Bali
9 Avril 2003
La force a vraiment beaucoup travaillé
pendant quarante-huit heures, c'est rare que ce soit si long, et la
manière a varié. Avec un peu de chance, c'est le Supramental du
dedans qui commence à œuvrer. Celui qui se réveillerait de
l'intérieur. En effet, pour une fois, ce n'est pas la première
certes, mais c'était encore plus marqué, tout le corps était
pris dans un effet astringent. J'avais l'impression d'être
comprimé dans un gabarit légèrement inférieur à mon volume, avec
une énergie chaude qui ressemblait à Mahakali, mais qui aurait été
mélangée à quelque chose de plus doux quand même. Hier
après-midi, le cerveau a été enveloppé, surtout ce qui est
au-dessus du cou, par une énergie très puissante, qui force à
dormir, au moins une heure, rien à voir avec le pétillement sur la
nuque des premières années de transformation . C'est
beaucoup plus profond, je sens que la substance même de mon corps
physique dépend maintenant de la manifestation de la Force, qui fait
vraiment ce qu'elle veut.
Il
y a sans doute deux causes à ce travail très puissant, d'abord un
contact avec la Mère divine deux ou trois jours après mon arrivée,
où tout le corps a été enseveli d'une manière agréable dans un
océan étrange où de la conscience se mêlait à l'énergie. Je
crois que j'ai été définitivement nettoyé de la force magique
de Poona, qui m'était tombé dessus quand I m'avait trompé et
s'était payé une initiation à cent roupies. On avait renoué à
Goa sexuellement, car je ne voulais pas la quitter. J'ai eu des
images de cette période pendant le contact avec la Mère divine,
puis je me suis retrouvé dans la cour de la maison de Saint-Raphaël
où j'aimais tant jouer entre 6 et 10 ans. J'ai pleuré tellement
je me suis retrouvé à cette époque avec une foule de sensations et
les images de la cour et de la maison. C'était si vivant que je
n'avais pas l'impression que ce fussent des souvenirs. Après
cette expérience, j'ai éprouvé de la reconnaissance pour le
Divin et je crois que ma confiance en Lui augmente encore. La
deuxième raison de l'implication exceptionnelle de la Force (à
moins que cela continue à ce rythme ! ) est que c'était ici à Bali
la fête de Saraswati, très puissante dans l'île. Or,
sémantiquement parlant, c'est l'aspect de Mahasaraswati, une des
quatre faces du Supramental, qui me travaille le plus et le mieux
depuis 1977. Cela doit avoir eu une incidence.
14 Avril 2003
incroyable
expérience. J'ai voyagé seul avec la voiture. Deux jours
fantastiques dans un bon hôtel où j'ai marchandé, pris deux bons
massages, où j'ai fait du snorkelling et nagé. La deuxième nuit
je me suis réveillé, et j'ai senti l'atmosphère très
bienveillante de Bali, et j ai écrit un roman de science-fiction
dans ma tête. Suis reparti ensuite à Lovina, où je me suis senti
au fond d'un tunnel, portant un tas de choses à transformer, et
quelque chose se plaint de ne plus avoir de femme, mais cela n'a
pas duré. Reparti vite fait pour Amed où je passe une bonne journée
et nage dans la piscine où l'eau est très chaude en devenant bien
conscient de mon corps. Je ne dîne que de letchees et de durian, et
me couche à sept heures du soir en prévision d'une sortie de
chasse sous-marine le lendemain matin. Je dors 12 heures et n'arrive
pas à me lever ! Pas bien. Je dois faire une méditation spéciale
pour que la lumière descende et cela marche. Finalement, je pleure
un peu, car je me rends compte qu'une force agit pour m'empêcher
de sentir l'amour du monde, pour m'empêcher de le recevoir. Puis
je comprends que c'est la vibration de ma mère, c'est étonnant,
mais c'est ça. Je vais quand même chasser, car je rééquilibre,
et sens à nouveau l'amour m'envahir. Mais après le bateau, je
ne suis pas quitte avec cette force. Je laisse Amed pour Candi Dasa
et tout le long de la route, j'ai envie de serrer les dents, mon
corps penche dans les virages sur le volant, je sens que la
conscience de ma mère est là en moi, et ça dure...
A
l'arrivée, j'ai l'impression que je peux communiquer avec
cette conscience, et QU'ELLE ME TEND LA PERCHE: ne vois-tu pas tout
ce que je peux te donner, susurre-t-elle, et je me vois avec beaucoup
de pouvoir, et la satisfaction de réaliser mes désirs. En allant
faire quelques courses, j'étudie mon état d'âme, de plus loin,
c'est bien ma mère, je me sens fort, tout est fait pour moi;
j'existe seul au milieu du décor. Je souris et sais que
l'expérience va bien tourner car la force commence à prendre le
cerveau, en tout cas le cervelet, je me sens triple, moi, ma mère et
le Divin qui veut transformer tout ça: j'aurai des bons souvenirs
même si personne ne me croit. Et cette force qui verrouille l'amour,
invraisemblable, d'où vient-elle?
Ce
n'est quand même pas ma mère qui l'a inventée, que je sache,
mais elle vivait avec, c'est une force de pouvoir personnel, assez
panoramique, cérébrale et peu sensuelle, mais c'est vraiment loin
de moi et surtout c'est antidivin. En tout cas j'ai avancé ces
derniers jours car j'ai vu que seul le Divin peut faire ce boulot:
l'homme n'est pas de taille. Il faut le croire, puis le saisir
intellectuellement, il faut le comprendre, et tout ça ne suffit pas,
il faut le vivre, et puis des forces arrivent qui font oublier cela,
et il est alors nécessaire de revenir là-dessus, l'ancrer
davantage, jusqu'à la prochaine attaque. Un travail de titan si
j'ose dire. Natarajan fait du surf dans le ressac.
17 Avril 2003
Ubud.
Pour
une fois je suis fier. Je commence à comprendre ce qui se passe
réellement. En fait, je grimpe, et plus je grimpe, plus la force
descend bas, mais dans des univers dont on ne sait même pas qu'ils
existent. Je me farcis alors une crise: un logiciel archaïque
débarque, monte à la surface et cherche à me bousiller. L'autre
matin à Amed, j'ai été le plus fort. Je suis arrivé à faire
descendre de la lumière-force (petit mélange de conscience et
d'énergie supramentale) par la fontanelle et j'ai senti la
différence. A un moment, j'ai dû fermer les yeux et j'ai perdu
le contrôle du cerveau, mais avec le mantra j'ai senti que je
n'avais pas à m'inquiéter, et j'ai laissé faire (une
suggestion m'a dit quand même que j'allais délirer, sacré
cerveau ! ). Au bout d'un moment, le sale état de conscience était
bien dissipé, chassé du cerveau, mais il est resté longtemps dans
le corps. Il n'y a qu'à Candi Dasa que j'ai récupéré, à la
tombée de la nuit, et depuis, je me sens bien, mais comme d'habitude
je n'ose pas espérer rester là, alors que cela m'est vraiment
conforme. Toute l'activité mentale est en retrait et en même
temps à l'entière disposition de quelque chose que je ne peux pas
définir. Ce n'est pas un état humain. C'est un état nouveau,
étrange, il n'y a pas de centre, je me reconnais dans tout, mais
ce n'est pas clinquant comme Vasudeva ( sentiment hyper mystique)
de 1978, que j'avais expérimenté à Auroville. Cela ne voit pas
les choses du dessus, mais du dedans !
Inexplicable,
mais confortable et extrêmement approprié à ma personne. Cela ne
se doute de rien. C'est une sorte d'innocence absolue fondue dans
une connaissance intuitive instantanée. Il n'y a plus besoin de
saisir les choses, car elles sont la perception même. Ce sont les
fleurs qui me regardent, le ciel qui m'observe, le temps qui me
nourrit.
La
grande révélation, c'est que le cerveau est un organe comme les
autres. J'ai mis près de deux ans à m'approprier les intestins
de ma mère, et depuis novembre, je m'approprie les poumons de ma
grandmère, et d'ailleurs je crache encore pas mal. Bien sûr, le
cerveau est déjà à moi par tout le travail que je fais depuis
l'âge de cinq ans, mais cet organe est divisé en trois, et il est
clair que depuis Mayotte où la mort programmée et les peurs
ancestrales sont remontées, mon cerveau est en pleine
réorganisation. Des logiciels chimiques extrêmement puissants
semblent pouvoir profiter de mon sommeil pour me balancer des états
d'âme parasites de première grandeur.
Je
tiens le coup parce que je sens physiquement la force qui intervient,
dès que c'est possible. Souvent, je pense que quelque chose va
péter quelque part, et en général la Force se calme et me laisse
un peu de répit. Les jours comme aujourd'hui, je pourrais dicter
un livre entier sur de nombreux sujets qui concernent la
transformation.
Je
répète pour tous ceux qui n'ont pas compris, le Supramental ne
supériorise rien de ce qui est ancien. Je ne suis pas le
prolongement supérieur d'un sage ou d'un saint, ou même d'un
avatar. Le Supramental veut créer une conscience divine dans le
monde sensible, dans le monde sublunaire. Guénon doit se retourner
dans sa tombe, mais il pourrait comprendre s'il revenait. Je ne
suis pas un homme amélioré. Aucune éthique humaine ne peut
embrasser le plan. Il faut se laisser envahir par un autre type de
conscience, renoncer à se l'approprier, et alors, une nouvelle
perception cherche à se faire jour. Mais on subit à quatre-vingt
dix pour cents, ce qui revient à dire qu'il y a peu d'humains
assez souples pour faire ce travail.
En
comparant ma vie à une partie d'échecs, je viens de prendre une
pièce importante à l'adversaire, il n'avait pas prévu mon
changement de stratégie. Si je devais perdre quand même, car la
partie s'éternisera peut-être, je sais que les suivants
étudieront mon ouverture avec soin. Le plus drôle c'est que j'ai
conçu la «théorie des survivances dynamiques», clé de la
mutation solaire de l'humanité ( Les principes de la
Manifestation, dans Ecrits) avant d'être réellement confronté de
près à ce qu'elles sont.
Cela
aurait été plus logique dans l'autre sens: que j'en bave
autant et qu'il en sorte la vision des survivances dynamiques. Mais
non ! Il est vrai que le Supramenral commence par le dessus, et que
son pétillement dans la matière grise (1980/81) a été la période
la plus gratifiante de ma vie, d'un point de vue intellectuel. Puis
il y a eu cette descente à Sri Lanka en 90 me semble-t-il, d'une
sorte d'intelligence spontanée exhaustive, qui a servi de base au
livre en question. Maintenant, je suis confronté à ce que j'ai
vu, et donc pré-vu.
Le
Divin n'a qu'à se débrouiller.
18 Avril 2003
Ai
fini de lire le livre de G Van Krekken, vraiment excellent. Grande
précision historique, exagération involontaire sur le feu brûlant
de l'énergie divine, en réalité, le Supramental est assez
supportable. Il précise que Satprem semble se considérer comme le
seul héritier, il ne commente pas cette attitude, mais cite par la
suite des passages de Savitri et Nolini pour laisser entendre que
d'autres suivent la même route.
Le
titre c'est « au-delà de l'espèce humaine » et la
couverture ne paie pas de mine, mais c'est vraiment une synthèse
magnifique. Je me suis rendu compte grâce à ce livre que j'avais
sous-estimé Mère, d'une part, et que je n'avais pas saisi
d'autre part à quel point sri Aurobindo était un grand
intellectuel (à l'aise dans plusieurs langues). Finalement, j'ai
réfléchi sur leur histoire et pour les deux personnages, c'est le
début qui est le plus difficile à gober. C'est-à-dire la
révélation en prison qui change toutes les cartes du jeu, mais cela
passe encore, on peut lâcher prise et admettre que la vie d'un
avatar commence ainsi, mais pour Mère, pour un esprit moyen, non
intuitif, toute l'histoire du début est fort indigeste, en
particulier son mariage avec P Richard, à n'y rien comprendre
puisque elle le considère comme un être particulièrement hostile
au Divin. De même, la formation par Théon, dont on ignore pourquoi
il l'aide et ce qu'il lui apporte vraiment. Une fois passé le cap
d'Alipore pour aurobindo Ghose et l'histoire du mariage pour Mirra,
tout tourne comme sur des roulettes, mais vraiment, pour un néophyte,
les éléments invraisemblables du début n'aident pas à
entrer en communion avec le projet supramental.
Je
tiens à préciser, si le Divin me fait l'honneur de continuer à
me transformer, que mon itinéraire possède un trait commun avec
celui du Lion (plus facile à taper que Sri Aurobindo). J'ai été
emporté par une vision dynamique à 17 ans (décembre 67) et elle a
largement précédé la réalisation du silence mental intégral, qui
a surgi six ans révolus plus tard presque jour pour jour. Je ne
crois pas qu'on puisse utiliser correctement les illuminations
dynamiques, même celles provenant du Surmental, si le silence ne
s'installe pas en profondeur. Quand j'ai réalisé le soi, j'ai
senti que c'était en quelque sorte moins élevé que l'expérience
de 67, mais au moins ça restait là et je touchais enfin une clarté
omniprésente. Soyons donc prudents sur les procédures, on n'est
pas forcé de commencer par le soi, mais de toute façon il faut
passer par là pour exploiter ce qui vient de plus haut. C'est mon
avis, qui n'est pas une autorité suprême, mais qui doit faire
réfléchir, en particulier les femmes douées, qui feraient bien
l'économie du silence mental, histoire d'escamoter ce qui
détache des sentiments et des émotions, et de la prise directe sur
la vie.
Mes
bien chers frères, je plaisante aujourd'hui car j'ai remporté
une victoire, mais il faut en baver un maximum, et pour certains,
réaliser le soi pose des problèmes difficiles, mais les serrures
sans clé ne servent à rien et réciproquement.
Je
suis désolé de confirmer que ce yoga est très difficile mais c'est
le seul moyen de ne pas récupérer le Supramental en pavoisant. Le
Divin doit descendre dans des profondeurs inconnues sinon le cerveau
ne change pas. Or il est le centre de la perception, mes bien chers
frères, et c'est vraiment pas la peine de transmuter les cellules
des muscles sans transformer celles du cabochon. Mais le cabochon,
comme son nom l'indique, est cabochard. Hier, c'était bien, j'ai
senti un tyranosaurus rex, le même que celui de Jurassic park,
sourire au fond de mon cerveau reptilien. La mort s'est prise une
sacrée claque, et je m'attends à ce qu'elle se venge, mais je
ne sais pas encore comment. Un peu d'euphorie de temps en temps, ça
ne fait pas de mal.
6 Mai 2003
Je
me suis quelque peu étonné de rester dans une conscience stable
depuis la libération du mental génétique de ma mère
survenue à Amed. J'en ai profité pour faire un travail physique
intense sur une petite île où j'ai fait de la chasse sous-marine
tous les jours pendant une semaine, Nusa Lembongan, en louant un
bateau chaque matin. Ce séjour a été en quelque sorte décoré
d'une attaque mentale inconnue le second soir. J'ai eu une sorte
de paranoïa dans une chambre chargée de vibrations lourdes de
drogues dures, et les forces adverses en ont profité pour jouer à
me déstabiliser. Je me suis profondément recueilli en acceptant le
Divin, ce qui a fait monter à la surface une voix très puissante,
mécontente, impérieuse, qui semblait m'appartenir: «Ainsi, tu
n'es plus qu'une marionnette», m'assène-t-elle, et je
ressens comme une morsure profonde ou un coup de couteau. Je reste le
bec dans l'eau et les larmes me montent aux yeux une ou deux
minutes. Puis la solution se forme, et prend donc une allure
sémantique et je réponds: «Je préfère être une marionnette
divine qu'une marionnette de la nature.» En fait, une semaine
après, je n'ai toujours pas découvert à qui pouvait appartenir
cette voix qui me reprochait d'être une marionnette. Après cette
réponse j'ai pu m'endormir facilement et il ne s'est plus rien
passé de nouveau sur cette île.
Avant
hier soir à Ubud, alors que j'étais très décontracté et
serein, une voix immense à parlé en moi et m'a dit: « Tu
n'as rien à craindre ». J'ai apprécié cette injonction,
car je suis encore parfois traversé par des souvenirs de toutes les
épreuves que j'ai subies dernièrement. Mais en l'occurrence,
l'injonction semblait hors de propos car je me sentais très bien
quand elle se forma dans mon esprit. Hier après déjeuner, je me
suis soudain senti mal, et mon corps est devenu tout « spongieux ».
En allant me reposer à ma chambre, ma personnalité s'est en
quelque sorte effondrée, et heureusement je n'ai eu absolument
aucune réaction. C'était comme si soudain j'étais privé de
moi-même, et qu'il ne reste que l'individu biologique et
physique, englué dans la matière, et sans aspiration. J'ai dormi
un peu et somnolé tout l'après-midi en acceptant cet état
désagréable. J'ai dormi à la tombée de la nuit, me suis
réveillé un peu plus tard, et là, une expérience formidable a
commencé !
La
conscience supramentale du premier degré s'est installée. C'était
très étrange: le moi qui formait le discours intérieur à ce
moment-là ne voulait absolument pas se reconnaître dans l'individu
habituel que je suis. Ce moi m'a affirmé qu'il n'était jamais
allé faire de la chasse sous-marine à Nusa Lembogan, et j'ai
trouvé ça très drôle. Ensuite, la conscience d'Ishwara s'est
manifestée, et j'ai vu qu'on vénérait une partie de mon être
psychique en Inde, car je voyais une sorte d'effigie, portée par
un groupe, effigie qui me représentait. Le moi immense m'a alors
dit ou révélé quelque chose qui ne peut pas être compris par
l'intellect ordinaire. La phrase très puissante qui s'est formée
est la suivante: C'est le dialogue du Moi avec lui-même qui
détermine tous les événements extérieurs.
Sur
le moment, c'était très clair que c'était vrai, et cela m'a
confirmé que mon enseignement sur la volonté solaire est vraiment
d'origine supramentale. A force d'être si conscient, je me suis
rendu compte que je m'étais installé dans une dimension où le
temps ne s'écoulait pas !
