www.supramental.fr - Le site de Natarajan
La lettre de Natarajan

15 Juin 2013: je vous souhaite la bienvenue sur ce site qui aujourd'hui boucle la boucle du message essentiel que je voulais faire parvenir aux amants de la Conscience, aux guerriers de l'évolution......

24 Avril 2012: La dissidence divine, un texte inattendu, iconoclaste. Ecrit pour ceux qui sont prêts à se lancer corps et âme dans le service divin......

26 Déc 2011: Et la peur de la peur, y avez-vous jamais pensé ?Il devient difficile de ne pas être pris dans la mouvance 2012......

8 Déc 2010: Bonjour à tous ceux qui agissent pour une terre nouvelle, et pour la guérison de l'homme, floué par l'Histoire......

13 Juin 2010: La consultation astrologique me permet de plus en plus souvent d'avoir accès aux scories des incarnations, c'est-à-dire qu'une voyance extra-temporelle se développe, qui s'appuie sur les éléments du thème natal.....

5 Sep 2009: Cette fois la Terre est en plein barratage énergétique. Vous me permettrez de dissimuler les raisons personnelles qui me portent à faire cette analyse, par pudeur....

14 Mai 2009: Le supramental dans le physique constitue une nouveauté dans notre histoire terrestre. Les critères de sélection appartiennent au Divin exclusivement. Aucun individu ne peut se hisser jusqu'au Divin, simplement parce qu'il le décide...

25 Décembre 2008: INSTRUCTIONS SUPRAMENTALES POUR UNE TERRE NOUVELLE, Les bases du yoga urbain......

31 Juillet 2008: Oui j'ai quitté la maison, j'ai fugué, mais je ne veux pas que tu t'inquiètes. Bien sûr, tu n'avoueras jamais que c'est de ta faute, ou celle de papa, mais peu importe, vous voilà bien punis tous les deux, puisque votre fille et votre fils vous ont abandonné, de concert et en catimini......

12 Mai 2008: C'est assez étonnant de constater que très peu d'êtres humains ressentent l'existence de la conscience suprême, et admettent qu'Elle puisse posséder ses propres critères pour venir à la rencontre de l'être humain.....

21 Février 2008: Finalement, le cas Satprem ne me tracasse plus. Cela vient sans doute de ce regain de confiance depuis le 2 janvier, grâce au sentiment dans le corps d'une jeunesse revenue....

19 Février 2008: Hello, la décision a été difficile, j'ai failli tirer à pile ou face, et puis, non, j'ai profité d'une grande forme physique pour me lancer, éviter tant faire se peut de laisser se détériorer une situation.....

11 Décembre 2007: Il y a deux manières d'utiliser le mot supramental...

15 Août 2007: Vous avez tous la chance d'avoir compris la suprématie de la vision aurobindienne, mais cette chance peut être encore gaspillée pour différentes raisons...

22 Avril 2007: C'est parce que vivre le supramental est à la fois un défi majeur et une nécessité absolue dans l'avenir que je signe des ouvrages fidèles à une expérience diffcile. ...

12 Février 2007: Un soir que je m'inquiétais pour l'avenir de l'homme, la Terre me parla en ces termes: «bien qu'il soit légitime d'espérer l'avenir éclatant, ne cherche pas ...

5 Novembre 2006: Le Tao est à la fois un des termes les moins précis et les plus représentatifs d'une culture chinoise qui se perd dans la nuit des temps ...

14 Août 2005: Je me rends compte de plus en plus que le fait de jouer des rôles fait partie intégrante de l'expérience de la conscience ...

6 Juillet 2005: (Poème)Thuriféraires de la souffrance nous transformons la mort elle-même notre œil voit le pire créer le meilleur telle...

20 Décembre 2004: Beaucoup de ces êtres humains qui s'imaginent meilleurs que les autres parce qu'ils cherchent soit-disant la Vérité oublient en cours de route la largeur...

20 Février 2004: Le Supramental n'est pas une auberge espagnole. Beaucoup de soi-disant chercheurs se dispensent d'une étude des œuvres principales de Sri Aurobindo, et méprisent l'agenda de Mère...

31 Janvier 2004: Je me rends de plus en plus compte de la singularité de chaque individu, et je suis déjà certain qu'une partie des lecteurs du site ne sera touchée que par mes lettres...

28 Décembre 2003: Chers lecteurs, c'est une lourde responsabilité de faire savoir qu'il existe une nouvelle loi spirituelle sur la Terre, un nouveau Dharma. Seulement les choses vont très vite, et de plus en plus vite...



































































































Lettre du 15 Juin 2013

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Salut les lecteurs,


je vous souhaite la bienvenue sur ce site qui aujourd'hui boucle la boucle du message essentiel que je voulais faire parvenir aux amants de la Conscience, aux guerriers de l'évolution, aux trouveurs de perfections, à ceux et celles qui se consacrent à changer la vie, comme le voulait déjà Rimbaud, changer la vie mais pas n'importe comment.


Mes ouvrages s'accumulant au fil du temps, je les ai regroupés dans de nouvelles catégories. Chacune correspond à un verbe fondamental et je vous propose donc — avant de lire ou relire, de poser l'intention qui correspond au contenu de l'œuvre, afin de mieux en profiter. Vous pourrez ainsi vous imprégner de ce qui vous semble nécessaire selon le moment en cours. Voulez-vous découvrir les possibilités de vivre au présent, la rubrique concrète ? Naturellement, puisqu'à travers le 4 de la méditation quantique et le 5 du dernier essai, nous avons une sorte de pratique essentielle à découvrir. C'est neuf. Ou bien, ne serait-ce pas le moment d'approfondir ce verbe mystère et yeux qui contient tout et n'importe quoi......... « comprendre » ? Allons donc, n'oubliez pas qu'il est aussi question d'explorer le champ infini de cette expression « se connaître », puisque notre propre complexité, n'ayons pas peur des maux, nous dépasse parfois, et appelle donc l'arpentage des gouffres et des cimes. Naturellement, tout cela est bien joli n'est-ce pas, mais cette jungle de signifiants risque de rester dans le domaine des « représentations » si le mental gourmand se régale d'abstraire pour rester dans ses pantoufles vintage, dans un monde qui se noie et qu'il veut contourner. Alors, étant donné l'urgence de la situation terrestre, c'est la rubrique « s'impliquer » qui invite le Divin — si vous me permettez de le faire, puisqu'Il vous attend.


Vous pouvez aussi piocher dans « se reposer » des textes ludiques qui chantent le mystère de l'existence, car nous sommes faits pour la Joie, qui va et vient, nous abandonne et reparaît selon des secrets qui nous poussent à mourir et renaître sans fin, tout en devenant partie prenante du Tout, qui deviendra l'Un pour l'évoluteur rompu à se donner corps et âme au seul Mystère.


Deux textes pratiques sont consacrés à « vivre le présent », dont l'ultime étude écrite cet hiver, et que je mets en ligne aujourd'hui sous le titre « pratique intégrale du Tao ». C'est une longue approche de notre potentiel, qui reprend les thèmes développés dans les vidéos. Le champ du Tao, l'équilibre yin/yang est adapté aux préoccupations supramentales, tandis que vous trouverez des clés simples et claires pour vous amener à une recherche holistique parfaite. Je ne peux m'empêcher de tâcher de vous donner l'eau à la bouche en citant un extrait:


« Nous avons dit stratégie, voyons les stratagèmes. En Occident, les stratagèmes passifs sont ignorés, parce que l'on s'imagine que tous les stratagèmes sont conquérants. C'est faux, il y a des stratagèmes entièrement passifs. Exemple: la toile d'araignée. L'araignée tisse sa toile et après elle attend, c'est une structure passive. Si je veux pousser loin l'analogie et pratiquer la lecture des signatures, j'irai même jusqu'à nous comparer à des araignées. Notre raison peut fabriquer la toile, mais son rôle s'arrête là. La nourriture spirituelle ne peut pas être créée par nos concepts, ni piégée dans des présupposés meilleurs que d'autres. La nourriture divine nous parvient quand on a reconnu que le rôle de la pensée active était extrêmement limité, et que le défi était de pratiquer, de s'engager, de prendre de bonnes décisions, de toujours progresser vers un emploi du temps essentiel, peut-être diminuer l'action et attendre, comme les araignées, que les indices divins tombent dans la toile géométrique que nous aurons façonnée. Quand notre raison et notre intuition se fondent ensemble, une autre perception se produit, beaucoup plus profonde. Nous comprenons ce que nous avons reçu, nous intégrons quelque chose qui nous manquait. Les stratagèmes passifs nous permettent de nous ouvrir à ce qui descend. Dans les stratagèmes actifs, on essaie d'obtenir un pouvoir positif à exercer dans la durée. Ils sont volontaires, précis — et cela est très important. Dans cette stratégie globale de l'évolution, nous collaborons à l'expansion de la conscience sans nous l'approprier et, dans le déploiement de cette aspiration nous avons besoin de poser des intentions, d'accorder à la durée une valeur particulière, qu'elle finisse par nous donner ce dont a vraiment besoin, soit qu'on la manipule avec des stratagèmes actifs, soit qu'on la laisse faire avec des stratagèmes passifs. »


Nous sommes quelques-uns à consentir que tout aille si mal dorénavant, seul moyen semble-t-il pour réveiller les consciences insatisfaites de subir toutes sortes de jougs formatés dans un conditionnement homogène. La liberté dis-tu ? Elle n'est donnée à personne. C'est un bel objet qui ne s'attrape pas par hasard, c'est une conscience qui monte du cœur et en finit avec les calculs d'épiciers, alors elle est toujours plus exigeante, comme le chantait Moustaki. La bataille continue, combattez, combattons sans violence. L'égoïsme fait rage, la cruauté se repaît impunément pas si loin de chez nous, et saint-Pouvoirdacha ne répond plus à l'appel déchirant des citoyens aux abois, en dépit des ex-voto innombrables qui lui sont consacrés. Quelle galère, mes aïeux, on ne sait plus à quel saint se vouer. L'avenir rétrécit à vue d'oeil. Don't worry, c'est pour mieux nous mettre au pied du mur du présent.


Bonnes vacances !


Natarajan






























Lettre du 24 Avril 2012

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La dissidence divine, un texte inattendu, iconoclaste.
Ecrit pour ceux qui sont prêts à se lancer corps et âme dans le service divin. Beaucoup seront découragés ou furieux ou bien se sentiront impuissants après lecture, mais ceux qui ont ressenti tant soit peu, un jour ou l'autre, l'amour de Mère ou l'intelligence de Sri Aurobindo comprendront qu'il me revenait d'élaguer toutes les branches mortes, et de revenir sur le secret du devenir divin, le surrender.


Et ils auront confiance dans leur abandon, ou s'y prépareront.


Je ne me serais pas permis de brosser un tableau aussi sombre de la réalité humaine si le Divin ne m'y avait autorisé. Je me souviendrai toujours de cette impression, dans le Rajashtan, en 1983, perdu dans le désert avec un maharadja célébrant je ne sais quoi avec ses serfs — tout en prenant de l'opium liquide ce que j'ai refusé, que j'étais là dans une poche de résistance du passé. Soit un univers qui tournait rond, tant bien que mal, et sur lequel aucune menace ne planait. Et j'ai alors senti, sans doute avec mon âme, que ce temps, qui me rappelait d'autres existencs « faciles », était bel et bien révolu. L'avenir désormais ne serait plus fait que de menaces diverses, s'épaulant les unes les autres, épuisant l'énergie des sages, dépassés par l'Histoire. Mon statut « d'éveillé », soudain, n'avait plus rien à voir avec mes anciennes réalisations, à des époques où la terre allait cahin-caha son chemin. Un peu plus tard, la shakti supramentale reprendra son travail spontanément, car j'avais fait une pose quelques mois, incapable de tout intégrer. Depuis, je fais le yoga pour la Terre.


Il y a donc presque trente ans déjà, et le navire sphérique n'a pas su rétablir le cap. Loin de là. Certains parlent d'une mondialisation, et c'est vrai. La photo du petit chinois avec une tonsure B.M.W le prouve autant qu'un bouquin de Montebourg. Mais ce n'est pas le pire. Le pire est la médiocratisation, — soit la religion de l'égoïsme, partagée par tous, rendue obligatoire par le consumérisme, et qui provoque le terme de toute éthique universelle, poignardée par le Profit autant que par les intégrismes en goguette qui veulent en découdre, la bave aux lèvres et les écritures sur le bout de la langue. Les valeurs de mérite, de courage, d'intégrité sont aujourd'hui ensevelies. Mon intention n'était pas d'accuser l'espèce humaine, depuis le temps qu'on le fait, ça ne l'améliore pas…… Ce que j'accuse (j'admets que le contenu de ce livre demandera peut-être deux, trois ou quatre lectures pour devenir opératif, c'est une « quintessence » presque dictée par Mahasaraswati), ce que j'accuse c'est donc notre condition. Nous n'y sommes pas pour grand chose mais il faut faire avec. Le mélange du vital et du mental, pour reprendre les termes de Sri Aurobindo, produit « le libre arbitre »… Mais ce n'est pratiquement rien, sinon l'illusion qui nous permet de nous sentir libres. Libres de quoi, je vous le demande… Le sommeil, la sexualité, l'alimentation et la mort, le besoin de sécurité, guident par en-dessous notre existence. Les conditionnements culturels et le type d'éducation reçue déforment le potentiel d'ouverture… Il y a même dans l'heure de notre naissance des configurations énergétiques qui déterrminent en partie notre approche de la réalité, c'est-à-dire nos projections subjectives.


Etant donné que la liberté signifie d'une part la disponibilité qui finit en licence puis en perte de soi dans l'addiction yin ou l'obsession yang, et d'autre part la responsabilité consciente qui produit l'autonomie de pensée, nous devons reconnaître que le signifié est inabordable à partir d'un seul signifiant. Le mot décline des formes différentes jusqu'à ce qu'elles explosent dans des contraires : la perte de soi autant que la maîtrise de soi. Issues du même protocole, l'exercice du libre arbitre, ces deux orientations caractérisent les deux extrêmes de l'humanité, tandis que le milieu ne parvient ni à se perdre ni à se trouver. Panoramique et duel, ce «pas grand chose » pour la conscience supramentale, cette marge de manoeuvre nous a «permis » de nous fourvoyer, nous l'espèce humaine, de conquête inutile en progrès provisoire, jusqu'à oublier le sens et la sensation de notre participation cosmique dans l'univers.


Résistants.
Dissidents, bienvenue.


Dans l'intention d'évoquer le laboratoire divin de la conscience, le moi ouvert sur 'lInfini, il m'a fallu établir primo,
que notre « libre arbitre » est non seulement influençable, mais qu'il est manipulé.


Secundo, que seule la soumission au Divin peut le remplacer, ce fameux libre arbitre de paccotille : cela ne sert à rien de lui ôter sa place, mais il débouche, chez tout être humain aspirant sincèrement à davantage de conscience, sur le surrender, — qui le dépasse et le rachète. Cette « soumission au Divin » n'emprunte pas, rassurez-vous, toutes les caractéristiques d'une obéissance infantile, et elle n'est pas non plus comparable au pari de Pascal. Elle s'appuie sur le besoin naissant de se réaliser, quand développer la conscience devient un impératif prioritaire. Cette démarche libératrice ne peut pas seulement se fonder sur des « représentations », ni sur une simple ligne de conduite ou sur un « enseignement », mais sur un engagement personnel intense et sans angles morts.


Le surrender est-il une obédience ?


Non, c'est plutôt une sorte de foi absolue prête à en découdre avec le moi, la personnalité, la mémoire évolutive, le subconscient noirci (celui qui est rempli de mémoires de souffrances), une foi prête à affronter les héritages des ancêtres dans la substance énergétique du caractère. Chaque évoluteur, comme tout le monde, peut hériter de la colère, de la concupiscence, de la lâcheté, de l'avidité, de ce genre de choses, qui même à dose infime compliquent depuis l'inconscient la consécration et la perception pure du présent. Le surrender constitue une décision d'un type inconnu dans les cultures des civilisations, puisque, même s'il est évoqué, c'est totalement déformé, « Dieu » apparaissant avec des attributs paternels, autorité/châtiment/récompense, alors que le vrai Divin est bien au-dessus de cela, naturellement, et qu'Il est plutôt — pour rester dans le même registre de la personnification, un coach bienveillant et parfait, infaillible, qu'un maître régnant sur des esclaves, ou qu'un professeur exigeant à l'affût des maladresses pour les réprimander.


Alors naturellement, comme elle est « revenue », Mahasaraswati m'a aidé pour écrire ce livre, qui permettra peut-être à certains de se jeter dans l'aventure divine, comme on se jette à l'eau pour apprendre plus vite à nager.


P.S : Ironie du sort, quinze jours plus tard je tombe dans une bouquinerie de Phuket ( où les noix de coco fraîches du marché prouvent l'existence de Dieu si on se donne la peine d'en boire ) sur « le testament » de Cousteau, chez Robert Laffont. Après avoir renoncé une première fois à l'acheter, je m'y décide après quelques jours, pour trouver la justification absolue de mon analyse. Les mémoires du commandant Cousteau sont accablantes pour les dirigeants, et ce, dans tous les domaines. Il y a eu naturellement quelques charognards qui ont essayé de l'abattre après sa mort, en s'appuyant sur les imperfections de l' homme montées en épingle, mais dans l'ensemble le pionnier de la plongée, co- inventeur du scaphandre autonome, a fait le maximum pour prévenir et même parfois guérir. S'il a pu sauver l'Antarctique pour une cinquantaine d'années, dans d'autres secteurs ses mises en garde n'ont pas servi à grand chose, et il brosse un tableau déprimant de l'avenir, tant le lucre et l'imbecillité ont dominé le dernier siècle, appuyés par une science aveugle et arrogante. Après le scandale de la pêche, son étude sur le nucléaire m'a laissé pantois, et confirme ce que je sens depuis lontemps, et que j'avais exprimé dans éveil et philosophie : l'absurdité de la fission atomique, à quelque fin que ce soit.


Une stupidité générique, suicidaire, caractérise mon espèce, et le développement technologique lui a permis de saboter la terre avec l'industrie chimique, de ratisser les océans au radar, de créer des armes au-delà de l'enjeu de n'importe quel conflit... C'est même à Hiroshima que s'est tenue une conférence sur le nucléaire civil, considéré comme une panacée...après la bombe naturellement. Avec Fukushima aujourd'hui, et les cinq cents centrales disséminées sur la terre, ne me dites pas que quiconque « au pouvoir » a jamais pensé aux générations futures avec tant soit peu d'intelligence ou d'amour.


Rien à attendre de l'humain.


Tout, du Divin.


Pour sauver l'espèce, peut-être.






























Lettre du 26 Décembre 2011

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Et la peur de la peur, y avez-vous jamais pensé ?


Il devient difficile de ne pas être pris dans la mouvance 2012, et tentant d'imaginer des scénarios pour l'avenir. Cela est stimulant pour l'esprit, et, finalement, suivre le long accouchement de l'Homme par l'homme, à travers d'innombrables péripéties ne peut qu'élargir notre esprit. Néanmoins, il s'avère que tomber dans le « conspirationnisme » peut attirer de très mauvais feelings. Surtout en ce qui concerne les « aliens ». Mon but n'est pas de nier ou de révéler leur existence. Je ne suis pas « compétent » en ces matières-là, et je ne vois aucune raison particulière de ne pas s'attendre à rencontrer des existences créées autre part que sur la terre. Autant il demeure relativement sain d'imaginer que quelques êtres humains veulent s'emparer de la terre à travers des systèmes lucratifs pyramidaux, ce qui ne constituerait finalement que l'apothéose du capitalisme, autant il est dangereux de « croire » au complot alien. Sa théorie se répand. Afin d'en venir rapidement au fait, de quoi s 'agit-il ?


Différentes sources prétendent que l'homme a été modifié. Ici par des Archontes, là par des machines perfectionnées, dans le style des « petits gris ». Nous avons même l'embarras du choix si nous mentionnons d'autres «  peuples venus des étoiles », et qui à des époques différentes se seraient partagés la tâche de « détourner » l'humain de ses prérogatives pour l'aliéner. Je n'ai personnellement rien contre ce genre de théories. Il se peut même qu'elles soient exactes en partie. Mais il ne s'agit-là que de « modalités » particulières de l'existence, qui ne changent pas le fond du problème. Si l'existence est de toute façon « coupée de sa source » pour permettre à l'âme de remonter le chemin vers le Divin en devenant responsable de sa vie, n'en déplaise aux paranos propres sur eux, les « manipulations » éventuelles ne feraient ou ne font que corser cette difficulté. Elles ne la créent pas, loin de là, et comme le libre arbitre possède même l'esprit de contradiction, la tâche rendue plus difficile peut lui convenir, et l'empêcher de se satisfaire d'à peu près. Si le Divin était « donné », l'hypothèse qu'Il serait facilement corrompu doit prévaloir. Chacun sait que les enfants pourris-gâtés cultivent des exigences pathologiques... Alors qu'on apprécie ce que l'on mérite, et qu'on ne le gaspille pas. Je sais bien que cette notion de mérite tombe en désuétude, mais c'est une preuve supplémentaire de la décadence.


Bref, même sans aucun trafic génétique, le retour (au Divin) est contrarié par la nature. Relisez la vie divine pour cerner cette question. L'efflorescence de la Nature se satisfait de son propre mode, et le mental n'apparaît qu'après des séries de créations d'espèces qui préparaient le terrain. Il a beau arriver et se répandre comme une traînée de poudre par la reproduction, devenant inné, il n'a jamais rien résolu des déterminations qui l'ont précédé dans la vie, et qui s'en tenaient à la maîtrise du territoire par toutes sortes de manœuvres brutales. La vie, même surplombée par l'esprit, comme c'est le cas pour notre espèce, reste encadrée par des contraintes incoercibles. La peur la protège, le désir la multiplie. La violence sert ces deux maîtres sans rechigner. Des personnes se font piétiner dans des queues pendant les périodes de famine, quand la nourriture arrive. Et Hegel n'y peut rien. Je le répète, la guerre est toujours là, alors que nous déchiffrons le gènome. La jalousie, l'envie, la colère, la haine, la cruauté n'ont jamais déserté la terre le moins du monde, en dépit des « progrès » de l'intelligence, progrès d'ailleurs séparés les uns des autres, ce qui empêche l'hégémonie de la raison (voir journal de recherche).


L'autonomie de la vie, qui n'a nul besoin du Divin pour se perpétuer et s'apprécier elle-même, demeure un des mystères les plus difficiles à avaler pour le chercheur. De nombreux « penseurs » ne se sont pas remis de la médiocrité de l'Histoire, et parmi eux des individus remarquables, tels par exemple Cioran, Schopenhauer, Pascal... Les rêveurs d'Absolu sur la Terre, s'ils ne consentent pas aux racines obscures de l'incarnation, ne franchissent pas les seuils initiatiques. Le Mal est notre aiguillon, notre coach. Il exaspère la présence de l'absence du Bien-Aimé, jusqu'à toujours nous remettre sur sa piste.


Bref, la vie spirituelle est de toute façon difficile. Le « joug » de la nature est très puissant, pas la peine, ipso facto, de le trafiquer !Ou bien, s'il a été trafiqué, cela n'a pas vraiment changé la donne. Désolé pour ceux qui se lamentent avec concupiscence sur le pauvre sort de la machine biologique humaine. C'est plus simple de relativiser les théories du complot, et d'en revenir à l'indiscutable base de notre statut. Il s'agit de s'en tenir à la difficulté initiale: l'empilement du matériel, du vital et du mental, entrelacés dans le moi, aux prises avec lui-même (force centripète) et aux prises avec le non-Moi (force centrifuge). Cette simple distribution des trois étages formant une fragile unité soumise à un double mouvement, constitue un schéma nécessaire et suffisant pour rendre compte, d'une manière exhaustive, de la question humaine.


Sri Aurobindo affirme dans la vie divine que les « murs » entre les trois fondations participent de la même réalité fondamentale, ce qui devrait rendre possible la transformation supramentale, et pousser tous les évoluteurs (que nous sommes) à travailler sur l'harmonisation physique/vital/mental. Dans les principes de la Manifestation, j'ai repris le même paradigme, commun à toutes les traditions, tout en insistant sur la résistance de chacun des plans à l'intrusion des deux autres. Parce que sensible à l'intelligence de ces trois systèmes, j'ai pu expérimenter l'autonomie propre à chacun d'eux, dont la marge excessive produit des conflits avant de provoquer un dysfonctionnement. J'ai donc développé ce qui est contenu dans l'ouvrage de Sri Aurobindo, en partant de mes propres résistances, les tensions extrêmes que j'ai subies entre un petit éventail d'appétits divergents. J'en ai tiré la théorie des survivances dynamiques, après vingt-trois ans de trituration énergétique, une vision simple qui encadre toutes les possibilités dialectiques entre les processus évolutifs et les résistances régressives.


Dans la vision supramentale, infiniment large et quasi illimitée, le rôle des trois juridictions apparaît avec une netteté impitoyable, qui rend compte de la difficulté que le Divin rencontre à sortir de l'involution matérielle. Le corps est fait pour mourir, le vital pour désirer, et le Mental pour embrasser l'Infini, d'autant qu'il se sera débarrassé en cours de route de la pensée dynamique, c'est-à-dire de l'empreinte de la Nature. Ces deux ouvrages sont foncièrement complémentaires et s'éclairent mutuellement. Ils s'en tiennent aux lignes générales de la Manifestation, et évitent les pièges des accidents historiques, tels les manipulations à l'encontre des êtres humains, perpétrées par toutes sortes d'entités matérielles ou astrales. Ces possibilités existent, comme l'atteste l'expression «bétail des dieux » dans l'hindouïsme, et ne modifient en rien le statut fondamental de l'incarnation. Etre sprirituel c'est s'affranchir, aussi bien de la tyrannie des forces naturelles que des manipulations venant d'entités puissantes. Si l'on a envie de se perdre dans l'occultisme, c'est facile, mais ce n'est certainement pas de là que vient l'éveil. Comme l'esprit aime « dramatiser » , de nombreuses pseudo-sciences en profitent pour « révéler des choses cachées », et exercent une influence considérable sur de nombreux chercheurs néophytes, les détournant de ce qu'ils sont et qui reste à découvrir, pour les noyer sous des vérités de seconde main, concernant la création humaine, et l'issue de secours. Cela excite le mental, donne l'impression qu'on joue enfin dans la cour des grands, mais derrière il y a trois fois rien, ou des méthodes farfelues, des doctrines sulfureuses, des dangers sournois et subtils, des carottes. En résumé, quelles que soient les causes de notre condition « déchue » ou seulement ignorante, le remède se trouve par la consécration, si l'on pressent le Divin, ou par le lâcher prise, si la non-dualité appelle fermement l'adepte.


Retrouver le transcendant Divin et l'attirer dans la matière demeure l'œuvre à accomplir, et qu'elle soit ou non compliquée par des volontés extérieures qui s'y opposent, ne change ni le principe, ni la volonté de s'en tenir à une feuille de route qui ne dérivera pas de son objet. Rencontrer des forces qui détournent, ou accélérer grâce aux aides extérieures, ne constituent que des phénomènes, que des détours qui retardent ou raccourcis qui simplifient le chemin, mais dans son itinéraire principiel, la voie évolutive demeure foncièrement la même. S'en tenir au projet divin tel qu'il est exposé dans la vie divine ou commenté et même observé dans mon propre testament spirituel, permet d'enraciner une démarche que les circonstances (négatives) ne pourront ni corrompre ni compromettre. Dans les deux ouvrages, les obstacles sont absorbés, dépouillés de leur substance, pour ne devenir que des « phases d'opposition », de simples ressacs. C'est d'ailleurs cette puissante légereté qui déroute encore ceux qui ont besoin de compliquer les choses, d'érotiser leur démarche, pour mettre en scène leur chemin de manière théâtrale, avec ce personnage artificiel du « chercheur », qui, prenant les choses de haut quand il se renseigne et prend pour cible la Vérité, est écœuré par toute forme d'inspiration qui ne rentre pas dans ses préjugés d'ordre spirituel, pour mieux attaquer de front la volonté narcissique de connaître, la dernière plaie de l'ego. Sri Aurobindo est écrasant dans la vie divine, c'est ce qui était nécessaire pour changer le dharma de l'espèce. Aucun autre livre ne lui arrive à la cheville, et il demeure étonnant que si peu d'êtres humains se donnent la peine d'entrer dans le Plan divin enfin dévoilé, au-delà des petits règlements de compte que fait mousser l'Apocalypse de Jean, ou au-delà des promesses vagues du calendrier Maya, tandis que la toile de fond demeure le samsarâ, avec la nécessité de reconnaître aujourd'hui l'extrême vulnérabilité des sociétés, de la terre elle-même, et des individus embrigadés dans des valeurs qui se dérobent sous leurs pieds. Se libérer des formes de l'avenir, tant qu'elles demeurent inconnues, permet une consécration radicale, une ouverture qui ne se laisse pas assombrir par les menaces historiques, une foi qui ne craint pas la déchéance matérielle, et ne s'enivre pas de lendemains qui chantent.


Toutes sortes d'appétits nous traversent et nous mènent en bateau. Parfois nous avons la possibilité de les embellir, et alors tant mieux, la sexualité débouche sur l'amour, et tout le monde y trouve son compte, bien qu'il soit rare qu'une union de ce type puisse être consolidée...La faim peut mener à une connaissance profonde de l'alimentation, ou même à se dispenser de manger, comme y parviennent les « praniques ». L'insatiable curiosité, dont j'ai personnellement hérité, bien menée, mène à la réflexion profonde et au déchirement des apparences. Un élan assez indéterminé d'affirmation de soi peut se transformer au fur et à mesure en compétence, et relier agréablement le sujet à son milieu, par la spécialisation amoureuse dans un domaine partagé par tous. La gratitude permet des apprentissages sans effort dans différentes directions et crée de nouvelles possibilités harmoniques entre le moi et le non-Moi. La volonté préserve l'intégrité personnelle et possède un pouvoir conséquent sur le temps, et évite l'aléatoire toxique. Mais même si nous savons, finalement, diriger la nature, c'est insuffisant pour la plupart d'entre nous pour basculer dans le Soi, ou bénéficier des flux ondulatoires divins. Il est nécessaire de parvenir à un abandon plus complet pour être homologué par l'univers comme fragment incarnant la totalité, et comme cet abandon fait nécessairement surgir les derniers obstacles primordiaux, peu s'y livrent avec succès. Certains chercheurs restent donc sur un seuil, face à un abîme. Les dernières certitudes qu'il faut lâcher pour devenir digne de l'Absolu ne sont pas éliminées.


La vie spirituelle est donc difficile. Par définition. C'est une attitude perverse de se dédouaner de ses incapacités, de ses faiblesses, de son impéritie, de son manque de consécration, des fluctuations de sa sincérité, en invoquant des forces extérieures. Croire au complot alien (ou aux mauvais parents), c'est régresser au stade infantile: c'est la faute des méchants si je ne parviens pas à ma source divine, ils ont bidouillé les rapports neuronaux, ils ons saboté le « véhicule » de mon corps physique pour m'empêcher de gagner la lumière. Cette forme-pensée, qui veut rendre les aliens responsables de l'échec spirituel de l'humanité, est très puissante et se nourrit de chaque nouvelle interception mentale. Le web fournit trop d'indications aujourd'hui sur la théorie du complot, et ce que j'évoque peut faire froid dans les dos. Dans quel but répand-on ces rumeurs, ou informations secrètes ?


Personne ne peut empêcher un être humain de reconnaître le Divin
et de s'adonner à cette reconnaissance.


C'est un élan qui ne s'embarrasse pas outre mesure « de ce qui se passe », et ne se laisse pas détourner du feu intérieur, par toutes sortes d'allégations, horribles d'un côté, merveilleuses de l'autre, l'avenir devenant un cadeau empoisonné injectant dans le présent des menaces inutiles et des promesses inaccessibles. Mais le sentiment « d'être dans le confidence de Dieu » s'empare facilement de tout esprit obsédé par le futur, sur ses traces, même s'il s'y prend intelligemment.


On aimerait se plaindre de ne pas aboutir en montrant du doigt les nombreux comploteurs qui jettent des bâtons dans les roues, comme s'ils ne devaient pas être là, — les adversaires. Mais non, la réalité ne nous obéit pas, et la guerre entre le bien et le mal, — même s'il est stupide de l'interpréter au premier dégré, existe bel et bien. Cette guerre peut être vécue dans l'unité, comme Sri Aurobindo est parvenu à le faire, quand il a vu monter le nazisme, ce qu'indiquent clairement certains poèmes de 1938. L'Histoire est un jeu dialectique, mais pas vraiment un jeu étant donné la souffrance en cause. Si je vois juste en ce qui concerne le second principe de la thermodynamique: plus le «bien » s'accroîtra (l'émergence de la conscience non-séparative), plus le mal résistera. Jusqu'à...


Il est probable que de petits complots se développent partout contre l'Emergence Divine, je suis loin d'en disconvenir, des traces suintent partout, jusque dans l'Apocalypse de Jean, et cela fait partie du scénario d'ensemble. Mais à quelle réalité appartiennent-ils ? A la réalité extérieure, matérielle, historique: le transcendant sera toujours à l'abri de ces manifestations-là. Le propre du sadhak, c' est donc parvenir à se distinguer lui-même, avec son feu intérieur, des identifications éphémères qui tombent au jour le jour, imposées par l'ordre de la succession, et dans lesquelles les menaces cultivent des peurs intérieures sournoises, tandis que les promesses courtisent des attentes inconscientes illusoires. Certains s'imaginent qu'en venant longtemps à l'avance sur le quai, le train arrivera avant l'horaire prévu, mais je crains qu'ils se trompent. Oui, être prêt à tout. Que faut-il anticiper pour cela ? Comme le scénario matériel manque de précision pour le moment, que plusieurs décors sont possibles, il me semble que le travail intérieur suffit s'il mène loin dans l'éradication des peurs d'un côté, et dans le « consentir » de l'autre, c'est-à-dire pouvoir supporter des changements, des pertes matérielles, des déménagements, des ruptures, des « trahisons ». Le Matériel et le Spirituel ne font pas très bon ménage dans les sociétés matérialistes décadentes comme l'Europe et les U.S.A, et le conflit s'accroît. Les choix deviendront de plus en plus nets entre le conservatisme peureux et sécuritaire et « l'aventure de la conscience », prête à tout pour se découvrir dans ses états supérieurs.


Tout ce qui concerne l'écologie me paraît un domaine sur mesure pour les chercheurs spirituels, mais je n'encourage pas pour autant les mouvements qui se marginalisent à tout prix, en portant sur le monde ordinaire un regard hautain, méprisant, désabusé ou agressif. La conscience par identité peut se développer facilement et c'est elle qui permettra d'établir une nouvelle relation esprit/matière, avec un effort considérable sur la réduction énergétique. L'argent devra donner autant avec moins, nous ramenant à l'essentiel des besoins, un nouvel essor sans doute des communautés, du troc, le repli étant fondé sur une recherche et non une fuite hargneuse. D'autres continueront de croire à la consommation, et sacrifieront tout au maintien de leur pouvoir d'achat, embrigadés jusqu'à la moëlle.


Nos choix n'ont pas à être imposés à d'autres. S'ils ne comprennent pas ce que nous « pressentons », l'agonie d'une société à bout de souffle, qui cherchera à tirer vers le bas les plus faibles pour qu'ils restent soumis, ils ne doivent pas empêcher nos propres initiatives pour composer avec le système sans y être inféodé. Sans parler de catastrophes naturelles ou d'invasions extra-terrestres ou militaires, il est certain que notre société pourrit, et que plus rien ne peut enrayer la gangrène, les médias se chargeant d'infantiliser chaque jour davantage les « citoyens », tandis qu'un climat de peur est savamment orchestré en même temps que son contraire, la « remontée possible ». Cette dichotomie enferme notre cerveau dans la double contrainte de Bateson : aucun terme de l'alternative n'est satisfaisant et leur jeu de miroir, qui rend malade, si l'on s'y complaît, espérons-le au contraire, permettra à certains de trouver le troisième terme: relativiser l'identification sociale, la ramener à sa plus simple expression, et développer en-dehors d'elle une ouverture innocente, nouvelle, sans arrière-pensées, permanente, qui appellera à son tour une vision profonde des choses, fondée sur le moi en tant que sujet souverain, et non en tant qu'unité productive, maillon social, posture professionnelle, ou partenaire affectif.


Ce type d'identification ne peut plus garantir l'épanouissement individuel, sauf dans de rares domaines, et il semble donc que l'univers pousse dans leurs retranchements les individus de la société occidentale, qui les premiers ont eu le droit et l'immense privilège de se différencier des familles, des clans, des classes, des superstructures culturelles, pour accéder à l'individuation (cfrs Jung). Peut-être que le mouvement des années soixante reprend force aujourd'hui, avec des élans du style « indignés », à cause de l'état d'urgence qui s'installe. Cette mentalité trouvera d'autres modes d'expression que ceux utilisés de 1975 aux années Quatre-vingt, et qui n'ont pas pu faire long feu sous la montée en puissance de la « financiarisation » du monde, dont nous subissons aujourd'hui les conséquences désastreuses, après plus de trente ans de développement exponentiel.


«Se faire peur » avec les « complots » relève de la plus basse frange du New Age, ce flux mental synchrétique et naïf, bon-enfant mais rusé, merveilleux mais complaisant, ouvert mais docile, curieux mais superficiel, et qui laisse entendre à sa proie que tout sera fait pour l'individu « ouvert », sans qu'il se donne la peine d'obtenir quoi que ce soit par une consécration exhaustive, en restant seulement « le nez au vent » et fervent de l'avenir nouveau. Sous prétexte que « le ciel arrive sur Terre », une mentalité étrange voit le jour, dont le propre est de tout mélanger. Le Nouvel Age n'est pas à rejeter, il déborde de petits prophètes qui font tout ce qu'ils peuvent pour attirer un monde meilleur, par de nouvelles formes de ferveur et de connaissances, dont le channeling, qui permet parfois à des esprits farceurs de se faire passer pour ce qu'ils ne sont pas. Et chaque âme peut toujours grandir dans son rôle de prophète, — chacun de nous en est un d'une certaine manière s'il décide de l'avénement de la conscience non-séparative. En laissant l'avenir se faire tout seul par le présent vécu en profondeur, nous avons bien plus de chance de créer un vrai futur qu'en courtisant avec complaisance de grandes Images. Certains voient l'avenir comme un immense cerf-volant à ramener de haut, et ils ont tort de tirer dessus aussi fort, il ne descend que pour remonter.


L'avenir ne se manifeste jamais, par définition.


Il advient parce que le présent se dérobe en arrière, et il n'est pas écrit. J'aurais beaucoup à dire sur ce sujet, car j'ai entendu maints « initiés » changer les dates importantes des « interventions majeures » depuis quelques années, l'effet papillon faisant la pluie et le beau temps jusque dans les plans de l'Apocalypse. En ce qui me concerne, je sais que l'Apocalypse arrive depuis mars 1975, grâce à une incursion sur le plan causal. Etant donné l'envergure du projet, qui concerne, semble-t-il, tout le continent occidental, peut-être davantage, c'est favorable que les choses se mettent en place lentement, le temps que de vraies semences spirituelles puissent se développer.


Le Nouvel Age, nécessaire et insuffisant, perd en profondeur ce qu'il gagne en largeur, et comme un soufflé qui retombe en sortant du four, s'il se laisse contaminer par le conspirationnisme aux multiples aspects, ce bel élan ne contribuera plus, — comme il le voulait au début, à instaurer la fameuse cinquième dimension, terme générique pour évoquer une terre nouvelle, dans laquelle l'évolution de l'âme serait reconnue, ou en tout cas, cesserait d'être contrariée, grâce aux nouvelles structures économiques et relationnelles. Il est toujours délicat de se positionner dans une perspective en quelque sorte « chronométrée » pour envisager la terre nouvelle à laquelle nous aspirons tous. Pour rester rivé à l'essentiel, sans compromettre nos actions dans le flux des choses contingentes, flot qui devient de plus en plus difficile aussi bien à prévoir qu'à contrôler, ou même qu'à suivre, quand on sait se laisser porter et s'adapter sans crainte du changement, le travail intérieur doit prévaloir sur le reste. Viser cette arrivée du plan divin permet certes de prendre des forces, quand les intuitions arrivent toutes seules, ou que les indices pleuvent quelque temps, parce qu'on se sera mis à l'heure universelle. Mais n'oublions pas une chose, le monde extérieur est indigeste. Trop vaste, éclaté, perclus de pustules qui semblent hétérogènes, distributeur de séductions diverses, spécialiste des accidents de parcours, le samsarâ peut facilement nous mener par le bout du nez, en distribuant de la fortune ou de l'infortune, en nous culpabilisant sur nos échecs, ou en nous enivrant par nos succès. S'y adonner requiert des facultés d'assimilation proportionnelles à celles qui produisent distance d'un côté, pour éloigner, et lâcher prise, de l'autre, pour voir ce qui est même si c'est dérangeant. Sinon l'envoûtement existentiel prévaut, et nous prenons bien trop au sérieux ce qui arrive, et pas assez notre propre pouvoir de creuser vers la force et l'amour.


Il est parfois utile de limiter les informations qui nous parviennent, si elles nous « débordent ». L'avalanche d'informations qui nous engloutit permet de faire un travail de tri exemplaire, nous pousse dans nos retranchements pour que nous puissions, à chaque moment, faire la part des choses entre ce qui nous concerne et ce qui ne nous concerne pas. C'est l'art suprême, chanté déjà par Epictète, un art auquel je vous invite tous, et sans la pratique duquel vous serez peut-être un jour ou l'autre « dépassé par les événements ». L'Histoire jusqu'à présent n'a jamais donné raison à l'âme, le message de Jésus a été corrompu à un point inimaginable, celui de Bouddha ne porte plus que des fruits maigres, et pourtant les deux paroles ont secrété des vérités profondes qui auraient pu « changer le sens de la vie ». L'Histoire changera. C'est une question de vie ou de mort.


Pour pratiquer cet art correctement, il convient, me semble-t-il, de sentir jusqu'où il est possible de se laisser aller à « absorber » le monde, autant qu'il est nécessaire de sentir comment il nous absorbe, sans perdre notre propre identité. Chacun de nous souffre, soit d'une curiosité gigantesque propice à quelques faux pas didactiques, l'univers nous phagocyte, soit d'un narcissisme bien ordonné qui escamote quelque peu « le champ », et ferme les volets avant la tombée de la nuit, au risque de se couper du grand flux pour concocter sa petite histoire perso. Le conflit originel entre l'ouverture et la préservation se déroule à chaque instant. Je comprends donc parfaitement bien que certains comptent sur Internet pour débusquer des secrets d'avenir — fort désobligeants parfois, mais je doute qu'ils en trouvent le mode d'emploi. Ils se préparent ainsi à des « indigestations » mentales, et le pauvre cerveau patine! Il y a trop de choses en jeu à l'heure actuelle pour que nous puissions les détailler. Des forces régressives, oui, nombreuses et bien organisées, qu'il est inutile d'aller provoquer. Et même, s'y intéresser de trop près entraîne parfois une contamination. Ne pas soupçonner le mal, comme le disait déjà Saint-Paul, constitue une bonne condition pour passer à travers de nombreux pièges. Consentir aux adversaires, en évitant de transformer en cacas nerveux leurs menaces plus ou moins ponctuelles, réelles ou imaginaires. Faire front sans cultiver haine ou ressentiment, constitue pour moi un bon moyen d'avancer dans la jungle du vingt-et-unième siècle, où chacun a la parole. La compétence est morte.


Tout un chacun croit transformer en vérité sa propre histoire, du simple fait qu'il la raconte.


Il s'ensuit la tyrannie de la complaisance émotionnelle, l'abondance sans pudeur des blogs, l'innombrable communication nombriliste propre à une fausse littérature et aux réseaux sociaux, dont on n'a pas encore fini de mesurer les impacts contradictoires...


Complaisance positive: qu'est-ce que l'univers attend pour tout me donner ? Où, la recette absolue du bonheur cosmique, j'achète tout de suite !
Complaisance négative: c'est pas de ma faute, monsieur le juge, si je n'arrive à rien, ON m'empêche d'évoluer. D'abord mes parents, et maintenant les aliens. Sainte Plainte priez-moi !


Deux-types de formes-pensées que je caricature sans joie, des poussées mentales insidieuses et profondes, fort subtiles, empoisonnées, des moteurs d'illusions nouvelles. Il s'agit donc de remonter vers soi-même, au lieu de rester, d'une part, à l'affût des perches qui nous sont tendues pour en sortir sans lever le petit doigt, et d'autre part à guetter des adversaires invisibles.


Mais le mouvement naturel, oui, c'est de chercher le sauveur et d'éviter le prédateur. A l'intérieur de soi, c'est pareil. Il y a bien en nous un sauveur, le maître intérieur, et un prédateur, l'égo triomphaliste... Alors pas la peine d'aller chercher dehors les occasions de jouer...à l'Evolution cosmique !


Surfer sur le net demeure donc un spectacle fabuleux, je vous l'accorde. Riche, toujours nouveau et surprenant, et qui nous branche sur l'occulte, le quantique, l'invérifiable, le dissimulé, et tutti quanti ! Cela peut être amusant et instructif, et rappelle la fameuse phrase du Cheikh Spear, —comme quoi la réalité contient davantage que tout ce que l'on peut rêver. La découverte d'un complot doit nous renforcer dans la résistance et nourrir notre foi. Mais certaines informations sur les « menaces organisées » ont pour but de saper notre moral, d'incruster en nous la peur de l'avenir. Quant au pire de toutes ces manœuvres délétères, c'est de nous remettre dans la posture de la victime, alors que nous étions justement en train de tourner définitivement la page du passé.


Nourrir l'alien avec mes peurs, je dis non :-)


Natarajan































Lettre du 8 Décembre 2010

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Bonjour à tous ceux qui agissent pour une terre nouvelle, et pour la guérison de l'homme, floué par l'Histoire.

Mon journal se divise maintenant en trois catégories, adaptées à l'information, à la recherche, et au partage convivial, comme celui que vous avez lu jusqu'à présent (journal-blog). Rédigé pour le site, à partir de la mort de Satprem qui a laissé un grand vide, il m'appartenait de confirmer sans en faire toute une histoire, en passant par-dessus l'indifférence et les résistances que je suscite, que le Divin tente à travers moi le même travail. Quelques rares êtres humains sont sensibles au fait que le yoga de la transformation physique perdure, et je devais donc m'avancer quelque peu pour le faire savoir.

Le nouveau journal de recherche aiguise l'intelligence, dont je continuerai à défendre la puissance éternelle, en dépit de l'acharnement des réducteurs de tête à vouloir la réduire à un obstacle ou à une survivance, car c'est elle qui m'a mené jusqu'au Divin, accompagnée bien sûr d'une aspiration brûlante, qui m'a évité de l'utiliser pour moi-même, et m'a donc mené sur la piste de la Voie: là où il n'y a rien à faire d'autre que de récolter les indices de la Vérité, dans le dénouement des émotions, le renoncement aux petites ambitions personnelles, et l'exaltation à se nourrir du mystère absolu d'être là, face à l'éternité et à la mort, posé dans le Temps prodigue, distribuant beauté et enchantements, épreuves et cruauté.

Ce n'est pas sans surprise que j'ai relu le journal supramental 2003/2004, qui n'ayant aucun destinaire particulier, a été tenu avec une pureté absolue, simplement pour archiver la percée balbutiante du Divin dans l'humain, et dont le style est différent des deux autres témoignages. Intime, économe, franc et direct, n'ayant rien à cacher de mes difficultés sur ce chemin si peu emprunté, je dévoile des expériences exceptionnelles, et parfaitement inattendues, qui peuvent commencer à donner une échelle de la dimension infinie du supramental, que tout le monde réduit s'il n'en a pas l'expérience, à ce que notre pauvre imagination — avidement spirituelle ou bien-pensante, peut produire, mais elle est loin du compte ! Il s'agit bien d'un saut de l'humain dans autre chose, et je continue de m'y prêter. N'ayant rien à défendre, ne cherchant pas à être reconnu, tandis que les éditeurs craignent ne pas faire de chiffre en publiant l'équivalent de l'Agenda, internet me sert superbement à faire savoir que le Divin n'a pas dit son dernier mot dans la Matière, au milieu des apocalypses christiques molles ou sectaires, des combats intergalactiques astraux ou géographiques, bref, des nouveaux mondes variés qui s'avancent en concurrence pour délivrer quelques chose de meilleur, qui permettrait un processus évolutif naturel.

Même si tout concorde pour transformer la vie aujourd'hui, l'échec retentissant de l'Histoire nous poussant à revoir de fond en comble les buts de l'existence, même si nous devons rester sensibles à toutes les formes de manifestations spirituelles pour nous aider à nous adapter à une société en faillite, même si nous reconnaissons aux maîtres ascensionnés certaines prérogatives, et à la voie de la non-dualité une pureté exemplaire, même si des darshan étincelants nous requinquent parfois, il n'en demeure pas moins qu'une expérience entièrement nouvelle et imprévue se fait jour par le Supramental, et qu'en être le témoin et l'acteur me permet d'affirmer qu'une véritable mutation se prépare, à laquelle je vous invite, ne serait-ce qu'en décloisonnant les voies spirituelles qui vous séduisent, pour trouver la vôtre, inimitable et délivrée de tout plagiat rassurant, qui la certifierait conforme pour le mental.

Un nouveau paradigme s'avance depuis Mère et Sri Aurobindo.

Pour le comprendre, il sera nécessaire de cerner les limites des transmissions antérieures, tout en intégrant leur pouvoir de transformation. Ni l'amour ni la connaissance ne sont le dernier mot de l'Histoire, mais ce sont deux forces, deux mystères, deux puissances proches du Divin, qui se sont partagé équitablement le monde spirituel jusqu'à aujourd'hui. Il est temps de réunir ces deux courants: ce sera le prix du passage vers la Terre nouvelle.

L'Amour permet à la connaissance de ne pas devenir une prison de luxe, et la Connaissance permet à l'amour d'aimer toujours davantage, en se libérant de la loi du semblable qui ne reconnaît que le semblable.

Se libérer des voies hémiplégiques constitue l'unique moyen de sortir des ornières des bons sentiments invalides et des vérités si transcendantes qu'elles ne peuvent toucher à la vie sans se salir ni se perdre.

Qui aime le soleil intérieur devra descendre au charbon ! De plus en plus, l'Inconscient se laisse triturer par les fréquences divines, et sa libération est indispensable pour incarner un nouveau processus. Les épreuves sont des passages divins, les crises des bénédictions, les souffrances des appels de Dieu.

Bonne lecture !

Natarajan































Lettre du 13 Juin 2010

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La consultation astrologique me permet de plus en plus souvent d'avoir accès aux scories des incarnations, c'est-à-dire qu'une voyance extra-temporelle se développe, qui s'appuie sur les éléments du thème natal. Je peux également développer depuis peu, sans aucun effort et dans une sorte d'improvisation, tout ce qui concerne la voie du Tao, dont je souligne la simplicité par rapport à d'autres doctrines spirituelles plus biscornues, et j'insiste sur les raisons pour lesquelles cette voie est particulièrement adaptée à une préparation au Supramental.


Il se peut donc qu'une implication supérieure de ma part dans notre cher samsara, avec stages disséminés, formation d'astrologie dans une ou deux régions, et davantage de consultations, me permette de nouvelles aventures, avec la satisfaction d'être utile à mon prochain, si Dieu le veut. J'ouvre également une boutique puisqu'on me réclame par le net musiques et mandalas ; boutique où j'aurai le plaisir de proposer des livres « écrits avec amour » qui ont été refusés par les éditeurs.


Les « voies » n'existent pas, ce sont de simples descriptions d'itinéraires. Chaque être marche vers lui-même ou vers le Divin, les plus conscients seulement comprenant qu'il est nécessaire de faire converger la différenciation personnelle avec la recherche de la conformité cosmique et divine. C'est à cela que je m'emploie désormais, avec la satisfaction de trouver sur mon chemin d'autres êtres qui sentent la nécessité pour eux-mêmes de développer cette double approche, sans imitation ni obédience servile d'un côté, et pleine de reconnaissance pour le Divin de l'autre, Divin que les masques de l'Histoire ne peuvent dissimuler aux scrutateurs du secret éternel, qui auront dissipé les fantômes de la peur et de l'ambition. Uranus Neptune marcheront la main dans la main, pour les connaisseurs qui auront perdu leur ego en cours de route, comme un bagage devenu inutile. Vers soi-même et vers le Tout, sans sacrifier l'un à l'autre. Impossible n'est pas français.































Lettre du 5 Septembre 2009

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Chers amis,

cette fois la Terre est en plein barratage énergétique. Vous me permettrez de dissimuler les raisons personnelles qui me portent à faire cette analyse, par pudeur. Toujours est-il que j'ai été confronté à deux évênements-chocs en moins de quinze jours, et que j'ai vraiment fait une découverte stupéfiante. Je me suis pris moi-même en flagrant déli de rejeter certaines réalités intolérables, comme si mon cerveau faisait tout pour se protéger à retardement d'un fait inassimilable. Jusqu'à présent j'avais prêché le lâcher-prise avec une certaine désinvolture, mais je n'avais pas été confronté à une situation suffisamment violente pour moi pour qu'elle reste intolérable. Oui et tant pis si je rabache des lieux communs, quand l'intolérable se manifeste à notre porte nous devons nous attendre à voir une partie de nous-même le nier farouchement. Peuvent alors surgir toutes sortes de compulsions graves qui entraînent notre esprit dans des ornières dont il ne saura pas sortir. Mépris, dédain, rejet de l'autre, agressivité, jugement calomniatoire et même violence physique sont vraiment à la disposition du vieil homme pour répondre à une souffrance intolérable qu'il vient de subir. On en connaît les archétypes fondamentaux qui ne sont d'ailleurs pas si nombreux que cela: Trahison amoureuse imprévisible, décès d'un proche dans des circonstances humiliantes, telles le suicide, apparition soudaine d'une maladie grave dans son propre corps ou celui d'un être aimé, mort d'un enfant ou d'un ami en pleine force de l'âge.

Le vieux cerveau de l'animal fait son travail en refusant l'intolérable, pour la bonne raison que l'on ne trouvera jamais de cause satisfaisante pour l'expliquer. Une trahison amoureuse paraîtra toujours injustifiée puisque l'autre est possédé à l'intérieur de soi-même, par la fameuse introjection qui permet à ceux que nous aimons de vivre en nous autant qu'ils vivent à l'extérieur, avec leur propre liberté. J'ai remarqué que la pratique de la méditation quantique pouvait permettre de venir à bout d'une souffrance intolérable de perte de l'autre, à condition de savoir se recentrer sur soi-même, et d'affirmer en toute simplicité que l'essentiel, c'est le divin et soi-même, et non pas cet amour prometteur qui s'effondre, et non pas ce suicide d'un membre de sa propre famille, qui vient jeter un nuage noir sur tous ceux qui croyaient en cette personne, et restent bec dans l'eau pour expliquer son geste.