C'était
très agréable, absolument immense, une réalité dans laquelle les
distances sont abolies. Il me paraît assez évident que le jour où
il sera possible de s'installer physiquement dans cette
dimension, le processus de vieillissement du corps sera pratiquement
ajourné. Je dois cependant ajouter que dans ce lieu, toute la
manifestation apparaît comme irréelle, si elle n'est pas faite
pour mener précisément là. C'est donc tout à fait normal qu'une
demi-journée plus tard, je ne me sois pas encore vraiment remis
d'une incursion aussi précise dans l'avenir très lointain de
l'humanité. Expérience vraiment exceptionnelle, d'où sortait ce
Moi ? Impossible à savoir, ai-je été «adombré» sans m'en
rendre compte ? Ou est-ce le fond le plus profond de tout être
psychique ? Pas de réponse.
PS.
Ai rencontré la veille de cette expérience un homme au karma
occulte gigantesque, avec une intelligence vraiment très large, mais
qui est très attaché aux sensations, puisqu'il se définit
lui-même, sans la moindre trace de culpabilité, comme étant
bisexuel. Sa maison est habitée par un pouvoir tantrique puissant,
malheureusement vrillé de l'intérieur par l'énergie diabolique
que X. a ramassé chez un célèbre personnage parisien. X a admis
que son énergie pouvait être purifiée, d'autant que le tarot
que je lui ai interprété correspondait exactement à ce que je
venais de lui dire. Je lui ai aussi affirmé qu'aujourd'hui
l'énergie divine pouvait descendre très bas sur les plans de la
manifestation, et qu'il était possible qu'il soit purifié par
la Mère Divine si son aspiration était sincère et qu'il se
soumettait. Mais X est profondément rebelle et il n'a finalement
pas voulu considérer comme un avertissement la menace inscrite dans
son tarot : modérer ses appétits ou bien finir dans la fausse
force de la luxure et de la volonté personnelle chaotique. La
conscience qui est descendue en moi, hier soir, pourrait facilement
aider ce genre d'individu, s'il l'accepte, et si elle continue
à se développer en moi. J'ai besoin que les meilleurs
représentants des spiritualités archaïques reconnaissent
l'évolution divine de la Terre, alors que pour le moment ils
s'acharnent à vouloir la sauver, principalement pour préserver
leurs propres prérogatives: une célébration de l'existence où
les sensations immédiates jouent encore un trop grand rôle pour ne
pas étouffer l'être psychique.
Je
ne sais pas encore comment X va tourner car il peut représenter un
excellent instrument aussi bien pour les forces de lumière que pour
les forces adverses. Sa structure énergétique astrale lui confère
un ascendant énorme sur beaucoup d'êtres humains moins larges, et
sous prétexte de les libérer, il peut aussi bien les pervertir que
leur montrer le chemin. X semble pourtant décidé à se libérer du
diable dont il s'imagine avec une certaine complaisance, maîtriser
l'énergie. Je ne crois pas son information selon laquelle Bali
serait particulièrement appréciée et peuplée par des expatriés
prêts à vivre une vie spirituelle. Il s'agirait plutôt de
personnes ressemblant à X lui-même, trop intenses et trop libres
pour supporter la civilisation occidentale, mais qui rencontrent sur
le chemin les mêmes obstacles intérieurs qu'ils trouveraient
partout ailleurs.
21 Février 2004
Le
Divin a profité de mon installation à Bali, à Padang Bai, pour
mettre les bouchées doubles et j'ai crié grâce il y a trois
jours, tant le travail dans le corps était intense. Il est clair que
je suis allé sur le plan causal supramental début Novembre, juste
avant la conjonction harmonique dont Z fait si grand cas. Le rêve
conscient est resté très vivant. Un astéroïde me tombe dans la
main et la brûle et se transforme aussitôt en bijou enchâssé dans
une monture à quatre étages dont chaque pièce est faite d'une
pierre verte, de la turquoise. Ou de la malachite. Les images
n'étaient pas plus fortes que dans les autres rêves spéciaux que
je fais depuis l'âge de 21 ans à peu près, mais cette fois
l'intensité était maximale. L'astéroïde était encore brûlant
et même fumant, et d'un coup il refroidit et devient le centre
d'un penditif, sans doute en argent, avec quatre niveaux
d'inscrustation de pierre, en s'élargissant vers sa base, et
cela me réveille. Mon interprétation est que j'ai encore vaincu
une couche d'inertie fondamentale qui résistait à la perforation
supramentale, peut-être dans le corps, ce qui ouvrirait un passage
vers la conscience des os, peut-être dans l'Universel, auquel cas
un échelon irréversible aurait été franchi, une victoire de la
lumière sur l'espace et le temps, en tout cas l'étendue
infinie, dont la masse ou l'essence, pour peu pondérables qu'elles
soient, constituent un bain de matière récalcitrant à la
Transformation. Bref, je suis rentré en France avant noël où j'ai
donné un séminaire sur les quatre mystères, me suis reposé chez
mon ami, jusqu'au jour de l'an, puis arrivé à Nice le 3
janvier, j'ai commencé à reprendre un texte que je veux mettre en
ligne sur le web, et peu à peu, la rédaction m'a mangé la tête
et j'ai travaillé jour et nuit. Avant mon départ à Bali, j'ai
rencontré l'extraordinaire Z qui à mon avis mélange des
forces blanches qui me sont inconnues, et une semaine plus tard, T,
qui suit ma formation aux quatre mystères depuis le début,
c'est-à-dire depuis Pentecôte 2003, se présente comme le Messie
et parle de moi comme le christ du cerveau. Devant un groupe d'une
vingtaine de personnes dont la plupart de mes pseudo-disciples. Je ne
l'agresse pas, mais lui laisse entendre que cela peut être vrai ou
du délire et que je ne peux me prononcer. Au point de bizarreries où
nous en sommes question millénarisme, pourquoi pas, mais il faudrait
qu'il soit adombré, parce que je ne le sens pas si évolué que
cela malgré ses déchiffrages de codes par numérologie sacrée.
Je
dors peu dans l'avion, le 1° février, et arrivé à Bali, malgré
le décalage horaire, je fais des courses à Kuta. Je récupérerai
le soir après un bon massage où je refuse les avances de la
masseuse (désirable) sans trop d'efforts, alors qu'il y a quatre
ans que je n'ai pas fait l'amour, et qu'une envie est forcement
montée mais sans s'accrocher. Bref, le lendemain je me trouve dans
un état extraordinaire qui dure quarante huit heures et qui m'a
inspiré le début du poème La mort blessée. Puis je prends
possession de ma belle maison louée à Padang-Bai, une petite
merveille, avec une chambre à air conditionné où je maintiens 25°
degrés la nuit pour le cerveau. Là je me repose, je me sens très
bien, et commence à récupérer. Je pense que ma mère aurait aimé
me voir ici, et je retrouve intact l'amour que je lui ai porté
avant que les choses ne se gâtent quand j'ai pris la direction de
son hôtel meublé et qu'elle a voulu continuer à faire la loi à
plus de quatre-vingts ans. Je pleure un peu. Pareil pour I, mon
esprit se voit une seconde avec elle ici même, comblé, et elle me
manque un petit quart d'heure. Puis je décide de travailler
l'alimentation, j'arrête le café, me fait des jus de fruits,
vais au restaurant du propriétaire de la maison, excellent, et là
la Force ne me demande plus mon avis et peu à peu de jour en jour,
elle travaille un peu partout et augmente, surtout derrière la tête,
au niveau des reins, et dans les jambes. Finalement, la Force
travaille maintenant avec un levier de vitesses que je ne contrôle
pas du tout. Le fait est que le corps à un moment est devenu
tellement conscient que c'était insupportable, parce que la nuit
la force accélère, et cela me réveille, carrément. J'ai profité
de tous ces événements pour faire le point. Z et T veulent
m'entraîner dans un Plan, mais je ne sers que le Divin, et pour le
moment le millénarisme, le sauvetage de la planète, les messages
des maîtres de sagesse sur la cinquième dimension, tout cela ne me
parle pas beaucoup.
Ce
matin, nouveau petit sanglot, très court, sur ma mère. L'évidence
de mon échec à son égard. Gros comme une maison qu'elle a choisi
de nier toute transcendance pour n'avoir de compte à rendre à
personne. L'orgueil personnifié. Réfractaire à toute autorité,
y compris la sienne sur elle-même. Retour du sentiment étrange qui
m'est parvenu un soir à Ubud, fin novembre, près d'un an après
sa mort, ma mère demandait la permission au Seigneur de se
dissoudre, d'être détruite plutôt que de revenir se frotter à
son karma. Vu ce matin, une seconde, mais c'est suffisant, que des
gens très intelligents comme l'était ma mère, décident
consciemment de nier le Divin, alors qu'ils pourraient devenir des
instruments puissants. Pourquoi? Je ne comprends toujours pas
l'avantage de s'imaginer qu'on est entièrement libre, qu'on
peut faire ce qu'on veut à tout instant, suivre ses caprices,
inventer le Réel par le mensonge systématique. Mais maman était
comme cela.
22 Février 2004
J
ai dû annuler une sortie en pirogue de chasse sous-marine au dernier
moment, car la Force s'est remise à s'abattre d'un seul coup,
et à la place j'ai mangé, et maintenant j'écris après m'être
épuisé une fois encore contre mon programme de jeu d'échecs. Je
crois que le travail prend une autre tournure, car je n'ai
finalement pas eu le moindre regret à renoncer, et j'ai envie
maintenant de cette fièvre, comme si c'était vraiment mon
boulot de me transformer. Réveillé à deux heures du matin pour
avoir trop pris de bouillon au gingembre, avec des brûlures
d'estomac, ça passe en buvant de l'eau et voilà que je repars
dans le séminaire sur les 8 chemins, comme si je le donnais, avec
des visions remarquables. La prochaine fois, je prendrai la peine
d'enregistrer, je dois aussi prendre au sérieux mon travail de
maître, dont je me foutais éperdument jusqu'au séminaire de la
Pentecôte, refusant de m'identifier à un gourou, mais mon groupe
m'a suivi patiemment et à la suite de mes deux premiers voyages à
Bali, j'ai senti que je pouvais les concerner vers le supramental,
après avoir abordé depuis 98 l'Éveil et le soi. Si je veux tant
soit peu développer mes interventions, ce qui me ferait plaisir, il
y a un minimum de bases à établir.
J'ai
distingué la peur de ne pas être à la hauteur de la peur
d'échouer, et j'ai vu qu'il s'agit de deux choses totalement
différentes. Avec la peur de ne pas être à la hauteur, l'obstacle
prévaut sur le but, et il encombre de toutes ses menaces. Moralité,
les gens intelligents sont souvent des lâches car ils voient les
obstacles et les conséquences indésirables de leurs actes. La peur
d'échouer concerne les gens courageux, forts, mais sans doute
assez bêtes. Ils s'imaginent que le but prévaut sur l'obstacle,
et comme ils ont peur d'échouer, ils se le cachent, l'obstacle,
le transforment en ballon de baudruche, ils sous-estiment donc
l'adversité pour être sûrs de rester fidèles à leur but, et de
s'y atteler sans faire dans leurs culottes. Il y a annulation
magique du potentiel de résistance à leurs œuvres. Ils sont
arrogants, audacieux, et ne tiennent pas à considérer l'obstacle
comme pouvant être plus fort qu'eux. Ils fantasment la victoire en
lieu et place de l'observation de l'ennemi, de l'adversaire, du
piège. Cette différence était pour ainsi dire vivante,
comme si j'avais accès aux clefs décisionnelles du genre humain,
clés subjectives s'entend. J'appartiens à la catégorie des
« pas à la hauteur », ce qui a du bon, car je ne prends
pas de risques exagérés. Ceux qui ont peur d'échouer et qui
affichent de l'assurance m'ont toujours énervé et je comprends
pourquoi. Premièrement leur confiance en eux est surestimée,
secundo ils s'attribuent les mérites de leurs victoires. Tertio,
le lâcher-prise, ils ont de la peine à voir de quoi il
s'agit avant d'avoir touché le fond. Mais dans bien des
circonstances leur attitude est plus appropriée que la mienne, parce
qu'ils évaluent mieux leurs chances, alors que moi je les
sous-estime. En tout cas, ces deux tribus ne sont pas prêtes de se
réconcilier. Les pas à la hauteur méprisent le caractère
narcissique et conquérant des peur d'échouer, et ces derniers en
veulent aux pas à la hauteur d'être trop souples, trop fuyants,
férus d'atermoiements, et incapables de prendre de grandes
décisions. Deux espèces différentes. Dans un couple, s'il y en a
un de chaque catégorie, cela ne manque pas de sel. Celui qui a peur
d'échouer décide pour les deux, et s'il rate, le pas à la
hauteur lui dit méchamment: «je te l'avais bien dit», ou pire,
prend un air détaché, et dit: « cela ne m'étonne pas outre
mesure » avec plein de sous-entendus. Vexé, le type peur
d'échouer rétorque «et toi qu'-est-ce que tu aurais fait à ma
place?». L'autre hésite (ce qui horripile la victime de son
erreur) puis dit «en tout cas, pas une connerie pareille» en buvant
du petit lait, tout en noyant le poisson. Mais encore ! Insiste le
peur d'échouer. «Je ne sais pas moi, j'aurais réfléchi,
consulté, attendu».
—Bref
tu n'aurais pas pris tes responsabilités, comme d'habitude !
—Tu
décides de tout, alors ce n'est pas à moi qu'il faut te
plaindre quand tu te plantes, puisque tu ne m'écoutes
jamais !
—Tu
veux dire que ta solution était meilleure sans doute !
—Tu
ne m'as même pas demandé mon avis !
—Ah !
Parce que pour une fois où je me trompe, toi tu avais la bonne
solution !
—Pour
une fois, pour une fois, c'est vite dit, moi je trouve que tu as
pris l'habitude de te planter, okay, faire des erreurs ça devient
une manie chez toi, et en plus je n'ai pas le droit à la parole !
—Tu
ne proposes jamais rien !
—De
toute façon tu ne m'écoutes pas, à quoi bon?
Cela
peut durer toute la nuit.
L
prétend qu'il y a déjà douze inscrits pour le séminaire de
l'Ascension, qui devrait me permettre de peaufiner mon système des
quatre mystères. La subjectivité humaine, il faut l'accueillir ou
alors on en crève. Pour L, qui ne se fait pas de bile, il est bon
d'entourer T pour lui éviter de dérailler (sic), et elle
mentionne sa présence à une séance saï Ma, la jeune (pour un
gourou) indo-française qui mélange tout et qui met toute la gomme
pour réveiller ses ouailles. C, nouvelle venue dans le groupe, très
intelligente mais qui est refermée sur elle-même et commence à
s'ouvrir, « communiquerait » avec T, tandis qu'E dit
de son côté dans ses e-mail que T continue ses déclarations
tonitruantes, c'est-à-dire qu'il ne tiendrait absolument pas
compte de mes doutes sur son statut de messie qu'il nous promet
pour dans deux ans à peu près. On l'entoure et on ne le dément
pas. Il ratera le séminaire de l'ascension pour aller, comme
Moïse, sur une montagne sacrée, où il reçoit des infos. Tout le
monde aime beaucoup ce garçon qui a quelque chose de pur et de
touchant, mais il est incapable de citer ses sources, il est très
gauche quand il s'exprime. Il déchiffre tout, du matin au soir,
passe son temps à trouver des codes. Il voit la France jouer un
grand rôle dans quelques temps. Trier là-dedans me semble
impossible, le problème c'est que sorti du judéochristianisme, ce
n'est pas son rayon. Je dois mentionner qu'il prétend que j'ai
été Judas, mais en dehors d'un rêve étrange qui m'a calé me
semble-t-il à l'époque du christ dans la région, je n'ai aucun
souvenir d'un trip pareil. En dehors de Djalnoun, peut-être
égyptien, et d'un maître taoïste, je n'ai pas de mémoire karmique
vivante. Mais J, qui a des flashs, prétend que je suis adoré en
Inde et que je suis même passé sur ma tombe cette vie-ci, et cela
me rappelle aussi la descente à Ubud, qui a duré deux heures
peut-être, où je suis sorti du temps, et où une immense identité,
qui prétendait n'avoir rien à voir avec moi, en tout cas avec
celui qui venait de faire de la chasse sous-marine, a pris possession
de moi dans une couche du supramental, mais ce n'était pas une
entité extérieure, donc c'était forcément une partie de
moi-même, et d'une hauteur remarquable, si je m'en tiens au
ressenti. On portait mon effigie en procession, mais mon ne
veut pas dire grand chose en l'occurence, puisque cela appartenait
au Moi qui était descendu. J'ai l'impression que l'identité
divine peut procéder par petites touches, nuances, indéfiniment, et
qu'il y a toujours au fond un Moi essentiel, mais qui se manifeste
à différents degrés de pureté, d'intensité, selon les
circonstances, le boulot qu'il y a à faire, les événements
terrestres. Je m'y retrouve bien, mais les passages où la force
travaille dans l'opposition sont encore difficiles, envie absolue
de ne rien faire, où je peux rester plusieurs jours impuissant, avec
des couches à traverser qui n'en finissent pas, déni du corps,
méprise de l'incarnation, nostalgie des élans vitaux, sentiment
de solitude exacerbée, incroyable, sans parler des frémissements
nerveux autour des testicules quand je suis contrarié. J'ai
peut-être commencé la transformation du mental physique, au
service de la mort, et ça explique les contrastes assez violents que
je dois subir. Quand ça dure plusieurs jours, la Force se retire
quarante-huit heures pour que je retrouve mes marques, ou en tout
cas, agit de manière plus discrète, comme cela vient de se passer.
C'est réglé au quart de tour. Il semble qu'après vingt-cinq
ans de contact, je commence à comprendre comment ça fonctionne. Il
faut s'aligner, ou trahir, ou péter les plombs, ou encore ralentir
comme je l'ai fait volontairement en 82, au risque de tout perdre.
Souvent
le sens apparaît après l'expérience, ce qui est frustrant, très
frustrant, parce qu'on se retrouve dans un état de conscience
inconnu, on ne sait pas d'où il débarque, ni à quoi il sert, et
on n'arrive pas à s'en dépétrer, et on ne sait pas combien de
temps cela va durer. En tout cas cette phase a duré de 1998 à l'été
2003. Mes poumons sont encore plein de saloperies de la lignée du
côté paternel, mais ça s'atténue et c'est de moins en moins
gênant. Mais cette deuxième vague de purification a commencé fin
septembre et n'est toujours pas terminée, alors que j'ai senti
un net progrès à Nice mi-janvier.