Ces événements sont probables pour chacun de nous à un moment donné, et peut-être même qu'aujourd'hui leur probabilité augmente. Beaucoup d'êtres humains qui refusent la lumière en dépit de l'aide qui leur est fournie peuvent aujourd'hui préferer la fuite directement dans la mort ou dans des maladies puissantes, qui leur permettent en quelque sorte de ramener le monde à eux, puisqu'ils n'ont pas su entamer la démarche contraire, se relier à la totalité par l'amour ou la connaissance. Beaucoup de couples explosent sans prévenir car chacun veut devenir maître de ses propres décisions, qu'il s'agisse d'hommes ou de femmes trop dociles. Nous assistons donc de près ou de loin, dès que nous vivons en milieu très ouvert à des explosions de souffrance qui dévastent quelques temps ceux qui en sont les victimes. Pour nous-mêmes nous savons que si l'intolérable se manifeste dans notre vie, nous aurons peu ou prou tendance à tomber dans la panneau de la victime, afin de justifier des mauvais sentiments comme la haine et le mépris pour les humiliations et les offenses, comme le désespoir et la résignation pour des pertes qui sur le moment semblent conséquentes, comme celles d'êtres chers ou même parfois seulement des pertes matérielles qui donnent sur une insécurité concrète. Dans tous les cas de figure, l'aspiration au Divin permet de supporter puis de guérir l'intolérable, c'est un travail assidu quand il se présente, c'est un mouvement nécessaire, c'est devenu un véritable yoga que de savoir accepter tous les imprévus de l'événementiel et du relationnel. Chaque être aspire à son propre souffle, à sa propre liberté, et les connivences mécaniques ou artificielles peuvent éclater au grand jour.

Accepter l'intolérable, ce n'est pas se résigner mais apprendre à moins souffrir devant les événements qui nous terrassent quelle que soit leur origine.































Lettre du 14 Mai 2009

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VERS LE BOUILLONNEMENT APOCALYPTIQUE.



Le supramental dans le physique constitue une nouveauté dans notre histoire terrestre.


Les critères de sélection appartiennent au Divin exclusivement.
Aucun individu ne peut se hisser jusqu'au Divin, simplement parce qu'il le décide,
ou mène une ascèse censée y conduire, qu'il risque d'inventer sur mesure,
sans jamais récolter les résultats escomptés
et en interprétant à faux ses expériences.


De la suprématie du Supramental découlent deux aspects opposés et complémentaires.


Premièrement, que des êtres le touchent mais n'aient pas pour mission de le faire savoir au plus grand nombre, et qu'ils gardent pratiquement secrète cette expérience, qui n'est pas faite pour épater la galerie, ou faire de la publicité pour le Divin, mais pour permettre simplement des modifications extrêmement profondes dans ce que l'on appelle l'individu humain.


Deuxièmement, que des êtres qui ne connaissent pas le supramental, s'en réclament, ce qui peut avoir différentes origines. Une mauvaise évaluation de son propre niveau, en toute sincérité en quelque sorte, hypothèse à retenir d'emblée pour certaines personnes qui montent sur des plans supérieurs, et qui, parce qu'elles éprouvent quelques sensations nouvelles, s'imaginent se transformer, alors qu'elles reçoivent une shakti surmentale. Mais il est aussi plausible que des êtres particulièrement décidés à évoluer spirituellement le fassent n'importe comment, en s'acharnant, en tirant à eux, pendant de soi-disant méditations, «la lumière», alors qu'ils ne feront ainsi que permettre la descente d'entités hostiles et très puissantes, astrales voire extra-terrestres, capables de les adombrer, puis de les manipuler. Parmi eux, certains peuvent être sincèrement convaincus d'être dans le vrai, et peuvent œuvrer pour un faux Divin, qu'ils prennent pour le vrai, évidemment. Il est également possible de toucher des plans supérieurs et de ne pas savoir les conserver, et de s'acharner à ne pas le reconnaître, la perte étant trop humiliante, ce qui peut aussi attirer des forces hostiles. Enfin, certains karmas spéciaux sont également susceptibles de vouloir s'emparer du supramental, pour régler, une bonne fois pour toutes, le problème de l'identité personnelle dans une sorte d'apothéose mégalomaniaque, et la question sera alors de se donner le change le plus longtemps possible, à soi-même et aux autres, par toutes sortes d'artifices, de moyens, de prétentions etc. Ce danger est d'autant plus grave que les candidats concernés par ce genre de problèmes peuvent arguer que nul ne s'est jamais avancé aussi loin dans la «vérité», et qu'il est donc normal qu'ils soient invulnérables à toute critique les concernant, personne ne pouvant apprécier où ils se trouvent. (Le b a b a du faux prophète moyen, à qui je mâche le travail, merci Natarajan). Ils peuvent s'enfermer dans leurs illusions tout en se croyant tout au sommet de l'échelle.


En ce qui me concerne, je ne me suis jamais senti en position de «supériorité» par rapport à qui que ce soit, et j'accepte systématiquement les critiques, n'ayant strictement rien à défendre, sinon mon intégrité. J'ai conservé l'amitié pendant longtemps de camarades (aujourd'hui perdus de vue) qui doutaient de moi, et ne cherchaient pas pour autant à me nuire, car je n'ai jamais présenté le supramental comme un privilège qui devait être reconnu par les autres. Dans mon enthousiasme, j'ai regretté que certains se ferment à moi, car je suis convaincu qu'une ouverture les aurait fait avancer, et à l'époque j'étais plus attaché qu'aujourd'hui aux progrès spirituels de la terre, et j'ai donc eu quelques déceptions, autorisées par mes attentes, qui n'étaient pas entièrement justifiées. Je ne cherche donc pas à faire taire ceux qui m'accuseraient d'être un faux yogi, ou de me tromper sur ma propre «réalisation», car c'est normal de ne pas voir d'emblée ce qui m'anime, d'où ça vient, et je me moque bien pas mal de ce qu'on pense de moi, et même d'être sali; mais je n'irai pas jusqu'à nier être ce que je suis pour faire plaisir à tel ou tel. Au contraire s'il le faut, je défendrai une certaine vision du supramental contre des polémistes le présentant autrement, si je sens le mensonge, l'ambition ou le manque de compétence animer leur discours. Je parsème parfois mes écrits d'informations nouvelles qui me viennent à l'esprit, et qui peuvent davantage me crédibiliser, mais par ricochet, puisque c'est dans l'intention de montrer les moyens que met le Divin en œuvre pour percevoir la manifestation. (Comme par exemple, la cristallisation du mental de lumière en 1991, à Sri Lanka, preuve concrète que la transformation du cerveau débouche sur une nouvelle perception, holistique à chaque instant, après quinze ans (pour moi) de présence dans les parties molles du crâne. Cette «intelligence» ne cherche à s'emparer de rien, et comprend instantanément de quoi il en retourne sur tous les plans de la perception, sans aucun effort, y compris la perception abstraite (qui devient d'une pureté incroyable). Je ne cherche pas non plus un monopole, et je ne désespère pas de rencontrer un ou plusieurs êtres réellement possédés par le Divin, ce que je devrais pouvoir reconnaître. Certaines expériences m'ont été relatées, mais ne correspondent pas pour le moment à ce que j'ai vécu moi-même, mais je me prépare à rencontrer des personnes qui entreprennent aussi un travail dans le physique, et il sera intéréssant de comprendre en quoi de nombreuses variations individuelles renvoient à un dessein collectif. En revanche, il est clair que certaines Shakti travaillent aujourd'hui, et que des perceptions nouvelles se produisent, comme les chakras peuvent également bénéficier d'ouvertures conséquentes, sans que cela soit nécessairement du supramental. Ce qui compte, c'est la qualité de la force en question, et bien avant la transformation supramentale, il y a déjà des stades très intéressants d'ascèse énergétique, qui contribuent largement à l'éclaircissement de l'atmosphère terrestre et à l'évolution individuelle transcendante. Aussi faut-il se méfier des mots, et ne pas coller l'étiquette supramentale sur n'importe quoi, pour seulement trouver un signifiant pour un signifié qui a eu lieu, une expérience de lumière nouvelle, qu'on représente ainsi au petit bonheur la chance.


Il est même possible que des usurpateurs m'attaquent faute de les reconnaître, cela fait absolument partie du jeu cosmique, ma position étant extrêmement délicate, puisque je représente un nouveau prototype d'évolution spirituelle. Je n'ai rencontré aucun maître avant l'illumination, et entre l'illumination et le supramental non plus. Je compte continuer de déployer toute une gamme d'approches pour permettre à chacun de se passer d'autorité supérieure, et de faire néanmoins le travail initiatique correctement, l'autorité revenant au seul Divin, ce qui a le mérite non négligeable de court-circuiter les intermédiaires, dont certains sont plutôt à éviter, et dont la plupart plafonnent. Ainsi, ceux qui voudraient m'attaquer en me traitant de gourou autoproclamé peuvent le faire en toute légitimité, et qu'ils m'excusent donc de leur fournir moi-même les armes pour m'abattre, ce qui les prive d'un certain plaisir. Gourou, si l'on veut, par une transmission d'écrits, c'est vrai, en tout cas sur le web, autoproclamé certainement, comme un musicien s'autoproclame aimer la musique en jouant, comme un écrivain s'autoproclame homme de lettres en publiant. Oui, je m'autoproclame amant de Dieu, et j'affirme même que c'est réciproque, et que notre union résiste à de sacrées scènes de ménage, qui entretiennent la passion (c'est un luciférien, pas de doute, Watson).


Ce que j'ai reçu du supramental me permet largement d'ouvrir cette voie, vers la découverte du maître intérieur, mais j'éprouve une fidélité absolue pour Mère et Sri Aurobindo, si puissants que la lecture ou relecture de leurs livres me «branche» parfois spontanément sur leurs propres découvertes, ce qui fait que je continue d'être enseigné à travers eux, tandis que je dois également rester très indépendant dans ma propre voie. Certains pour qui l'univers se réduit presque exclusivement à leurs projections sur le relationnel, peuvent aussi m'accuser de vouloir attirer dans mon sillage, et de distribuer des vérités et des concepts que je voudrais imposer, pour devenir une sorte de «successeur» de Sri Aurobindo, ou de Satprem, ce qui est parfaitement ridicule. Je commente ce qui m'arrive, et je pose des jalons, qu'on peut réfuter à chaque instant, pour retracer l'itinéraire qui m'a mené aussi loin, dans l'intention que d'autres en profitent. Si le désintéressement qui est le mien est présenté par des sûrs de leurs faits pour une volonté de me faire valoir, je les laisse volontiers se discréditer eux-mêmes. Car ce que je continue de voir, c'est qu'on ne s'intéresse pas toujours au supramental pour ce qu'il est, la porte de sortie vers une vie divine, mais pour se faire du cinéma avec les querelles de clocher qui peuvent animer les discussions et les rencontres entre «superbranchés», ce que je revendique, «superbranchés» où il y a à boire et à manger, vanitas vanitatum.


On pourra attaquer ma personne tant que l'on voudra, mes écrits resteront, et sans doute serai-je attaqué si je ne reconnais pas tel ou tel. Ce serait très grave à l'heure actuelle de répandre une fausse doctrine d'accès au supramental, mais vu la symétrie extraordinaire qui prévaut dans l'organisation de l'univers, ce serait bien synchronisé avec mon travail, et conforme au jeu de miroir du yin et du yang. Par fausse doctrine, j'entends tout moyen qui laisserait miroiter l'accès à la Mère divine par des itinéraires douteux, comme se soumettre à un individu particulier qui serait le meilleur de tous, rejeter le couple de Pondichery au bénéfice d'une nouvelle dimension supérieure sortie d'un chapeau de magicien, ou en provenance directe d'une nouvelle galaxie, et qui brouillerait les cartes de la sadhana, en inventant de nouvelles pratiques, de nouvelles licences, de nouvelles règles, voire de nouvelles prières, ce qui serait le fin du fin en innovation de produits de consommation.




À chaque instant, je renvoie l'information que je fournis à ce qu'elle représente pour celui qui la reçoit, et je ne fais aucune pression pour qu'il l'accepte, ce qui donne du fil à retordre à ceux qui veulent me réfuter. Mais comme par hasard, ce sont ceux qui sont assoiffés de pouvoir qui me prêtent ce travers, de vouloir régner, — les projections une fois de plus revêtant l'objet de l'esprit même de celui qui les produit. J'ai la liberté d'affirmer que tout ce qui est nécessaire à la consécration supramentale est contenu dans les œuvres de Mère et de Sri Aurobindo, ainsi que les miennes qui particularisent la question de la sadhana, (cosmophilosophie et méditation quantique), et cela est suffisant. Feuille de route pour l'Apocalypse constitue la synthèse la plus pure à l'heure actuelle pour se débarrasser de l'illusion


de la voie tracée d'avance,




et prépare donc la lecture d'œuvres entièrement inspirées par le supramental, comme la vie divine et l'agenda de Mère. Je porte un regard critique sur tous ceux et celles qui prétendraient «dépassées» les bases du yoga divin, sous prétexte qu'ils sont loin devant, et qui s'affranchissent sans vergogne de Mère et de Sri Aurobindo, qui pour le moment constituent encore les SEULES AUTORITÉS INDISCUTABLES en matière de Supramental. (J'ai personnellement fait parler de moi pour qu'on sache que l'expérience de Mère continue, car certains seront très heureux de savoir que le yoga supramental n'a pas été compromis par la disparition des fondateurs et de Satprem, mais mon combat au fond de la matière n'est pas terminé, et je continue le travail, sans autre prétention que de ne pas m'arrêter. Mais de là à accréditer quiconque prétend faire la même chose, il y a un pas que je ne saurais franchir).


Tous ceux qui en veulent plus, ou en veulent trop, prennent des risques à rencontrer des imposteurs conscients de l'être, ou des imposteurs à l'insu de leur plein gré, ou encore des sortes de fous, qui vivent dans un univers entièrement subjectif et personnel, qu'ils tiennent à ériger en vérité universelle, où l'on trouvera projetées, quintessenciées, leurs propres obsessions (jouir d'une liberté absolue, être le meilleur de tous, piloter la terre, être le nouvel avatar, parvenir là où nul n'est passé avant, et j'en omets, de peur qu'on s'imagine à la longue que je vise des individus particuliers). Le supramental est encore vraiment loin de l'homme, mais un millième de l'humanité s'imagine sans doute que le signifiant, le mot, va mettre à disposition la chose, le Divin, en se bricolant de petites extases sur commande. S'il n'en était pas ainsi, ce ne serait pas l'Apocalypse. Il y a certes quelques moyens pour éviter de se laisser berner. En premier lieu, refuser tout abandon de sa volonté personnelle à une autorité prétendue telle qui réclamerait ce sacrifice, pour vous soumettre. Je suis absolument catégorique sur ce point, car la nouvelle manifestation est très profonde, et il n'est plus question que quiconque fasse le travail à votre place. La soumission au gourou est possible dans des cadres traditionnels, devenus archaïques, et elle est légitime dans ce cadre-là. Mais ce que veut réaliser le supramental ne s'arrête pas là, et celui qui se consacre au Divin proprement dit, recherche une relation d'égalité avec le précurseur, le yogi supramental, qui ne peut en aucun cas se considérer comme supérieur, mais seulement en avance sur ceux qui bénéficient de sa parole, d'autant qu'il en bave plus souvent qu'à son tour, refusant de se figer dans un rôle quelconque, ce qui finirait toujours en posture, et de la posture, à ceux qui sont pour et ceux qui sont contre, puis on passe de l'orthodoxie au schisme; et l'on escamote le problème, en évoluant à l'horizontale, mon gourou est meilleur que le tien, et autres friandises, quand on continue de ramper tout en prétendant vouloir s'identifier au vol de l'aigle.


L'autorité spirituelle de l'avenir sera seulement une sorte de compétence pratique, et se désistera totalement du contrôle des faits et gestes de ceux qui, en quelque sorte, suivront l'éveillé supramental, au sens propre seulement, en étant derrière lui par rapport au Divin manifesté. Puisque chacun doit découvrir sa propre voie, suivre doit être ramené à son sens propre, être derrière, et chacun doit renoncer à »suivre» dans le sens figuré, d'imiter ou d'obéir. Car chaque être possède son dharma, et dès qu'on l'accomplit,


aucun dharma n'est supérieur à un autre.


C'est le Divin qui remonte vers Lui, en empruntant l'âme humaine, et c'est particulièrement douteux de se réclamer d'une connaissance spirituelle supérieure pour inférioriser les autres, les manipuler, les soumettre, voire les humilier, — à moins qu'ils ne s'y prêtent avec joie, comme certains hommes très riches paient cher pour être dominés une heure par une femme, ce qui est très chic chez les hauts responsables qui décident tout le temps (encore des renversements du yin et du yang tout à fait charmants). Or, comme j'ai moi-même subi cette technique quand j'étais jeune, je l'assimile à une méthode de prise de pouvoir sur l'autre, à caractère sectaire. J'ai déjà été deux fois utilisé comme faire-valoir par deux hommes prétendant à une très haute connaissance, et qui ne se gênaient pas pour «casser» leurs disciples. Bien qu'il y ait un déchet considérable dans cette technique, ceux qui restent sont entièrement dévoués, et ceux qui partent n'osent pas faire de vagues. Ce que je connais du Divin me confirme que ces méthodes sont, soit employées intentionnellement dans un but malsain de domination, soit employées avec négligence, sous couvert de thérapie émotionnelle, mais elles font dans les deux cas ressortir le rapport dominant-dominé, maître-esclave plutôt que maître-disciple, et je suis certain que ces pratiques, assez spectaculaires, ne touchent pas les vraies questions, ni n'instaurent une relation vraie entre le soi-disant instructeur et celui qui le subit.

En second lieu, rester sensible au dessein du «prétendu supramentalisé», où veut-il en venir, à quoi joue-t-il, comment se justifie-t-il de devoir «témoigner», et en quoi cela vous concerne-t-il. Témoigne-t-il pour faire parler de lui, pour s'amuser, pour séduire, pour gagner de l'argent, pour vous sauver, pour contribuer ou pour faire bande à part ? De quelle façon prétend-il transmettre sa connaissance, par la persuasion, le pouvoir, l'éloquence, le dialogue, le monologue, ou un travail quelconque, précis et cadré, mesurable en quelque sorte. Flatte-t-il, intimide-t-il, fait-il les deux à la fois, quel type de relations cherche-t-il à créer ? Où se situe-t-il ? Dieu est-il son valet de chambre ? Pourquoi tient-il tant à vous, c'est-à-dire, qu'attend-il de vous ? Propose-t-il une inféodation déguisée en complicité, sentez-vous qu'il encourage le meilleur de vous-mêmes, ou bien qu'il vous juge, sous couvert de vous aider, ou qu'il ne fait que poursuivre sa propre route, indifférent à ce qu'il suscite, s'enfermant dans sa propre soi-disant transcendance ? Transmet-il une vision claire du Spirituel, ou ramène-t-il tout à lui ? A-t-il les capacités de reconnaître le Spirituel partout où il se trouve, quitte à nuancer le débat, ou ne voit-il que le sien propre ?


Des êtres d'un peu partout, branchés Apocalypse, prétendent en effet aujourd'hui favoriser l'Ascension, ou bien être passés dans d'autres dimensions, et il y a donc à boire et à manger pour la plus grande gloire de la Manifestation (et l'exercice de votre libre arbitre), qui, je le répète, a un faible très particulier pour l'hétérogène et le mimétisme, et naturellement pour le mensonge, qui ramène les signifiés à leurs signifiants, les objets aux mots qui les représentent, et les valeurs aux noms qu'on leur donne. (Et les principes spirituels à des images !)


Pourquoi les faux maîtres peuvent-ils jouir d'une certaine impunité ?


Parce que c'est le jeu de la Manifestation, darwinien. Parce qu'il y a toutes sortes de forces, puissantes, qui protègent leurs thuriféraires, même s'ils ne vont pas dans le sens de l'évolution, et ces forces sont rodées et disponibles.


Peut-on être «récupéré», même à un haut niveau spirituel ?


Malheureusement oui, c'est possible, sans doute assez rarement quand même, car les enjeux deviennent de plus en plus importants, et de magnifiques «cadeaux» peuvent être faits aux transfuges. Qu'on me pardonne de ne pas insister, c'est très occulte, mais il faut le dire, sinon la mise en garde contre de «faux supramentalisés» n'aurait aucun sens. J'ai une tendresse particulière pour le Divin et Sri Aurobindo, sinon j'aurais abandonné en 2005 en me «rabattant» sur une énergie extraordinaire, d'une très grande beauté, mais qui n'était pas du supramental, et me donnait en échange de la substitution, pratiquement tout ce que je voulais obtenir, longévité, impunité karmique et physique dans l'exercice sexuel cultivé, extrême sensibilité à la jouissance de l'incarnation, avec une permissivité totale, bref le grand jeu... Elle est quasi inconnue, comme le supramental, mais je l'ai délogée par hasard en passant devant un temple à Bali, et elle est quand même parvenue en entrer en concurrence naturelle avec le Supramental, peut-être un bon quart d'heure. Une splendeur incroyable, mais pas du tout comme Mahalakshmi qui est toute imprégnée de l'indescriptible force originelle. Même les fleurs étaient devenues le symbole le plus représentatif de la sexualité, c'était vraiment un autre monde, qui transformait aussi la perception physique. Le vent en roulant en scooter donnait presque des sensations d'orgasme. La possession énergétique, car il n'y avait pas d'entité, est assez vite retombée. Mais avant, j'ai dû dire non.


J'ai dit non car l'énergie, transmuée en conscience mentale, m'a montré tout ce qu'elle donnait. C'était vraiment extraordinaire, mais ce n'était pas le Divin originel. Dans le meilleur des cas, l'âme du mouvement ascendant (de la vie) depuis la matière, c'est-à-dire peut-être le principe même du désir dans toute sa gloire éternelle, mais c'était justement trop tentant de s'arrêter là, ce n'était pas du jeu de m'envoyer quelque chose d'irrésistible, alors j'ai passé ma route. Coup de bol, le supramental commençait à agir de l'intérieur du corps, ce qui fait que le fait de le perdre par la sensation physique (externe) n'a pas vraiment duré, mais la claque a duré plusieurs mois. Et des énergies de tous types foisonnent, qui peuvent se présenter automatiquement sur la voie, comme dans un miroir inversé. On peut ainsi en même temps ou presque rencontrer un vrai maître et un faux, ou tomber amoureux quand on s'affranchit de la sexualité, ou tomber sous la coupe de quelqu'un juste au moment où l'on allait vraiment découvrir l'autonomie de pensée, car les contraires s'attirent au lieu de se repousser, dans bien des domaines, et le pauvre «libre arbitre» est mené à mal. Il n'y a pas de règle vraiment fixe qui puisse dicter de la valeur du comportement à adopter. Cela joue dans les deux sens naturellement, aussi bien accepter dans un élan nouveau et imprévu qui s'impose de restreindre désirs et projections, et extériorisation, que de faire davantage confiance à l'expérience ouverte, même si elle fait sortir d'un cadre figé de principes. À condition qu'il y ait l'aspiration, naturellement... C'est donc pour mettre en garde que j'évoque ces expériences incroyables, et non pas pour intimider qui que ce soit avec le risque des «contrefaçons» ou des énergies médiocres. Il faut en parler, car elles sont là, menaçantes, et à l'affût du sadhak distrait ou prétentieux.


Voilà pourquoi le supramental ne doit pas être confondu avec autre chose, d'autant qu'il est possible que des leurres soient fabriqués exprès pour prendre au piège les badauds. Des énergies diaboliques fines, tirées de l'imagination universelle encore vierge, non informée par la mémoire humaine, peuvent donner un substrat énergétique puissant, une sorte d'impunité dans tous les actes, et le sentiment d'une complicité cosmique inconditionnelle, qu'on peut prendre, si l'on y tient, pour un contact avec le divin. Dans ce cas, un circuit s'effectue entre les chakras sexuels et le chakra du plexus, mais l'énergie ne remonte jamais plus haut et provoque des addictions diverses. C'est donc l'arborescence des énergies sur terre qu'il est possible de dépasser aujourd'hui, qu'elles soient excellentes comme celles de certains plans surmentaux, ou plus douteuses, comme la plupart. Mais aussi bien le mental que le vital sont infestés de courants de formes délétères, et c'est pour cela que la terre tarde à «ascensionner», les êtres humains restant prisonniers d'immenses filets énergétiques «de base», qui s'appuient sur des valeurs morales, mais maintiennent l'identité dans un cadre contingent, où les énergies divines n'ont aucune chance de passer entre les mailles. Ces filets sont protecteurs sur un plan très concret, mais filtrent et refusent tout ce qui compromet la sécurité du «moi», et c'est donc difficile de forcer le passage. Mais la sadhana, par définition, libère des scories de l'identité contingente (ou bien c'est qu'elle n'est pas comprise), et permet donc de recevoir le réel dans des fréquences plus élevées. Il semblerait ensuite qu'il y ait une équivalence entre les progrès intérieurs et la qualité des énergies recueillies, ce qui met un terme à toute polémique stérile. Plus le moi est pur, plus il capte la Shakti dans une forme élevée de sa manifestation, plus il est embourbé, moins il se branche, ou contacte de fausses énergies évolutives. Le Divin arrive par le haut, ouvre la fontanelle, et se tient au-dessus, puis se déverse. Il n'est donc plus intéressant d'ouvrir les chakras par le bas, mais il est vrai que le Tout peut commencer à se manifester au niveau du coeur, tandis que l'illumination ouvre le chakra du front, sans pour autant qu'on ressente de l'énergie. Ces fluctuations évolutives chamboulent beaucoup de choses, et soulèvent des résistances, parfois proportionnelles.


Restons simples. Tout cela est très enfantin, et presque automatique.


Le progrès accompli amène nécessairement un nouvel adversaire ou obstacle, intérieur ou extérieur. C'est une sorte de loi, à laquelle le New Age et quelques mouvements qui cherchent du recrutement global, veulent déroger, pour enluminer la quête divine d'une sorte d'aura magique qui faciliterait la démarche. Cela est entièrement faux. C'est l'aspiration et elle seule qui permet de supporter les forces hostiles qu'un ego ordinaire ou un système nerveux non entraîné ne pourrait pas parvenir à vivre, mais les difficultés se présentent, et si elles cessent de se produire, c'est que la voie s'est tout simplement arrêtée. En revanche, il est tout à fait possible de passer par de longues plages de temps où l'adversité semble se résorber, et dans ces moments-là, on peut accumuler la force nécessaire pour affronter, le cas échéant, de nouvelles crises, au sens large, c'est-à-dire l'urgence de certains changements. Il apparaît aussi qu'il faut souvent revenir en arrière pour vraiment intégrer certaines choses, qui semblaient acquises, si l'on ne veut pas faire semblant de les «maîtriser».




Peut-on être récupéré par des forces purement adverses ou d'autres forces,
simplement moins divines ?


Il n'y a aucun préjudice à ne pas pouvoir rester exclusivement en contact avec le supramental. On peut le toucher mais pas assez profondément ou longtemps, et continuer avec d'autres énergies un vrai travail spirituel, comme l'énergie christique par exemple, (là encore, la vraie, il doit en traîner quelques fausses), ou celles provenant de shakti qui viennent de traditions plus ou moins oubliées, et qui peuvent être attirées par un karma particulier. Il est envisageable de mélanger le pur supramental à autre chose, soit par incapacité, soit au contraire dans des intentions nobles, comme créer des plans intermédiaires, si la pure transformation, comme celle de Mère par exemple, est trop difficile, et ne parvient pas à s'imposer. Ce sont des questions extrêmement délicates, que presque nul ne peut traiter en expert, car l'expérience est nouvelle sur la terre, et toutes sortes de possibilités peuvent se manifester. Les êtres capables de faire ce genre de choses sont eux aussi si différents des normes, avec des origines si diverses, qu'il faut aujourd'hui un grand discernement pour savoir à qui on a affaire.


Il n'y a pas de raison de rester longtemps sous l'emprise des forces adverses, si on les a identifiées comme telles, bien que certaines collent en profondeur aux sensations. L'invocation du Christ est en général suffisante pour se libérer d'une chute par inadvertance, ou d'une agression particulièrement bien menée. Se tourner vers le Divin, évidemment, en permanence si possible, tout en continuant les opérations habituelles de la journée et du mental. Considérer les attaques de découragement comme du simple «cinéma», et attendre le retour de la foi, gouvernée par l'être psychique.


Existe-t-il des forces ni évolutives ni hostiles,
qui peuvent prendre à revers les personnes très avancées ?


Oui, il y a encore des forces issues de la terre, qui travaillent pour la terre, et qui ne sont pas à proprement parler transcendantes, et qui ne donnent pas sur le diabolique ou le satanique non plus. Parmi elles, beaucoup sont des vestiges, et c'est une erreur de les surestimer. Elles peuvent être en revanche employées ou subordonnées à des projets verticaux, sinon leur proportion de vital demeure trop élevée pour obtenir des résultats sur les plans plus profonds de l'ascèse, de l'Intellect supérieur, du détachement absolu. Une partie des énergies chamaniques, la plus lumineuse en tout cas, peut collaborer à une nouvelle écologie terrestre, mais c'est également là que les contrefaçons abondent, d'ailleurs le monde chamanique lui-même vit un combat de titans depuis une quarantaine d'années, car son système syncrétique, dans lequel le bien et le mal sont à la disposition (éclairée) de l'initié, engendre forcément des luttes de pouvoir occultes pour un certain contrôle de la terre, et même la magie terrestre est en ce moment complètement chamboulée. Il existe également des énergies tantriques assez basses, et pour tout dire déjà diaboliques, aussi est-il difficile de porter un jugement sur le tantrisme, qui comporte certainement le pire, et parfois de très bonnes choses.


Existe-t-il des forces évolutives qui ne concernent pas l'incarnation ?


Oui, le darshan de certains maîtres, au demeurant fort rares, fait descendre une énergie qui n'a aucune affinité particulière avec le corps physique, mais qui peut agir sur les chakras et sur le coeur, pour nettoyer, encourager la sadhana, sans aller pour autant dans le sens de la reconnaissance de l'incarnation, qui demeure subordonnée à un but extérieur. (Traverser le grand vide, se libérer de la roue des naissances et des morts, rejoindre le royaume d'où provient cette énergie, en tant qu'âme, atteindre le soi du soi, considéré comme la plus haute possibilité terrestre.)


As-tu des personnes à recommander ou au contraire dont il faudrait se méfier ?.


Pour le moment je ne tiens pas à faire d'ombre à qui que ce soit, et tant que je ne serai pas attaqué personnellement par un ou plusieurs «détracteurs supramentaux» (c'est à mourir de rire, la Manifestation), je ne vais pas m'amuser à les condamner d'avance, même si j'ai des doutes à leur égard. Peut-être oserai-je avancer le cas échéant que je ne vois pas trace du supramental chez tel ou telle qui s'en réclame, non pas pour le condamner, mais pour émettre mon opinion, tout simplement, pour rester cohérent avec moi-même. (On pourra toujours dire que je me trompe, après tout). À chacun de se démerder (c'est dans le dictionnaire) avec les contrefaçons, volontaires ou pathologiques, je ne suis pas un redresseur de torts, et je bénis le voleur de poules. (La contre-initiation est aussi un sacré boulot, et certains sont admirables parmi les faux prophètes, mais ils ne servent pas le Divin, et a priori c'est ce qui nous intéresse ici).


Oui, en cas de pépin, ou de crise, ou même pour le fun, je considère qu'Amma peut rectifier des trajectoires déviantes par son seul Darshan, mais je n'incite pas à un abus de son bain énergétique, qui mérite d'être intégré, sous peine de devenir une addiction. Se déplacer, même si c'est loin, en cas de problème, peut être une excellente initiative.


J'espère que toutes ces précisions vous seront utiles sur un chemin de plus en plus semé d'embûches et de merveilles. Que rumeurs, gossips, et autres mensonges organisés se retournent contre leurs initiateurs. Om Shanti.

































Lettre du 25 Décembre 2008

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Salut les internautes.

Je joins ici l'introduction destinée aux éditeurs qui recevront simultanément mon nouveau dossier «la voie du maître intérieur» et «feuille de route pour l'Apocalypse». Les deux forment une unité pour pratiquer le yoga urbain, le plus ouvert de tous, d'origine supramentale.
Si vous avez un contact, vous pouvez m'en parler.
Sinon, tout va dans le sens du mensonge qui se casse la gueule,
merci la crise.

INSTRUCTIONS SUPRAMENTALES
POUR UNE TERRE NOUVELLE

Les bases du yoga urbain

LA VOIE DU MAÎTRE INTÉRIEUR
SUIVI DE
FEUILLE DE ROUTE POUR L'APOCALYPSE.




Ces deux ouvrages permettent au lecteur de se consacrer «au yoga urbain», qui constitue une nouvelle voie spirituelle, facile à suivre en Occident. Cette voie est fondée sur le discernement personnel d'une part, et l'abondance des témoignages spirituels d'autre part, grâce aux librairies spécialisées, les voyages longue distance et la culture internet. C'est sans doute la première fois dans l'histoire connue que n'importe quel chercheur peut profiter d'autant de lumières sur les traditions spirituelles, l'émancipation psychologique de l'individu, et les utopies de l'avenir divin.



Il est facile de se noyer dans cette somme d'informations, ou d'être écartelé entre différents courants. Je remercie donc mes interlocuteurs internautes de m'avoir fait part de leurs impressions et de leurs doutes concernant leur propre démarche, trop riche en quelque sorte, et c'est pour eux, en tant qu'éclaireur, que je me propose d'ouvrir des passages entre des voies différentes, et les conceptions variées de ce que doit être l'itinéraire de l'éveil. Mon propos est destiné à ceux qui refusent de s'inféoder à un mouvement particulier, et qui éprouvent néanmoins la nécessité d'évoluer «en faisant feu de tout bois». Ces deux approches se complètent et sont donc des réponses à de nombreux chercheurs éclectiques et curieux, extrêmement scrupuleux, et qui éprouvent plusieurs centres d'intérêt spirituels, sans nécessairement savoir les départager ou les concilier. Aussi, en tant que témoin de l'éveil, m'a-t-il paru important de faire le point sur ce «statut spirituel», encombré de mythes, et présenté de différentes manières selon les sources.



Comme le mouvement spirituel de l'Occident se raffine aujourd'hui, la question du jour est subtile et profonde, et concerne l'utilité du maître, une question d'actualité, puisqu'il est facile de recueillir différents avis, contradictoires, de la part des éveillés eux-mêmes. On oppose depuis peu l'enseignement du maître traditionnel au témoignage de l'éveillé sauvage, parvenu à l'illumination sans suivre de voie (continue), et qui décrète qu'elles sont inutiles... Ces hommes et ces femmes apportent des turbulences dans le «spirituellement correct» et possèdent de plus en plus d'audience. Aussi faut-il envisager que le Terre change, que l'éveil se découvre par toutes sortes d'itinéraires, et que le temps de croire à des «cartes topographiques» de la Connaissance est bel et bien révolu. Nous devons nous adapter à cette accélération de l'histoire, tenir compte de tout ce qui est vrai et nouveau à la fois, afin de conserver la démarche la plus «en phase» avec notre époque, qui voit la terre menacée.



Autant d'avis différents sur la nécessité du maître remuent en profondeur le chercheur sincère, qui peut hésiter à faire cavalier seul, puis se ranger à l'hypothèse du maître intérieur, à découvrir en soi, afin de ne dépendre de personne. Il n'y a qu'un pas pour en finir avec la question épineuse de la «transmission», quand la résolution est prise de se prendre en charge, mais cela ne veut pas dire que le contact avec des éveillés doit pour autant être évité, vu qu'ils incarnent ce à quoi tout chercheur aspire, et qu'ils peuvent, ne serait-ce que ponctuellement, fournir des éclairages.



Le yoga urbain se distingue des autres parce qu'il est le plus ouvert de tous, prend en compte tous les matériaux de la réalité, sociale, naturelle, cosmique, qui se tiennent à sa disposition par une information toujours renouvelée des événements dans tous les secteurs. Il ne se ferme dans aucune étiquette, reconnaît avec amour la légitimité de quelques voies pérennes, et s'il inclut la vision de Sri Aurobindo, il reste sensible au devenir terrestre d'un côté et l'exigence intérieure. Il est conçu pour des individus persuadés que seule l'autonomie spirituelle leur permettra de suivre leur propre voie, mais qui aiment écouter et dialoguer avec des éveillés de différentes traditions, si l'occasion se présente. Ils effectuent en permanence des synthèses d'information, s'initient à différentes pratiques, afin de ne pas tomber dans le piège d'une voie tracée d'avance, coercitive, aux prédicats inadaptés à une vie moderne en milieu ouvert.



Ces deux ouvrages permettent d'éviter le piège de se disperser pour tous les disciples de la voie universelle, très ouverts au présent, sensibles au nouveau, et réfractaires à l'autorité.



Sans rejeter les doctrines traditionnelles, j'affirme qu'il est aujourd'hui possible de s'en passer, en respectant certaines conditions qui sont mentionnées. Ainsi la question de l'éveil, que l'on retrouve au détour de toutes les grandes traditions, est-elle abordée dans le premier volet, pour permettre à chacun de s'y préparer sans pour autant s'enfermer dans une obédience, ou ramener sa vie à l'obsession de ce «résultat». La question de la nécessité du maître se pose, mais comme le pratiquant du yoga urbain ne peut ni ne veut se confiner dans une communauté ou une culture traditionnelle fermée sur elle-même, il doit faire preuve d'une grande force, et ne peut plus déléguer ses doutes au maître, à un arbitre extérieur. Cette voie est néanmoins possible, par un affinement du mental, une meilleure connaissance de soi, une aspiration intense. La cité permet de s'intéresser à toutes sortes de manifestations tournées vers la transcendance, et il est donc facile aujourd'hui d'être au courant du passage des maîtres et éveillés, ou même d'entendre des messages «cosmiques» à travers le channelling. Rien n'est à rejeter, rien n'est à prendre pour argent comptant, rien n'est à suivre, rien n'est à écarter par principe, et cette profusion peut permettre un jugement d'une extrême finesse, et à chacun de se réaliser à force d'intégrations diverses de sources différentes.



Le «yoga urbain» permet l'interaction de plusieurs instructeurs qui peuvent être écoutés plutôt que suivis, et dont l'effet global sera de favoriser le jaillissement du maître intérieur. Ou bien, ils peuvent au contraire être évités, ou difficiles à rencontrer, au cas où des sources livresques, diverses et approfondies, assorties de quelques initiations pratiques, sont suffisantes pour dégager l'autonomie décisionnelle du chercheur, offrant à son âme et à son avenir sa propre consécration. Cela dépend beaucoup de chacun, et il me paraît absurde de prétendre qu'un maître vivant est indispensable, ou que l'on peut par définition s'en passer. La vie est plus souple que cela et l'alternance fait jouer les contrastes, ce qui peut permettre d'apprécier à leur juste valeur aussi bien les périodes ouvertes où des chercheurs plus avancés sont fréquentés, que des phases de retrait, où rien d'extérieur ne semble utile ou souhaitable pour mieux s'ancrer dans la voie.



Le yoga urbain est donc celui de l'individu libre, saturé d'informations spirituelles, et qui reste nez au vent, et qui travaille pour ne rien refuser du réel. Le yoga urbain n'oppose pas le matériel au spirituel, l'immanent au transcendant, le quotidien à l'élan spirituel, et il propose une voie pour unir la terre et le ciel, sans dépendre d'un paradigme fermé. L'action en milieu ouvert, par exemple écologique, peut y tenir sa place, c'est un yoga qui suit les événements sans s'y attacher, pour les transformer, à l'échelle individuelle.



Le second volet trace le modèle d'un travail intérieur, indépendant des circonstances, qui peut faciliter le contact avec le supramental, étant donné que cette énergie est bien présente, encore que peu manifestée. En contact continu depuis 1977 avec elle, j'avance quelques hypothèses pour permettre de s'en rapprocher. Le départ de Satprem, le scribe de Mère, a découragé certains, mais le travail continue quand même. Il n'est pas nécessaire de faire de la propagande, aussi la transmission constitue-t-elle un aspect secondaire de l'expérience, que je ne peux pas délaisser, suite aux contacts qui s'effectuent par le web. ll m'appartient de faire savoir que le supramental est bien là, et de le rendre plus accessible.



L'ouverture à l'éveil et au supramental ne sont pas incompatibles, mais jusqu'à présent leur approche n'a pas été globale, sauf dans la synthèse des yogas de Sri Aurobindo. Je me suis attaché pour ma part à dépouiller de leurs formes archaïques et fermées, doctrines et témoignages, dans les deux ouvrages, afin de permettre à chacun d'être le maître de sa propre consécration, après avoir décanté, puis intégré les différents sources d'inspiration qui permettent de prendre appui dans le monde spirituel.
































Lettre du 31 Juillet 2008

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Chère maman,

Oui j'ai quitté la maison, j'ai fugué, mais je ne veux pas que tu t'inquiètes. Bien sûr, tu n'avoueras jamais que c'est de ta faute, ou celle de papa, mais peu importe, vous voilà bien punis tous les deux, puisque votre fille et votre fils vous ont abandonné, de concert et en catimini. Non, je ne te dis pas où je suis, tu aurais le culot de venir me chercher, voire de me culpabiliser. Sache que c'est décidé, je suis anorexique, et je m'en félicite. Comment je me débrouille ? J'ai gardé tout mon argent de poche pendant des années pour préparer cette sortie, ne t'inquiète pas, je ne fais rien de mal. De toute façon, comme je te l'ai dit, je mange si peu que cela ne me côute rien, et c'est indispensable parce que je fais des castings. Je sais bien que l'idée vous fait horreur, à papa et à toi, mais je l'ai décidé. Je suis certaine que si je vous apportais un contrat à signer, dans lequel je serais bien payée, vous vous féliciteriez finalement que j'ai choisi ce métier. Si, c'est possible, je vais avoir seize ans, j'en fais un peu plus, j'ai toutes mes chances.

Sinon, oui, je me laisserai mourir de faim, c'est mon destin. Depuis que je suis toute petite, tous mes camarades se moquent de moi à cause de mon prénom, et parce que, finalement, vu les vêtements ordinaires que j'ai toujours portés, j'attirais les plaisanteries du matin au soir. Je n'en peux plus d'être déconsidérée et humiliée, et cela a largement augmenté depuis deux ans, puisque toutes les filles connaissent ce que représente mon prénom, et en rêvent la nuit. Si je meurs de faim, ce sera de votre faute. Il ne fallait pas me donner ce prénom ridicule, trop lourd à porter.

Votre fils, Porsche, lui, a décidé de devenir coureur automobile, et il est prêt à tout pour ça, contrairement à moi. Je crois qu'il a commencé à comprendre que les femmes mûres pouvaient le soutenir dans son projet, à certaines conditions, et lui aussi pense qu'il ne survivra peut-être pas à sa propre histoire. Il est toujours arrivé à l'école avec une bicyclette rouillée, et, en plus, ce prénom lui va très mal parce qu'il a toujours été lent en tout et très discret. Lui, encore plus que moi, a souffert de son prénom, chaque jour que Dieu fait, et je vous passe les plaisanteries constantes, même de la part des professeurs, quand il était en retard ou tardait à répondre. Il n'a pas cessé d'être l'objet de la risée de tous, autant que moi, il n'a pas cessé de s'entendre dire, chaque jour, des dizaines de fois, que c'était un frimeur qui ne tenait pas la route, il aurait tout donné pour s'appeler John ou Peter. Tous les deux, nous avons bien vu que si vous nous aviez donné des noms pareils, c'est que vous ne vouliez pas voir ce que nous sommes, et que vous nous ravalez à des marques. On vaut mieux que nos marques, et si votre idéal imbécile consiste à fantasmer sur les marques, c'est votre problème, avec les noms qu'on porte, on dirait que vous nous avez achetés en magasin, et nous doutons tous les deux que vous ayez le moindre amour pour nous.

Vous avez vraiment fait une grosse erreur en vous croyant dans le vent et en nous baptisant de cette manière. Nous vous haïssons tendrement, car vous êtes quand même nos parents, et peut-être n'êtes vous pas responsables de votre immense bêtise. Porsche et moi avons la chance de ne pas en avoir hérité, et, pour le moment, nous allons tous les deux au bout de nous-mêmes, pour transcender nos prénoms. Si nous réussissons, Porsche dans la course automobile, et moi, votre fille, dans la mode, vous serez fiers de nous, et nous, fiers de vous. Sinon, vous n'entendrez plus jamais parler de nous, c'est qu'on aura mal fini, on sera mort ou drogué, et j'espère que dans ce cas, vous attaquerez nos marques pour tromperie sur la marchandise.

P.S : Ce serait l'occasion pour vous de changer le prénom de nos deux petites sœurs jumelles, Tequila et Peppermint, à moins que vous ne mettiez un point d'honneur à ce qu'elle entament leur carrière d'alcooliques avant l'adolescence.(Il paraît que les grandes les appellent déjà le cocktail, « tiens voilà le cocktail qui arrive », mot qu'elles ne comprennent pas, prononcé avec un tel mépris, alors que les autres sont mortes de rire, qu'elles ne peuvent plus suivre les cours, ce qu'elles n'ont pas osé vous dire.)

Sans rancune,(et ne nous recherchez pas ou bien je me suicide !).

Votre Chanel.































Lettre du 12 Mai 2008

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C'est assez étonnant de constater que très peu d'êtres humains ressentent l'existence de la conscience suprême, et admettent qu'Elle puisse posséder ses propres critères pour venir à la rencontre de l'être humain. Peut-être avons-nous été dégoûtés de Dieu par le cléricalisme, sans doute n'avons-nous pas assez le temps de réfléchir sur les quatre milliards d'années (qui ont permis à la Terre de nous produire), et d'anticiper sur l'avénement supramental, vu que nous sommes coincés dans un présent aussi éphémère que rapide et aléatoire.

En réduisant tout à une échelle mille fois inférieure à celle de la réalité, l'esprit humain s'invente des buts en s'appuyant sur la mémoire de quelques hommes qui ont prétendu traverser les apparences. En s'attachant à eux, on finit par croire qu'ils ont énoncé des méthodes qui permettent de rejoindre le réel, à condition qu'elles soient suivies le nez sur le guidon, avec des œillères certifiées conformes, afin d'éviter de voir tout ce qui pourrait être extérieur à la voie préconisée, et qui ferait perdre du temps.

C'est ainsi que les intégrismes se forment.

Il semble encore que de nombreux soi-disant chercheurs spirituels s'imaginent que la Conscience va se rendre aux pièges qu'ils lui tendent en la persuadant qu'elle doit s'approcher d'eux, parce qu'ils décrètent que quelques concepts authentiques (comme la croyance en la non-croyance, fort à la mode) doivent l'appâter, afin qu'elle se rende à leurs minuscules prétentions. En réalité, aucun être n'est jamais parvenu à la vérité ou à l'illumination, ou à «l'intégrité du bois brut», parce qu'il suivait une voie. Il n'y a que les sots et les arrogants qui peuvent s'imaginer que la Conscience se laisse piéger dans un tracé perso, mais, en revanche, façonner un modèle pour regrouper ses intentions supérieures, connaissance, amour, intégrité, et les ordonner dans le temps, oui, cela peut être un itinéraire, au sens large, car il faut bien un peu trier, dans la mine du temps, ce qui nous revient, et choisir quelques options. C'est l'objet de mon dernier ouvrage, «feuille de route pour l'Apocalypse».

Les chercheurs de feu aiment marcher. Ils acceptent les erreurs, soit la nécessité de revenir en arrière, quand la ligne droite s'avère impossible, l'idéal insuffisant, la stratégie périmée, et qu'il faut se confronter à tout ce qu'on voudrait déjà avoir réglé. Les autres mettent sous le tapis l'obscur, et se gargarisent de leurs progrès en lumière. Ils aiment la nature, où ils vont pêcher des couchers de soleil transcendantaux, avec leur petit attirail de complaisance émotionnelle, mais ils font la fine bouche, puis se ferment, sur les itinéraires que la vie leur impose, dépités de voir qu'elle possède une autorité imprévisible, qui rabat leurs prétentions, et montre que le Vrai se dérobe dès qu'il est certifié personnel.

Dans cette posture du moi tendu vers la lumière, tandis que le subconscient reste obscur et inerte, on aboie, on mord, on ne veut pas reconnaître que ça n'avance plus, mais on peut toujours se venger en attaquant ceux qui ont le vent en poupe, ceux qui continuent, ceux qui ne s'arrêtent pas, ceux qui sourient aux obstacles, ceux que la souffrance ne démet pas. Des inquisiteurs chastes qui torturent les jeunes sorcières, aux petits maîtres du Soi qui méprisent les mystiques, et haussent les épaules devant Sri Ramakrishna, Sri Aurobindo ou Hallaj, comme si ceux qui étaient devant eux étaient derrière, c'est toujours le même problème finalement, celui du singe, ordinaire ou supérieur, qui exige que tous les autres fassent la même chose, sinon il se sent menacé dans son identité, et ce qu'il souhaite avant tout, c'est de se sentir supérieur. C'est cette vanité-là que les sociétés encouragent, les modes changeant les subterfuges par lesquels on peut se sentir supérieur et être reconnu comme tel. Pendant longtemps, il fallait que la naissance s'en mêlât, mais c'était suffisant. Le dernier mécréant venu, parce qu'il avait une particule, pouvait tyranniser impunément un ou plusieurs villages, voler des femmes, condamner des innocents pas assez serviles. Puis le mérite individuel s'en est mêlé, et on pouvait jouir d'un sentiment de supériorité reconnu, grâce à la gloire militaire, le succès commercial, l'aventure coloniale, la création intellectuelle et artistique. De fil en aiguille, la matière s'est mise à servir l'homme, et la richesse est devenue le moyen le plus universel de s'acheter de la supériorité sociale. Être connu, célèbre, et te voilà supérieur, petit d'homme, prends-y toi n'importe comment, peu importe, gagne beaucoup d'argent, beaucoup beaucoup, tu jouiras de l'admiration d'autrui, tu te sentiras supérieur. Travaille nuit et jour pour vivre au-dessus de tes moyens, c'est le prix du bonheur.

Je m'étonne encore de croiser tous ces chercheurs autoproclamés qui se sentent des êtres supérieurs parce qu'ils se sont «engagés» dans une voie spirituelle. Alors que l'immensité de l'enjeu évolutif devrait ramener leur existence à de plus justes proportions, ils continuent de se prévaloir de quelques «expériences» plus ou moins mystiques, pour se sentir au-dessus du lot. Ils s'évaluent eux-mêmes à partir de quelques événements fugaces que l'univers, dans sa mansuétude, leur aura fournis par la loi des cycles, et ils cherchent donc à s'imaginer qu'ils sont davantage que ce qu'ils sont en réalité. Ils me demandent d'apposer un visa sur leur passeport de voyageur cosmique, ma réalité devant se conformer à ce qu'ils en attendent.

Or, il y a deux choses, le moi et tout le reste. Le moi peut toucher des plans supérieurs, dans le moment, et se retrouver avec une personnalité de base inchangée, récalcitrante, voire mauvaise, ce qui arrive encore à des milliers d'Hindous envoûtés par leur dévotion, comme une drogue, et qui se dispensent de tout chantier psychologique, persuadés qu'ils aiment Dieu, et qu'ils font tout ce qu'il faut pour en être dignes. À l'inverse, le travail en profondeur peut se faire sans tambour ni trompettes, sans paillettes, et le moi peut descendre dans les souterrains de la vie s'affranchir de tout ce qui limite la perception spirituelle, sans pour autant profiter de moments extatiques, où l'unité semble se manifester, qui viendront après ce déblayage interminable. La descente en soi-même révèle que le cerveau fonctionne pour s'approprier les choses, et que c'est peut-être là le fond du problème. Après s'être repu d'appropriations grossières, on peut se mettre en quête de lumière ou de vérité sans se départir de cette petite convoitise animale qui va pervertir le mouvement, enrober l'aspiration de nombreuses ambitions délétères. Or, ce principe, bien peu le comprenne, et l'on voit donc des humains se lancer dans l'appartenance cosmique comme s'il s'agissait d'une nouvelle conquête. Ils «ramènent à eux». Ils font ce qu'il faut pour se donner le change, deviennent experts en une voie, mais ils voient rouge devant un expert d'une autre voie, qui mène au même sanctuaire. C'est que se débarrasser de l'idée de réussir est quelque chose de très difficile, alors, le réflexe, c'est de balancer à la figure de l'autre sa propre carte sacrée, bien certifiée conforme, comme pour s'appuyer sur le chemin parcouru pour aborder endormi le parcours qu'il reste à faire, rassuré par la possession de la carte au trésor.

Non, c'est inutile de condamner la voie des autres: elle ne rend pas la sienne meilleure. Cette réaction révèle la plupart du temps que ceux qui se livrent à ce genre d'exercice sont justement profondément concernés par les voies qu'ils attaquent, puisqu'ils se donnent la peine de les critiquer avec véhémence, au lieu de se contenter de suivre la leur. Ils doivent être attirés sans doute, aussi leur faut-il accuser, condamner, rejeter cet itinéraire qui ne leur demande rien... Quel est l'intérêt de nier la route du Gange, pendant qu'on marche sur celle de St-Jacques de Compostelle?

P. S: il y a toutes sortes de dissensions entre les enfants de la Terre, qui se fraient un passage vers le cosmos de lumière, et, parfois, une estime réciproque se noue, quand chacun sent que l'autre le laisse libre, et suit vraiment sa propre voie. Les êtres vrais qui se croisent défendent leur propre itinéraire, mais se dispensent de condamner le chemin du prochain, et c'est en cela qu'ils sont libres: ils respectent la liberté du voyageur qu'ils croisent, car ils sont eux-mêmes comblés par la leur.































Lettre du 21 Février 2008

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Finalement, le cas Satprem ne me tracasse plus. Cela vient sans doute de ce regain de confiance depuis le 2 janvier, grâce au sentiment dans le corps d'une jeunesse revenue.

Je perçois les choses dans une grande clarté, une légèreté extrême, et avec une sorte de profondeur inhabituelle. J'en profite.

Tout d'abord je n'ai pas à décréter le politiquement correct dans l'aventure supramentale, et je veux qu'il soit bien entendu que mes «réserves» sur Satprem proviennent seulement du fait que je suis convaincu que le scribe de Mère n'a pas eu le temps de devenir parfait. En second lieu, grâce à une lecture accidentelle, mais opportune, je me suis à nouveau frotté à la question de la poésie, des défricheurs, et des explorateurs de l'esprit. Et j'ai donc tout bonnement vu mon intelligence se régaler à créer la catégorie des «inclassables»... Oui, certains se sont si éloignés de la perception ordinaire de la réalité qu'il serait absolument présomptueux de les localiser. Je respecte leur mystère, renonce à les enfermer où que ce soit, leur énigme me comble plus qu'elle ne me dérange, car je vois ces âmes d'explorateurs comme des feux scintillants dans les mémoires des cultures qui les rejettent ou les encensent.