Je
m'approche petit à petit de l'explication du 27 décembre 1967,
où une voix d'une puissance incroyable m'a dit « Je suis
toi », avec laquelle j'ai dialogué quatre ou cinq heures
sans parvenir à la croire. Cette identité est inconcevable,
informelle, et elle est toute conscience. Je dois admettre que c'est
moi, tout au fond, et que cela peine à se manifester, bien que le
supramental soit forcement destiné à ça. Il m'apparaît
maintenant que la puissance de cet être est terrible et s'exprime
en particulier dans le sommeil, dans mes rêves spéciaux. Encore
deux ou trois nuits en arrière, j'ai mis en déroute des
adversaires nombreux qui voulaient m'abattre, comme Bruce Lee en
quelque sorte, au moment où ils me repèrent dans l'ultime
cachette, je bondis sur eux, pour faire comme si je faisais exprès
d'être démasqué, et là, c'est la déroute. Je ne peux pas
apprécier le temps de ces rêves spéciaux, mais il y a chaque fois
un scénario, et finalement, il n'y a que des forces les unes
contre les autres. Rien d'autre. Mais dans ces rêves-là, je
n'apparais pas du tout comme dans mon corps physique où je suis
plutôt yin, détaché, effacé. J'ai une puissance incroyable et
personne ne me résiste; il y a peut-être un rapport entre le moi de
67 et mes pouvoirs dans le monde décisonnel au fond du sommeil. Je
m'élargis énormement et le monde divin commence à m'intéresser
autant que la vie qui m'avait récupérée pendant près de quinze
ans. Au moins, j'aurai tout vécu et je ne regrette rien. De toute
façon, je le répète, la force n'a jamais cessé de travailler,
même quand je la laissai faire sans zèle et que je menais ma vie
d'homme, heureux et satisfait. J'en connais un bout sur
l'identification, et ne me laisse plus prendre à ce jeu débile.
La Force travaille et me transforme, parfois je suis divin, parfois
humain, et parfois à moitié noyé dans les régressions de la
mémoire évolutive. Je ne sache pas d'autre chemin.
23 Février 2004
Il
y a des moments où je souffre tellement insidieusement que je ne
vois pas le rapport entre l'immense connaissance que je possède
aujourd'hui et cette souffrance sournoise. Finalement, je me
rapproche doucement de la réponse. Il y a beaucoup, beaucoup de
conscience matérielle dans l'être humain. La preuve est
constante, l'attraction que peut susciter le passage d'une femme
même chez les grands yogis, et je vois de plus en plus qu'on ne
peut pas séparer cette conscience de la conscience spirituelle,
puisque le rôle du cerveau c'est justement d'organiser de la
conscience spirituelle dans un milieu, une écologie, ou de canaliser
vers le haut, par le mental, la conscience matérielle du corps et du
moi écologique, conscience que possèdent au plus haut point les
animaux. Les petits chats affamés qui viennent réclamer de la
nourriture depuis que je suis à Padang Bai sont très conscients de
la faim, il n'y a qu'à voir comment ils s'y prennent. Même
s'ils ne savent pas qui ils sont, ils doivent manger et le
ressentent à un point inimaginable. L'un d'entre eux (ils sont
deux) est parvenu à emmener un petit maquereau, de la taille d'une
grosse sardine, que je faisais décongeler pour lui dans la cuisine.
Alors qu'ils ont peur que je les approche, même quand je les
nourris, il a pris le risque de me rencontrer, de traverser la maison
et de repartir avec le poisson, énorme pour lui. Il semble que ce
soient des chats si mal nourris qu'ils ont cessé de grandir, trop
vite. En tout cas l'un deux est adulte me semble-t-il, et il
possède une taille ridicule, reste à comparer à celle d'autes
chats balinais que je croiserai, il n'y en a pas tant que ça.
Je
crois aussi que c'est la conscience matérielle qui produit les
addictions. Un système souverain et souterrain exige la cigarette,
l'alcool, la drogue, le sexe, et le moi d'au-dessus, le moi de
l'identité qui est soi-disant un moi spirituel ne peut rien faire.
Les résolutions sont insuffisantes. Cette autonomie du principe
d'en-dessous est vraiment décourageante. Donc les tantriques ont
raison. Si l'on ne veut pas sauver son âme, inutile d'opérer la
différenciation de ces deux consciences dans un monastère. Si l'on
veut vivre incarné, c'est beaucoup plus difficile, il faut voir en
face que la conscience matérielle et la conscience spirituelle sont
inséparables. D'où ce que j'ai expérimenté quelque temps, un
érotisme libre et sans tabou mais vécu dans l'abandon et la
gratitude, avec peu de perte d'énergie. J'ai toujours eu
l'impression que cela libérait des frustrations, des refoulements
qui ne m'appartenaient pas en propre, mais il n'y a qu'avec I
que les choses se passaient ainsi. J'ai cru un moment que la
sexualité allait faire disparaître le contact avec le supramental,
mais comme les chakras inférieurs avaient été indondés de Force
en 80, 81, et début 82, le retour à la sexualité a juste
ralenti l'action supramentale, et c'est justement ce que je
demandais. Mais j'ai dû renforcer le besoin par la même occasion.
Il y a eu des moments de retour du désir très violents depuis que
j'ai arrêté la sexualité. Mais là aussi, ce sont des
expériences incroyables, on va croire que je les invente. J'ai
senti la femme dans ma chair, son besoin dans ma chair, c'était
terrible, c'était comme l'ordre d'y revenir, un ordre donné
par une autorité incoercible, Ah tu veux te passer de la femme,
mon bonhomme, tiens, prends ça dans les gencives. Tout le corps
n'aspirait plus qu'à la caresse, sentir des cheveux, sentir la
pression d'une peau sur mon propre corps, c'était insupportable,
c'était une sensation physique de manque, impitoyable, et qui m'
a vraiment pris de court, et ce n'était même pas sexuel, ni lié
à aucune de mes conquêtes, donc ce n'était pas de la mémoire,
réellement comme une faim dévorante. C'est là que c'était
très fort, je n'avais pas envie de faire l'amour mais j'aurais
tout donné pour embrasser la nuque d'une fille, sentir et caresser
ses cheveux, même pas le moindre petit fantasme grivois. Un
attachement d'une subtilité grandiose. Pas une grosse corde, comme
les cordes lisses des gymnases, non, un filin de titanium d'un
millimètre de diamètre qui épuiserait un chalumeau de perceur de
coffre-fort, et qui serait tiré en droite ligne depuis l'époque
des dinosaures. Un truc insensé après autant de mantra, de rigueur,
de temps chaste qui semblait avoir mis de la distance, et non, au
contraire mon neveu, puisque tu as repris du poil de la bête
(c'était en août 2002) tu ne vas pas t'imaginer qu'à
cinquante-deux ans le désir va te laisser tranquille. Tu préférerais
être un vieillard?
J'ai
sangloté en roulant sur mon scooter, et je crois que la force a
travaillé par la suite dans mon sens.
Peut-être
que le mental est un champignon qui pousse sur la conscience
matérielle, la faim, la peur, le désir, la conscience du
territoire, la sensibilité à la température, le sommeil, le
bâillement et l'éternuement, l'érection naturelle chez les
hommes, les règles. C'est ce que pensent les darwiniens, et quand
on sait qu'on possède à peu près le même code génétique que
les chimpanzés, ça donne à réfléchir. Et ce champignon ne libère
de rien. Il peut soulever vers le haut la conscience matérielle,
rendre les plaisirs plus fins, plus raffinés, il peut trier les
peurs, départager les vrais dangers des craintes, et organiser
l'appétit par la diététique. Mais le mental ne supprime pas une
seule parcelle de la conscience matérielle. Il la recouvre, il peut
l'embellir, et s'il s'acharne il parvient à la modérer, c'est
tout, ça ne va pas plus loin. J'en suis convaincu. La loi est
terrible, et je découvre ce dont Sri Aurobindo parle dans Savitri
que je n'ai pas encore lu, loin de là, sauf quelques passages. La
loi de la mort est terrible. S'affranchir de ça, il faut être
fou, fou de Dieu. Cela tombe bien car je suis justement un fou de
Dieu.
De
toute façon, que le mental soit une extension supérieure du vital,
ou que ce soit un autre plan, indépendant, qui se mélange et
s'enchevêtre dans le vital, cela ne change rien. C'est
extraordinaire. Que l'évolution monte, ou que le Divin descende,
c'est exactement la même chose. L'homme se farcit la rencontre
du courant ascendant et du courant descendant. Il n'est plus le
stupide baboin rusé au mental cruel et embryonnaire et il n'est
pas l'ange qui obéit à Dieu les doigts dans le nez, et en tire sa
félicité. Il est coincé l'homo sapiens sapiens, sri Aurobindo
l'a vu et il semblait inquiet, la perfection d'un seul homme
peut encore sauver le monde, dit-il, nous serions donc dans de
beaux draps. Triomphalement cons et destructeurs. Il en jouit et il
en crève, l'homme, d'être à la jonction de ce qui monte et de
ce qui descend... Il s'accroche au baboin et pleure l'ange, et ce
n'est jamais de sa faute, bien sûr. Le courage de lutter,
d'apprivoiser, d'amadouer la conscience matérielle, il
semblerait que ce soit le luxe de quelques âmes d'élite, ou
pourquoi pas, spécialement expérimentées, vieilles comme on dit,
mais l'évolution c'est aussi les pervers qui faisaient des
"chenilles" dans les bains douches de san Francisco, les
thaïlandaises qui vendent leur fille de dix ans au gros porc
européen qui sort le plus de dollars, c'est l'Afrique décimée
par le sida, les animaux torturés en labo pour la gloire de la santé
humaine, et toutes ces merdes-là dont aucun avatar ne nous libèrera
jamais, même s'il dénonce mieux que les autres, et montre le
chemin avec de jolies paroles fleuries qu'on inscrit aux portes des
temples pour mieux les oublier. Oui, la conscience matérielle, je me
bats contre elle depuis vingt-cinq ans, elle ne m'a pas encore eu,
mais la guerre franche contre le mental physique, qui s'est
déclarée à Mayotte, bien que j'en sorte vainqueur, me montre le
vrai dessous des cartes.
Pourquoi
vouloir sortir de cette condition? Tout ce que je peux dire, c'est
que je dois suivre ce qui m'arrive et l'intégrer avec les moyens
du bord. Une intelligence amoureuse du réel, au moins j'ai ça, et
pas mal de respect pour le Divin. Est-ce que ce sera suffisant pour
continuer? Peut-être à condition que j'accepte ma situation. Je
suis là pour apprendre à surfer sur la vague d'un raz-de-marée.
Et dès que je me félicite de prendre un tube et de me maintenir
dans un rouleau, ça me fait casser la gueule et le corail attend de
me déchirer.
S'
il y a la moindre, je dis bien la moindre complaisance, la moindre
vanité, infinitésimale, qui se mélange à l'ananda pur, l'ananda
divin, tout s'écroule. C'est comme s'il fallait éradiquer
« l'ivresse existentielle », un sentiment assez beauf,
pas très lourd, mais qui n'est pas de la vraie gratitude, ni de la
vraie reconnaissance, mais un truc opportuniste qui ne manque pas une
occasion de s'arrêter en territoire conquis pour en jouir. Il
existe des tas de contrefaçons de la satisfaction pure, et même
cela remonte des ancêtres, parfois je regarde une fille et je sens
que c'est le regard de mon père, même pas le mien.
Je
ne peux plus supporter les gens qui sont là-dedans, l'évolution
maîtrisée. Ils ne lâchent pas assez de lest, ne s'éloignent
pas suffisamment de leurs certitudes, ils ont encore besoin de se
rassurer avec du contrôle, mais comme c'est assez habile, ils
considèrent que c'est de la maîtrise, le seul moyen de garder les
pieds sur terre. Je leur fais peur avec le Supramental, mais ils
feignent un intérêt certain, tout en rejetant vers l'inaccessible
ce dont je cause pour rester dans les limites de la convenance,
ne pas prendre feu, car je pourrais leur donner envie de prendre feu,
de s'enflammer pour de vrai pour le Mystère, et cela ne les
intéresse plus. Ils ont tiré leur épingle du jeu, ils savent
surfer dans les petites vagues pour ne rien déranger, ils ont une
vie sexuelle intense, ils ont une famille, ils se prennent pour ceci
et cela, ils ont forcément tâté du zen, de la psychanalyse, et
peuvent citer de mémoire deux ou trois maîtres spirituels, et puis
tout ça tourne en rond, ils ont leur système, et ne peuvent pas
aller plus vite. Les enfants ! Les responsabilités ! La carrière !
Alors ils surfent aux heures de pointe, se partageant des
vaguelettes, ils parviennent à résister aux nouvelles tentations
sexuelles, savent qu'ils ont un inconscient, ils évoluent, mais
contrairement aux mutants, ils évoluent à certaines conditions.
Si
leur évolution entre dans un cadre, ils avancent, s'il faut
modifier, élargir, ils préfèrent la structure existante, et
plafonnent en regardant les choses de haut. Ils dégagent un bonheur
convenu, sortent haut la main des discussions épineuses où
s'avérerait leur superficialité, car en quelque sorte ils
assument ce qu'ils sont, et se débrouillent pour qu'on n'ait
rien à redire là-dessus. C'est de la matière évolutive gâchée,
gaspillée, mais c'est comme ça, et le plus souvent ça pète plus
haut que son cul, ça cherche à s'épater soi-même, ça se court
après. C'est pathétique. Cela se félicite également d'être
parvenu jusqu'ici, et pourtant c'est si peu. Mais avec le
Supramental cette vision, paradoxalement, n'entraîne aucun mépris,
aucun jugement, c'est plutôt l'impression d'être au zoo qui
domine, tiens ils en sont encore là, viens-je du futur moi-même
personnellement ou sont-ils attardés?
Je
suis impuissant vis à-vis de tous ceux qui sont satisfaits
d'eux-mêmes, leur carapace de vanité est indestructible.
Maintenant l'on peut être serein et même très serein sans être
satisfait de soi, je ne vois pas comment on peut évoluer si on se
débrouille toujours pour que rien ne manque. Refouler le désir
d'être Dieu, c'est à cela qu'ils sont arrivés les modernes,
mais je suis désolé pour eux, ils vont le payer très cher, je ne
sais pas encore comment ni quand, mais refouler le désir d'être
Dieu, le faire taire par tous les moyens possible, un jour la
civilisation de cet acabit le paie très cher.
24 Février 2004
Enfin
un nouvel écrivain qui fait vraiment le poids, en tout cas dans ce
livre-ci, qui n'est peut-être pas le plus connu. Maya, de
Gaarder, part sur les chapeaux de roues, et je le lis doucement.
Très belle intelligence. Il est rare que je n'ai pas envie de
fermer un roman dès le troisième chapitre, ce qui allait m'obliger
à relire les Norman Spinrad qui m'avaient enchanté pendant ma
jeunesse, mais maintenant je vais chercher d'autres titres du même
Josteen Gaarder, bien qu'il me semble ne pas avoir accroché sur un
de ses best-sellers, le monde de Sophie. Mon roman apocalyptique est
en rade, alors qu'il ne reste que la dernière partie à écrire,
c'est comme si je devais savourer de m'y remettre, attendant sans
doute un petit coup de pouce qui me dise que c'est nécessaire.
J'arrive enfin à sortir de mon cocon, j'ai rebranché le
téléphone, j'ai de bonnes nouvelles de mon pied-à-terre sur
l'île en face, la cuisine serait enfin finie, et je compte y
retourner après être sorti du territoire pour le visa. Maintenant,
sortie obligatoire au bout de trente jours. Je vais naturellement
étudier les visas longue durée car cette fois je n'ai pas envie
de déguerpir d'ici pour trouver mieux ailleurs. La maison est
louée et payée pour un an, et si j'envisage de finir ma vie en
Inde, tant que je ferai du snorkelling, avec ou sans chasse
sous-marine, Bali restera le meilleur compromis, vu la culture
exceptionnelle de cette île.
Le
seul moyen d'accepter tout ce qui remonte et qui n'est pas moi,
c'est d'admettre que l'Infini m'a capturé et que je dois
jouer le jeu. J'essuie les plâtres. Tant pis si personne ne peut
me comprendre sauf un Satprem, je ne suis pas là pour demeurer
humain, et encore moins pour être reconnu, mais pour commencer autre
chose, et le passage est long, difficile, insupportable et
merveilleux, parce qu'au bout du chemin, l'obéissance au Divin
est en quelque sorte automatique, comme chez l'ange, sauf que c'est
le Divin de la Conscience suprême, au-dessus du Surmental. Pour le
moment malgré les 25 ans de travail, ou justement à cause des 25
ans de travail, je tombe presque exclusivement sur les obstacles
évolutifs. Mais j'établis quand même des percées foudroyantes
dans la conscience divine, et ce, à travers un registre
impressionnant. Il y a donc quelque chose qui se cherche, mais il me
semble que ma voie maintenant concerne réellement la transformation
physique, et que tout le reste y est subordonné. Même les lumières
qui m'ont permis de mettre au point le système des quatre mystères
proviennent de la connaissance des résistances au projet évolutif,
et une connaissance diablement concrète, physique. Pourquoi la
conscience matérielle ne se laisse-t-elle pas transformer? Bouddha
savait cela et c'est pour cela qu'il a voulu partir, ne jamais
revenir. Bien sûr le soi c'est pratique, parce que d'un seul
coup le sentiment de la conscience matérielle passe au second plan,
elle s'évapore, et on croit que c'est arrivé. Tout ce qui gêne
devient le samsâra et on crache dessus, désolé mais c'est
encore le singe qui se vante. Mais rien n'est arrivé par rapport
au corps. Il demeure exactement le même, avec seulement la glande
pinéale plus active, mais le sperme continue de se former, et le
nombre de maîtres qui baisent en douce est incommensurable,
bien que certains annoncent la couleur et ne s'en cachent pas, car
l'illumination peut à la rigueur donner du recul sur le désir
mais elle est loin de le supprimer, parfois au contraire, d'où la
rumeur de la chute de certains maîtres, dont fait grand cas un
ésotérisme mental à prétention anthropologique, et la légende
des fous sages, ou réciproquement, qui, bien que réalisés,
s'empressent de combler leurs désirs si l'occasion se présente,
j'oserais dire comme n'importe qui. Pour les spécialistes, vous
souvenir du grand sage tibétain, trop précoce, qui a pété les
plombs, a sombré dans l'alcool et tripotait ses disciples, après
avoir écrit les plus beaux textes d'incitation au Spirituel (c'est
un événement récent). Qui peut comprendre que le Soi ne doit être
qu'une courte étape? Presque tous ceux qui y parviennent s'y
enlisent, sauf les femmes évidemment, qui vont jouer un rôle
déterminant, parce qu'elles n'apprécient pas d'être
déconnectées, même si elles peuvent rêver en bleu toute la sainte
journée. Bref, la grande aventure Supramentale c'est de se rendre
compte d'un seul coup que le sujet contient en lui-même toutes les
époques de l'évolution.