Ces précurseurs admirables brisent les moules psychologiques de leur génération, de leur culture, de leur race parfois, et leur piste ne peut pas plus être décrite que suivie. Nul ne sait exactement où ils se sont rendus, et ce serait se risquer à inventer de beaux mensonges de vouloir trop en dire sur leur compte. C'est le cas de Rimbaud, d'Artaud, de Daumal, de Michaux enfin, qu'on récupère ou qu'on évite, qu'on étiquette ou qu'on oublie, puisque leur itinéraire demeure impénétrable pour qui ne s'est pas heurté, de plein fouet, au manque de l'être. Ils ont tâtonné, franchi des barrières illicites, ils ont brûlé leur vie, dans une passion pour l'être qui se dérobe, passion qui s'arc-boute sur un jugement amer concernant l'existence, en tout cas le monde humain. Ils se sont voulus des démiurges de l'inaccessible, ont chanté l'expérience pure, celle qui s'écarte des représentations toutes faites ou des discours des petits nains intérieurs que la société nous demande d'écouter. Même si l'on suppose, à juste titre, que Satprem a poussé bien plus loin l'expérience de la nudité intérieure que ces poètes de l'indicible, il partage avec eux une difficulté commune, celle d'accepter le monde tel qu'il est, il partage avec eux cette volonté de forer toujours plus loin, au-delà du déjà vu, du déjà connu, au-delà du certifié conforme, pour atteindre une nouvelle perception des choses, et en premier lieu de soi-même. C'est Rimbaud qui dit je est un autre, Michaux qui se dissèque en moi révolus qui cherchent à persister tandis que celui du moment cherche a s'imposer, ou qui se diffracte en trois personnages différents, c'est Artaud qui doute du langage, jusqu'à préférer des civilisations sans écriture, c'est Daumal et Crevel, harassés par l'imposture sociale et la religion du fric qui vient définitivement d'abolir le spirituel dans la culture européenne, qui y laissent leur peau.

Je les comprends d'autant mieux que pendant l'année de ma Khâgne, j'ai failli sauter du septième étage pour en finir avec ces simagrées, puis, tout près du but, je me suis rendu compte que je ne pouvais pas me prendre assez au sérieux pour supprimer ma propre vie. Mes inclassables vivent dans mon coeur, et je ne cherche pas à leur arracher le moindre secret. J'ai eu pour ma part la chance de basculer, après cette période critique, vers un amour inconditionnel et indistinct de toutes choses, que je possédais d'ailleurs l'année précédente. Mais je suis passé par là. Alors, oui, je mets Satprem dans la même catégorie d'inclassables, ceux auxquels je ne peux pas toucher sans risquer l'erreur de jugement vaniteux, ou de l'approximation vague. Ceux dont la vie échappe à toute représentation logique, car ils sont tellement allés au bout du monde d'eux-mêmes, que les termes d'échec et de réussite n'ont plus aucun sens dans leur parcours pur. Plus aucun. Aucun indice ne prouve que la folie d'Artaud n'ait pas été salutaire à son âme, en dépit des apparences, car nul ne peut imaginer un itinéraire qui aurait été meilleur ou pire pour lui.

Respect s'il vous plaît, vis-à-vis des cathares qui nous énervent, respect pour leur engagement qui les brûle jusqu'à l'excès, avec une force centrifuge qui les marginalise, respect pour leur refus radical de toute médiocrité et de toute perversité, respect pour percer les murs contre lesquels les sans foi ni loi se heurtent, jusqu'à les admettre, les légitimer, pour finir par leur dresser des autels. Mes inclassables avaient compris que le mental transforme les prisons en dieux, pour tourner en rond la conscience tranquille, et ils ont pris le mors aux dents. Que dire de plus?

Qu'ils brillent comme des étoiles qui n'ont pas encore été nommées, et qui se cachent peut-être derrière d'autres, plus proches et plus aveuglantes. Grâce soit rendue aux explorateurs du Verbe, que les jugements salissent, que les hommages souillent, que les admirations récupèrent. Ils continueront de faire leur boulot, à notre nez et à notre barbe, le sale boulot de spéléologue, qu'on méprise au nom du divin alpinisme, de l'air pur des cimes, de la supériorité des ascensions.

Rendez-vous au sommet de l'Himalaya le 14 juillet, les gars, et n'oubliez ni le champagne ni l'appareil pour la photo-souvenir !

Merci Satprem, quand j'étouffais l'hiver 77, au fond du néant, sortait ton «matérialisme divin». Je m'y suis accroché, figure-toi, c'était une boussole dans ma nuit. Rien n'empêche, le travail continue.































Lettre du 19 Février 2008

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Hello, la décision a été difficile, j'ai failli tirer à pile ou face, et puis, non, j'ai profité d'une grande forme physique pour me lancer, éviter tant faire se peut de laisser se détériorer une situation. Alors je me mouille, et comme j'adore nager, j'assume tous les risques. J'ajoute mon grain de sel sur Satprem, après avoir été abasourdi quelques mois par le témoignage de Luc Venet. J'ai réfléchi, passé en revue mon passé, pesé mes responsabilités en tant qu'être convaincu d'être en contact avec le Supramental, tout ça à seule fin d'ouvrir des pistes, pusique je ne suis pas capable d'en fermer, me considérant comme le thuriféréaire suprême de la liberté individuelle. C'est elle qui peut mener à une soumission consentie, qui collabore mieux avec le Divin que les soumissions de surface, obligatoires, au nom du devoir, du dharma, etc... Et qui font machine arrière aux premiers obstacles conséquents. Voilà, c'est fait, j'ai touché à Satprem, c'est un crime de lèse-majesté pour certains, l'expression de ma liberté pour d'autres. Il y aura donc toujours deux camps, celui des hommes libres qui disent ce qu'ils pensent, et celui des esclaves qui décrètent les tabous et les interdits, et censurent, avant de torturer.

Les uns comme les autres croient bien faire, ce qui génère conflits, dissensions, et parfois luttes. C'est néanmoins la stratégie du Divin qui autorise chaque être à défendre ses valeurs, quitte à ce que la guerre des valeurs soit une croisade éternelle, qui ne mène à rien. Voilà pourquoi de grands bouleversements sur terre permettraient de réunifier les valeurs essentielles, de s'unir contre les vrais problèmes, et d'en finir avec la complaisance des chercheurs en pantoufles, qui peuvent perdre leur temps sur le web à défendre des sous-alinéas, comme s'il s'agissait du cœur de la vision, ou de l'âme du paradigme. Le temps gaspillé en commentaires et polémiques, constitue un travers français, hérité de la naissance même, contre lequel tous les chercheurs ne font pas front. L'acharnement avec lequel des êtres qui ne sont même pas vraiment «éclairés» défendent leurs positions, possède quelque chose de maladif, de pathologique, puisque ce que nous pensons n'a aucune importance, il s'agit d'être, et le temps perdu en justifications personnelles est récupéré par le Mensonge, comme dirait Satprem. Si la sincérité était vraiment là, on trouverait mieux à faire que s'envoyer à la figure des projections, comme de la bave de crapaud.

Alors, il fallait quand même appuyer autant ma défense de Satprem que mes réserves «techniques» à son égard, ce qui a nécessité d'etoffer le contenu, et m'a obligé à dévoiler une partie de mon histoire personnelle. Et comme cela est quand même assez sérieux, et que j'idolâtre l'équilibre, j'ai pour compensé écrit un dictionnaire qui prête à rire, et qui j'espère, me discrèditera auprès de ceux qui manquent de perspicacité, et dont je redoute qu'ils utilisent ma vision des choses à des fins délétères. Autant s'en débarrasser tout de suite. Je ne crois pas qu'on puisse rire de tout avec les juifs, on trouve des forces obscures dans la dérision, du racisme dans l'humour, de la traîtrise dans certaines formes d'ironie, alors mon dictionnaire de la langue de soie prétend avant tout distraire, aérer, en aucun cas mépriser les victimes de Narcisse qui l'emploient couramment. C'est comme ce fameux charabia qui consiste à défouler sa colère sur des objets différents de ceux qui la suscitent, afin de leur épargner toute violence d'une part, et d'en finir avec le ressentiment à leur encontre d'autre part. Eh bien, nous rirons ensemble des egos demesurés, et parfois même du nôtre, puisque charité bien ordonnée commence par soi-même. Cela, ce sera pour la prochaine mise à jour, le dico de la branchitude cosmique ne peut pas être baclé, il nous permettra de rire de nos adversaires, ce qui souvent vaut mieux que n'importe quelle arme, puisque ils ne sont pas tous si méchants...

Le soutien appuyé de quelques-uns me pousse aussi à rapprocher les mises à jour, peut-être tous les deux mois environ, pour y inclure des textes neufs autant que des écrits toujours en panne d'éditeur, journal, roman, et un nouvel essai que le Divin vient de me commander...

Sinon, je n'ai pas l'intention de me noyer dans un verre d'eau, et je ne compte pas m'éterniser sur l'éloge de Satprem ou fournir des précisions à n'en plus finir sur l'interprétation de son expérience, puisque je ne l'ai pas connu, et pourrais facilement me tromper en décortiquant ses écrits. Nous ne sommes pas à une époque où nous pouvons refaire le match, sous prétexte d'améliorer la prochaine rencontre. Il est question d'élaguer, et de ne pas prendre prétexte de désaccords subjectifs sur des sous-alinéas pour décimer les rangs. Etre tourné vers le supramental, voilà une attitude profonde, qui ne nécessite pas de savoir comparer Mère, Satprem, Sri Aurobindo.

Tant mieux si chez chacun, on trouve des pépites, tant mieux si l'on reçoit de l'un ou de l'autre de quoi avancer. Tant pis si l'on reste sur le bord de la route, car on aura cru bon de s'inféoder à un mythe, au lieu de prendre le risque d'être soi.































Lettre du 11 Décembre 2007

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«Question de vocabulaire»

Il y a deux manières d'utiliser le mot supramental:

La première constitue une référence directe à Sri Aurobindo qui a attribué ce nom à l'énergie divine originelle, la shakti de la Conscience suprême. Ce terme est pratique dans ce contexte parce qu'il permet de regrouper les quatre aspects de la Mère divine et parce qu'il contient aussi la conscience qui accompagne nécessairement ce type d'énergie. Il s'agit finalement d'un terme très technique, qui, sorti de son contexte, ne veut plus dire grand chose. La seconde manière d'utiliser le mot supramental est entièrement fallacieuse. Elle consiste à prendre le terme mental dont chacun sait qu'il caractérise l'esprit qui «pense», et de supposer qu'au-dessus de lui quelque chose existe, et que c'est là que nous devons nous rendre. Dans ce contexte, le terme supramental n'est rien d'autre qu'une catégorie intellectuelle vide de sens, mais tout-à-fait propre à jeter la confusion chez des esprits innocents qui s'imagineront qu'un monde merveilleux est à leur disposition, pour peu qu'ils traversent vers le haut le monde de la pensée. Je souhaiterais pour ma part que ceux qui veulent employer ce mot hors du contexte aurobindien l'écrivent avec un trait d'union entre supra et mental, de manière à ce qu'ils puissent continuer d'évoquer l'ensemble des plans qu'ils supposent au dessus du mental, tout en renonçant à s'approprier à si bon marché la shakti divine. Rien n'est plus facile que jouer sur les mots, et le propre justement d'une conscience qui se développe vraiment, c'est de traverser immédiatement le signifiant pour goûter la saveur du signifié. Personnellement je suis même prêt à abandonner le terme supramental s'il se galvaudait à toute vitesse, et je continuerais pour autant à être transformé par la mère des mondes.

La manifestation ne serait plus ce qu'elle est, si elle n'autorisait pas les tricheurs et les contrefacteurs à créer des illusions nouvelles dans un monde perclus d'illusions anciennes et démodées. Tant que l'espèce humaine continuera d'être fascinée par le mental, elle aimera remplacer la réalité elle-même par les mots qui la désignent, afin de pouvoir s'enivrer à bon marché, comme quelqu'un qui trouverait le vin meilleur parce qu'il aura changé l'étiquette de la bouteille. Le «supramental» peut devenir un nouveau miroir aux alouettes, et cela est tout à fait conforme à notre histoire. Des centaines de sectes chrétiennes se sont créées en récupérant le mot amour auquel Jésus donnait un certain sens pour en faire tout autre chose, et cela a très bien marché. Il serait donc naturel que le terme supramental tombant peu à peu dans le langage commun devienne le porte-flambeau de toutes sortes de mouvements qui n'auraient rien à voir ni avec son origine ni avec sa finalité. Bienvenue aux escrocs qui forcent tout un chacun à devenir un expert en discernement, et nous obligent à une vigilance suprême: ils mettent à l'épreuve notre aspiration, ils maquillent la voie de signes trompeurs pour que chacun devienne véritablement responsable de ses propres pas, de ses propres erreurs, de ses propres découvertes.































Lettre du 15 Août 2007

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aux internautes inconnus

«appelons un chat un chat»

Vous avez tous la chance d'avoir compris la suprématie de la vision aurobindienne, mais cette chance peut être encore gaspillée pour différentes raisons. Et je reviens là-dessus, à cause d'un inventaire qui me semble assez pauvre de la manifestation supramentale, depuis qu'elle est possible, c'est-à-dire depuis quarante ans. En premier lieu, un nombre considérable de forces s'opposent à l'apparition du supramental, et il n'est donc pas absurde de supposer que les chercheurs qui manquent de vigilance puissent recevoir des contrefaçons du supramental, dans la mesure où ils se tendent vers lui avec des mouvements impurs, egoïstes, narcissiques, ou même désespérés, comme si le supramental était une solution à tous les maux, et qu'il faille en forcer la manifestation par un entêtement obsessionnel à le débusquer.

Il est donc tout-à-fait naturel pour moi d'évoquer la difficulté de contacter le supramental, et de travailler avec lui, puisque cette aventure dure maintenant depuis trente ans, ce qui m'a demandé un coefficient d'adaptation extraordinaire, pour ne pas abandonner, pour ne pas «péter les plombs», et comme je souhaite que l'expérience se propage, je me considère par la force des choses comme un premier de cordée, qui a le droit de donner son opinion sur une ascension que d'autres veulent tenter. Et comme tout me prouve que j'ai en partie «réussi», (pour le moment), il m'est naturel d'aborder les conditions à remplir pour réussir cette ascension. En mon âme et conscience, et au risque de faire de petites erreurs d'appréciation, j'ai le droit de décréter que certains surplombs sont infranchissables, et qu'il vaut mieux prendre un chemin plus long, mais plus sûr, que de tomber dans le vide parce qu'on s'imagine pouvoir marcher au plafond. Et tout m'indique que beaucoup de «chercheurs» n'ont pas compris le paradigme aurobindien. Ils se sont emparés de cette vision avec leur imaginaire, leurs frustrations, leur manque-à-gagner existentiel, avec leur ideal et leur foi également, donc avec leur coeur, avec bien sûr quelques beaux raisonnements sur la complémentarité de l'Esprit et de la Matière, mais cela risque dêtre insuffisant pour prétendre au yoga le plus élevé de tous et, partant, le plus difficile.

Je mets donc les points sur les i, non pas pour décourager qui que ce soit, mais pour rappeler le paradigme extraordinaire du supramental, qui en garantit à la fois la transcendance absolue et la difficulté extrême, car ayant été moi-meme «recruté» par le Divin, si je me retourne en arrière et contemple ces trente ans de labeur, j'avoue avoir rencontré des obstacles quasi-infranchissables....Alors quand je vois des «chercheurs» qui n'ont pas une conscience directe du supramental jouer à prédire ce qu'est la transformation, je ne peux que les plaindre pour leur naïveté, ou au contraire leur arrogance, mais dans l'un et l'autre cas, il y a un réel manque déquilibre....

Il est éprouvant pour moi de voir chaque jour se cristalliser davantage un mythe du supramental, qui propulse les adeptes dans des univers théoriquement vrais et parfaits, mais sans aucune consistance pratique, et ils vivent donc en créant eux-mêmes des «écrans de fumée».

Beaucoup de personnes entichées du supramental me font penser à des néophytes qui voudraient commencer à plonger, mais en débutant par un baptême au «nitrox», un mélange de gaz pour respirer sans danger à plus de soixante-dix mètres de profondeur, où ils voudraient se rendre d'un seul coup d'un seul. Ils ne trouveront aucun club qui leur fasse brûler les étapes, et la première plongée se passe toujours près de la surface.

La différence c'est que le monde spirituel n'est pas balisé, sauf par quelques gourous dont peu sont recommandables, ce qui fait que chaque «chercheur» se croit autorisé à s'approcher du supramental avec une telle dose de subjectivité que la chance qu'il se présente est pratiquement réduite à néant.

Aussi, libre à vous bien sûr de me rejeter sous différents prétextes car je ne vais pas assez dans le sens du vent, je vais asséner quelques vérités qui permettront à certains de rectifier le tir, et à d'autres de me contourner et de s'enfoncer plus profond dans leurs illusions. C'est le jeu de l'intervention, car rien n'est neutre, je vais donc aider une minorité au risque de «déplaire» à une majorité, c'est un risque que je prends car je ne cherche pas à être «reconnu» par les différents mouvements de la bien-pensance (déjà installée) aurobindienne, et être réfuté par des mythomanes est pour moi un honneur. Donc, accrochez vos ceintures, et envoyez-moi au diable, puisque je ne vous brosse pas dans le sens du poil.

En premier lieu, le terme supramental ne veut strictement rien dire s'il n'est pas associé au Divin, comme on ne peut pas caractériser l'homme sans évoquer la femme, ou penser yin sans l'arrière-plan du yang: toute évocation du supramental qui ne sous-entend pas le Divin, en tant que Conscience suprême, est un pur contre-sens. Le supramental n'est rien d'autre qu'une modulation, qui nous apparaît sous forme d'énergie centrifuge et ultramicroscopique, énergie qui répond à des critères quantiques, mais il n'existe pas par lui-même, le supramental. Il est tout simplement un champ d'ondes dans le temps et l'espace qui dépend exclusivement et entièrement de la Conscience Suprême éternelle, le Purushottama et Satchitananda.

Le supramental c'est donc la musique produite par la fréquence, et la Conscience Suprême c'est l'instrument. S'attacher au son produit en oubliant sa source est une ânerie pure et simple.

Donc, revoir les yogas qui ont préexisté à l'avènement aléatoire du supramental, car ce n'est pour le moment qu'une hypothèse, vu le peu d'empressement de l'humanité à reconnaître RÉELLEMENT le Divin (même parmi les zorrobindiens), le Divin proprement dit, que beaucoup s'amusent à faire commencer plus bas, sous prétexte, et cela est vrai, que d'autres forces participent à l'ascension de la Terre.

La prakrtiti sans le purusha, tout le monde le sait, c'est l'horreur. C'est l'énergie qui se pousse en avant, tandis que la conscience-témoin n'émerge pas, c'est la main-mise de la nature, c'est-à-dire des guna, sur un moi qui ne fait que traverser l'existence sans prendre conscience ni du soi, ni de l'être psychique.

Pas grave, certes, mais ce type d'individus est quand même nuisible par ignorance, manipulé par le rajas dans la colère et la violence, par le tamas dans la lâcheté et l'indolence, par le sattva dans l'intégrisme, chez tous les redresseurs de tort passés, présents et à venir.

Le supramental-énergie, sans la Conscience dont il n'est que l'instrument, ça n'existe pas, ou pire, en y mettant du sien, on risque de mal l'utiliser en s'attachant à son caractère énergétique, tout en oubliant ou presque son caractère conscience, car telle est la difficulté, le supramental est si actif, si opératif sur le plan physique, sur le plan de la perception, qu'il faut contrebalancer le mouvement par des efforts vers le haut, sinon on perd facilement le Soi, on perd le Divin du dessus, et ce qui reste d'ego se débat avec l'action supramentale dans le physique, incontrôlable, souveraine, d'une rapidité fulgurante. Intégrer l'énergie supramentale est donc particulièrement difficile car elle veut agir dans la matière pure du corps, qui doit être abandonné à son état naturel. La conscience supramentale proprement dite est donc nécessairement transmutée en énergie, car pour le moment les deux simultanément sont incompatibles, le corps n'y résisterait pas. Sri Aurobindo s'est retiré en 1926 pour trouver la voie qui permettrait de ne pas récidiver le scénario des rishis: trouver un supramental qui anime l'esprit, sans rien transformer. Nul ne sait ce qu'il a fait, mais il a réussi, et j'en suis la preuve vivante. Toucher désormais les plus hauts plans accessibles à la conscience humaine (Stachintananda et Purushottama) entraîne automatiquement une conversion de la conscience en énergie. La lumière, l'omniscience se retirent progressivement, les anciens pouvoirs se perdent pendant des mois consécutifs, l'on devient un mort-vivant, mais au fond de cette plongée au bas de l'enfer, il existe la possibilité d'incrémenter l'énergie supramentale dans le corps physique, et c'est elle qui veut produire un nouveau type de conscience, différent du merveilleux supramental des rishis vécu dans un corps ordinaire.

Le problème n'est donc pas d'atteindre le supramental, mais simplement et exclusivement de devenir conscient.

Sur le plan supra-cosmique, avant la fragmentation de l'univers, on peut très bien supposer une unité imprescriptible où la Conscience Suprême et l'énergie suprême se confondent, c'est quantiquement possible, mais dans la Manifestation, il y a deux choses, et d'ailleurs il n'y a que deux choses, comme le dit sri Aurobindo dans Savitri, Elle et lui. Elle, c'est l'action divine originelle, la Mère des mondes, l'immense Mère divine, avec les quatre énergies supramentales qu'elle délègue, Lui, c'est l'inexprimable «conscience de Soi», le Seigneur, qui se répartit dans les existences et s'y perd.

Ceci dit, si on a envie de cesser de tricher, c'est possible.

On sait que notre «âme» contient au fond d'elle-même la présence «involuée» du Seigneur, et on prend moins au sérieux les tableaux qu'on veut se faire de la prochaine ère supramentale qu'on convoite, car c'est le nec plus ultra, évidemment............Et au lieu d'attendre je ne sais quoi de la manifestation EXTÉRIEURE du supramental, révisée cellules propres, on fait le travail, comme les yogis l'ont toujours fait, vers le dedans. On se rend compte alors qu'inventer les caractéristiques de la transformation supramentale, par pure complaisance, loin de l'attirer, la fait fuir, un peu comme regarder un film pornographique dispense d'aimer la femme qu'on aime. (Appelons un chat un chat, imaginer le supramental est tout simplement obscène. Comme son nom l'indique, il est au-delà, au-delà même du soi, déjà difficile à représenter, et au-delà du surmental, qui lui est aussi intraduisible, alors, excusez-moi du peu, mais les délires sur la transformation physique non seulement n'apportent rien (sauf témoignages directs) mais encombrent la voie de filandreuses projections nacrées et irisées, qui ne soutiennent absolument pas l'effort du chercheur, mais l'enrobent dans un cocon fluide et éthéré, une prison sur mesure pour idéalistes de luxe.

Le but du supramental n'est pas la transformation physique du corps, mais la connaissance-identité du Divin par Lui-Même à travers une âme et un être incarné qui se donne au jeu suprême, sans avoir la prétention de savoir où cela mène, puisque des états nouveaux se présentent, jamais répertoriés. S'il y a des acquis sur le plan matériel et physique, ce seront simplement les CONSÉQUENCES de ce contact plus intime entre l'homme et le Divin, et s'attacher donc au côté le plus superficiel du supramental, comme par exemple un gain extrême de longévité, ou même une suspension du vieillissement, est un pur contre-sens.

Je ne dis pas que le chose est impossible, mais elle découlera de quelque chose de beaucoup plus essentiel, l'établissement d'une autre conscience dans le moi, très difficile à obtenir, puisque le corps possède des galaxies entières de processus naturels limités par les échanges nerveux et hormonaux, ce qui pose le problème d'installer une conscience que le nature n'a pas prévue, dans un corps particulièrement éphémère à l'échelle cosmique. Il n'est donc pas surprenant que Mère n'ait pas obtenu l'immortalité physique, ou que je n'aie pas encore obtenu de résultats spectaculaires sur le plan physique après trente ans. On s'attaque à des milliers de programmations toutes faites, on tombe dessus, et éclairer tout ça, c'est plus un calvaire qu'autre chose, les satisfactions proviennent donc de la conscience, de son contact avec le Divin, parfois des nouvelles sensations corporelles, mais l'énergie dans le corps produit beaucoup de sensations désagréables en contrepartie des gains effectués. Mon corps se transforme, mais il n'est pas «moi», et j'ai beau savoir lier correctement le moi et le non-moi, je refuse de m'identifier exclusivement à cet être humain qui subit, à travers l'énergie supramentale, une transformation physique conséquente, transformation qui est parvenue même jusqu'aux gènes en 2001, (ce qui a failli me tuer entre parenthèses), car mes gènes ont littéralement explosé après trois mois d'hésitation, libérant des informations de terreur et d'énergie nazie (transmises par ma mère qui cachait des juifs en 42). Mon enveloppe charnelle a été soumise à très rude épreuve pendant trois mois, (six médecins consécutifs ont séché sur ce qui m'arrivait) et il m'a fallu un an de convalescence, et cinq autres pour définitivement reprendre le dessus.....

Alors, je ne peux que sourire des grandes dissertations des zorrobindiens qui s'imaginent que changer quatre millions d'années de systèmes intégrés biologiques tient dans quelques phrases sucrées sur les cellules divines, et autres envolées mentales, qui me font penser à des masturbations de puceau. Qui servent surtout à s'imaginer qu'on joue dans la cour des grands, à partager des illusions, parce qu'on s'intéresse au transcendant de chez transcendant.... et oui, désolé les zamis, je décèle une vanité florissante chez de nombreux aurobindiens, une hypnose de l'avenir triomphal, un envoûtement du mental holistique (on a compris que tout se tient, ok, il n'y a pas de quoi en faire tout un fromage), et finalement l'établissement d'une bonne conscience et d'une bien-pensance contraire aux règles du Yoga.

Alors ne rêvez plus d'un corps immortel, ou d'un eden doré. Seul le présent est le levier de tout le reste, dispersez vos propres écrans de fumée, s'il vous plaît.....sinon on fera avec le paradigme supramental ce qu'on a fait avec Bouddha, Jésus, Lao-Tseu, du mensonge certifié conforme.

Commencez par comprendre les anciens yogas, la difficulté déjà d'atteindre le Soi (des gens sérieux n'y parviennent pas, qui ne se permettraient pas de gloser sur l'homme transmuté), l'immense défi que cela représente de ne plus être manipulé par les guna, de trouver et d'obéir à l'être psychique. Oui, ça ne sert à rien de commencer par la cerise sur le gâteau, cette imagerie déjà bondieusarde d'un corps aux cellules immortelles, alors que le vrai travail est ailleurs: commencer par être, commencer par là, tout simplement, et cesser de se raconter des histoires avec le dernier avatar du spirituellement correct. La transformation physique est une conséquence seulement du contact avec le Divin, le Divin a autre chose à être que poursuivre un but aussi limité. Mais il est vrai qu'une enveloppe charnelle «travaillée» par le supramental correctement, serait le témoignage d'une condition supérieure enfin accessible.

Donc, si vous êtes assez ouverts pour réfléchir sur ce «retour aux sources», relisez une ou deux fois ce texte, je suis certain que je vous permettrai de moins «fantasmer» votre voie, et toute la Terre y gagnera...., et si je ne vous apprends rien, bienvenue au club des lucides.































Lettre du 22 Avril 2007

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       C'est parce que vivre le supramental est à la fois un défi majeur et une nécessité absolue dans l'avenir que je signe des ouvrages fidèles à une expérience diffcile. S'il m'avait été facile de supporter cette force inconnue, j'aurais sans doute tracé un itinéraire en concluant, «maintenant réjouissez-vous, vous allez peut-être décrocher la lune». Mais il s'avère que ces trente ans d'expériences m'ont appris à passer de l'extase à l'enfer, dans la même journée, des centaines de fois, et que j'écris donc dans une seule optique, faire comprendre les difficultés de la chose, pour aider ceux qui suivront, qu'ils n'abandonnent pas quand tout semble perdu, car c'est là que ça commence.

Pour le moment, c'est un guerrier qui parle, qui, sans être désabusé, décrit le front pour ceux qui prétendent vouloir s'y rendre, en bons petits soldats de la lumière. Peut-être croyaient-ils que c'était un front imaginaire, et que le Divin leur distribuerait des satisfactions énormes en échange de leur engagement. Peut-être pensaient-ils que le supramental n'était qu'un soi amélioré, avec félicité perpétuelle garantie sur facture, vite poussons la porte et ronronnons à tout jamais. Que nenni. Ceux qui ne le connaissent pas en parlent avec des effets de manche mirobolants, l'œil gourmand, mais le très petit nombre qui en fait l'expérience directe présente la chose autrement: difficult de chez difficult. Il est donc prévisible que les lâches rejettent les vrais témoignages pour s'en tenir à des paroles fleuries, d'imposteurs, de fabulateurs ou d'exaltés, de truqueurs qui nomment «supramental» ce qui leur passe par la tête, ça ne mange pas de pain et cela leur permettra de tourner en rond, ou en cage, dans leurs rêves dorés, tandis que les autres, que je me permets de choisir avec mes livres dénués de toute complaisance, s'engagent à comprendre les premiers témoins, avec humilité, circonspection, et détachement. Comme le disait si bien Mère, «ils ne veulent pas d'un Dieu qu'ils ne peuvent pas berner».

Je veux qu'il soit bien entendu que je ne réglemente en rien l'accès au soi ou au supramental, et que je livre des textes issus de ma seule expérience. C'est le Divin qui possède les vrais critères et non moi-même. Mais il est peu probable que je sois arrivé par hasard à l'illumination en 74, et par hasard au supramental en 77. Il m'appartient donc de témoigner, de m'exprimer, d'avancer quelques certitudes tout de même, au risque de généraliser, sur tous les thèmes qui ont été au centre de mon existence.

1/ «La racine de l'éveil» constitue un hommage fervent au soi impersonnel, qui, par son détachement, permettra aux évoluteurs de supporter le supramental physique. Il est vraisemblable que cette réalisation demeure pérenne, même pendant le règne supramental, puisqu'elle rend infiniement passif et prépare donc l'instrument à recevoir, sans le filtre des attachements ni de la volonté personnelle. C'est, pour ma part, une erreur de chercher un raccourci supramental, en sautant à pieds joints au-dessus de la spiritualité classique et authentique, comme si le Divin faisait table rase. Ce n'est pas cela du tout. Le supramental dépasse tout, mais ne dément rien de la spiritualité pérenne. Le soi trouve une autre place, sans rien perdre de ses qualités. Il faudra donc le trouver, après ou avant le contact supramental, pour rester homogène.

2/ «Guérir par l'éveil» est un ouvrage essentiel pour comprendre la résistance du subconscient, à la quête et au supramental, et je l'ai écrit à la fin d'une longue convalescence, il n'est peut-être pas très «chargé» de joie, mais annoncer qu'il faut «descendre au charbon» fait partie de mes prérogatives, car c'est tout simplement la vérité nue de l'expérience spirituelle, et l'adversaire est nommé. Ce qui peut l'affaiblir.

3/ La «méditation quantique» est pour moi un petit bijou ciselé, que j'offre à l'intelligence suprême, que j'ai toujours aimée avec passion, et bien que je doute que les techniques puissent avoir des résultats tangibles dans l'ordre spirituel, elles en ont d'immenses dans le domaine psychologique. Un investissement libre, gratuit, désintéréssé dans la pratique évoquée peut être une source d'éclaircissement intérieur. Comme l'œuf de Colomb, il fallait y penser, à ce diagramme absolu, mais je précise un point important, la méditation quantique se pratique dans la désinvoture, même en cas d'urgence. Je déconseille fortement de «tirer la force» en ce moment, surtout dans le mystère 2, car de «drôles» d'entités, jeunes gens, n'attendent que ça pour s'incruster sur votre cervelet. Attention, ne mélangeons pas tout, la méditation quantique est un outil, fourni avec mode d'emploi, mais il est facile de s'imaginer que c'est plus ou moins que ce que c'est réellement, et, une fois de plus, vous serez renvoyé à vos attentes grasses, à votre attachement au fruit des œuvres, si vous voulez «l'exploiter» d'une manière pragmatique. Ce n'est pas du développement personnel.

Le supramental se manifeste de lui-même, il entre sans frapper, et n'entend pas les coups de sonnette, ne forcez pas. Désinvolture, désinvolture, et désinvolture, mais de la vraie, sérieuse et sans coquetterie, un avant-goût, donc, du détachement.

C'est un complément aux rencontres sur ce thème, la méditation, expérimentée plusieurs fois sur trois ans, et j'admets que cela fonctionne d'une manière différente pour chacun, très différente, puisque, justement, le diagramme originel très simple contient tous les possibles, et donc, tous les cas particuliers.. C'est une mine inépuisable de petites prises de conscience. C'est un feng shui pour aider le cerveau à faire son boulot, le pauvre, depuis qu'il se coltine le mental en plus du reste, il est débordé....

4/ «Eveil et philosophie» est un pied-de-nez sans méchanceté aux «acharnés» du mental, qu'ils souffrent donc davantage les bougres de s'imaginer mettre le monde en «représentations», ou bien qu'ils en profitent pour lâcher, dans l'aveu qu'ils peuvent «laisser faire» cette intelligence dont ils s'emparent vainement avec les prétentions de leur petit moi à refaire le monde avec des jugements. J'aime les intellectuels, qu'ils ne m'en veuillent donc point de m'exprimer sur le mental et son emploi. Chacun peut dire ce qu'il veut là-dessus - le rôle de la pensée, c'est la règle du jeu, le mental qui se mord la queue dans la diversité des opinions, les contradictions de ses affirmations, l'arbitraire de ses présupposés. Alors pourquoi pas moi? J'ai adoré penser, avant de voir que cela ne menait nulle part. Et j'avais envie de me soulager, Sartre m'a fait pleurer une heure à grands sanglots quand j'avais dix-neuf ans, sous l'effet d'un excellent haschich «rimbaldien», et Nietzsche m'a envoyé à l'infirmerie à la fin d'une dissertation quand j'étais interne à Nice en Hypokhâgne, je me suis même cru fou pendant quleques heures. L'empathie, c'est plutôt mon fort. Alors quand j'ai lu Yankélévitch à Mayotte, en l'an 2000, j'ai été si touché de voir qu'il y avait encore des «mecs» bons et intelligents qui pratiquaient la philosophie, que j'ai profité des retombées d'un contact avec la Mère divine pour rédiger à la main, à la va vite, ce petit texte, avec un interlocuteur factice, comme faisait tonton Platon, parce que ça permet de déblayer plus vite le terrain d'avoir un contradicteur en face.

Enfin, grâce au web, puisque les éditeurs refusent Natarajan, qui c'est celui-là, je suis convaincu que le titre «les principes de la Manifestation» aboutira là où il peut être utile, et laissera la trace et le parfum du supramental chez toutes sortes de personnes, même peu nombreuses, qu'importe, chez quelques enfants indigo bientôt, chez quelques-uns qui ont besoin de cette confirmation que l'intuition ouvre des espaces infinis, et que l'univers repose sur un ordre qui se dévoile de lui-même, pour qui sait y être attentif. J'ai commencé à écrire cet ouvrage en 1991, à la main, par petites touches, à Sri Lanka, un matin où j'avais l'impression que mon esprit commençait à travailler différemment, naturellement, en voyant tous les aspects des choses sans effort. Puis le livre s'est bâti à différentes reprises, avec parfois deux ou trois ans de jachère, et je l'ai entièrement remanié tout l'été 1999, pour le corriger finalement en février 2007.

J'aime la simplicité, mais non la simplification. Une réflexion sur le corps humain seulement (sans parler des milliards d'ondes mentales possibles), nous met en présence de la complexité: plus de deux cents os, différents appareils qui regroupent plusieurs organes, d'invraisemblables «circulations», du sang, d'énergies, tout un labyrinthe de représentations symboliques inconscientes étagées dans les trois cerveaux, alors oui, j'ai fait le pari de faire aimer la complexité, dans tous ses univers, à tous ceux qui prétendent déchiffrer le réel......pour coïncider avec lui, avec son principe...

P.S Je ne suis pas un marchand d'aurores, mais un spéléologue de la mémoire de l'évolution, et c'est dans ce sens que s'orienteront mes prochains écrits, pour une part. Le supramental peut dissoudre les concrétions des réactions subconscientes, jusque dans leur principe peut-être, individuel et collectif. Il faut continuer l'expérience et voir si le corps résiste. Et être un peu plus nombreux...Cela vous étonne-t-il vraiment que le «prix» d'un tel projet soit si élevé? Et que j'annonce la couleur? Désolé, nous ne marchandons pas. Nous priver d'illusions, c'est le projet du Divin, pour toute l'humanité, encore faut-il l'accepter, c'est-à-dire préférer les vérités qui dérangent aux mensonges qui rassurent. Et dans tous les domaines, tous sans exception.

Autant dire saboter le mental, et ne conserver que l'intelligence de l'amour.































Lettre du 12 Février 2007

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      L'invitation de la Terre (1991)

       Un soir que je m'inquiétais pour l'avenir de l'homme, la Terre me parla en ces termes: «bien qu'il soit légitime d'espérer l'avenir éclatant, ne cherche pas à lui dérober sa lumière à coups de force, puisque seul l'amour te mène à l'or des eaux célestes, et il chemine dès que tu t'examines sans complaisance, comme une énigme confuse, comme un esprit maladroit qui vagabonde de rêve en illusion et d'amertume en plaisir éphémère. Si ce rayon solide de l'amour ne s'installe pas, aucune chance ne t'est offerte de percer ton œuf qui t'enclot dans le sommeil.

Dégages de ton esprit cette fluide intelligence qui se joue de l'arborescence complexe de tes actions et réactions pour te révéler l'itinéraire sublime qui absorbe tous les courants sans se perdre. Tes déceptions sont encore des injures inutiles adressées au soleil, car tout se rachète dans l'offrande exhaustive. Même tes choix te seront arrachés par d'hostiles puissances, si tu t'imagines que le ciel te doit quelque chose alors que tu ne l'as pas encore reconnu.

Je pourrais t'enseigner longtemps et te montrer le passage du bleu au rouge, du blanc au noir, de l'orange à l'indigo, du vert au violet, du jaune au turquoise, et sans doute tu t'extasierais que chaque chose engendre son contraire comme la nuit enfante le jour, comme le repos fatigué aiguise l'activité. Je pourrais te persuader que ce n'est pas toi qui combines les phrases qui traversent ton esprit, mais un pouvoir incandescent qui te condamne au verbe en t'inféodant à la pente du temps. Là, tes émotions enlacent tes idées, tes sentiments déguisent tes craintes, tes espérances embellissent tes désirs tandis que tu te laisses emporter. Je t'ai vu dire je avec emphase quand tu fêtais quelque succès médiocre, comme si tu avais domestiqué le monde, et puis un peu plus tard je t'ai surpris dans la colère qui te poussait presque à tuer qui tu prétendais aimer.

La mort récupère tes illusions comme un butin précieux, mais saches que l'amour fertilise tes rêves et leur donne le pouvoir de mûrir. Le ciel attend que tu plantes des souhaits merveilleux, et la terre exige que tu les récoltes dans des accomplissements improbables.

Les contraires se combinent dans des lois secrètes qui sont les clefs de ta demeure, l'existence, et de nombreuses portes te révèlent l'itinéraire du guerrier. L'obscurité et la lumière veulent le temps à leur service. C'est l'origine de tous les conflits qui arc-boutent l'avenir sur le passé, avec ce levier du présent dont nul ne peut s'emparer. Si tu refuses l'océan du ciel dont tu ne constitues qu'une vague qui mousse à chaque moment, rien ne rachètera tes multiples souffrances, elles deviendront inutiles et tu seras pour moi comme un poids mort.

Mais chacune de tes victoires rejoint le soleil, et ce que tu gagnes pour toi-même se répand et chante le ciel. Un souffle inconnu t'emmènera aux énigmes inaccessibles. Tu pourras vaincre les masques de Dieu, terrifiants ou charmeurs, qui t'obligeaient à séduire et à craindre la même immensité que tu n'osais regarder en face. Tu verras dans le mécréant un Dieu qui se cherche, aussi maladroit que toi, et plus aucun scandale ne t'abattra, puisque tu pressentiras dans l'immonde le contentieux de l'évolution, sa part maudite, que ton éveil contribue à transformer.

Tu verras dans ta propre souffrance Dieu avouer qu'il s'est perdu en toi pour t'animer et tu renieras les anciennes tortures qu'un démiurge injuste semblait t'infliger. Tu sentiras même que ton plaisir n'est plus une jouissance trouble et électrique, mais un moment de gratitude de la chair offert à la vie.

Rien ne t'appartient, sauf tes illusions dont la mort se repaît. Tes rêves sont les souhaits du soleil que ton cœur dilue, tes buts sont les fragments d'un puzzle qui te dépasse, ton caractère est l'émanation d'un chiffre primordial à la géométrie cachée; ton idéal est l'effluve d'une étoile, et ton jugement un ruissellement d'hypothèses radieuses.

La guerre, c'est combattre pour te découvrir.»

J'avais écouté la terre patiemment, elle m'avait nourri. J'aurais voulu sans doute du repos pour méditer ce que j'avais reçu, mais, au contraire, toutes les vérités nouvelles qui avaient pris corps en moi en appelèrent d'autres. Peut-être fallait-il m'empêcher de revenir en arrière.

L'esprit du feu se manifesta soudain à travers les étoiles que je contemplais, et chanta en contrepoint: «arraches ta conscience à l'inertie du minéral, c'est elle qui fossilise les angles de ton regard. C'est elle qui recherche la torpeur définitive en exigeant des réponses absolues. Comme la pierre évolue vers le métal, ainsi ton sommeil pressent la sérénité quand une timide réflexion s'empare de tes nuits ténébreuses pour aspirer à l'infinitude.

La fleur est encore en toi, dans ces émotions fragiles qui suscitent tes pleurs, dans les songes qui se tournent vers un soleil magnifique, dont les rayons diaprent tes espérances parfois dignes et audacieuses, souvent naïves et puériles. Mais tu paies la persistance de la fleur en toi quand une goutte de trop de chagrin fane le sourire de la vie qui t'anime, et te fait renoncer à l'endurance.

L'animal est encore en toi, stratifié mais vivant, dans ta mémoire génétique. Comment expliquer tes colères sinon par le retour d'une puissance oubliée qui te protège maladroitement... Comment admettre ces lois de la famille auquel tu crois si tu n'avais pas hérité des animaux le sacrifice pour les descendants et l'obsession pour la sécurité? Tout est codé bien plus loin que ton intelligence ne porte, dans des royaumes inaccessibles. Tu peux retrouver le cheval dominant les étendues et décider l'audace du permanent voyage. Tu peux débusquer le rapace et geler tes désirs pour gagner le discernement solitaire qui dénoue la mémoire du clan. Tu peux retrouver l'éléphant et sa mémoire intemporelle pour mesurer le temps à l'empan des siècles. Tu peux rencontrer le loup qui dicte encore en toi la loi tribale et la préservation de la hiérarchie. Le singe est encore derrière tes gestes qui imitent, la vache et l'agneau paissent dans tes rêves qui dissolvent la cruauté, le chien bat encore dans ton cœur, quand tu sacrifies ce que tu appelles la liberté au maître que tu aimes, quel qu'il soit. L'ours en toi veut grappiller du temps sacré sans être dérangé. Les empreintes de ces bêtes se chevauchent à la lisière de ta personnalité.

Il faut parfois que l'aigle vole, quitte à ce que ton regard effraie ceux dont tu t'éloignes et tu verras se succéder au premier plan de ta conscience les vivants modèles de ces créatures dans une féerie qui t'étonnera. Le retour du tigre peut inspirer le crime et celui du renard des ruses parfaites. Le passage du félin foudroie toute sensiblerie, puis fait dériver l'esprit vers trop d'éclat. Quand le chien ressuscite, une tendresse ineffable s'offre à l'amour lointain mais déjà deviné. Le bouc parfois menace, sous le sceptre du grand Pan, pour chanter l'ivresse puissante des sens, tandis que le message de l'oiseau t'entraîne vers des fuites nacrées te sauvant du banal. Laisse passer ces personnages qui reviennent d'un temps que l'histoire a chassé sans pouvoir abolir leur fantôme. Laisse les faire surface à travers toi: ils témoignent de la terre, ceux sont les avatars du temps, comme les dieux sont les avatars de l'immortalité.

Toutes les époques s'enracinent dans l'immédiat moment, et s'affrontent en toi pierres et métaux, plantes et bêtes, anges et démons. Je te délivre de l'envoûtement de l'azur et des sortilèges de l'idéal, seule la guerre transforme. Tout se bâtit dans la destruction du périmé, toute graine engendre un arbre qui mourra desséché. La durée domine la naissance et la mort qu'elle ne distingue point. La naissance tombe sur la rive du devenir comme la mort échoue dans le fleuve sidéral de la Voie lactée. Le moment se ramifie au chaos des genèses initiales aussi bien qu'à l'ordre divin des futurs les plus lointains.

Acceptes la loi: tout est mouvement, toute genèse est funéraire, la naissance et la mort ne font qu'un.»

Cette nouvelle exhortation me montra le labeur à entreprendre avec une telle netteté que ma force m'abandonna. Je fus submergé par une émotion légère et persistante comme si mon cerveau refusait d'absorber autant d'informations nouvelles. Mais le feu reprit son discours, comme pour m'encourager:

«Le moment deviendra un merveilleux vertige si nulle distance ne t'effraie. Rempli d'une immensité à laquelle tu consens, les soleils viendront à ta rencontre. A toi les délices des frontières abattues. A toi les enchantements des nombres fondus en une seule grappe d'étoiles produisant tous les possibles. Le mystère des formes te sera révélé. A toi l'exhaustive complémentarité de tous les contraires, à toi le mariage de l'obscur et du lumineux qui pacifiera ton désir de perfection. A toi les ailes de l'imagination qui t'emporteront jusqu'aux architectes de la création.

L'azur et le noir se mélangent pour l'argent qui chuchote la lune, le rouge du sang et l'ambre du crépuscule mélangent les oranges des réconciliations. Le vert et le jaune tressent indéfiniment le renouvellement des choses, et le gris et le rose subdivisent les élans. L'or attend l'offrande de ton esprit quand tu auras épuisé l'arc-en-ciel des rêves et le tonnerre des passions. Alors les soleils viendront te servir.

Aussi ne te lamente point sur le temps perdu. Les regrets sont les larmes d'un regard qui croupit. Le remords est la chaîne par laquelle tu demeures esclave du passé. Abolis le temps que tu as traversé, laisse remonter les souvenirs des tortures et passe ton chemin. Ne te complais pas dans l'insoutenable évocation. Je peux brûler tes mémoires les plus douloureuses si tu me laisses faire, et que tu m'offres ton aspiration.»

Puis ce fut au tour de l'esprit de l'eau de se manifester, plusieurs jours plus tard, alors que j'étais sans défense, abasourdi, ma mémoire remplie d'échos cosmiques, qui semblaient attendre de moi je ne sais quelle participation.

«Tu peux embrasser d'un seul regard l'arc-en-ciel des sentiments qui se succèdent jusqu'aux sublimes extases te fondant dans le Moi de tous les êtres. Tu peux devenir l'Air et parcourir tous les secrets de l'espace, comprendre tous les symboles, et créer des grammaires de signes où les syntaxes s'enchaînent pour dévoiler l'histoire des hommes. Tu peux laisser sur la Terre les empreintes de tes pas, et les sourires de tes œuvres émerveilleront les générations futures; tu peux construire des temples dans la fibre dorée de l'intelligence à l'abri des ruines que l'Histoire impose aux constructions mortelles.

Et tu pourras même atteindre mon contraire, le feu, lui qui brûle et consume sans jamais se tarir, lui qui était déjà là dans l'atome incandescent tournant sur lui-même si vite que le sens de sa rotation est illusoire. La matière n'est qu'une apparence, comme la durée n'est que la surface d'un miroir immobile.

Ma propre transparence bénit ta fluidité nouvelle.

Creuse sous les masques, le visage apparaît.

Creuse dans le chaos, la finalité jaillit.

Perce le passé, la source du présent révèle les premiers fondements de la mémoire qui fut tienne. Creuse le Présent en détachant toutes les amarres, et la Terre t'entraîne sur l'océan des possibles que le Ciel insondable reflète.

Tu fus formé à colmater les brèches, à dissimuler les fissures de ton œuf existentiel pour vivre dans le béat prolongement du placenta maternel. Tu as fui l'essentiel pour serpenter parmi les événements en les appréhendant à leur hauteur. La culture de ton peuple te confine dans ton œuf en le polissant encore, et elle devient adverse dès quelle s'arroge le droit à la noblesse et à la dignité tout en laissant entendre que ses vérités sont meilleures que celle des philosophies lointaines. Ceux qui te traitent d'apatride et de renégat idolâtrent les masques de Dieu qui les entourent. C'est une bénédiction d'être exclu, cet opprobre décrète ta singulière sainteté fragile.

N'appartenir à rien, telle est la première initiation solaire, celle qui ouvre le chemin quand les certitudes sédentaires cèdent le pas à l'ivresse de l'interrogation vagabonde, mais pour y parvenir, il te faudra t'être lassé des sentiments faciles et des satisfactions mesquines.

On t'a simplement appris, quelquefois, à changer de Maître sans que tu t'affranchisses.

Or, n'appartenir à rien ni à personne, voici la meilleure voie quand seuls le Ciel et la Terre sont complices de tes questions fulgurantes. Tout chemin embrassé sans en être compris exigera des retours en arrière pour ne pas suivre aveuglément les plus beaux itinéraires déjà tracés. Toute piste où il ne suffit pas de glisser ses pas dans les empreintes du prédécesseur, révèle plus d'indices que la trace d'un dieu que plusieurs chasseurs auront déjà truquée pour s'en approprier la découverte.

Je t'exhorte à marcher seul le long de centaines de millions d'années presque identiques, et qui finissent par déboucher sur une pépite d'étoile, l'homme, confronté aux sidéraux espaces et à sa propre genèse immémoriale. Et tout est là, concentré dans le je qui s'empare maladroitement du moment, une puissance imparable forçant le cerveau à anticiper avec la même intensité qu'il se souvient.

Le présent éternel est donc rarement atteint, soit que le maintenant soit seulement le prolongement des rêves de l'œuf, soit qu'il ne représente que le prélude à des fins qui se dérobent, à des ambitions qui engloutissent la fraîcheur du jour dans un projet conforme au cocon du passé. La Terre n'espère point que tes pas soient homologues à ceux de tes prédécesseurs. Elle détruit et innove, perfectionne et invente, et les arborescences de l'esprit où les souhaits se forment sont ses fruits les plus délicats.

Voilà pourquoi certains retrouvent le dessein originel de l'existence dans la plénitude consécutive aux chaînes brisées, alors que les derniers bagages se sont évanouis dans la douceur d'une aurore accouchant de tous les matins, révélant leurs sens éparpillés dans une gerbe d'étoiles intérieures. Une fois l'œuf brisé, l'esprit retrouve son propre mystère dans le vent et la poussière, la fleur qui chante les nombres dans la symétrie de ses pétales, dans l'animal serein, mieux plongé dans le temps exact que l'homme qui se plaint ou espère, désire ou calcule.

Une fois l'œuf brisé, la nature devient une matrice dont on se détache, une mère dont on ne cautionne plus les drames, une patrie dont on ne respecte plus les illusions, tandis que le Soleil annonce de nouveaux décrets: le vœu que toutes les vies humaines s'affranchissent de leurs innombrables tutelles pour trouver l'immensité éclatante de l'esprit libre des désirs et des craintes, et qui apprécie les œuvres de la vie sans se laisser piéger dans ses rets.

Ton esprit voudrait gagner le radieux sans en finir avec l'opaque. Il voudrait gagner le bonheur sans avoir démonté le malheur et ses sortilèges, il veut courir sans apprendre à marcher. Il deviendra insatiable de triomphes s'il mange le temps pour accumuler les victoires. Ton esprit voudrait vaincre la peur sans regarder le danger en face. Il voudrait éviter l'angoisse sans analyser dans quels méandres d'émotions elle sourd pour ruisseler ses cauchemars.

Vois comme le souvenir est une fuite, dés que tu l'appelles pour substituer au moment des images fanées. Vois comme l'anticipation est une fuite, dés qu'elle t'entraîne hors du présent vers d'imaginaires spectacles où tu as le beau rôle. Tu te déplaces aisément dans ce qui n'existe pour personne d'autre, car ni tes rêves ni tes nostalgies ne sont palpables, et tu t'enroules dans ton propre temps jusqu'à perdre de vue la matière et ses exigences perpétuelles.

Tu crois ainsi posséder un vaste espace, et même, tu te vantes de parcourir l'étendue. Mais tes souvenirs sont trop violents pour ne pas teinter le présent de leur propre couleur, et tes espoirs sont trop naïfs pour être conformes au futur. Tu navigues dans les subtils effluves de ce qui fut, mais ce n'est pas là que tu trouveras le parfum d'aujourd'hui. A quoi bon refaire la piste que tu as déjà tracée, ne vois-tu pas qu'elle t'enchaîne au même labyrinthe, à moins que tu n'évoques que les lumières des passages et les symboles des seuils...

Ton esprit sue dans son labeur d'appropriation de tes préférences, et il souffre des choses qui lui résistent, et s'étonne de ne pas pouvoir forcer leur consentement. Tu cherches à attraper ce qu'il y a derrière le mur avant de l'avoir franchi, sous prétexte que, de l'autre côté, les choses seraient meilleures. Tu oublies ta prison en te délectant d'envisager ce que tu feras en t'évadant, mais tu ignores si tu en sortiras jamais, tes désirs ne sont pas des serrures. S'il suffisait de regarder le ciel à travers les barreaux pour que les portes s'ouvrent, je te conseillerais de rêvasser sur ton devenir, mais les lois régissent la périphérie du temps jusqu'à son centre insoupçonné, et si tu ne les découvres pas, tu les subis.

Et cependant, tu as raison d'attendre du nouveau. Il ne viendra pas des circonstances, ne jaillira pas des évènements, mais franchira tes inventaires de jours analogues, tes séries d'habitudes, tes stratifications de préjugés, tes miettes de vérités. Le nouveau piétinera tes musées personnels où sont fichés tes attachements.

Le ciel n'est pas un amoncellement d'étoiles, ni la connaissance une somme de vérités. L'amour n'est pas une addition de sentiments, et la lumière ne s'accumule pas: elle se disperse dans l'étendue pour tout embrasser.

Au fond des jours les plus sordides, tout au bout de leur grisaille, tu franchiras la porte de l'inattendu qui t'éclaboussera de la plénitude d'un chemin sans départ. L'éblouissement te guette, pour que des zéniths à portée de souffle t'emportent par-delà tes emplois du temps impitoyables, jusqu'aux promesses du Soi intérieur qui ensevelit les chimères de ton passé. Il te suffit de devenir guetteur, de scruter le flot de tes pensées qui mêlent les courants de plusieurs torrents en une seule rivière apprivoisée... Ne sais-tu pas que tes désirs mêlent leur substance à tes observations, que tes souhaits proviennent de cascades d'eau pure rencontrant les lacs ténébreux de grottes souterraines nourrissant les racines endormies de la Terre? Ignores-tu que les émotions sont des pluies qui viennent s'amasser dans ton esprit, et qu'elles réparent la sècheresse du cœur ou dévastent et inondent l'âme quand elles sont trop abondantes? Typhons et déluges rôdent autour de ta démarche pour la noyer dans un temps où seuls les chagrins et les démissions se perpétuent, mais l'âme de l'eau est bienveillante si tu acceptes de couler avec elle, et les inondations te sauvent te révélant l'humilité, et la dissolution des jugements.