Pour
rester dans l'esprit de Gaarden dans Maya, employons l'image
suivante, dont je dirai dans vingt ans si elle est conforme ou non à
la réalité.
La
possibilité de dégager des nœuds dans le passé ferait advenir de
l'avenir.
Ou
mieux encore, on entraîne le futur dans le présent, parce que tout
se tient. Enfoncer le présent dans le passé amènerait le futur
dans le présent, mais cela ne renverserait pas le principe
d'irréversibilité de la flèche du temps, le passé touché ne
serait pas celui de la mémoire, du calendrier, mais celui des
structures proprement dites qui ont fomenté ce passé. Platon
plus Sheldrake plus Heisenberg. Donc si le présent supramental
aujourd'hui même transforme des structures archaïques de
millions d'années (encore en service), par la même occasion des
structures potentielles, qui semblaient réservées au futur, peuvent
enfin jaillir, comme si elles prenaient la place de ce qui vient
d'être libéré. Ce serait comme de la broderie. C'est la figure
d'ensemble qui donne un sens à chaque motif, mais on ne peut pas
tout broder en même temps. Quand on se rapproche de la fin, on a
tout le loisir de prendre par exemple un nouveau fil d'une nouvelle
couleur et de faufiler dans l'ensemble, en bricolant à la main,
pour créer une harmonie, ou relier de façon visible les motifs
entre eux. En quelques minutes, on peut relier des espaces que la
machine à tisser a produit en dix ou douze heures de navette.
L'univers
ne se crée pas chronologiquement.(Pas seulement).
Platon
s'était approché de cela, mais ne l'avait pas réellement
exprimé. Le déroulement n'est pas un phénomène exhaustif. À
n'importe quel moment du déroulement global, des facteurs
extérieurs peuvent interférer, qui semblent tomber de nulle part,
qui n'appartiennent pas à la chronologie, qui échappent à la
relation de cause à effet. Il y a des choses qui tombent dans la
Manifestation, à un moment donné, et qui n'y appartiennent pas.
Et plus la Manifestation évolue, plus les choses qui tombent dedans
venues d'ailleurs, le non-temps, l'éternité, peuvent être
incomparables, inconnues, extraordinaires. Je pressens des extensions
incroyables de la conscience humaine, il suffit que je me souvienne
d'une bonne cinquantaine d'expériences-clés, toutes
différentes, mais de vraies percées néanmoins, d'une heure, de
trois heures, parfois d'une journée et plus, pour établir que des
horizons infinis s'ouvrent à nous. Mais il faudra avant
transformer la conscience matérielle, appelons-là comme ça pour
schématiser la conscience structurelle du corps physique. Jouir de
la conscience illimitée dans un ciel supérieur mais pas dans
l'incarnation, ça c'est le passé. Et il est probable que chacun
n'arrivera pas au même résultat. On peut dire: il faut
diviniser la matière et commencer à ressentir le Supramental,
et commencer la transformation intégrale par un décret qui vient
d'en haut. Mais la suite demeure paradoxale, une aventure
universelle, unique, un changement de plan, mais incarné par des
âmes entièrement différentes... voire d'origine différente !
La
maison est légèrement en hauteur, et domine toute la baie et le
village. Plein est, je vois le soleil se lever. Je crois que je
cherchais un endroit pareil depuis plus de dix ans, toutes ces
incursions à Sri Lanka, celle en Polynésie, puis enfin à Mayotte,
avec ce gros déménagement qui n'a servi à rien. Finalement, le
mieux c'est ici, à différents titres, gentillesse des balinais,
bons fonds sous-marins, magnifique culture, vie très bon marché. Je
vois la petite plage et le débarcadère pour Nusa Penida depuis le
salon et ma chambre, et de la terrasse, sur la droite, je vois les
ferrys rouillés pour Lombok. Leur corne me réveille une fois par
nuit au moins, mais j'en profite pour relancer le mantra.
Aujourd'hui il fait très lourd, ce qui me pousse à rester dans la
chambre cet après-midi avec l'air conditionné à 26° degrés,
écrire, revoir mon journal, m'acharner encore contre le programme
d'échecs. C'est fou ce que j'apprends en jouant des parties
courtes contre lui. Incroyable. Des fois je m'évertue à passer
dans ses défenses et il me laisse faire, alors je me dis que j'ai
une chance. Je le trouve mesquin de grapiller un pion ou deux,
en réalité il a une telle avance qu'il n'a rien de mieux à
faire. Il pratique le non-agir le salopard de programme, et j'ai de
la peine à ne pas lui prêter l'intention de m'humilier. C'est
un programme que j'arrivais parfois à battre en reprenant les
mauvais coups sur un vieil ordinateur, il y a dix ans. C'est très
instructif. Aucune erreur, le meilleur coup chaque fois, quelle que
soit l'ouverture. Pas plus de cinq à dix secondes de réflexion,
et ça vous en fout plein la vue. On voit que c'est une machine,
les émotions ne rentrent pas en ligne de compte. Parfois le roi sort
et attaque les pièces si je l'ai empêché de roquer, il s'éloigne
du fond sans état d'âme, mais un maître humain hésiterait à
abandonner le fond et aller vers le centre en début de partie, il
penserait qu'il oublie un risque à longue échéance. Lui, il n'
a pas d'émotions, il se moque totalement de gagner et ne perd
jamais. Une image de la perfection ? Je ne perds pas mon temps
avec lui. Il m'enseigne la stratégie. D'accord j'ai toujours
les blancs, mais ce fameux coup d'avance, puisque les blancs jouent
en premier ne le handicape même pas. Il est absolument diabolique.
Il calcule des combinaisons sur trois ou quatre coups pour récupérer
une pièce par un système d'échanges. Je dois dès le début lui
piquer ses cavaliers qu'il utilise avec une telle habileté que ça
me rend malade. Quand vraiment il est en difficulté, il propose un
échange de dames, puis un échange de pièces, et il sait qu'il
aura toujours un pion d'avance au moins pour me mater. Un homme
ordinaire finirait par lui prêter de la conscience ou des
intentions, à force de jouer avec lui. Moi je commence à lui
parler, pour rire bien entendu, mais je sais qu'il n'y a aucune
intelligence là-dedans, seulement des équations, des systèmes
d'alternative. N'empêche que si Pascal ou Leibniz avait vu ça,
il en serait resté comme deux ronds de flanc. Le génie n'a pas
entraîné l'amélioration de l'espèce.
Bush
veut relancer la conquête de l'espace au lieu de financer des
projets écologiques, et de payer des taxes sur l'environnement.
C'est ce que j'ai toujours dit, l'espèce humaine est une
espèce ratée. Arriver à foutre de l'intelligence pure en
boîte et en être toujours là, franchement c'est désespérant.
Bousiller la planète pour mieux aller voir ailleurs en se ruinant,
pauvre Sisiphe, avant tu faisais pitié, mais maintenant tu es un
type dangereux, et tu vas te prendre le courroux des dieux en pleine
poire.
Je
ne renonce pas à gagner une partie, et je l'enregistrerai dans le
disque dur.
***********************************
Voilà,
c'est fait, tant pis pour ceux qui croiront que je raconte des
histoires. J'ai eu une impression de déjà vu en me
remettant aux échecs avant de dormir, et je me suis dit, j'ai
bien fait de parler de mes tournois d'échecs dans mon journal, et
ce déjà vu, ça veut peut-être dire que je vais gagner.
Affirmatif. En reprenant un mauvais coup vers la fin, (je concède
que je suis remonté en arrière deux fois après avoir identifié le
coup défaillant) j ai fini par gagner, je n'en reviens pas. Ah !
La magie du verbe. Je suis certain que d'avoir objectivé mes
difficultés a changé quelque chose. C'est idiot et enfantin mais
j'ai vaincu cette machine et cela m'apporte une petite
satisfaction. Comme elle n'a pas d'émotions, elle ne m'a pas
laissé gagner pour me faire plaisir. Il a dû se passer quelque
chose, reste à savoir si, pour gagner à nouveau, je dois répéter
et réécrire je ne renonce pas à gagner une partie.. .Quand
on voit à quel point les mantras sont efficaces et les rôles que
jouent les paroles dans les cérémonies religieuses et spirituelles,
il n'est pas interdit de penser que je vais m'améliorer aux
échecs avec un entrainement mental voire incantatoire, qui viendrait
s'ajouter aux parties. C'est quand même curieux que je gagne
juste après avoir écrit là-dessus. Cela fait une semaine que je
m'acharnais sans le moindre résultat, sans doute plus de deux
heures par jour. Et comme ce n'est pas le programme qui a faibli,
c'est forcément moi qui ai mieux joué, pourquoi ce soir
précisément ? C'est tout le temps comme cela avec le
Supramental, les certitudes s'effilochent dans des perspectives
nouvelles, et si l'on conserve l'innocence, on fait des
découvertes remarquables, et surtout, on se rend compte que les
vraies causes des choses ne sont jamais celles qu'on croit. Celles
qu'on croit ne sont pas fausses, mais elles déguisent d'autres
facteurs plus importants, secrets, cachés. Moi j'avance comme
cela, de mystère en mystère, et non de certitude en certitude,
c'est une voie royale, mais l'espèce n'y parvient pas. Voilà,
je vois qu'il est important de FORMULER, cela ne veut pas dire
d'établir des recettes, mais de trouver la forme exacte des
choses, des problèmes, des questions, des relations. Formuler
clairement résout déjà une partie de tout conflit, de toute
opposition, et formuler clairement un défi ou un enjeu permet de
mieux s'y mesurer. Revoir la vie des grands artistes à la lumière
de ce concept, formuler. Créer, formuler sans emprisonner ?
25 Février 2004
Développement
divinatoire de la méditation quantique pour les amateurs !
Je
crois que je me suis autorisé à gagner la machine aux échecs en
écrivant je ne renonce pas à gagner. Je ne vois pas d'autre
explication. Cette expérience banale ne l'est pas du tout, et m'a
encouragé à exprimer ma connaissance d'une manière précise.
J'ai réfléchi cette nuit sur un tarot des quatre mystères pour
le séminaire de l'Ascension. Non seulement je vais mieux
déterminer les 4 espaces fondamentaux, mais je vais sans doute
organiser chacun en quatre parties. En quatre parties, ce serait très
puissant car seize est un chiffre dangereux, mais au moins il
contient tout, ça me fait frémir rien que d'y penser. Finalement,
avec 5 déclinaisons, l'as, la dame, le 8, le 5, et le 4, on peut
faire un diagnostic précis de l'état de chacun des Mystères, et
opérer des rectifications. Quel que soit l'as qui sort, s'il en sort
un, ce sera un point d'appui. Si l'on tire un as qui correspond à
un mystère donné (au cas où l'on conserve un jeu traditionnel)
toute autre carte de la même symbolique sera chez elle. Même en
tirant la pire, le 8, si le 8 tombe avec un as de sa symbolique, il
sera soutenu par l'as. Le meilleur tirage serait les 4 as,
équilibre des quatre mystères, et le pire, les quatre huit,
contentieux dans chacun des mystères.
L'as
représenterait le champ quantique proprement dit,
le
8 le danger dans ce champ,
le
5 la dérive, soit son extension trop subjective, soit son
empiètement sur d'autres mystères,
le
4 l'enfermement dans ce champ, soit le manque de communication
entre ce mystère et les autres. L'as représente le mystère ou le
champ comme point d'appui, le 8 demande une transformation urgente,
le 5 un retour à l'objectivité. Le 4, c'est la sclérose de ce
mystère, toutes les autres cartes doivent permettre de le modifier,
même les 8 ! Comme tout se tient, on peut tirer un 8 quelque
part à cause d'un cinq ou d'un quatre dans une autre zone, et
enfin
la
dame représenterait l'image de l'enracinement pour le mystère
3, la conscience du territoire / l'image de soi pour le 1,
l'identité / l'image de Dieu pour le 2, le moi subliminal / et
l'image de l'emploi du temps pour le 4, la durée, le moment, le
soi.
Sortie
avec l'as, la dame confirme un travail d'évolution personnelle
naturel et expansif. Sortie sans l'as, la dame exprime la nécessité
de revoir l'image pour bénéficier du principe, de l'as.
Je
ne suis pas loin de trouver quelque chose d'aussi puissant que la
géoméancie ou le yi-King, tout ça parce que j'ai gagné un
ordinateur aux échecs !
Désolé
pour les pinailleurs, la conscience matérielle est un concept
de mon cru. (Elle prédomine dans le champ 3 de la méditation
quantique). Il faudrait que je relise tout Sri Aurobindo pour établir
les correspondances, et je n'ai pas que ça à faire. Ce qu'il y
a de sûr, c'est que le noyau de la conscience matérielle est
cette saloperie de mental physique, au service de la Mort, dont je
peux affirmer qu'on ne peut rien rencontrer de pire en soi-même.
Le reste c'est de la rigolade, le sexe sera plus difficile à
transformer chez les hommes, mais ce sera possible, pas facilement,
mais possible. Les organes vont s'aligner petit à petit, et se
libérer des engrammations ancestrales (moi j'avais les intestins
de ma mère, et j'ai encore un peu les poumons de ma grand'mère
paternelle). Une partie du vital participe aussi de la conscience
matérielle, celle qui a le moins d'énergie, le moins d'élan,
ce n'est pas encore du désir, mais cela en prend le chemin, et
concerne des opérations dans le physique lui-même que le vital
tournera vers la reproduction.
Quand
le corps se sent vieillir, ou sent qu'il va mourir, il remonte des
états de conscience d'une saleté invraisemblable, et dont la
gamme est variée. On se sort d'une mélancolie dégueulasse, et on
peut tomber un peu plus tard dans un truc serein, mais qui n'a plus
la moindre envie, ni de se lever, ni de bouffer, ni même de vivre ;
et là quand ça passe, on est tout heureux quelque temps, et puis à
nouveau on peut se lever le matin avec un corps presque centenaire et
l'envie immédiate d'en finir. On balance le mantra, on se
retrouve, mais un peu plus tard un esprit extrêmement défaitiste se
pointe, dont on ne sait pas d'où il arrive, avec des sensations
bizarres dans le corps, et c'est tout juste s'il n'efface pas
tout le reste, comme si on était fait pour vivre là-dedans jusqu'à
la fin de ses jours et être amnésique de tout le reste. Cela ne
vous encourage pas ?
Je
me disais bien aussi que votre prétention à aimer le Divin n'était
que de la pure coquetterie.
26 Février 2004
Je
sens approcher la fin de la saison des pluies, autant dire que le
côté paradisiaque de l'île va s'accroître. L'air va devenir
moins humide, et déjà hier l'eau était redevenue claire. Très
bon snorkelling sur un massif de corail brun, des cornes de cerf,
avec un banc important de poissons noir rayés de blanc, mais avec
beaucoup de jaune citron entremêlé vers l'épine dorsale, de deux
à trois kilos. J'ai nagé un bon moment très relax, et puis j'ai
pris le fusil. Le petit mérou que j'ai tiré (ils sont abondants)
a été cuit à la vapeur au resto, accompagné d'un léger curry
de légumes, après quoi j'ai joué aux échecs sur place avec les
employés, et j'ai gagné, mais le petit serveur n'était pas
affecté par sa défaite alors qu'il croyait bien jouer, je suis
sûr qu'un blanc bien de chez nous aurait fait la gueule dans les
mêmes circonstances, mais je me demande ici s'ils ne bénéficient
pas d'une culture où l'on prendrait systématiquement les
événements du bon côté. L'échec et la réussite n'ont pas la
même signification qu'ailleurs, et ce dans tous les domaines. La
réussite est donnée par surcroît, et elle est mystérieuse, et
l'échec s'efface la minute suivante devant la beauté du jour.
En tout cas c'est ce que je ressens. Je suis loin de l'hypocrisie
tamoule du Tamil Nadu, loin de l'arrogance des cingalais de la côte
ouest qui se mettent à adorer le fric, j'ai dû trouver ici ce qui
me correspond. Il n'y a vraiment pas grand chose qui trouble les
balinais, c'est remarquable d'être heureux comme ils le sont en
se contentant de peu. Je suis certain qu'ils ont des trucs occultes
efficaces. Pas de moustiques pratiquement alors que nous sommes sur
l'équateur ou presque, et je n'ai pas rencontré de campagnes de
D.T.T, alors j'aimerais bien savoir comment ils ont fait. Même à
Ubud, perdu au milieu des rizières les moustiques sont peu
abondants. D'ailleurs j'y vais aujourd'hui car je n'arrive
pas à avoir Internet à la maison, et je dois reprogrammer le PC
portable, et déplacer un technicien pour jouir du web sur l'Apple,
maintenant que le site va entrer en ligne, ce serait parfait.
De
toute façon, le flux nous entraîne vers la mort. Autant se laisser
emmener de la meilleure manière possible. En aimant tout, même ce
qui nous détruit.
28 Février 2004
Passé
deux jours presque à Ubud, et j'ai mon billet pour Singapour, avec
une lettre qui permettrait d'obtenir un visa à l'ambassade, de
quoi rester tranquille six mois mais je dois rentrer pour le
séminaire de l'ascension. J'ai passé aussi une après-midi avec
un technicien sur mon ordi portable. Il a finalement fallu repartir à
zéro à cause d'un virus, et j'ai sacrifié le programme
d'astrologie, mais au moins je peux avoir internet à la maison, ce
qui change tout. On verra si j'ai bien choisi le moment de la mise
en service du site supramind.com en comparant des thèmes,
mais sans m'acharner sur ce travail. Le 1°mars à 17.20, heure de
Paris, ce qui donne si Éric y parvient, l'ascendant sur Régulus à
29° du Lion, avec Jupiter en maison 1, et les carrés de mars entre
soleil et saturne sont passés. C'est pour cela que j'ai attendu
si longtemps. Retrouvé Padang Bai avec plaisir, pour la première
fois depuis longtemps, l'impression d'être chez moi. Chasse
sous-marine sous la pluie, pris un poisson genre corb de deux kilos,
à la chair réputée, dont la moitié a été grillée au barbecue
au resto, j'ai ramené les restes aux petits chats qui se sont
régalés, j'ai mis un beau rouget au congélateur et j'ai donné
un gros perroquet brun au pêcheur qui m'emmène, que je paie peu,
et qui m'avait demandé de lui prendre quelque chose. Du coup tous
les gars de la plage me réclament du poisson, avec une désinvolture
désarmante, mais je ne compte pas tirer beaucoup plus pour autant.