N'as-tu pas repéré quelques marécages où ta conscience s'enfonce dangereusement, quand tu les évoques, et où pourrissent encore des évènements que tu n'acceptas jamais? N'as-tu jamais rencontré ton fleuve, ton Gange, ton Nil, qui peut ramasser toutes les eaux et couler impassible en fertilisant ta terre sur son passage?

Méfie-toi des écluses artificielles, qui embellissent les doctrines aux systèmes révolus, n'immobilise pas dans les dogmes les papillons des saveurs éternelles. Car la plus belle erreur t'attend: que tu veuilles dompter le temps, le faire tourner en rond dans ta cage mentale, sans qu'il te morde. Apprivoise-le plutôt, offre-lui des moments qui ne seront qu'à lui. Donne-toi à sa vastitude, sans rien réclamer...contemple son âge à l'étalon des étoiles, et prends conscience de l'inanité de tes ambitions. Si tu le laissais vraiment faire, si la rivière de ton esprit acceptait de couler jusqu'à l'Océan éternel en se fondant dans le fleuve unique de la durée, tu serais entraîné vers les mystères de l'existence qui coule largement, tes chagrins passeraient, tes limites se noieraient, emportées par les soleils des jours, et tes épreuves jalonneraient, comme des apnées, cette descente expérimentale dans le flux des époques.

Tes choix seraient complices de la pente de l'eau, tu te laisserais aller vers la sagesse, qui se moque des choses qui ne dépendent pas d'elle, et cueille chaque moment comme un baiser divin. Tu ne résisterais pas à l'absolu. Tes regrets se dissoudraient dans le cours majestueux du fleuve, tes remords seraient bénis par de nouvelles berges, tes accomplissements seraient d'éviter les écueils, en te fondant sur l'observation perpétuelle du lit. Et tu sais bien que regarder le sillage te conduirait à ta perte puisque il te faut barrer sur la crête de l'instant.»

Mais toutes ces belles paroles ne faisaient que souligner le contraste entre ma condition et ce que je devais accomplir. Comment croire au chemin étoilé, quand le monstre affiche sa cruauté, que les guerres s'enchaînent et les génocides rivalisent d'horreur? Pourquoi si peu d'amour dans les offrandes solennelles, pourquoi ces rituels qui veulent prendre la vérité à témoin, pourquoi des liturgies rivales, sources de haine, pour célébrer un Dieu unique?

Assez de stupidité, d'horreurs, mes indignations sont trop nombreuses, mon regard trop perçant pour que je me laisse fléchir par d'improbables révélations. D'autres, avant moi, dans des époques immémoriales, ont cru au pouvoir enchanté des esprits des étoiles, ou à la force de la Terre, et qu'en est-il? Leur verbe a moisi, ils sont devenus des idoles, nul ou presque ne les a suivi. Où l'harmonie, où le dieu vivant en chaque homme? J'admets que la lumière veuille m'embaucher, puisque elle s'appuie sur mon aspiration, mais comment m'imaginer qu'elle puisse me transformer? Je retomberai dans les ornières de mon espèce, des puissances gigantesques attendent mon essor pour me rabattre au sol, je n'ai pas d'ailes, et si j'imite l'ange, qui s'y laissera prendre? Moi, sans doute, le temps de vivre pour des illusions supérieures, des valeurs absolues, interdites de séjour dans la boue endormie de la matière. Puis je verrai mon erreur: une présomption tenace à changer l'ordre du monde, sous prétexte que le Bien est meilleur que le mal, et le jour meilleur que le nuit. Or, je ne veux plus être partagé. Seulement être.

J'errais alors des jours et des jours, comme écartelé entre le monde que j'hésitais à quitter, rempli de cauchemars vivaces, et celui qui m'attendait, entre rêve et réalité, qui disparaissait si je l'abolissais par mes doutes, et renaissait si je l'appelais, telle une victoire venue de l'avenir, scintillant au-dessus de toutes les souffrances, et les condamnant à sécher et à pourrir. Mon corps devint une sorte de marionnette vivante, qui jouait avec moi, maudissait la vie et me donnait envie de mourir, puis m'imposait des désirs violents, des fringales impitoyables, et des délires brillants. Quand je ne fus plus personne, une voix inconnue s'empara de mon esprit, sans dire son nom:

«J'ai plongé dans l'extase marine des premières cellules accrochant la vie aux rochers immémoriaux des sidéraux rivages. J'ai suivi l'élaboration des premiers corps aveugles d'animalcules, poussés en avant par une pulsation radieuse dans la massive unité de l'opaque océan. J'ai retrouvé dans mon sommeil offert aux royaumes insondables la promesse des premières aurores éclairant les balbutiements de la vie d'une perpétuité éternelle. J'ai vu se former les premiers soubresauts du désir frissonnant. Je suis sorti de l'immensité à travers les innombrables corps des espèces animales, pour embrasser d'un seul regard, maintenant, les œuvres de l'Esprit, révélé par ses lois et déguisé par ses buts. Tous les sens trouvés, les réponses cueillies, s'amoncellent en une seule direction, la flèche de l'existence, tandis que les intentions triomphent du multiple et révèlent la fleur de l'être. Le temps s'agenouille puis rend ses armes à l'Eternel, et je vois enfin ce que les dieux proclament: une seule origine signe tous les objets qui se succèdent, le déroulement reproduit le secret de l'immuable, l'immobile éparpillé constitue le fond où le mouvement s'anime, où la vie s'enracine, et il luit d'une lumière invisible dont le mental est la trace. Le temps constitue ma propre forme, je le sculpte pour l'accrocher aux royaumes secrets de l'Absolu soleil conscient de lui-même. Les accidents de mes apparences illustrent tous mon unique principe, toutes les vies crient mon nom, toutes les existences sont miennes, les milliers d'époques me reflètent, et chaque créature me représente. J'émane de moi-même, il n'y a pas de plus haut secret, ni de mystère plus profond.»

































Lettre du 5 Novembre 2006

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      La voie du Tao

       Le Tao est à la fois un des termes les moins précis et les plus représentatifs d'une culture chinoise qui se perd dans la nuit des temps, et dont l'occident fut forcé de reconnaitre l'existence au cours de ses conquêtes coloniales. Le lien qui existe entre la civilisation chinoise et la culture moderne est encore fragile, dans la mesure où la mentalité européenne peine à utiliser les concepts chinois qui la séduisent sans les déformer gravement. C'est essentiellement pour cette raison que la philosophie du yin et du yang n'a pas été jusqu'à présent révélée, d'autant qu'il est probable que la Chine elle-même ait perdu au cours des âges les derniers détenteurs de la métaphysique du Tao.

C'est en nous replaçant dans un paradigme simple, mais qui est fort différent du nôtre, que nous pouvons comprendre sur quoi repose le système du yin et du yang. L'idée de changer le monde, que l'on trouve au cœur du judéo-christianisme ne constitue qu'un particularisme, dont il faut se libérer pour aborder le taoïsme dans son essence originelle. Il nous faut d'abord convenir, à la suite des faits, que la terre est suffisamment immense pour avoir développé à partir de lieux et d'époques différentes, des mentalités fort éloignées les unes des autres. Par mentalité, nous entendons la capacité que l'esprit universel possède pour saisir la réalité extérieure et s'y adapter tout en découvrant quelques principes et quelques lois qui permettent d'ancrer dans la rapidité de la durée certains critères permanents. Dès qu'une civilisation saisit des critères qui ne lui sont pas propres, elle est contrainte de les rejeter sous peine de perdre ses propres structures représentatives, ou bien, pour pouvoir en quelque sorte les absorber dans une image globale de l'histoire, elle les pervertit et les déforme de manière à les emboîter dans son propre arsenal de concepts. Il est donc absolument certain qu'un être qui ne s'est pas profondément libéré de la mentalité de sa propre souche, ne peut ressentir la fondation d'une autre cosmogonie. Cela veut tout simplement dire qu'aucun occidental ne peut devenir taoïste s'il ne s'est pas entièrement défait des structures mentales qu'il a héritées dans son cerveau en temps et place de sa propre histoire.

Il faut se faire donc à l'idée que la perception du réel peut être entièrement autre chez des êtres humains qui possèdent une culture différente. Pour un chinois taoïste, toute transformation n'est que la conséquence d'un nouveau rapport entre les choses, et en tant que telle, elle ne peut être conçue comme un but, une cible, une finalité, et elle ne sera jamais qu'un segment provisoire et limité, qu'il est dangereux de séparer de la totalité. Certes des visions du meilleur à obtenir peuvent être produites, comme dans les conseils de Lao-Tseu à l'empereur, mais il s'agit là de souhaits, de recommandations, et non pas d'une volonté politique proprement dite, énonçant des moyens précis. Toute transformation positive ou négative n'est que le fruit naturel du changement perpétuel qui anime les choses, et prétendre aboutir à des transformations préconçues, parce qu'elles nous arrangeraient, est une vision qui ne figure pas dans la philosophie chinoise. Les décisions particulières, en effet, issues du simple intellect, apportent des réponses dans un champ précis, mais il demeure impossible de prévoir toutes les conséquences qu'elles apportent, et qui font comme des ronds dans l'eau à partir de leur point de chute initial. Le meilleur exemple de la politique analytique, qui prétend résoudre un problème particulier en le soustreyant à l'ensemble de son propre système nous est donné aujourd'hui par la médecine industrielle, qui regorge de prescriptions pour des symptômes facilement identifiables, qui disparaîtront tout en engendrant des effets secondaires sous l'action de médicaments.

Depuis son origine, la pensée chinoise se veut holistique, fondée sur une vision d'ensemble perçue dans ses grandes lignes, ce qui est toujours suffisant pour ajuster les détails, c'est-à-dire le flux permanent des petites transformations qui affectent le quotidien. En fait, il s'agit de ressentir si profondément la manière dont tous les facteurs s'entrelacent les uns dans les autres, que cette procédure permettra de déduire les conséquences qui s'avancent, d'en rejeter celles qui paraissent probablement néfastes, pour en retenir celles qui seront favorables. La volonté de changer à coup de force les évènements et les situations semble une pièce rapportée dans cette philosophie extrêmement profonde où l'on sait que les choses suivent inexorablement leur cours, et qu'il est difficile d'en changer la direction. La réussite ne proviendra pas d'un combat, d'une volonté obsédée par ses objets, mais d'une appréciation patiente des facteurs, d'une mesure de leurs proportions, et cela nécessite de «faire dans la dentelle», d'ajourner, de temporiser, d'attendre le moment favorable, de renoncer aux coups de tête, aux émotions, et aux réactions.

C'est une stratégie inverse de celle qui se précipite, dans la conquête militaire par exemple, où la violence et la force perturbent l'ordre du monde pour créer des Etats artificiels. (Il serait intéressant de voir que la langue constitue un état historique plus fondamental que la nation ou l'empire politique, cfrs la désagrégation des empires alexandrin, romain, napoléonien).

Le Tao apparait donc plutôt comme une immense rivière dont le lit serait si étendu qu'il n'aurait pas de limites, que tel un principe d'autorité. On peut cependant essayer de s'y conformer, la conformité étant un des seuls concepts, finalement, du taoïsme, (conformité à la voie, à l'essence supérieure, au «retour»), par une sorte de luxe de l'âme, et non pas parce qu'il est nécessaire de le faire. Ce point est important, car au contraire de nombreuses révélations religieuses exotériques qui veulent faire craindre l'autorité supérieure des principes, de Dieu, des lois cosmiques, etc, le Tao épanche la liberté, distribue la conscience sans rien demander en retour, ce qui exclut dès le départ toute attitude morale dans la recherche de l'unité pure. Rejoindre ce flot qui emmène le temps lui-même toujours plus en aval, admettre qu'il existe une réalité qui se joue de nos émotions et absorbe en son être tous les contraires, voilà le paradigme d'une vision du monde qui s'est sans doute perdue elle aussi, mais dont nous retrouvons la trace chez Li Tseu, Tchouang Tseu et Lao Tseu.

S'imaginer que la spiritualité terrestre constitue un grand puzzle accessible, et que n'importe quel morceau s'emboîte parfaitement avec les autres, est une erreur. Il faut d'abord renoncer à son propre cadre pour comprendre un cadre étranger. Superposer des visions du monde est impossible, même si le mental y parvient pour se donner le change, et s'approprier en surface des choses qui lui échappent en profondeur. Il est faux qu'un croyant puisse comprendre l'humanisme d'un athée autrement qu'en faisant de la marquetterie, comme dirait Gurdjieff, ou qu'un pur yogi, qui avance par la discrimination seule, puisse se mettre à la place d'un mystique possédé par le Divin, soulevé au-delà du Soi, dans Iswara, par exemple, la conscience du Seigneur. Chacun détermine sa voie en fonction de ses besoins et de ses aptitudes, mais c'est un mensonge de l'esprit que prétendre qu'on peut justifier son propre itinéraire en le comparant à celui de l'autre: par définition ce que nous en saurons sera superficiel, de l'ordre de la carte, alors que l'autre justement vivra cette carte sur un territoire spirituel vivant, que nous ne pouvons imaginer.

Le Tao est assez large pour contenir tous les opposés, toutes les contradictions, tous les cheminements, et bien que nous ne puissions le définir, on peut cependant, comme en mécanique quantique en inférer quelques aspects, à partir de l'hypothèse de son insécabilité, pour produire quelques résultats objectifs: s'il contient tout, c'est que rien ne peut le contenir. Il ne peut se définir autrement que par lui-même, et l'on trouve d'ailleurs quelques expressions en sanskrit qui correspondent à cette explosion mentale: je suis cela, étant entendu tout et rien, dans l'unité sans bords ni coupures. Le Tao est donc bien le brahman des hindoux, et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle la voie du t'chan a pu se développer en sauvant le bouddhisme originel, lui qui visait également le Soi, tout en l'imprégant de représentations taoïstes. Peut-être que Bouddha s'est gardé de définir le résultat de sa quête comme une immersion dans le Brahman, mais s'il a justement pu être assimilé à un avatar de Vishnou, c'est bien que son système mène à la libération, la moksha hindoue, par une autre voie, celle qui saute à pieds joints la question de l'existence de Dieu, et propose un travail personnel fiable, pour se libérer de la peur et du désir. L'inconnaissable par les moyens intellectuels peut parfois se révéler de lui-même, par une fracture dans le mode de perception.

Il sera forcement au-delà de toute caractéristique, le Tao, rappelant ainsi le Soi sans attributs défendu par certains sages de l'Inde, qui renoncent à faire croire qu'un modèle quelconque de la vérité permette d'y parvenir. En cela, ils s'opposent aux maîtres didactiques, soucieux de fonder un enseignement, et qui affirment que le Soi, bien qu'invisible dans son volume, peut être considéré, tel un diamant, à travers les facettes qu'il présente à l'intelligence. Il se pare alors d'attributs, et il est vrai que pour des personnes douées d'une intelligence supérieure, cet habillement peut paradoxalement engendrer une mise à nu progressive, les attributs constituant des couches devenant au fur et à mesure plus relatives, et même opaques, car elles demeurent des images intellectuelles limitées. On s'appuie donc sur des représentations pour les dépasser, mais il s'agit là d'un art difficile et vivant, qu'on peut à la rigueur explorer auprès d'un maître, mais qui est particulièrement aléatoire. La réflexion qui ne mène pas à des méditations et à des contemplations demeure du seul domaine du mental, et n'ouvre pas les portes qu'elle dénombre. Le passage aux états de conscience supérieurs, là où le mental ne fait plus écran et ne sert plus de filtre, est difficile à trouver, et c'est dans cette mesure-là qu'il est vain de reprocher aux enseignements d'avoir peu de succès. Leur but même est d'être dépassé, ce qui n'est pas possible si on s'attache à la lettre. La rigidité est l'aboutissement du principe yang, qui le fait mourir. L'impasse intellectuelle doit amener une réceptivité superieure, l'aveu des limites du mental, et c'est alors seulement qu'un nouveau discours se met en place dans le moi.

Mais pour la plupart des êtres humains, une conceptualisation de l'univers spirituel - extra-conceptuel par définition, reste une méthode à double tranchant pour découvrir le Tao. Voilà pourquoi Lao-Tseu se borne à ses propriétés les plus fondamentales, (vide, invisible, impalpable, insipide, ne pouvant recevoir de caractéristique) en disant néanmoins qu'elles sont insuffisantes pour l'embrasser dans son être, puisque la voie nommée n'est pas celle qui est intègre, éternelle, ou conforme au Principe. Il annonce rapidement la couleur: le tableau qui peut dépeindre la réalité suprême n'est ni à sa dimension ni à sa hauteur, mais l'évoquer, même d'une manière malhabile ou incomplète, peut donner envie de reprendre «le chemin du retour». En chinois ancien, tao tê king veut même dire tout simplement l'énoncé de l'action conforme au principe, et non pas le livre de la voie et de la vertu, qui pose une opposition entre les deux termes.

On ne peut pas se laisser pénétrer avec sincérité par un système qui fait violence à ses propres représentations, sans tricher, ou sans se compromettre dans un amalgame trompeur. De la même manière, un bouddhiste convaincu, quelle que soit la qualité de sa philosphie, et même sa maîtrise pratique, voire sa «réalisation», ne peut comprendre les multiples formes de l'hindouïsme s'il ne ressent pas personnellement la présence d'un Esprit dans le monde, qu'on peut associer aux représentations générales de Dieu, ou d'une intelligence créatrice. Il trouvera inutile tout ce qui touchera à une «soumission» possible de l'être particulier par rapport au Divin, et jugera par conséquent son propre système supérieur, et beaucoup plus économe en matière de stratégie évolutive. Il est donc probable que seuls des esprits soucieux de se libérer des programmes de perception que leur a infligé leur origine contingente puissent vraiment bénéficier d'autres sources que celles qu'ils ont immédiatement à leur disposition. Cette intention, nous la trouvons déjà comme préalable à l'éveil dans la vision de Sankara, qui n'oppose finalement que le soi et l'avidya, l'état d'ignorance naturelle voilant la conscience impersonnelle, tout le reste n'étant que des intermédiaires entre les deux, le mental qui s'occupe de traiter les perceptions, et l'intelligence qui aimerait bien s'approprier le réel, mais qui n'en collectionne que les chemins innombrables, comme des équations de mécanique quantique.

Ceux qui sentent la difficulté d'absorber les autres cosmogonies se débarrassent du problème d'une manière assez convenue, qui consiste à dire que les races trouvent d'elles-mêmes les systèmes qui leur correspondent et qu'elles s'y tiennent. Ainsi le taoïsme serait adapté au peuple chinois et à sa langue purement analogique et structurale, l'animisme conviendrait aux peuples noirs qui ne se séparent pas de la nature et contournent par la magie la frontière entre la vie et la mort, le déisme sentimental conviendrait à la race blanche, pleine de ressources dans l'action et toujours prête à opposer ce qui est à ce qui devrait être, contrairement à l'asiate, ce qui la prédisposerait à entretenir une relation subjective et personnelle avec Dieu, auquel sont prêtés de nombreux caractères anthropomorphiques. L'ascèse exhaustive conviendrait à l'hindou, qui n'a jamais réellement aimé la matière, et la juge plutôt inférieure à l'esprit que telle son socle ou sa collaboratrice (vision propre au taoïsme, au tantrisme et à la révélation supramentale). Le chamanisme conviendrait aux peuples qui approchent le temps d'une manière cyclique, et chez qui l'écriture n'a jamais atteint un droit de cité supérieur.

Le premier travail à faire est donc d'éliminer ce que représente Dieu dans nos cultures pour éviter de le réduire aux dimensions de l'Histoire, aux caractéristiques qui sont les nôtres, génétiquement en quelque sorte. Dans cette mesure, peu importe le nom qu'on donne à la Réalité suprême, et d'une certaine manière, le Tao peut être une manière de la désigner, assez prudente d'ailleurs, puisque les trois patriarches insistent sur le fait qu'aucune image ne peut se faire de la réalité pure, étant donné qu'elle précède le ciel et la terre, et que ces deux mondes sont les filtres au travers desquels nous percevons tout et rien dans notre position intermédiaire entre les deux. Cette réalité suprême n'a pas plus à être cherchée en-dehors de la vie qu'à l'intérieur, pas plus dans l'être que dans les principes de la manifestation, car dès le départ l'idée de morceler le champ du réel apparaît fausse.

Ne rien saisir avec une conviction inébranlable, mais rester ouvert à l'unité est un principe supérieur à l'étalonnement qui décompose, puis ne sait plus recomposer l'ensemble. De la même manière qu'il est facile de démonter le moteur d'une automobile pour en comprendre les phases, mais plus difficile de tout remettre en place quand on n'est pas mécanicien, ainsi la décomposition du réel, qui prétend au départ en expliquer le fonctionnement, n'en découvre que les procédures, et une fois que l'univers est en quelque sorte déplié, le mode d'emploi n'est toujours pas évident. Sur quoi doit s'appuyer l'art suprême, celui de prendre des décisions?

Saisir les alternances de phases du principe, le retournement du yin en yang et inversement, quand il se manifeste, telle est la voie. En figer le schéma dans un diagramme peut tout au plus servir tout au début, et puis cela ne sert plus à rien. Expliquer pourquoi le jour et la nuit existent, ou rendre compte de la complémentarité du sommeil et de la veille, du désir et de la satiété, tout cela est sans doute nécessaire comme une première inspiration à la naissance, puis tout ceci tombe hors cadre du maintenant, sur lequel il nous est demandé de surfer, l'obscur pouvant s'éclaircir, le clair pouvant s'obscurcir à chaque instant, sous la poussée générale des éléments combinés.

Ce n'est pas en répétant la règle du jeu d'échecs qu'on devient un bon joueur, mais en la mémorisant et en s'entraînant au maximum de parties. Ainsi la philosophie chinoise fonde l'échiquier du yin et du yang, et, dès que c'est admis, compris, intériorisé, le jeu se déploie. Suis-je inspiré ou est-ce que je réagis ? Suis-je dans une action créative ou mécanique, dans une écoute vraie ou parasitée par des miasmes, du ressentiment, de la souffrance? Départager les deux principes n'est pas si simple, puisque ils sont combinés dès le départ, associés avec une force insécable, l'un menant à l'autre irrémédiablement, bien que parfois un troisième terme, le vide médian, les sépare et les relativise.

Les concepts, pour un esprit traditionnel chinois, n'ont aucune existence réelle en dehors de leur application pratique. Les philosophes des sciences en viennent aujourd'hui au même point, toute théorie n'a qu'un champ d'application limité hors duquel sa pertinence est inutile. C'est la complexité de la mécanique quantique qui a conduit à renoncer à toute ontologie de la théorie, car elles existent en grand nombre, croisent parfois leurs résultats, puis s'éloignent à nouveau. Le plus simple à considérer c'est que chacune a une utilité propre, mais une efficacité réduite à un nombre limité seulement d'opérations. Il reste à se servir de chacune là où ses opérations sont les meilleures, tout en admettant leur rivalité dans un champ de virtualités innombrables, qui par lui-même, échappe à tout réductionnnisme.

C'est sans doute parce qu'il est difficile de caractériser ce qu'apporte la libération en termes d'avantages ponctuels, que l'esprit chinois n'a conservé le message des patriarches que pour une sorte d'élite, souvent d'ailleurs des artistes, rêvant de retrouver le sentiment d'être un avec le Tout. Pour les autres, l'attrait du sentiment océanique (dont Freud n'a d'ailleurs jamais reconnu la légitimité spirituelle !) est trop flou pour représenter quelque chose d'intéréssant, qui demande une démarche particulière, l'abandon, le non-agir. L'abstrait (tao) mène au concret (tao), (Du principe découle la voie et la voie ramène au Principe, d'une manière fondamentale, directe, que l'hindouïsme ignore, sauf dans le tantrisme et la révélation supramentale de Sri Aurobindo). Car pour l'hindouïsme, l'obtention du soi, qui change fondamentalement la conscience du sujet semble se suffire à soi-même, et permet au moi d'être quitte d'avec la «manifestation». Le monde phénoménal apparaît comme la gangue dont on s'est enfin libéré, et il reste à prêcher la sortie, en quelque sorte, depuis une conscience impersonnelle, indépendante du corps physique. L'esprit chinois quant à lui ne peut en aucun cas «oublier» la réalité matérielle, et prendre prétexte de l'accès au Tao pour renier la condition terrestre, qui mérite d'être vécue «autrement» une fois l'illumination obtenue, tandis que les hindous extrapolent facilement, décidant par exemple d'échapper à la roue des incarnations.

Il n'y a rien à rejeter, l'observation départageant l'action et le repos, le clair et le confus, la réflexion ouvrant les ramifications supérieures possibles, l'univers des coïncidences extrêmes entre le sujet et le tout, que le taoïste apprend à produire par la passivité attentive, qui combine en elle les qualités du yin et du yang, l'abandon féminin et la vigilance masculine. C'est donc une philosophie, une religion, ou une tradition qui fait l'économie d'un grand nombre de présupposés, ce qui la rend inaccessible à un esprit philosophique, et elle se contente d'établir un état des lieux du réel, déchiffrable à travers le yin et le yang, entendu qu'au-delà une source les transcende tous les deux. Si «pinaillage» il y a, ce sont dans les mesures réelles des proportions concrètes des choses et des situations, et non dans les idées ou les concepts.

Le Tao peut être ressenti dans la nature, apprivoisé dans l'intelligence, déchiffré dans le cours des choses qui alternent les phases, d'action et de repos, d'échec et de réussite, de lumière et de clarté. Il suffit donc de concevoir comme une unité chaque couple d'opposés pour s'approcher de la vision chinoise. Le jour n'est pas le contraire de la nuit, c'est la même chose dans sa phase inverse. Il en est de même pour le mal, qui n'est que le miroir inversé du Bien, et qui en aucun cas ne s'y oppose. Ce sont des réalités indépendantes qui peuvent se développer dans l'immensité, selon leurs propres normes, qui se font miroir inversé, et s'acharner à les différencier constitue une entreprise intellectuelle défaillante dès le départ. Tout bien se transforme en mal à son excès, ce qui apparaît par exemple quand un Etat ou un royaume prend tellement de soin de chaque sujet que celui perd son individualité propre (assistanat, communisme), tout mal se transforme en bien quand il est saturé de lui-même, comme la paix reprend le dessus après la guerre, la discussion après la dispute, etc... Une mentalité qui voit au naturel les opposés comme les deux faces d'une même médaille ne peut pas concevoir le monde en termes aussi manichéens qu'une mentalité qui passe son temps à opposer les contraires, et qui s'acharne à faire prévaloir le côté de la médaille qu'elle préfère. Pour le chinois, la réalité est un ruban de Moebius, soit un ruban à une seule face (il suffit de tordre une extrémité avant de la raccorder à l'autre pour produire cet objet), et ce sont seulement des perspectives qui colorent cette face unique, que l'on peut regarder par en-dessus ou par en-dessous sans modifier son unité. De ce point de vue, l'ontologie semble être un concept inutile à la philosophie chinoise.

C'est donc un système qui ne dit pas où la vérité doit être cherchée, car elle n'existe en fait que sur le plan d'une meilleure coïncidence entre soi et le Tout. Elle est un ciment entre la pierre et la clé de voute, l'individu et l'univers. L'aspiration à être manque d'ostentation, ne se complaît pas en liturgie, en pratiques dévotionnelles, elle se campe dans une écoute exhaustive de ce qui vient de soi, à l'intérieur, et de ce qui vient de la grande force magique, Të, qui tisse le monde et le manipule. Il n'y a rien à rajouter à cette double observation du ruban de Moebius, sa face interne, grosso-modo l'introspection et la nécessité d'être contraint à fonctionner pour soi-même, et sa face externe, que suis-je dans le monde ? Le problème est donc d'identifier d'où viennent les choses, du moi ou du non-moi, et ce désenchevêtrement constitue une procédure nécessaire et suffisante pour rejoindre le Tao. Car tout sera passé au crible, sans grandes envolées lyriques, sans prétention d'aboutir (ce que l'on retrouve également dans la Gûitâ), et les forces devront rendre des comptes. Le désir devra se soumettre, et avec lui toutes les petites attentes gratifiantes dont l'homme ordinaire fait grand cas, comme la notoriété, la prospérité conquérante, dont la convoitise engendre une activité mentale permanente et pernicieuse, qui va à l'encontre du Tao essentiel, dont l'une des caractéristiques premières est l'immobilité tranquille, au-delà des accidents et des occasions.

Si l'appel vers le tao n'est pas naturel, il n'est pas fiable. Nous sommes donc loin d'autres cultures qui veulent imposer de force la croyance religieuse, la déontologie morale, au plus grand nombre, et qui croient pouvoir détourner le lit du grand Fleuve Tao, avec leurs petites écluses d'intimidation diverses, et de recommandations sacrées, comme savent si bien les mettre en œuvre nombre de prêtres de différentes religions. Mettre au pas, le meilleur fût-il, est une entreprise humaine vouée à l'échec, qui s'appuie sur une méconnaissance profonde des lois réelles et un parti-pris idéaliste infantile, pour ne pas dire stupide. Dans le Taoïsme, il n'y a rien à prouver, puisque tout est le signe du Tao suprême, qui laisse les êtres disposer de leur existence, comme le dit Lao-Tseu au chapitre 5. La question est de savoir comment favoriser le retournement vers le Principe, l'appel vers le divin, la vocation spirituelle, et cette question n'est pas tranchée. Lao-Tseu sème sans s'acharner à récolter et conseille le prince, Tchouang Tseu refuse une charge de ministre. Les deux témoignent néanmoins de la même chose, de la suprématie d'une réalité unique, indescriptible, insaisissable par les concepts, mais qui peut être ressentie, et qui libère de toutes les ambitions humaines au profit d'une vision sans angles morts, qui n'a nul besoin de s'approprier les choses pour en jouir.

La philosophie du yin et du yang permet de voir l'intelligence en mouvement, celle qui mène le monde, et en commençant par observer en soi-même si l'on est actif ou réceptif, ou dans un état mélangé, le travail spirituel commence. La réceptivité doit tendre vers un abandon, laisser se produire les associations intérieures, où qu'elles mènent, l'activité doit être dirigée et contrôlée, sans interférences. Mais en général l'être humain vit en mélangeant les deux juridictions où il n'est ni vraiment réceptif, car le mental continue de s'emparer facilement des sensations, ni réellement actif, car son activité est peu créative, et assez convenue, quelque peu ensommeillée ou mécanique. Les deux pôles peuvent se développer, en alternance, et il convient seulement de les distinguer. Plus on apprend à «lâcher prise», plus le retour à l'activité personnelle est créatif, et c'est dans ce sens-là que le travail doit être entrepris. Dans l'autre sens la formule ne marche pas. Le développement de la projection subjective, contrôlée, volontaire, ciblée, n'amène jamais par elle-même le retournement yin, (sauf catastrophes!), car la nature trouve une satisfaction intense à toujours tisser de nouveaux liens avec l'extérieur.

C'est donc le goût de l'action qu'il faut désamorcer, ce qui est difficile dans le prolongement de l'animal, qui en dehors de la fatigue et du sommeil, ne dispose d'aucun moyen pour s'abandonner à l'existence. Parvenir à convaincre l'esprit de demeurer passif est une stratégie invariable dans tous les arts traditionnels, bouddhisme, t'chan, taoïsme, hindouïsme. Ce renversement n'est jamais préconisé dans la culture, puisque le mental vit pour s'approprier le réel en le saisissant, et c'est auprès d'un sage seulement qu'on peut apprendre à renverser l'esprit vers sa source, soit demander à l'intelligence qu'elle remonte en amont, au lieu de la laisser filer sa toile de représentations en aval, avec la même trame et la même chaîne que celle dont elle a héritée. On retrouve cette préoccupation essentielle dans les tantras de l'Inde, où le même cheminement est décrit différemment, avec une économie moindre, des arabesques inutiles pour un esprit chinois, et des raffinements intellectuels que le taoïste récuse comme de simples friandises. L'eros intellectuel est abondant chez l'hindou et l'européen, et le grec déjà, alors qu'il est remplacé chez le chinois par la sensation pragmatique d'être là où il faut quand il faut, une émotion plus globale, plus proche de la sensation. Pour l'hindou et l'européen la caution d'une impression mentale rationnelle est indispensable, elle rassure.

La langue chinoise favorise le travail d'abstraction puisque le même idéogramme, le même signe possède différents signifiants. Ainsi la même image possède-t-elle des couches d'interprétation différentes, cohérentes entre elles, souvent d'ailleurs le concret amenant l'abstrait, ou l'objet la qualité. C'est une habitude de voir le monde immémoriale, l'ancienne langue chinoise se perdant dans la nuit des temps, et pour ainsi dire «le sujet du verbe» est moins prégnant que dans nos langues, les infinitifs en quelque sorte faisant la loi, alors que le lien, la situation, le comportement, définissent le sujet dans la position qu'il occupe plutôt que dans celle d'une identité singulière.

Sous-estimer la profondeur de la Chine est en quelque sorte une attitude naturelle puisque elle même a perdu son âme pendant le dernier millénaire, jusqu'à l'apostasie complète que représente le communisme, religion athée qui a eu raison quelque temps des valeurs religieuses agonisantes, ici ou là. Si le taoïsme et le christianisme étaient restés vivants, le communisme n'aurait pas pu s'emparer de l'âme des grands peuples de l'est, mais comme l'humanisme était mort, la solidarité perdue, et la transcendance oubliée, la tentation d'agir sur l'homme par les effets exterieurs était prête à déferler, jusqu'à l'échec, pour souligner l'héritage perdu qu'il nous reste à retrouver, maintenant que la coercition s'est avéré un moyen inutile, et le nivellement une monstrusosité. L'appel doit venir du moi, c'est la seule puissance qui peut transfigurer l'interprétation toute faite des sensations et des évenements, interprétation codée dans une memoire collective et culturelle toute puissante.































Lettre du 14 Août 2005

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       Je me rends compte de plus en plus que le fait de jouer des rôles fait partie intégrante de l'expérience de la conscience dans la nature. Les tribus animales répartissent des fonctions relativement précises parmi les congénères du même clan, et s'établissent ainsi des hiérarchies où nous retrouvons sans cesse la complémentarité du fort et du faible, le jeu du Yin et du Yang. Toute notre éducation nous pousse également à nous imaginer que c'est à travers des rôles que nous pourrons maîtriser l'avenir, c'est à dire tirer notre épingle du jeu de la manière la plus profitable. Il se trouve que dans le domaine spirituel jouer un rôle devient de plus en plus un comportement aléatoire. Le rôle de disciple n'est pas si facile à tenir à une époque qui exige de chaque individu qu'il se penche sur son propre processus de différenciation, quitte à remettre en question les injonctions de son maître, voire à lui désobeir plutôt que suivre mécaniquement une voie qui lui serait imposée. Quant au rôle du maître, il apparaît également qu'il devient vite une limitation si l'on s'y identifie avec complaisance, car la disponibilité au Divin peut disparaître au profit d'une instrumentalisation de son expérience passée pour se faire valoir.

       C'est donc d'une manière beaucoup plus souple que des transmissions réelles peuvent se produire aujourd'hui, dans lesquelles ni le disciple ni le maître ne seront enfermés dans leur rôle de dominant-dominé, ce qui, naturellement, produit un autre ordre relationnel, rempli d'éléments chaotiques, auxquels les esprits rigides ne peuvent pas faire face. Il appert souvent que des «éveillés» n'ont pas les mêmes opinions sur les mêmes choses, ce qui décourage la plupart des chercheurs qui préfèreraient se fier à une autorité exterieure plutôt que plonger au fond d'eux-mêmes à la recherche de ce qui les concerne vraiment. C'est donc l'efflorescence de la vérité qu'il faut accepter, même si elle est difficile à accueillir dans toute sa richesse et sa variété, et l'intégrisme doctrinaire qu'il faut rejeter - quand bien même nous pourrions le légitimer intellectuellement, en établissant par exemple la suprématie de Sri Aurobindo.

      En ce qui me concerne, bien que je continue à travailler sur la création de procédures de transmission spirituelle, je ne peux en aucun cas m'identifier outre mesure au rôle du maître, puisque la fonction du Supramental consiste seulement à ouvrir un nouveau champs de conscience aux êtres humains. C'est dans la représentation culturelle générale qu'un mutant supramental devient par la force des choses un gourou, puisqu'il ne peut dissimuler que sa conscience a atteint une vastitude exceptionnelle, supérieure même à celle à laquelle pouvaient prétendre les éveillés et les maîtres spirituels du passé. A cet égard, n'oublions pas que Sri Aurobindo lui-même travaillait beaucoup dans la solitude, ne se montrait au public qu'en de rares occasions, et qu'il préférait entretenir des rapports personnels par la correspondance, plutôt qu'à se livrer à des manifestations spectaculaires de sa compétence. Je continue d'agir pour ouvrir tous ceux que cela interesse au monde supramental, sans considérer que ma propre expérience en la matière me donne des droits inconsidérés sur les autres.

      Nous devons entrer dans une période où l'autorité du Divin lui-même devra se faire sentir de manière sensible et spontanée, à travers les sens mêmes, les impressions du corps, les intuitions libératrices, et dans cette mesure, il n'est plus d'actualité de se soumettre avec complaisance à une autorité humaine. L'idée selon laquelle cette soumission à un être particulier apporterait de grandioses bénéfices spirituels n'est pas entièrement fausse, et elle était même appropriée pendant l'ère du Kali Yoga. Mais aujourd'hui où de grandes énergies spirituelles se déversent sur la Terre, la rencontre avec des êtres qui bénéficient déjà de ces contacts doit simplement faciliter l'accès évolutif, rapidement, sans que soient recréées les lourdes structures d'obédience et de dominance qui enferment dans un cadre pré-établi la recherche du présent pur inconditionné. Mon but n'est pas de dévaloriser systématiquement les gourous, mais de rappeler leur rôle fondamental : Servir d'intermédiaire entre le Divin et les autres. C'est une tache possible mais difficile, et qui peut facilement enrayer l'évolution de celui ou celle qui y accorderait trop d'importance, au détriment de sa propre relation intime et secrète avec le Divin.































6 Juillet 2005: (Poème)

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Thuriféraires de la souffrance
nous transformons la mort elle-même
notre œil voit le pire créer le meilleur telle la nuit éternelle rompant son immobile sceau
accouchant du premier soleil

Tout le reste arriva comme une unique danse
par friction des contraires
l'amour scinda la haine
la douleur s'émietta en joie
le silence coupa le bruit en notes
le nombre donna à l'un l'intimité du fini et les contours aspirant aux caresses

la fulgurance du sens s'empara de l'univers
Tout produirait du neuf pour fatiguer le vide
l'obscur chercherait l'éblouissement le fragment l'ensemble

L'Esprit fendrait le temps telle une écume et la mousse du plaisir s'offrirait au mystère
abîmes et cimes s'étreindraient dans l'insondable énigme
pics et gouffres se chevaucheraient sans niveler l'étendue
tout se retournerait sans cesse sur son propre itinéraire
pour se lover dans l'Infini
et découvrir dans la souffrance la béatitude déguisée
rien n'aura été vain,
l'inutile chantant l'insouciance
l'imparfait louant l'avenir
l'achevé semant d'informelles semences

Même la pierre frémirait des éons
reconnaissante
sous l'œil géant du jour































Lettre du 20 Décembre 2004

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       Beaucoup de ces êtres humains qui s'imaginent meilleurs que les autres parce qu'ils cherchent soit-disant la Vérité oublient en cours de route la largeur, tout occupés qu'ils sont à développer la hauteur et la profondeur. Sans la largeur, l'esprit demeure fanatique, ou tout au moins obsessionnel. La largeur est ce qui permet d'embrasser toute cette partie du réel peu recommandable, le réel des apparences, de l'histoire-charnier, du répétitif sombre. Sous prétexte qu'il faut lever les yeux vers l'or de l'avenir, sous prétexte que seule la profondeur peut faire jaillir la source secrète de la vision, l'on oublie la légitimité du banal, l'authenticité de tout ce qui nous dérange par son caractère trivial, et la pérennité du médiocre nous attaque avec brio et nous blesse. C'est ainsi que l'on trouve des amateurs de Patanjali plus aigris que de vieux paysans, c'est ainsi que l'on voit des philosophes férus de dialectique se vautrer dans l'indignation comme si elle pouvait tenir lieu de remède, et c'est ainsi que l'on voit plafonner des âmes pourtant riches sur l'infini chemin parce qu'elles ne peuvent en quelque sorte pardonner au Divin l'ignominie de ce qu'elles appellent le mal. La largeur permet de remercier l'obstacle, d'en fixer la légitimité sur un itinéraire si vaste qu'il faut l'accueillir sans œillères tel un chemin ouvert sur tous les possibles, la voie sans crainte du chercheur de feu, celui qui accepte. Certes si la largeur n'est pas proportionnelle à la hauteur et à la profondeur, si elle est excessive et dominatrice, elle ouvre la voie à tous les abus, elle peut même légitimer les fautes selon la célèbre formule : «Si Dieu n'existe pas, tout est permis». Mais sans la largeur, la hauteur devient méprisante, la profondeur devient orgueilleuse, le chercheur se prive de l'amour de la Terre qui, bienveillante, secoure et pardonne. Tandis que la profondeur rassure et que tous les sages la recommandent, tandis que la hauteur est spontanément enviable comme si nous possédions tous dans un coin de notre mémoire la nostalgie de l'aigle, la largeur peut nous effrayer puisqu'elle est l'apanage du rebelle, le faire-valoir du traître, le fantasme du conquérant. Mais nous pouvons aussi la considérer comme la sentinelle de l'immensité, oui, la largeur est peut-être déjà là en nous, réellement présente mais ensevelie sous des buts mesquins et des peurs ancestrales, autrement dit, sans un certain amour de l'inconnu elle risque à jamais de faire défaut quelle que soit la hauteur de nos aspirations, faciles à déterminer, et la profondeur de notre quête. Des trois critères de la mesure, la largeur est en dernier lieu le plus objectif. La hauteur et la profondeur c'est ce que nous nous accordons à nous-mêmes par décret intime, pour survaloriser en quelque sorte nos existences naturelles. Mais la largeur est ce qui doit rester à notre entière disposition immédiate pour ne pas décapiter le réel et n'en garder que le chef, pour absorber les dualités dans le vaste espace où les contraires se tiennent par la main, et enfin pour embrasser dans le feu de notre quête tous les évènements quotidiens qui ne semblent s'y rattacher que par des liens indésirables ou scabreux. Bienvenue à la largeur sans laquelle l'évolution serait restée confinée sur un échiquier au lieu de s'élancer vers tous les puzzles vivants et bariolés, inlassablement neufs, friands de changements même au sein des structures. Le ferme et le malléable continueront sans doute de s'épauler par des voies encore indéterminées jusqu'à l'apparition de cet homme nouveau dont Sri Aurobindo est le prophète, et auquel Mère a donné l'impulsion. Le travail de l'alchimiste solaire consiste donc à s'élever, approfondir et s'élargir en maintenant dans chacune de ces trois directions une vigilance qui lui soit propre. Alors les angles morts se réduisent et la sadhana peut embrasser le réel dans tous les sens.































Lettre du 20 Février 2004

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       Le Supramental n'est pas une auberge espagnole. Beaucoup de soi-disant chercheurs se dispensent d'une étude des œuvres principales de Sri Aurobindo, et méprisent l'agenda de Mère, et ils veulent néanmoins pouvoir s'approprier le «Supramental» et en faire ce qui leur chante. Le Supramental n'est qu'un mot technique pour caractériser un champ de conscience qui jusqu'à présent a pratiquement échappé à la conscience humaine. Son altitude le rend pratiquement inaccessible, et quand ce plan s'est manifesté, récemment, il y a quelques milliers d'années seulement, les êtres humains ont été incapables de conserver un contact avec lui. Sri Aurobindo s'explique magistralement sur ce point, dans son étude sur les Védas. Je ne suis pas, pour ma part, responsable du «retour» du Supramental sur Terre, mais je le salue, et pilonné par l'énergie Supramentale depuis de nombreuses années, je peux me permettre de dire que cette expérience n'est pas comparable à d'autres manifestations d'énergie spirituelle, qui ont toujours existé, qui ont encore un rôle, mais qui ne peuvent d'aucune manière exhaustive transformer intégralement la réalité comme le fait le Supramental lui-même. J'ai trouvé beaucoup de personnes qui sont dérangées par le fait qu'on ne leur ait pas demandé l'autorisation de changer le dharma terrestre, (la loi spirituelle) comme si l'univers entier devait leur rendre des comptes. Parmi eux, naturellement, toute la gamme des pyschorigides qui ne jurent que par leur paroisse, orientale ou christopropre, millénariste ou galactique, l'éventail des petits maîtres du Soi, que je ne condamne nullement par ailleurs, mais qui interdisent à quiconque de toucher le Supramental sous prétexte que, si cela ne leur est pas arrivé à eux personnellement, cela ne peut arriver à personne d'autre, vu qu'ils occupent déjà le sommet. Le singe est encore bien présent dans l'homme, même dans l'homme dit «réalisé», et qui finalement n'a fait que sortir des déterminations de la nature pour se fondre dans un illimité confortable, où l'esprit ne fabrique plus de contradictions. C'est déjà quelque chose de remarquable, et il serait puant de ne pas en convenir. Le fait est que ce type de réalisation n'est pas suffisant pour garantir à l'univers une marche progressive et ascendante correcte. Les éveillés sont peu nombreux. S'ils se décident à parler, dès qu'ils ont du succès leurs formules sont récupérées, un dogme se crée, et la vérité est à nouveau étouffée sous les prédicats, les tabous et les prescriptions, tous les soi-disant «usages spirituels» qui vont bientôt faire tomber le moi sur les résistances puissantes de la nature et le décourager, et l'immobiliser dans un statu-quo dévotionnel filandreux. Ne pas reconnaître que la spiritualité a échoué à changer l'homme est la dernière hypocrisie à la mode, comme croire que la spiritualité va résoudre tous nos problèmes est la dernière farce de l'ego, fatigué de lui-même, mais qui hésite encore à se donner intrinsèquement au Réel, et au mystère pur de sa propre existence dans la chair, dans la matière, sur Terre, le tout étant d'ailleurs inextricablement lié, ce qui soumet notre existence aux menaces écologiques et politiques inventées par le singe debout. Aujourd'hui le problème se pose d'une manière entièrement nouvelle. Le vrai pouvoir de transformation exhaustive de l'homme est bien présent et disponible. Avec lui aucun retour en arrière n'est possible vers les demi-mesures des religions, ou le confort stérile de la réalisation du soi, extrêmement creuse, dans tous les sens du terme, mais qui peut être un excellent préalable à la réception de la conscience divine. La seule difficulté est de reconnaître que ce «miracle» est possible, et ensuite de se donner entièrement au Divin. Personnellement j'ai la preuve que le Divin, la conscience infinie, bien au-dessus de tous les dieux, de tous les anges, de tous les créateurs de monde, répond à l'amant de DIEU. Etrangement cette nouvelle dérange beaucoup, alors qu'au contraire elle devrait réjouir inconditionnellement tous ceux qui aiment la Vérité. Peut-être que beaucoup confondent encore la Vérité et leur vérité, et qu'ils veulent faire entrer la Vérité dans leur vérité, comme on pourrait s'acharner sans jamais y parvenir à faire entrer l'océan dans une bouteille. Pourquoi moi, direz-vous, et pas vous ? Quel orgueil pense-t-on parfois, comme si je m'autoproclamais vizir à la place du vizir. Et pourquoi pas vous ? Si la Vérité vous intéresse au point crucial que vous abandonnez vos singeries pour vous rendre au Mystère absolu, vous attirerez sur vous automatiquement la force évolutive dont vous avez besoin. Je ne suis pas propriétaire du Supramental, je ne le loue pas, je ne le vends pas, j'aimerais bien vous le donner, mais je ne crois pas que vous soyez tous prêts à recevoir un tel cadeau. Le mieux est que vous vous y rendiez par vous-mêmes, si cela vous intéresse vraiment. Mais le premier de cordée sera toujours là, il s'appelle Sri Aurobindo, c'est lui qui a baptisé «Supramental» le plan qu'il a découvert au-delà du monde des dieux, et ce terme ne peut donc être sorti de son contexte sans revêtir des sens déformés. Il n'est pas impossible que la manifestation Supramentale soit liée à un passage très important pour la Terre, passage auquel différentes hiérarchies spirituelles participent, sans qu'elles soient elles-mêmes à proprement parler «Supramentales», si nous entendons par là la manifestation du Divin dans la matière vivante, un processus que je souhaite maintenant irréversible, contagieux, et qui transfigurerait l'évolution terrestre, quelle que soit l'aide apportée par les hiérarchies célestes, astrales, qui dépendent toutes elles-mêmes en dernière analyse du Purushottama, la Conscience éternelle - le Dieu des dieux eux-mêmes. Pour ceux qui me jugeraient «élitiste» je précise que l'altitude du Supramental le met à l'abri de nombreux membres de la ménagerie humaine, qui aimeraient bien se l'approprier et qui le tordraient rapidement dans le sens qui leur conviendrait, puisque il s'agit d'une énergie d'une puissance formidable, pour tout dire souvent intolérable dans le corps physique, mais qui ne transforme pas immédiatement toute les composantes avides de la nature vitale et mentale, qui remontent de la mémoire de l'évolution. Autrement dit, peut-être que seuls ceux qui ont la capacité de le supporter le rencontrent-ils, mais le but de l'opération est naturellement de rendre plus manifeste cette énergie sur la Terre, et non de la conserver pour quelques élus. Mais il faut d'abord nettoyer le terrain, et c'est ce à quoi s'emploient beaucoup d'êtres de tous les plans, en avance sur les autres, qui font monter le taux vibratoire de la terre pour rendre ses habitants plus réceptifs aux influx spirituels. Si c'est la Vérité qui vous intéresse, et non pas la possibilité de vous épater vous-mêmes avec vos prouesses spirituelles, soyez sûr qu'un jour ou l'autre, dans cette vie ou dans une autre, le Divin viendra à votre rencontre. Il ne peut se dérober à la découverte de Lui-Même, et peut-être grimpe-t-Il déjà vers Lui-Même dans votre propre vie, que vous jugez maladroite ou imparfaite. C'est le signe de votre sincérité, et si elle est profonde il est inutile de vous culpabiliser sans fin sur vos faiblesses. Elles indiquent le chemin.































Lettre du 31 Janvier 2004

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      Je me rends de plus en plus compte de la singularité de chaque individu, et je suis déjà certain qu'une partie des lecteurs du site ne sera touchée que par mes lettres. Elles ont un caractère «pris sur le vif» qui peut séduire toutes les personnes en prise directe avec leur environnement et le moment et que le dégoût de la société pourrait emmener au Spirituel, et au Supramental, qui spiritualise la Matière. Je recueille pour le moment toutes les informations qui peuvent me confirmer que la Terre a subi un changement électromagnétique important. J'ai l'impression qu'en 3 ans les choses ont énormément changé, que le dialogue est devenu beaucoup plus facile entre personnes de bonne volonté. Dans de telles conditions, prévoir quoi que ce soit me paraît impossible, et je me méfie du millénarisme qui nous ferait une fois de plus sacrifier le présent à un avenir sur mesure. Une fois qu'on a compris «l'effet papillon», on sait qu'un petit évènement sans importance, parce qu'il suit un cours particulier favorable, peut grossir et entraîner sur son passage des situations imprévisibles. Je crois qu'il n'y aura bientôt plus que deux types d'individus : ceux auxquels l'apocalypse fera peur, et de plus en plus peur, et qui s'accrocheront à l'argent et à la sécurité comme des naufragés à un radeau, et ceux qui verront dans l'apocalypse le cheminement de la lumière dans la matière, et qui comprendront sans hésiter tout ce qu'il faudra lâcher pour jouir des transformations solaires qui s'avancent. Les jeux ne sont peut-être pas encore tout à fait faits et certains hésitent entre l'ouverture aventureuse au monde solaire de la conscience et la conservation sécurisante des prérogatives conventionelles. Peut-être n'avons nous plus beaucoup de temps pour nous déterminer. Et c'est peut-être aussi une erreur de s'acharner à faire partager notre quête à ceux qui se contentent des valeurs établies. Peut-être que certains d'entre vous souffrent de ne pas entraîner dans leur sillage évolutif certains membres de leur famille ou leurs amis, et qu'ils aimeraient les attendre. Ce n'est pas si facile de se sentir attiré par la lumière et de constater qu'une personne qui paraît semblable à soi-même reste fermée à l'évocation du Spirituel. Il s'agit là d'un mystère douloureux, une énigme qui se présente comme un gouffre émotionnel, une question qui ouvre des abîmes de sensations étranges. On peut facilement se sentir coupable de ne pas savoir montrer le chemin, mais il se peut tout simplement que l'autre ait besoin de refuser la perche qui lui est tendue pour jouir de sa liberté quitte à faire des détours qui nous semblent inutiles. Accueillir sa propre voie, c'est parfois se rendre là où nul ne veut vous voir aller.































Lettre du 28 Décembre 2003

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       Chers lecteurs, c'est une lourde responsabilité de faire savoir qu'il existe une nouvelle loi spirituelle sur la Terre, un nouveau Dharma. Seulement les choses vont très vite, et de plus en plus vite. Nous pouvons chacun aujourd'hui évoluer d'une manière précise et directe, en faisant entièrement confiance au Divin, et en lâchant prise dans de nombreux domaines. Mon cœur se serre chaque fois que je vois un chercheur sincère s'embarrasser d'une panoplie ésotérique pour avancer sur le chemin. Oui il y a encore des choses que l'on s'imagine être utiles et qui sont en réalité déjà superflues. Le recours à un enseignement quel qu'il soit et aussi élevé soit-il ne peut être qu'une étape éphémère. Nous voilà chacun confrontés à nos limites dans tous les domaines où l'énergie divine veut transformer le monde. Rester ouvert dans ce milieu fermé qu'est notre société décadente constitue un véritable défi. C'est à dire que nous travaillons sur tous les fronts, et que la transformation de notre seul moi est insuffisante. La Terre a besoin d'individus sincères qui ne l'abandonnent pas sous prétexte de chercher une perfection intérieure. Nous sommes peu compris autour de nous quand notre vision est à la fois matérialiste et spiritualiste, et si nous parvenons vraiment à vivre notre aspiration si exigeante en aimant le monde en dépit des circonstances, nous voilà vraiment l'exemple d'humains réconciliant le Ciel et la Terre. Nous vivons un privilège rare et cela nous vaut l'opprobre de ceux qui vivent les yeux fermés, ou simplement ouverts dans une seule direction. Oui, nous sentons tous un nouveau Dharma, et nous pouvons nous y tenir. Plus rien n'empêche d'avancer vers la transformation divine du corps physique, mais quels que soient les remous de l'histoire, l'aventure continue et nous concerne tous. «A la barbe des sages» disait Sri Aurobindo en parlant de l'infiltration du pouvoir divin dans la matière. Et il est vrai que cela se passe ainsi. Se libérer des enseignements, voilà vraiment le point essentiel pour faire taire le petit moi qui veut se sauver tout seul, alors que la vraie question est celle de la survie de notre espèce.