Toujours pas de carangue, mais au moins je m'entraîne un peu. Je
crois que c'est la première fois qu'il fait aussi frais, la
saison des pluies est presque terminée, et c'est un sursaut de
mauvais temps.
Je
prends l'habitude d'écouter mon corps n'importe quand, et si
je relâche tout, il se passe des choses intéressantes. Ce matin
j'étais bien, puis surpris de me retrouver fatigué un peu après
le réveil. Je me suis allongé et j'ai lâché prise, et la force
est descendu quelques minutes partout, c'était agréable et
suffisant. Je fais la même chose dans l'eau, surtout avant chaque
apnée, relâchement total au moins une ou deux minutes, le fusil
tient tout juste dans la main qui ne le serre plus et tous les
muscles sont mous, et j'écoute les poumons. Excellent. Maintenant
je nage chaque fois un peu, sans combinaison, avant de prendre le
fusil, pour faire respirer le corps et le rafraîchir. Bref, c'est
la vie rêvée. Le roman Maya est toujours intéressant,
belles allusions à l'hindouïsme, mais le genre S.F n'est plus
si facile. C'est tout juste si j'arrive à finir Globalia,
de JC Rufin, c'est difficile après Orwell et Huxley, K Dick,
Brunner et Spinrad d'inventer quelque chose. Il y a de l'invention,
mais il manque le zeste épique qui ferait croire au contenu. Surtout
ne pas faire comme lui. Ce n'est pas une fable voltairienne, ce
n'est pas 1984, et ce n'est même pas du bon Brussolo. Au cinéma
peut-être, par Carpenter, ça tiendrait la route.
Long
mail d'É, qui m'est très dévoué, et qui en fait presque trop.
Je ne tiens pas à mélanger Lao-Tseu, dont je ne peux pas finalement
prouver que c'est moi ou qu'il est descendu en moi en novembre
90, et le Supramental. Mais vu l'effet du premier livre, É pense
créer un nouveau site, en fait l'idée était de republier ce
bouquin, mais il est fastidieux de tirer des sonnettes. Ce qui se
dessine plutôt c'est donner de la vraie qualité dans mes
séminaires et les développer, sans renoncer à ma vie ici,
exploiter la veine Lao-Tseu ne me paraît pas indispensable. Si Dieu
le veut. Lu sur le web, sur lci, qu'un rapport alarmant sur
la météorologie avait circulé pour les prochaines années. Pas
moyen de savoir si on s'est amusé à noircir le tableau pour
susciter des préparations à ce genre de choses, ou si c'est comme
ça, en tout cas ça va mal.
29 Février 2004
Le
tout est de trouver le passage où le corps trouvera plus naturel de
se transformer que de rester dans l'état générique, et c'est
tout simple à calculer. Puisque je suis monté dans le corps causal
supramental le 17 mars 1978 où j'ai vu mon corps doré et la
transformation qui commençait (il y avait deux vaisseaux spatiaux
d'origine différente qui assistaient à ça, je n'ai pas compris
pourquoi), à 56 ans exactement, mon corps commencera à avoir passé
plus de temps dans la transformation que dans l'état naturel. Vu
que cette imbécile de matière ne connaît que la loi de l'habitude,
elle finira par s'incliner, à ce passage-là. Je sens de plus en
plus que je ne peux pas m'emparer intellectuellement de quoi que ce
soit, alors je fais la différence entre les états d'inspiration
où je vois réellement des choses, et les états de compréhension
issus d'une direction donnée à l'esprit. Mais il y a eu un
progrès considérable déjà de fait, je me souviens d'avoir
pleuré il y a un an à peu près devant un doute insurmontable
concernant la transformation physique, et ce qui venait c'est « le
corps n'est pas fait pour ça ». Mais maintenant je me rends
compte que le corps est fait pour la mort, et ce n 'est pas
mieux du tout. À des moments on peut même sentir que le corps
est fabriqué par la mort, et que la vie serait une sorte de
parenthèse paradoxale là-dedans. D'ailleurs, il y a certaines
visions spirituelles du samsâra qui peuvent s'accrocher et
montrer que la vie n'est pas une réussite, surtout si l'on brûle
de l'amour de la perfection, alors on décrète que seul le soi
universel, le Brahman, vaut quelque chose, et on attend patiemment de
crever, dans une légèreté telle qu'on est sûr de s'envoler
quand le cœur s'arrêtera. Changer ce système qu'est la vie
constitue l'entreprise, l'aventure la plus exaltante que ce soit,
et franchement je n'en aurais pas eu l'idée moi-même. C'est
comme faire un surplomb en varappe, la moindre erreur est fatale.
Mais si vous êtes obligé de passer par là pour redescendre (à
moins de crever de froid au sommet), et bien on se dit que c'est
possible après tout.
Et
il est évident que seule une force vraiment colossale peut faire ça.
Donc je n'ai pas à me plaindre. Aucune force plus faible ne
pourrait parvenir à cela, il faut donc que ce soit parfois
insupportable pour que le système fonctionne. Sinon ce serait
possible avec de l'air divinement comprimé, comme le darshan
d'Amma, et ça, ça ne peut pas faire grand chose pour le corps.
Cela fait aimer le Seigneur, facilite les décisions psychiques, mais
en ce qui me concerne, les darshan du Surmental me font plutôt
l'effet d'une drogue, c'est bon et on en a envie tout le temps,
mais ça s'arrête là. Avec le Supramental je ne sais jamais à
l'avance ce qui va se passer. C'est l'état de guerre.
Je
n'ai jamais vraiment dû quitter l'enfance et comme le dit le
héros de mon roman à finir, « je compte là-dessus pour ne
pas vieillir prématurément. » Me suis retrouvé au milieu
d'un banc de carangues de un à deux kilos, des centaines qui
virevoltaient, et mon cœur s'est mis à battre plus fort.
L'instinct, my God, l'instinct du chasseur. J'avais pris un
gros perroquet pour le gars du bateau, et ensuite j'ai
retrouvé des sensations primaires mais agréables, faire un avec la
mer, et j'ai finalement tiré trois carangues de trois tailles
différentes, et un petit poisson au dernier moment pour les chats,
qui m'attendaient. J'ai dû plonger dans un sentiment ancestral,
maintenant tout mon corps a chaud, je me suis dépensé sans compter,
ça va bien avec le groupe sanguin 0 auquel j'appartiens. J'ai
donné un poisson à la patronne du resto, ai mangé le petit sur
place, et Kadek, mon homme de main, qui travaille trois heures
environ par jour à la maison, m'a découpé le plus gros qui est
au congélateur. Il y a quelque chose de mystérieux dans
l'exercice physique si on se laisse absorber par lui totalement. Je
n'arrive pas à cerner, mais les longues marches, les longues
parties de chasse sous-marine, ont un effet flagrant sur moi. Je me
sens plus incarné après.
É
me dit qu'il n'arrive pas à expliquer mon travail, moi non plus,
tout le monde voudrait pouvoir se le représenter, ce qui voudrait
dire que c'est joué d'avance. Les humains sont très
majoritairement bêtes, même les intelligents. Je commence à
l'accepter. Ils veulent tourner en rond en se donnant des airs de
viser plus haut, c'est lamentable, petit, étroit, et ça déborde
de suffisance et ils ne s'en rendent même pas compte.
1 Mars 2004
Encore
une sortie de chasse sous-marine et cette fois j'ai mon compte. Les
54 ans approchent. Mais le corps est content après l'effort, et il
récupère vite. Le mois passé depuis mon arrivée s'est bien
déroulé. Enfin chez moi. Équilibre à trouver entre le
snorkelling, internet, l'écriture, la lecture, les échecs,
puisque j'ai des flashs intéressants parfois, toujours sur la même
chose évidemment, la grosse artillerie vaine, et le coup élégant,
sobre, inaperçu, qui tue. Le coup décisif préparé par cinq ou six
coups discrets, qui cachent leur intention. Ou bien ce qui est
jubilatoire et intéresse le guerrier. Le mat est prêt de chaque
côté. Si le computeur n'était pas parvenu à me mater par une
suite d'échecs, il aurait perdu le coup suivant.
La
culture balinaise est vraiment charmante. Chaque matin une fille du
resto vient poser les petites offrandes, bien préparées, dans le
temple extérieur, dans un autre minuscule sur un piquet, elle pose
aussi des bricoles parterre, du riz cuit avec des feuilles de
bananier, elle fait brûler de l'encens et parfois dépose dans la
cuisine — sur le fourneau à butane — un petit carré d'osier
avec fleurs, riz, je regarderai les détails la prochaine fois.
Idée
de plusieurs livres, mais fini les essais pour le moment. J'ai tout
donné dans la mutation solaire de l'humanité (devenu les
Principes de la Manifestation, sur le site:"Natarajan
essentiel"); et j'ai conclu sur Freud dans guérir par
l'éveil, qu'on devrait trouver sur le web à partir de ce
soir. Non, un roman qui se rapprocherait des miroirs de
l'esprit de Spinrad. Le thème est beau, un éveillé qui sert
d'homme de main à un escroc parce qu'il en a assez de vivre la
misère. L'escroc le tire d'affaire mais à quel prix, suspense
et guerre du bien contre le mal (§ paraîtra sous le titre
L'Apocalypse selon Neptune en 2009). Je finirai sans doute
avant scénario pour l'Apocalypse (§ à paraître sous le titre
La fin du Monde, Interkeltia). Rufin croit bon de se justifier à
la fin de Globalia, dans une postface, et cette explication le
dédouane un peu de ne pas avoir mieux réussi. Le type a un beau
parcours, il fait avancer les choses, il représente l'humaniste
accompli qui croit encore au changement de société, par l'action
militante et intelligente, par l'action fondatrice, donc il n'y a
rien à redire, mais cela me semble pauvre, pauvre comme vision du
monde. Pourquoi ce type d'individus ne fait-il pas le grand pas, le
grand saut vers le Divin ? Ironie du sort, ce monsieur rebelle
rafle plein de prix dès qu'il prend la plume, comment
supporte-t-il d'être immédiatement récupéré ? À quand la
légion d'honneur à Ben Laden pour le remercier de son joli
spectacle ?
Il
semble que cette question, ouvrir l'intellect au Spirituel, vienne
me tarabuster souvent. Cette limite m'agace. Même des hommes
supérieurs rechignent à se donner au grand mystère et à lâcher
leur politique historique. La politique cosmique vaut quand même
cent fois mieux, le problème c'est que personne n'y croit, que
nul ne la voit, ce qui fait que Sisiphe continue de rouler sa pierre.
A-t-il vraiment envie de faire autre chose ? Je me le demande.
P.S
pour les initiés seulement. Hier en fin d'après-midi plénitude
complète. Puis une petite voix légère arrive : avec une
femme en plus ce serait vraiment la cerise sur le gâteau.
Guerre
des plénitudes.
LA MORT BLESSEE
|
1
Pourquoi
demain la moindre chose
Pourquoi
hier saturé d'ossements
Un
immense Présent s'est abattu sur moi
un
aigle sur sa proie
Eteignant
les amours apprises par le corps
Et
annulant les buts les plus parfaits
Le
corps était gonflé d'éternité
Le
temps s'ouvrait sur l'Immobile qui le contient
Triomphal
je sentis la chair délivrée des griffes de la mort
Et
le corps sut qu'un jour il ne mourrait plus
Alors
les inouïes souffrances pour éclore là
Devinrent
mémoire de la victoire
Et
leur souvenir terrifiant
prit
le goût du miel sauvage
Les
tortures endurées balisaient
L'immense
champ de bataille
Les
gouffres m'avaient permis de sonder la matière
Jusqu'au
chaos imprescriptible
Exténué
je suis revenu cent fois
d'abysses
de plus en plus profondes
Mon
cœur fut broyé mon âme blessée
Ma
foi détruite
À
défaut de pouvoir m'abattre par trois fois
La
Mort se vengea et installa sa conscience dans mon mental
Et
je crus ne plus être vivant
Mais
le corps lui avait trouvé le passage impossible
Et
maintenant jaillissait le regard du vainqueur
Aussi
meuble que celui d'un enfant
Il
ne restait que l'Autre noyé dans l'ignorance,
Un
moi-même endormi ivre de petitesse
Dans
mon sommeil
Au
plus haut que l'Homme puisse aller
L'espace
tout entier et les poussières d'étoiles
Me
donnèrent le mandat pour la vie du corps divine
Et
l'étendue vide et sans limites fut terrassée
Les
étoiles me regardent dormir et m'admirent
Et
pourtant je ne suis rien
Seulement
un regard qui embrasse Tout
2
Le
corps sentait une fièvre exceptionnelle
Lassé
depuis deux jours de brûler et d'être réveillé à l'aube
Par
une douleur astringente dans les cuisses
Il
me prit à témoin de son sacrifice
Je
le rassurai en trouvant les mots qui désignaient l'expérience
«travail
dans la conscience de la mort à l'intérieur du corps»
Alors
un soulagement vint
Mais
je sus que tout ne faisait que commencer
Toutes
ces sensations accablantes
S'évanouissent
soudain parfois
Et
je marche par la seule volonté d'un Inconnu qui se cache
Et
me promet que je ne souffre pas en vain
Le
corps a besoin de pleurer
Et
il ne reste que l'émotion pure
Je
ne sais même pas si ce sont des larmes de peine ou de joie
Les
deux sont mêlées et je ne me révolte plus
Pourtant
j'ai vu le Monde nouveau commencer
Et
l'Instrument sait qu'il supporte cela par amour
Mais
le vieux corps humain croit qu'il va mourir
Et
sa peur remonte —la peur de tous les êtres
Dans
ma chair universelle
À
ce prix là nul ne voudrait de l'immortalité physique
Mais
Il veut descendre dans le Putrescible et en faire de l'Or
Comment
refuser une telle folie
Si
c'est la seule voie qui m'est offerte pour faire un pas ?
3
Là
où ils veulent voir de l'Idéal
Je
ne scrute qu'une fuite enivrante vers le bleu
Et
leur amour pour Dieu s'interrompt
S'Il
exige un sacrifice conséquent
Sacrifier
ce qui rend la vie agréable
Les
caresses et les sentiments les plaisirs de la chair
L'idée
d'être quelqu'un assaisonnée de complaisance
Parfumée
à cultiver quelques vertus supérieures
Enfin
le sacrifice de l'avenir convoité
Avec
toutes ces ambitions ratifiant
Un
pacte de dupes entre la peur et le désir
Concluant
un marché où chacun gruge l'autre
Presque
personne ne Me donne sa vie
Mais
on réclame mes bénédictions
Je
préfère ceux qui M'ignorent
A
tous ceux qui font semblant de M'aimer.
Et
sont nombreux ceux qui croient Me connaître
Et
qui inventent de toutes pièces Mon visage défiguré
Aussi
s'égarent-ils la conscience tranquille
Tandis
qu'ils chantent en croyant se rapprocher
Seul
celui qui plonge en Moi
Me
devinant au-delà du chaos des apparences
Et
au-delà des règles convenues de l'ordre
Possède
la chance de voir ma loi suprême
L'incohérence
dans les constructions rigoureuses
Et
la rigueur dans le désordre car tout se tient sans fêlure
Et
des millions d'itinéraires ne restituent pas l'Étendue
Sillonnée
par les déchirures rapides du Temps souverain
Elargir
le cœur et l'âme et le cerveau et le Mental
Absorber
le Monde en soi mène à Moi-Même
Alors
le Mal est béni et sacré et c'est la cicatrice
De
la blessure de Mon écartèlement éparpillé
Gagner
l'Unité exige de détruire inlassablement
Les
murs cloisonnant l'Un dans le Multiple
Remparts
solides mais faciles à abattre
Ou
fresques en trompe-l-œil passant inaperçues
Le
moi et le non-moi se seront enfin reconnus l'un dans l'autre
Combinant
leurs principes en une alchimie inconnue
Donnant
à chacun le pouvoir d'être l'autre
Dans
une noce infinie jouée par le Silence
4
Le
corps halète comme un animal
Il
veut maintenant respirer à l'unisson des galaxies
L'air
devient l'haleine du Seigneur
Et
j'inspire la Conscience suprême vaporisée dans l'atmosphère
Je
m'enivre pour transformer le Monde
Nageant
dans un bain d'Amour immatériel
La
Mort consciente heberluée ricane dans mon dos
Me
poursuit et tend des pièges au moindre relâchement
Le
guerrier
Devient
la guerre
La
flamme
Devient
le Feu
Tu
deviens l'Amour à force d'aimer
Tu
deviens l'Intelligence à force de comprendre
Tu
deviens l'Acte pur à force de choisir
Tu
deviens l'océan à force d'être goutte
l'Immaculé
apparaît alors et toute parole est perte
Mes
discours sèment le foisonnement frivole
Qu'ils
prétendent réduire par leurs doctrines
Et
je les lance comme des bouteilles à la mer
Mes
enseignements guérissent les petites blessures
Et
ouvrent à la blessure originelle de ne pas être Dieu
Celle
qui les contient toutes
Et
les ascèses courtisent l'Absolu pour effacer le Nombre
L'enfant
pleure déjà la Mère divine au sein de sa mère
Et
l'esprit pleure l'Unité originelle par les larmes des choix
L'orgasme
crie la déchirure du corps unique
Et
la vie perpétue le Soi fragmenté dans les chairs innombrables
Retrouve
toutes les pièces du puzzle
Et
puis emboîte-les à la vitesse du Mouvement
Efface
les jointures de tous les morceaux
Recommence
mille fois chaque vie
Jusqu'à
l'indicible fragilité du Moi suprême
Émergeant
dans la chair
Touche
l'Impossible en épuisant toutes tes limites
Et
deviens Moi-Même puisque tu l'es déjà
MANIFESTATION
Le
doux grésillement des vagues les plus hautes
sur
les rivages lointains des îles les plus perdues
Et
les couleurs qui ferment l'aveuglante lumière
Et
le martèlement du ressac incessant
le
battement de cœur de l'étendue liquide
Miroir
inattendu du ciel insaisissable
d'où
le désir s'élance pour conquérir le temps
Et
le silence qui vient pour apaiser les feux
Les
flammes cellulaires qui montent et qui s'assemblent
Jusqu'à
former des yeux dévorés par la faim
Dans
des corps séparés par d'innombrables formes
A
travers le corail puis les premiers poissons
Et
les reptiles plus froids que la pierre qu'ils transcendent
L'
inéluctable insecte aux pouvoirs saisissants
Comme
un unique esprit répandu dans le nombre
Voué
sans trêve à la rapidité
Vivre
et grimper encore vers les satisfactions
Du
sensible animal méprisant le futur
Par
l'innocence bleu du jour recommencé
sans
mémoire ni projet ni crainte de la mort
Puis
marcher sur la terre où l'Inconnu s'étend
Où
les dangers se cachent où le multiple règne
Où
souverains les Éléments dominent
Et
se déchirent et se combinent
Là
où la guerre amuse les espèces rivales
Et
maintient l'ordre rouge du territoire vital
Enfin
gagner les satisfactions rondes
Des
plaisirs lancinants et des satiétés molles
Remplir
l'existence et blesser le néant
Gagner
l'intelligence sans même savoir comment
Inventer
quelques mots qui cachent les sensations
Et
en veulent de meilleures obtenues par calcul
Décrocher
des visions à force d'expériences
Innover
et chercher les pistes devinées
Rêver
pour fêter la défaite du vide
Dans
le sommeil doré des avenirs certains.
|
5 Mars 2004
Soulagement
de pouvoir passer deux mois tranquilles sans sortir. Visa obtenu
facilement. Singapour extraordinaire. J'ai dormi à Little
India, trois ou quatre pâtés de maison comme dans le Tamil
Nadu, la poussière et la misère en moins, le rêve. La même
nonchalante décadence de ce peuple que j'aime et qui traîne un
drôle de karma. Femmes obèses, le corps lourd, le regard opaque.
Hommes bavards, loin de la matière. Une épicerie, un marchand de
bondieuseries, un joailler qui ne vend que de l'or, un marchand de
tissus, et ça recommence dans le même ordre, avec un bon resto au
milieu, dosas et idlis pour moi. À la première bouchée, je me suis
revu si intensément à Nerhu street à Pondichéry que j'ai failli
éclater en sanglots, devant une quarantaine de personnes cela aurait
fait désordre, alors je ne me suis pas appesanti et je suis revenu
aussi sec à ce qui passait dehors. Acheté un CD de mantras chantés
pour Saraswati, du riz basmati, de l'huile de vetiver de grande
qualité, de l'huile de noix de coco, pour mélanger les deux et
faire un bon mélange de massage. Avant de repartir, dans le centre
commercial, achat de mémoire flash qui sert à transférer des
données d'un ordi à l'autre d'une part, et qui est encastré
dans mon appareil photo digital d'autre part, et qui contient les
informations qui correspondent aux clichés. À cause du bon prix,
j'ai acheté un boitier étanche. Je remplacerai parfois le fusil
par l'appareil photo. Je pense déjà à retoucher sur photoshop
mes clichés, et sortir un peu des mandalas tout en continuant, si
l'on vent, à peindre.
É
a mis le site en ligne à l'heure prévue, Inch Allah. Avant-hier
soir j'ai dû faire descendre du Supramental dans la conscience
pour ne pas être englouti dans l'énergie de Singapour, trop yang
pour moi. J'étais dans un drôle d'état, la nuit s'avançait,
et il y avait trop de choses dedans, trop de vie, trop de
plaisir, trop de désir, mais je ne savais pas que le Supramental
allait descendre pour amortir tout ça, carrément dans le cerveau.
Je me suis endormi rapidement. Je dois admettre également
que l'avion commence à me fatiguer physiquement. Je voulais
récupérer aujourd'hui, mais la force travaille d'une étrange
manière. J'ai bien mangé au resto après avoir nagé un peu, en
essayant de nouvelles palmes trouées pour faire moins d'effort,
accessoire bien négocié à Singapour avec des chaussons néoprène
très fins, pour les longues palmes neuves d'apnée qui me serrent
un peu. Mais cet après-midi, seul le rangement et la lecture sont
possibles, bien que je me sois fendu de répondre à É, brièvement,
et que je sois parvenu à transférer avec une facilité
déconcertante mon roman d'un ordi à l'autre avec la mémoire
flash. Mais tout cela m'a demandé des efforts. On dirait que le
corps aspire à recevoir l'énergie de feu Mahakali, qui descend
très rarement. C'est un drôle d'état. Il faut lâcher, et je
le peux. Deux mois entre Nusa Penida et Padang Bai c'est le rêve,
même si la force me contraint parfois. J'essaie d'utiliser les
plaintes du corps pour amener la force. Si cette stratégie
fonctionne, le yoga marchera bien, mais je ne sais si je m'adapterai
facilement aux contraintes en France au retour. En dehors d'un ou
deux séminaires qui me feront plaisir, le reste risque d'être
duraillon. Mais on n'en est pas là, et de toute façon je peux
rester très peu en Europe si je le décide. Ma vie pourrait prendre
une belle tournure ici, les achats sophistiqués pourraient avoir
lieu à Singapour (informatique, instruments de musique, matériel
sous-marin), d'où il est également possible de partir en avion
pour Madras et Colombo, aller-retour, pour des sommes faibles. Et je
sens que je commence à avoir besoin, petit à petit, de l'Inde.
Sentiment
nouveau dans l'avion à l'aller. Que la vie n'avait strictement
aucune importance. Je pensais et si l'avion s'écrase,
événement infinitésimal, sans vraie conséquence dans l'univers,
pleurs et grincements de dents peut-être, et alors ?
Insignifiance de toute cette vie humaine dévouée aux petits
plaisirs, aux petits commerces, aux petites idées, aux sentiments
bourrés de complaisance. Et étrangement, ce n'était absolument
pas dérisoire. Il n'y avait pas moyen d'interpréter
intellectuellement cet état. Les idées et pensées ne
correspondaient pas à définir ce que je ressentais. Insignifiance
absolue mais rien de dérisoire. Insignifiance pure, mais rien
de trivial, rien de ridicule, rien qui mérite quolibet ou mépris.
Inexplicable sensation sans traduction mentale ! Du jamais vu...
Peut-être le Divin à l'état brut, vers l'amorce du potentiel.
Le mental était dérouté, une telle insignifiance aurait dû
s'accompagner du sentiment du dérisoire, et non, au contraire,
tout était là, de toute éternité, imprescriptible,
incompressible, et à la fois sans impact réel sur la politique de
l'univers. Du banal en coupe. De la matière première dans toute
sa splendeur obscure.
7 Mars 2004
Hier,
journée éprouvante. Je vais chasser à jeun, d'habitude ça me
réussit, mais là je vomis, très agréablement je l'avoue, mais
je vomis quand même dans l'eau assez longtemps, et au lieu de me
reposer sur le bateau, je reste à nager. Inutile, car je n'ai pu
récupérer qu'au bout d'une heure, et j'aurais mieux fait de
rejoindre Ketut sur la pirogue, et attendre au moins un bon quart
d'heure. L'après-midi je me sens vraiment vidé, incapable de
rien faire, et je pense que c'est Singapour qui m'a sucé
l'énergie, d'une manière occulte. C'est la Chine caricaturée,
rien d'autre. L'énergie du travail, de l'argent, d'ailleurs
quand la nuit tombe l'atmosphère se transforme. Le stress laisse
place à autre chose de séduisant, même trop. Aujourd'hui j'ai
remonté la pente, je suis content. Je n'aime pas perdre la joie de
vivre, mais ne parviens pas à la garder inconditionnellement.
Vu
mon site apparaître sur le web. Le mandala de présentation est très
bien, mais deux sur les huit de la galerie sont trop foncés. Les
cartes du tarot de mandalas sortent aussi très bien. Impossible de
savoir qu'attendre de ce gadget. Repris lecture et correction de
scénario pour l'Apocalypse.
Finalement
Gaarder finit par compliquer les choses, et je trouve tout un passage
inutile, sentiment que le reste du livre n'est pas à la hauteur du
début, sauf peut-être le Manifeste. Tout le livre amène le
Manifeste, très original. Dans scénario pour l'Apocalypse,
la structure est similaire. Même si je réussis la fin, il y aura
l'essentiel tout au bout, en épilogue. Finalement, il y a
plus de travail que ce que je pensais.
Commence
à vivre intégré au village. Ai perdu aux échecs, au restaurant,
contre un grand échalas qui vend des gravures. Je l'appelle le
champion, lui ai donné du poisson hier et avant-hier, et lui ai
offert un coca aujourd'hui. En faisant attention, je le gagne
aussi. J'ai demandé des explications. Il a commencé à neuf ans.
Cela change de l'ordinateur. C'est un type intelligent, qui gagne
très peu d'argent. Je ne le perds pas de vue.
Acheté
des bananes, des œufs. Ai réussi au blender une purée de
bananes au gingembre merveilleuse, et j'ai préparé mes pâtes
pour la première fois avec de la crème de noix de coco délayée,
du poivre et de la sauce de soja. Un bon repas me requinque, parfois,
c'est étrange. Cela dérange une partie de moi-même de devoir me
sentir bien à cause de sensations aussi basiques. Mais j'ai
vraiment senti que ce déjeuner tardif, que j'avais entièrement
préparé avec amour, a fini de me remettre d'aplomb. La matière
demande à se réconcilier avec moi, alors pourquoi pas de cette
façon. L'ange blessé trouverait-il cela trivial d'être remis
d'aplomb par un bon repas ? Je crois plutôt que tout moi-même
commence réellement à vivre autre chose, et que je peux de moins en
moins prévoir les conséquences de ce qui m'arrive. Cela demeure
difficile de s'habituer aux sautes d'humeur incontrôlables.
Pour
les fines bouches. Hier, journée peu reluisante. Je me couche tôt,
et là des sensations arrivent. Je me revois dans un de mes coins
préférés. Le lion de terre, à saint-Raphaël, mon lieu maritime
de prédilection depuis mon adolescence, le rivage, les rochers
rouges, un petit récif où j'adorais me rendre en nageant vite,
sur la gauche de cette petite île, le lion de terre, où j'ai
commencé la chasse sous-amarine sérieuse à quinze ans. Le
bien-être arrive, le premier de la journée. Sans nostalgie, en
plus. Complètement dégraissée de nostalgie. Aujourd'hui j'y
repense, et je me dis que mon cerveau essaie de se défoncer (quand
je n'ai plus assez de plaisir) et y parvient comme il peut. Je ne
fume pas, je ne bois pas un gramme d'alcool, je ne caresse
personne, il ne lui reste rien, au cerveau, pour se gratifier,
d'autant qu'hier je n'étais pas en mesure d'apprécier
réellement la nourriture. Donc il va chercher une sorte de mémoire
structurée très gratifiante, repasse le film, et me voilà
aux anges. En tout cas c'est une hypothèse. Je me suis endormi
serein, après une journée assez lourde de bout en bout, puisque
même la chasse sous-marine a été forcée. Et le travail a continué
dans l'inconscient. Rêve où mon père et ma mère exultent, où
nous nous aimons tous les trois, incroyable, mieux que cela a jamais
été dans la réalité, le tout dans quelque chose de très
compliqué que j'ai oublié. Je ne sais pas ce qui se passe, mais
le cerveau en voit de toutes les couleurs.
9 Mars 2004
Hier,
je crois que j'ai trouvé le début d'une technique de ki-cong
sous-marin : je suis sorti en pleine forme de l'eau, tout mon
corps avait chaud, j'ai gagné le champion aux échecs deux fois de
suite, je n'en revenais pas, et pourtant, tout aurait dû se passer
plus mal. Il y avait tellement de houle. D'abord je me suis baigné
sans combinaison, mais avec les palmes le masque et le tuba, en
prenant bien conscience de mon corps, des gestes lents et souples, et
en respirant. Sans doute six ou sept minutes. Remonté sur le bateau,
j'ai un peu plus tard commencé la chasse dans un endroit sans
courant, sans poisson, mais avec de jolis coraux, et j'ai commencé
de petites apnées. Nouveau repos au bout de vingt minutes. Puis
Grosse chasse dans les vagues monstrueuses, sans résultat, un quart
d'heure. Enfin, au retour, après quelques minutes passées sur la
pirogue, peut-être une demi-heure assez agréable dans le chenal ;
où je demeure conscient de mon corps, je le laisse nager sans
diriger. Je me souviens qu'un prof de gym sympathique nous bourrait
le crâne avec l'entrainement fractionné, quand j'avais quinze
ans. J'ai trouvé quelque chose grâce au mauvais temps, au besoin
de rectifier l'expérience précédente. L'alternance
repos-action, il faut travailler ça. Le bien être a duré jusqu''au
soir. Peut-être que l'heure intervient aussi. J'avais pris un
bon petit déjeuner deux heures avant. Je ne supporte plus la moindre
dose de sucre, c'est clair. Café pur et en petite quantité, ou
avec un zeste de miel. C'était autour de midi et demi.
Commencé
un livre de Beigbeder. Ce type est tout simplement dans l'air du
temps. Cela le dispense d'avoir du génie et de cultiver son
talent. Il ressent pas mal de choses, et quand son personnage souffre
un peu, on se demande s'il ne s'agit pas de lui. Belle apologie
de l'art américain. Suis d'accord. Moi aussi, depuis Vian, les
premier le Clezio et Camus, je n'ai trouvé aucun français à la
hauteur de K. Dick, de Brunner, de Spinrad. Quand les français
perdront-ils l'habitude de prendre les autres peuples pour des
cons ? Et quand les écrivains français joueront-ils à autre
chose que d'essayer de ne pas sembler snob ? Même Sollers est
revenu du snobisme, et il y a un snobisme du cynisme, un snobisme du
style (le nombre de nénettes qui publient et qui sont des clones de
Duras, ça donne le vertige, mais au moins elles font du fric), un
snobisme du je ne suis pas comme les autres qu'en pensez-vous je
vous écoute en me regardant le nombril, un snobisme du je ne
me prends pas au sérieux mais je suis quand même un écrivain non
d'un petit bonhomme, et enfin le nouveau snobisme small is
beautiful, resucée de l'époque hyppie, où l'on se fait
fort d'apprécier les petites choses de la vie, vu que les grandes
ont disparu. Derrière Delerm, de jeunes minets ressuscitent, (je
croyais l'espèce disparue avec moi-même), jouent de la mèche
et écrivent impeccablement des niasieries pseudo-cornéliennes sur
la taille de leur bite, et le nombre de gonzesses qu'ils peuvent
aimer à la fois sans se mentir. Vu que ces types ont du succès, il
est vrai que ce serait contradictoire qu'on se précipite pour
publier mes œuvres. La profondeur à la portée de tous est un
concept que je vais finir par abandonner (mais c'est un titre
formidable, non ! ).
*****************************
Long
mail d'É. Z aurait fait allusion à ma personne d'une manière que je n'ai pas vraiment bien saisie, mais É a été bouleversé.
Bien que ce ne soit pas incompatible, je préfèrerais qu'elle me
sous-estime, plutôt qu'elle ne se surestime, mais son discours ne
va pas dans le sens d'une grande reconnaissance de mon statut. Si
elle s'imagine être loin dans la transformation, c'est son
problème. Moi je ne le crois pas. Ses livres sont plein d'amalgames,
son expérience sur le tombeau de Mère, et puis son attachement
proclammé pour Israël, ses accointances avec Melchissedecq, je ne
vois pas ce que cela vient faire avec le Supramental. Mais comme je
le dis à É, elle a le vent en poupe, et elle est certainement
utilisée pour le travail de la Terre. Mais il semblerait qu'elle
aussi soit quelque peu intégriste, en tout cas son mental est
faible, elle n'est pas très souple, et se vante de tout comprendre
à travers les sensations, l'effet sur le corps des paroles, etc.
Ni plus ni moins, finalement, si je veux être vache, (encore
faudrait-il que je sache comment elle a vraiment exploité notre
rencontre), qu'un nouveau système. Elle aurait conclu que
je n'étais pas descendu jusqu'à je ne sais quel Sephiroth,
alors que je les ai dépassés il y a bien longtemps les Sephiroth,
my God. Au début de son allusion, elle a parlé de moi sans me
nommer, par rapport à mon manque d'amour reçu je crois, mais É
m'a reconnu dans le personnage, puis elle est revenu vers É,
contrarié, et c'est là qu'ont dû se dire des choses. Enfin,
grosso-modo, c'est elle la meilleure, point barre. Avec le dénommé
Y elle ferait un beau couple. Le couple des deux meilleurs terriens
les plus mieux déjà divins qui ont tout compris. Cela ne me
dérangerait pas si je le sentais. Moi j'attends que ce soit le
Divin et Lui seul qui me pousse en avant. De toute façon, j'ai été
si profondement impressionné par Sri Aurobindo, qu'il faudrait
vraiment que je sente un homme ou une femme à sa hauteur pour que je
m'incline, et cette rencontre n'a pas encore eu lieu.
Relu
le mail d'E sur Z. Affligeant. J'ai répondu immédiatement, et
conservé le dossier, pour l'avenir, si un jour cette personne me
discrédite ou cherche à m'utiliser comme faire-valoir, ce qui
semble être ma vocation quand je rencontre des personnes bien
décidées, qui exploitent mon yin. Cela m'est déjà arrivé
trois fois. J'étais le préféré du chef charismatique de la
classe à treize et quarorze ans, un type formidable et en plus très
beau, j'étais comme son intelligence grise, puis un chaman pas très
clair m'a utilisé comme chauffeur et conférencier quelque temps,
quand il se prenait pour le messie, j'avais vingt-cinq ans, et
enfin en 93, Y a conclu devant sa compagne, triomphalement et sans
même me regarder, « j'ai trouvé mon aide de camp »
quand j'avais quarante-trois ans.
Sur
ma prochaine carte de visite, Natarajan, faire-valoir des messies
en tous genres, devis gratuit. C'est dur à avaler que cette
petite, sous prétexte qu'elle est descendue dans Malkout, ne voie
rien de ma transformation totale dans le physique, et s'imagine
loin devant, et qu'elle utilise le peu qu'elle sait de moi pour me
réduire à ce point, allant jusqu'à dire que je n'ai pas la
même exigence sur le corps, ce qui est forcement faux, mais trop
long à démontrer. Elle semble avoir complètement oublié ce que je
lui ai dit sur la récupération de mes organes familiaux, sur la
bataille à couteaux tirés contre la mort en 2001, à laquelle j'ai
fait allusion devant elle, sur la certitude que j'avais, que les
gènes avaient rendu plein de mémoires ancestrales en 2001, et que
je l'avais échappé belle. Consternation et humour. Comme un
échiquier, les blancs et les noirs, drôle et pathétique. Cela me
navre et m'amuse aussi. Affaire Z provisoirement réglée. Quant à
Y, je dois réserver mon jugement. Il était puant en 93, mais il
aurait beaucoup changé et beaucoup souffert, ce qui est à mourir de
rire car il tenait des discours ronflants devant trente à quarante
personnes (en 92) comme quoi il ne souffrait plus (sous-entendu
passez par moi pour en faire autant). Il était très convaincant.
Déjà à l'époque je l'avais prévenu qu'il se trompait, mais
il se gaussait. Je disais qu'on pouvait à la rigueur continuer de
souffrir sans que cela fasse mal, mais faire disparaître la
souffrance était impossible. Il prenait un air et un ton supérieur.
Lui, il avait définitivement réglé le problème, à trente-cinq
balais, c'était ridicule, mais personne ne le trouvait ridicule,
son culot était monstrueux. Il avait un charisme très fort, en tout
cas sur des personnalités assez faibles, mais moi je le trouvais
vraiment mytho, et sa bande comprenait beaucoup de jeunes sensibles,
mais pas particulièrement brillants ni affirmés. Je ne saurais dire
où il en est. Il se plaint d'une guerre des maîtres qu'il met
en place lui-même en ne reconnaissant personne, et en exigeant
d'être reconnu comme autorité suprême. Satprem s'en fout et du
coup Y et sa bande le sous-estiment. La guerre des maîtres. Cela me
faisait rire, mais avec l'image que Z s'est construite de moi,
pour que les choses tournent à son avantage, ce n'est pas si
idiot, après tout. Une incapacité pour ceux qui sont devant de
s'évaluer, peut-être, pourquoi pas. Je ne fais que riposter à des
sortes d'attaques, j'aurais bien aimé que Y soit plus humble et
capable de reconnaître ce que j'avais vécu, et que Z partage
aussi le Supramental. Mais elle a décrété, elle, que je ne pouvais
pas partager au-delà d'une limite, selon elle, nous n'avons pas pu
aller ensemble jusqu'à l'os, en établissant les règles
du jeu elle-même. Si j'avais fait la même chose, j'aurais
pu la pointer sur des dizaines d'expériences qu'elle n'a pas
faites et en tirer parti pour l'inférioriser, et j'aurais même
pu l'attaquer de front, et lui dire que son Melchissedeck n'avait
pas à interférer avec le Supramental. Mais elle voit des tas de
choses et en tire partie pour impressionner, alors je m'incline. Je
ne l'ai pas faite, la mise au point, et j'ai commencé à la
reconnaître tout en trouvant étrange son mental presque infantile.
Maintenant je riposte. Elle profite que j'ai lancé la mode de dire
que j'étais un maître Supramental, pour s'aligner. Du style,
bon, puisque Natarajan ose, moi je vais le suivre, mais je ne le
disais pas avant pour n'effrayer personne. Pas sérieux tout ça,
mais je ne sais pas comment l'aider ou mettre les choses au point.
Elle se retire en Italie auprès d'un atlante local qui sauve à
tour de bras. Son logo regroupe les symboles des religions
principales disposées ensemble dans une belle unité. Roberto aurait
compris que Dieu était unique, bravo Roberto, et embrasserait toutes
les religions dans son cœur, encore bravo. Selon Z, un grand initié.
Belle brochure en quadrichromie, on se déplace, on vient le voir de
toute l'Italie, et on s'emploie à le rendre célèbre. Photo à
moitié de profil, on sent le bonhomme dans une sorte de transe
majestueuse du premier de la classe en méditation, ferveur,
grandeur, élégance, générosité, nombrilisme. Quand je pense
qu'un soir le Divin m'a utilisé pour détruire les siddhis,
je lui souhaite d'être sincère au rital.
Y
m'avait fait le même coup, le coup du partage qu'il ne peut pas
mener très loin vu mon incompétence. Il m'invitait à ses
weeks-ends, mais manquait soigneusement mes interventions, réservées
à ses disciples. Monsieur était au-dessus, naturellement, à quoi
bon perdre son temps avec Natarajan. Natarajan, faire-valoir des
messies en tous genres, se met à son compte. À force d'avoir été
infériorisé, cela se renverse et je vais me supérioriser tout seul
comme un grand.
11 Mars 2004
C'est
la première fois que j'arrive à me lever à l'aurore et sans le
sentiment d'être un peu cassé dans le corps. Tant mieux. Suite à
ma réponse, É a précisé certaines choses sur l'échange avec Z,
et j'ai peut-être noirci le tableau. Mais dans le fond, Y et elle,
c'est quand même le trip du lion farceur. Incapables de comprendre
qu'on peut avoir autre chose à faire que ce qu'ils font
eux-mêmes ! Si l'on ne fait pas la même chose, c'est forcément
moins bien. Reste à savoir si maintenant l'institut va réagir
aussi, parce que je ne ferais pas du Satprem copie conforme, lui qui
a renoncé à être gourou (alors que je le suis malgré moi, ça
s'est fait tout seul).
J'ai
la suite de mon roman de S.F, et des idées nouvelles pour le
séminaire de l'ascension. On va cerner de près ce qu'il est, le
mental, en voyant ce qu'il nous apporte par rapport aux animaux. La
question reste entière. Pourquoi, alors que nous avons à peu près
le même code génétique que les chimpanzés, disposons-nous en plus
du mental ! Qu'est-ce que ça apporte ? Les singes sont-ils
capables de faire des bombes atomiques ? Et du Mozart ?
Avons-nous autant besoin de bombes atomiques que de Mozart ?
(Ceux qui pensent qu'on a plus besoin de Mozart que de bombes sont
prêts à bombarder ceux qui pensent le contraire, c'est donc un
cercle vicieux. À Mort les racistes, proclament-ils fièrement.)
Vision
probable du mental comme un boyau de l'évolution totalement
inutile, sauf si c'est le pont vers le Supramental. Le mental sans
le Supramental, c'est idiot de le faire exister. Il faut qu'il
mène autre part, sinon toutes les règles sont truquées. J'en
suis là, et ce n'est pas personnel. Je suis resté trois minutes
ce matin au lever du jour, dans l'état que j'aime bien. J'ai
été entièrement fabriqué par l'univers tel quel, tel que je
suis. Il n'y a rien qui m'appartienne là-dedans, et je vois que
le mental est une impasse. Pour l'espèce bien entendu, pas pour
l'individu, qui peut le dépasser dans le Soi. Et le mental est qui
plus est, prisonnier du vital, qui lui-même est encerclé par la
Mort et le tamas. Sortir de ça est peut-être impossible,
mais ce n'est pas une raison pour renoncer. Si c'est le Divin qui
l'a décidé, Il trouvera de bonnes réincarnations capables de
commencer ce boulot. Hallaj, Maître Eckart, et les autres de cette
trempe, ils pourraient jeter les bases. Des femmes aussi,
naturellement. Les femmes ne fuient pas, quand la connaissance leur
tombe dessus.
Toute
l'Histoire n'est à nouveau qu'un château de cartes.
Il
y a d'autres scénarios, que la transformation physique ne soit pas
réellement possible, mais que l'atmosphère change, et que le
mental s'épure énormément, s'élève, et donne une conscience
intuitive à l'espèce. Il faudrait au moins arriver jusque-là.
L'écriture est un vieux machin. Il faut se lasser des
représentations, se lasser de ce pouvoir supérieur à celui des
animaux, qui nous fait faire du Mozart et des bombes atomiques sur le
même palier. Se lasser des représentations. C'est la seule
issue, sans revenir à l'instinct naturellement, en sacrifiant
l'hédonisme bas de gamme, qui prend toujours le relais dans les
civilisations saturées de représentations (retour de manivelle chez
les philosophes grecs qui finissent pédophiles et fiers de l'être,
contagion homosexuelle en Californie, avant le Sida, pas loin de la
silicone Valley, arhétype caricatural, (oh c'est joli comme
expression), mais qui n'est pas dénué de fondement, de
l'homosexuel maniéré grand amateur d'art, érudit émérite,
(oh c'est joli aussi), collectionneur de livres précieux et
d'éditions originales de Proust).
Voir
le marxisme et les religions sous le même angle : les grandes
représentations qui foirent, les modèles qui retournent au chaos,
la géométrie qui explose dans le big-bang, le calendrier qui flambe
dans l'incendie, lui aussi.
On
regarde la carte topographique pour être sûr d'aller dans la bonne
direction, tout en marchant, et on se casse la gueule par la même
occasion.
Pendant
qu'on fait le point avec la boussole, un jaguar vous attaque par
derrière. On consulte son G.P.S et un cobra vous mord la cheville.
On décompose la partition et on rate une note. Quand je verrai des
funambules se promener sur un fil à cent mètres de haut tout en
consultant leur horoscope sur le premier magazine venu, je ferai
confiance aux représentations, mais pas avant, en tout cas s'ils
n'en profitent pas pour tomber, naturellement.
Hier,
chasse dans le courant, dans une eau pas très claire. Aperçu des
poissons vraiment magnifiques pour la première fois. D'un blanc
incandescent légèrement argenté, avec une gueule de bar, et le
profil du thon. Moins hydrodynamiques que les carangues, mais une
majesté folle, entre un et quatre kilos. Jamais vu sur les marchés.
Me suis épuisé à les poursuivre assez profond. Revenu bredouille,
les chats me harcèlent. Ketut devrait me livrer des maquereaux pour
eux dans un moment
Les
représentations sont mortes, les formulations sont vivantes. Cela
oblige chaque humain à recréer sa propre religion pour qu'elle
soit autre chose qu'une mascarade, cela pousse les philosophes à
se démarquer de leurs références, et les artistes doivent dépasser
leurs modèles. C'est sûr qu'après Bach, certains compositeurs
on dû se dire, la musique c'est fini, puis il y a eu Mozart, après
lequel on s'est demandé quoi inventer, et puis les russes sont
arrivés en nombre, et même des français, Debussy, et ça ne
s'arrête pas là, on finit par tomber dans la forme pure et la
boucle est bouclée, alors il ne reste qu'à mélanger toutes les
musiques, et ça ce n'est pas encore fait. En spiritualité, j'en
suis là, voilà ce qu'il y a dans le zen, mais c'est
insuffisant, et dans l'hindouïsme, oui, mais sans le tantrisme,
pour l'hindou la matière est morte, le christ pourquoi pas, mais
nous n'avons plus besoin des anges et du dieu créateur, le Divin
suffit, le Bouddha avait raison sur tout, mais il s'est trompé
quand même, le Supramental démolit complètement son système, de
fond en comble, et pourtant il faut respecter ses principes, comme le
détachement, qui, lui, demeure indispensable au sein du nouveau
paradigme. Et là, il n'y a plus personne pour suivre. On croit à
la suprématie de Sri Aurobindo, et on méprise tout le reste, on
brûle les étapes en croyant avoir tout compris, comme la bande
d'abrutis français d'Auroville avant les années 80, ou bien
l'on se fige dans un vieux temple, la conscience tranquille, son
temple bien de chez soi.
Le
travail complet est de tout reformuler soi-même à partir
d'un vrai panorama, d'une vraie curiosité pour tout, au lieu de
faire la moue sur ce qui n'est pas bien de chez nous, ou au
contraire, sur ce qui est de chez nous. Il y a des français en Inde
déguisés en hindous, ils ont tout renié pour s'imaginer être de
là-bas, et un jour ou l'autre ils vont tomber sur la même
complaisance dévotionnelle, sur les mêmes parti-pris, sur les mêmes
illusions supérieures. Ce n'est pas plus intelligent que mépriser
tout ce qui n'est pas juif quand on est juif, ou tout ce qui n'est
pas chrétien quand on est chrétien. On veut juste apprendre le
solfège, mais sans le recréer, donc on ne peut pas comprendre
l'harmonie. On veut en rester à Mozart ou à Xenakis, mais surtout
pas se libérer de toutes les formes. On veut mettre le grégorien
au-dessus du reste, ou le jazz, ou la goa trance, ou Mozart, ou
conclure sur la suprématie de Bach mais personne n'a l'idée
que toutes ces choses ne peuvent pas être hiérarchisées et
proviennent seulement d'une combinaison différente des
mêmes sept notes.
Je
continue à me libérer des formes.
Bach
n'est pas meilleur que mac Cartney qui n'est pas pire que
Vangelis et les Floyd sont ni au-dessus ni en-dessous de personne, ce
sont les pink Floyd, défoncés à l'acide, mais capables de mettre
dans le même album du super sweet et du heavy metal harmonieux, sans
compter les alaps de guitare que même un Santana ne sait pas faire.
Et si je préfère Spinrad à tous les autres, cela ne veut pas dire
qu'il est le meilleur. Tous les écrivains sont les meilleurs. Mais
il n'y a qu'un Proust, qu'un Flaubert, qu'un Stendhal, qu'un
Spinrad. Il n'y a qu'un Rimbaud et qu'un Milton. À partir d'un
moment, il n'y a plus de critères. On absorbe le musicien ou
l'écrivain, il n'y a plus de niveau. Le mental n'a rien à
ajouter, messieurs les intellectuels, il aura toujours du retard sur
le moment où l'on écoute de la musique, sur le moment où l'on
se délecte de lire. Qu'ajouter à cela. La recette ne
remplacera jamais le plat, nouvel aphorisme à ajouter au
célèbre, la carte n'est pas le territoire, plus tantrique
non?
Et
si l'on me provoque et qu'on me dit que Spinrad n'arrive pas à
la cheville de Houellebecq, je n'en disconviens pas, et dis que mon
jugement est entièrement subjectif, et que je suis incapable
d'apprécier le Houellebecq en question, une lacune sans doute, due
à mes préjugés Je n'ai rien à défendre, c'est magnifique,
magnifique. Natarajan, yogi supramental, pensez-donc ! Un minet
soixante-huitard couvé par sa mère, et qui a dû fumer un peu trop
de haschisch
C'est
pour cela que je suis si seul.
Je
n'ai jamais suivi aucun chemin, pour être sûr de ne pas me
tromper d'itinéraire.
J'affirme
que l'on ne peut jouer que sur un instrument que l'on a fabriqué
soi-même. Être cul et chemise avec son mental, et le traiter comme
un animal de compagnie qu'on connaît par cœur. On l'aime
énormément, mais on ne se laisse pas marcher sur les pieds. Si on
nourrit le mental avant de nourrir l'âme, il fait la loi, le
salaud. Et comme il y a des psychologues pour les chiens dominants,
il y a des tas de psychologues pour les patients affligés d'un
mental dominant. Leur animal domestique leur mange la tête, et ils
ne savent plus que faire. Le mental est un vieux singe. Tant que
l'homme sera au service de sa machine à penser, il restera ce
qu'il est, une moisissure arrogante dans les galaxies. Mais tant
que l'homme haïra sa machine à penser, sous prétexte d'avoir
du cœur, ou de ressentir le présent, il utilisera le moment comme
un faire-valoir, car il ne saura jamais s'en éloigner assez pour y
revenir d'une manière nouvelle.
Une
journée assez nonchalante, dévolue à la réflexion, pas de chasse
sous-marine, et le tao qui s'amuse encore à dérégler mon
horloge. Il n'est que dix-neuf heures dix, la journée semble en
avoir duré trois, mais je me sens beaucoup mieux qu'hier où je
finissais de digérer cette info sur la fantaisie de Z (me
présentant pas du tout comme je suis en dépit de notre rencontre)
et la vibration de malaise qu'Éric m'avait communiquée.
Content
qu'il y ait encore quelques hommes universels. Sheldrake dans l'âme
de la Nature montre qu'il n'est pas qu'un scientifique mais
aussi un historien des idées. Je croyais que tout avait basculé au
dix-huitième siècle, mais si l'on introduit le protestantisme
comme une des causes du futur matérialisme (scientifique) qui ôte
l'âme à la Nature, le dix-septième est le vrai départ de la
réification de la Nature. C'est amusant que cette réification ait
fini par amener également une réification de l'homme, telle que
l'entendent les critiques marxistes sérieux, et Brecht, voyant
dans le petit-bourgeois du dix-neuvième, ayant perdu tout idéal,
toute générosité, un homme transformé en chose par l'amour des
choses qui lui a été inculqué. Il ne fallait pas commencer par
voir en la nature une mécanique, mon cher Descartes, et les grecs
les plus avisés de l'antiquité ne se permettaient pas de le
faire. Seulement il fallait se libérer de tellement de superstitions
qu'on a jeté le bébé avec l'eau du bain. Pour en finir avec
les personnifications païennes, et les identifications bas de gamme
aux sens, il fallait peut-être que l'esprit joue au chirurgien, et
se distancie de la nature, pour mieux l'observer. Mais si le retour
ne s'opère pas rapidement, cette distance nous tuera tous.
Peut-être également qu'en tuant la nature, c'est-à-dire en en
faisant une mécanique, on a, sans s'en rendre compte, également
tué Dieu. Je ne sais quelles raisons Nietzsche évoque pour cet
assassinat, puisque je suis allergique à sa lecture, (je me suis
retrouvé sonné à l'infirmerie en hypokhâgne, pendant quelques
heures, après une dissertation sur un aphorisme de Nietzsche, avec
la trouille de devenir dingue), mais en ce qui me concerne, puisque
je crois que tout est lié, il me paraît que la conception, la
vision de Dieu, dépend de tout le reste. Et l'époque où l'on
parle de Dieu comme d'un grand horloger est justement celle où la
vision mécaniste commence à triompher de la pensée religieuse. Si
Dieu n'est plus bon qu'à régler les choses, qu'à surveiller
l'ordonnancement, le voilà ni plus ni moins qu'un être
intelligent et rationnel. Son amour a disparu !
Son
infinitude se perd dans des lois physiques imprescriptibles et tirées
au cordeau, sa saveur devient celle du métal, nécessaire aux
engrenages, aux poulies, aux crémaillères, aux forges
industrielles, aux rails de chemin de fer. Si la Toute puissance de
Dieu se mesure, comme tout le reste, nous n'en aurons bientôt
plus besoin...
Et
c'est ça qui est arrivé au vingtième siècle, ne plus avoir
besoin de Dieu, non pour donner raison à Nietzsche, mais parce que
toute courbe suit son mouvement, tout boulet de canon atteint son
apogée, avant de retomber. Puisque tout peut exister sans la grâce,
remplaçons là par la raison. Faisons de la raison une grâce
accessible à tous et bon marché. C'était le pari de Diderot, de
Laplace, de Comte, naufragés dans le sillage de Descartes, pari
repris par le communisme, par Sartre contre Claudel, par tous les
hommes fiers d'utiliser leur mental pour en finir avec les
bondieuseries, la crainte de l'enfer, le péché et toutes ces
sornettes. Et le pari a marché jusqu'à l'effondrement soudain
du rideau de fer. Car les idées, comme le reste, finissent par
retomber, et la beat génération, déjà, annonçait la fin
de la mort de Dieu, le début du déclin de la trajectoire du
matérialisme religieux. Et plus le cœur est nié, plus son retour
se fait attendre, plus sa résurrection est explosive.
Les
avions du 11 septembre vengent la mort de Dieu assassiné par le
capitalisme et la réification absolue, à petit feu, de Cortez à
la mondialisation. De la manière la plus triviale qui soit, la plus
caricaturale, la plus primaire, la plus archaïque, la plus ignoble,
mais également la plus efficace. (Considération entièrement
subjective que je renierais le cas échéant, si la bien-pensance
universelle me le demandait à coups de menaces citoyennes).
L'expression
qui présente le remède comme pire que le mal, expression
pleine d'humour et d'amertume, pourrait presque définir le
matérialisme scientifique triomphant de L'Eglise, et trouvant son
apothéose dans la pharmacie chimique industrielle, qui soigne une
partie (du corps) en contaminant le tout, (et j'ajoute qu'
aujourd'hui en 2010 l'interdiction des plantes médicinales
s'avance ! ).
Sisiphe
change de pierre parfois, pour se donner le change. Il en prend de
moins lourdes, le bougre, sans se rendre compte que leur forme
beaucoup plus éloignée de la sphère que les précédentes, rendra
la montée plus difficile encore, malgré le gain en légèreté,
parce que les faces irrégulières imposent à la traction des
soubresauts déplaisants, une marche de travers, et des efforts
chaotiques. Alors un jour, il rêve de pousser des polygones
réguliers, de pouvoir se reposer sur chaque face égale une seconde,
pour monter agréablement, alors que la sphère de pierre est
absorbée par la force de gravitation et lui demande un effort
constant pour ne pas repartir en arrière. Il se met à prier, et
Dieu lui dit : « demande à Platon de t'envoyer
un polygone à vingt faces, ce serait parfait. Avec le dodécaèdre,
l'effort serait encore un peu trop violent pour changer de face. »
Alors Sisiphe est tout content, il se dit que les choses vont
s'améliorer, dès qu'il aura son polygone plein de petites
facettes égales, taillé comme un diamant. Mais Platon refuse après
avoir fait bisquer Sisiphe. Il s'est déplacé, que puis-je faire
pour vous, patins-couffins, mais il refuse tout de go de donner les
plans du polygone à vingt faces à Sisiphe, qui avait appris la
sculpture exprès pour ça. « Vous me faciliteriez rudement
la tâche, monsieur Platon, vous savez. » Platon lui,
laisse entendre que s'il en est là, c'est qu'il n'a pas
vraiment envie de se libérer, sinon il trouverait un moyen de
changer sa condition. « Je n'aide pas les lâches,
Sisiphe, la liberté se mérite ». Platon a passé toute sa
vie, toutes ses nuits, à faire les calculs de découpage d'une
sphère en polygone à vingt faces, il a même consulté Pythagore
dans l'astral, il a peiné en croyant qu'il n'y arriverait
jamais, sans pour autant renoncer, et il ne va pas donner ce trésor,
son chef d'œuvre, l'effort de toute une vie, à un pauvre type
qui ne veut pas s'en sortir. Naturellement, Sisiphe réagit sans
réfléchir et dit tout de go « mais je ne peux pas
monsieur Platon, vous le savez bien. Je ne veux pas changer ma
condition, juste améliorer mon esclavage. » Bref, Sisiphe
a beau changer de pierre, c'est-à-dire qu'il a beau varier les
formes de son ignorance de siècle en siècle, la pente ne change
pas, elle. Toute ressemblance avec une fable immémoriale ne serait
que le fruit d'une pure coïncidence.
L'idôlatrie
scientifique n'est pas dans le fond supérieure à l'idôlatrie
religieuse, qui a le mérite d'être tant soit peu holistique. Nous
sommes passés de la peur de Dieu à la destruction de la Terre en
quatre siècles seulement. (Il est évident que si la peur de Dieu
avait subsisté nous n'aurions jamais osé malmener la matière à
ce point-là, jusqu'à ce qu'elle puisse nous détruire). Les
choses vont très très vite. Notre esprit raisonne de travers depuis
qu'il croit qu'il faut à tout prix prouver. Mais une nouvelle
phase commence, d'où ce paradigme est exclu. Il faut à nouveau
ressentir, et le nouvel-Age l'a compris avant tout le monde. Le
renversement des cycles, il n'y a que cela de vrai, basculer de
contraire en contraire.
Aujourd'hui,
il n'y a plus rien à prouver car il n'y a plus rien à démentir.
Les idéologies, ces religions athées qui avaient gardé les travers
des forces auxquelles elles voulaient s'opposer, sont mortes. Il ne
reste plus que la mondialisation et le terrorisme. Le mental est une
force mystérieuse, et comme le vital, il est dangereux de se
l'approprier, l'Histoire ne cesse de nous le répéter. Le louer,
sans en être jamais propriétaire, puis changer de résidence. Mais
nul ne nous l'a appris. Alors on considère comme un bien ce qui ne
nous appartient pas, on fabrique de la pensée, et l'intelligence
se sauve, parce quelle a horreur d'être récupérée par une
bête.
13 Mars 2004
Il
ne fallait pas s'attendre à ce que je me lance dans du Rupert
Sheldrake sans en profiter pour gloser un peu, tant pis pour ceux, et
surtout celles, qui me croient intellectuel. (Une des choses qui me
rassurent, le Sri Aurobindo il avait une sacré tronche, mes aïeux,
et bien avant que Krishna le rejoigne définitivement en 1926).
Sheldrake, c'est un des seuls génies contemporains connus avec
Lupasco, Prigogyne, et le physicien qui a donné la réplique à cet
abruti de Krishnamurti. Et c'est merveilleux, aujourd'hui je me
sens dans une douceur extraordinaire, écrasé et croyant que je ne
peux rien faire de mieux que dormir, mais la sieste a été brève,
et tellement profonde que je n'ai pas entendu le portail grincer,
tout près, quand Kadek est arrivé faire le ménage. Bon, j'émerge
un peu, et voilà que dans l'âme de la nature, Rupert
annonce réellement que les atomes n'existent pas, que c'est la
conclusion de E = mc2. Il n'y aurait donc que des champs. À ce
moment-là mon cher Watson, tout est possible, ascensionner, est
possible, il suffit de changer la masse du corps en énergie. De
toute façon, nous ne pesons strictement rien, c'est la force
gravitationnelle, comprise par Newton, qui donne l'apparence du
poids aux champs qui prennent l'apparence de la matière. Mais en
fait il n'y a qu'une seule chose, la grande Shakti, qui se
subdivise en nombreuses Prakriti, cette seule chose existe, et
naturellement le mystère de la conscience pure. Personne n'a
encore compris la portée des découvertes d'Einstein. Personne,
peut-être mille ou deux mille humains, qui n'en reviennent pas,
parce que ça donne sur l'unité absolue, sur le puzzle d'ensemble,
avant que le mental ne le découpe en rondelles. Même le temps
serait une propriété de l'étendue, en définitive, et l'étendue,
ce serait des champs, toutes sortes de champs, permettant l'apparence
de l'agglutination, comme un aimant permet à la limaille de fer de
se rapprocher de lui. Bref, Sheldrake n'est pas loin d'avoir
compris intellectuellement ce que je ressens spirituellement. La
multiplicité des champs fait même que le Supramental peut agir
chaque fois d'une manière pratiquement nouvelle, ou en tout cas,
en suivant des modus operandi généraux très variés, dont
chacun possède une palette de variations. Ce que je sens aujourd'hui
n'a rien à voir avec tout ce que j'ai vécu au moins depuis
plusieurs mois, mais c'est le top. C'est la phase repos, où
l'intégration se produit sans doute, mais je sens bien que la
force a dû travailler avant de différentes manières pour produire
ça. Une complémentarité imprévisible, et jamais la même chose.
Il y a de quoi péter les plombs.
Hier,
deux choses intéressantes. D'abord plus aucune tension, amertume
ou jalouise, à lire les titres des auteurs d'espaces libres
chez Albin Michel où De Smedt a décidé de me faire la gueule
depuis dix ans. Des personnes à qui j'ai donné la mutation
solaire, et qui ne m'ont jamais répondu, y publient. Mais tout
ce qu'ils racontent me paraît maintenant tellement pauvre que je
n'ai même plus envie de figurer dans cette collection. Je
cherchais s'il y avait d'autres Sheldrake, et je tombe sur la
liste de tous ces auteurs.
L'après-midi,
pêche au maquereau sur la pirogue de Ketut jusqu'à la tombée de
la nuit. Invraisemblable mystère de tous ces petits poissons, qui
frétillent en mourant, interchangeables, et qui n'étaient il y a
quelques mois encore que des œufs. Les voilà avec des yeux, une
peau, et tout le reste ; et tout le monde trouve ça normal, pas
moi. Je me suis rendu compte que je ne savais pas pourquoi l'eau de
mer était salée. Au retour, je me suis vu entièrement créé par
la Terre, et je la sentais posée dans le ciel, et là je me suis
senti entièrement créé par l'univers. Une sensation physique
de l'infini, très simple, sans aucune transcendance. Sri
Aurobindo l'avait promis, mais je n'y croyais pas, et voilà
qu'en écrivant ça je pleure comme une madeleine. Cela n'a pas
duré longtemps, un petit quart d'heure, ça vient tout droit de
l'expérience causale de l'astéroïde, et ça explique aussi
peut-être ce que je vis aujourd'hui. Il y a un moi en moi, qui au
point où il en est, n'en à plus rien à foutre de rien, du coup
tout le monde se repose, tous les moi s'alignent, les guerriers
déposent leurs armes, au moins jusqu'à demain.Le 16 mars.
Je
sais, ce que j'ai dit en deux lignes, beaucoup en aurait fait un
livre, d'autres auraient ramené ça à quarante pages, mais cela
ne sert à rien. J'admets que j'ai été trop concis, et que
cette expérience ne m'appartient pas. Les autres mutants, les
vrais, méfiez-vous des contrefaçons, finiront également par vivre
quelque chose d'analogue. Je me suis senti fabriqué par la Terre,
et que je n'avais rien ajouté à cette fabrication. J'étais en
accord absolu avec la Terre, sans avoir conscience d'une quelconque
personnalité. En revanche j'étais intégralement ce moment-là,
de tout mon être, et c'est à ce moment-là que j'ai eu
l'impression que la Terre était toute petite, comme une bulle
de savon, et qu'elle était posée en équilibre dans le ciel
entier. Ce n'est pas la peine d'insister, c'est inimaginable.
J'ai
passé deux jours à me laisser flotter, à cause de l'incroyable
ananda de paix qui était descendu. Chasse sous-marine avant-hier (on
a tous mangé, le personnel du resto et moi, une sorte de corb que
j'avais pris, dans une soupe au curry, les jeunes filles étaient
là, et à un moment, deux d'entre elles m'ont invité à dormir
près d'elles, plus ou moins par plaisanterie, sous l'auvent.
Bali n'est pas une destination adéquate pour le Bramacharya.)
Partie
d'échecs, lecture, hier aussi, et hier après-midi, pas la forme.
Après un massage pour résoudre un petit problème dans le dos du
côté gauche, j'ai eu envie de pleurer, et j'ai été envahi par
un sanglot vraiment énorme mais assez court. C'était global, tout
ce que j'avais enduré, et quelqu'un disait non à poursuivre
ainsi. Ce n'était pas du chantage, mais je voulais dire que je
n'aurai plus la force de supporter autant de choses pour faire le
yoga. Il n'y avait que de la souffrance occasionnée par les
autres, en particulier ma mère, et c'était localisé à Lyon, où
j'ai beaucoup vécu, mais j'avais enterré les préjudices subis
là-bas sans doute.
Si
tout le vécu est recouvert par le moment présent, ce n'est pas
étonnant de devoir toujours revenir en arrière nettoyer le passé.
Rêvé que je partais en pension et que cela me faisait plaisir mais
sans réagir que j'avais passé l'âge, et puis finalement je
m'installe dans la fameuse maison de mon père à saint-Raphaël
(pour laquelle ma sœur voulait me faire un procès en 97 ne
supportant pas que le juge m'ait laissé l'occuper à titre
gratuit quand mon père a fait son hémiplégie). La maison est toute
transformée, je remarque une voie qui mène à un appartement
souterrain, qui est encore une cave pleine de choses archaïques, des
objets, puis ce niveau redonne miraculeusement de plain-pied au
rez-de chaussée, et là la maison est vraiment immense et magnifique
dans une atmosphère géniale. J'y croise une jeune fille qui avait
travaillé pour ma mère à Lyon, j'y vois ma mère, en pleine
forme, mais je me demande comment elle a encore de l'argent. La
maison est à louer 9.500 f par mois, ça ne me choque pas, et le
fait que je veuille m'installer dedans n'interfère pas. Absence
totale de mon père. Oui, ça a travaillé fort sur la lignée
maternelle. La réappropriation de cette maison, où je découvre que
la cave entière est immense et peut être transformée, tout en
donnant sur le rez-de-chaussée à partager avec d'autres membres
de ma famille, me paraît bon signe. C'est moi qui décide de
transformer la cave. Je ne suis donc plus le fils d'un père absent
et d'une mère qui était la négligence et le mensonge incarnés.
Et je retrouve de nouvelles racines. J'ai vécu sans racines depuis
plus de quatre ans, c'était intolérable, je devrais peut-être en
reparler, mais comme je n'ai pas su à quoi cela correspondait,
j'en ai peu parlé. Je me sens un vrai yogi supramental. Avant
j'avais des doutes sur mes capacités.
P.S
J'ai beaucoup de vitalité et des érections assez longues la nuit
et le matin, je ne comprends pas pourquoi la Force n'active pas les
chakras inférieurs, ce qui me donne un peu de plaisir, je me dirige
vers la frustration, mais peut-être que ça va finir par arriver.
(Ou une femme dans mon lit ! ).
Je
suis allé faire de la chasse sous-marine à pied, car Ketut n 'était
pas là. J'ai marché un peu, revêtu un tee-shirt, plus un
justaucorps de lycra et j'ai coincé une plaque de plastique contre
la peau, sur le thorax, pour pouvoir recharger jusqu'au second cran
sans me blesser. Cela marche, c'est parfait. Je suis resté
longtemps, jusqu'à prendre un gros perroquet pour le staff du
restaurant, plus d'une heure c'est sûr, et je n'ai pas eu
froid. Maintenant le corps brûle. C'est à n'y rien comprendre,
car cette nuit j'étais frileux. Je ne me suis pas refroidi,
merveilleux. La mer n'était pas très claire, et ressemblait à la
méditerranée aujourd'hui, petites vagues. Mes nouvelles palmes
extralongues qui me serraient vont bien avec les nouveaux chaussons
de néoprène très fins. J'ai lâché toute mon énergie, et je ne
suis pas fatigué, pourtant j'ai palmé sec à un moment, pour ne
pas dériver, à cause d'un petit courant.
J'ai
fini Sheldrake. Oui, moi je sais bien qu'il n'y a que des champs,
et qu'il faut les transformer. On n'est pas sorti de rien. Et
l'esprit est rivé aux sensations et à la mémoire, même si on
parvient à le libérer parfois ; avec le désir, le sommeil,
les circonstances difficiles, l'esprit redevient de la conscience
matérielle — du primate dans son environnement. En fait, Freud a
commencé à gratter sous la surface, puis Jung a mis toute la gomme
pour ne pas réduire le système à la théorie sexuelle, et
maintenant on en a plein la bouche de l'holisme et de l'holistique,
d'un superconscient qui compenserait l'inconscient, et jouerait
avec la marge de manœuvre, l'alternative, le libre-arbitre.
N'empêche qu'il faut revenir décaper après avoir gagné
quelques lumières, et là, on trouve peu de volontaires.
Mon
rôle est d'être pratiquement le premier à nettoyer
l'ashvatta, je ne fais que ça, pas moyen d'en sortir,
j'accepte. Il y a des hauts et des bas, bien sûr, et les fakirs,
et les zenistes triomphaux se gaussent, mais les pauvres petits
dorment si bien sur leurs planches à clous parce qu'ils se croient
encore des yogis et s'imaginent avoir dompté la nature. Mais il y
a des champs par là-dessous, des champs infinis. Ils commencent
juste à se révéler. Et pour y aller, il faut surtout pas
s'imaginer que l'on est quelqu'un, parce que ça fout un tel
filtre que les expériences génériques et universelles ne passent
plus. Je suis le corps de tous les hommes. C'est pas de la tarte,
mais c'est le chemin. Je l'ai nié longtemps par modestie, mais
maintenant c'est sûr.
18 Mars 2004
Je
n'aurai pas eu un anniversaire ordinaire. Je me souviens aussi
particulièrement de celui de l'an 2000, dans un temple hindou de
la ville Le Port à la Réunion, où j'ai dit au Divin, bon, je
n'ai sans doute pas toujours été à la hauteur, si Tu veux
rectifier le tir, vas-y. 2000, pas pire que 2001, mais enfin de la
souffrance en abondance. Pas besoin de faire un prêt à un taux
exorbitant. 2002, je me souviens que dans la nuit du 13 au 14 mars,
je guéris définitivement. 2003, souvenir pas net, mais plein
d'expériences à Ubud, et 2004, hier, à Padang bai. La journée
avait bien commencé car j'ai battu aux échecs le champion local
invaincu, trois fois de suite, encouragé par tous les perdants, qui
se vengeaient à travers moi (on était quatre ou cinq sous
l'auvent). Après quoi, j'apprends qu'on va enfin me livrer une
table en teck commandée il y a longtemps. Au lieu de faire de la
chasse, je fais une très belle séance de natation, avec palmes
longues, masques et tuba, et je vais jusqu'à la colonne de fer au
milieu du chenal. Je remarque ensuite l'après-midi que je suis
fatigué, et met cela sur le compte des intestins dont je sens depuis
la veille qu'ils ne sont pas alignés. Après la livraison de la
table, je pense d'un coup à ma mère, et j'éclate en sanglots,
puis m'allonge, et là je subis une attaque étrange, très
profonde, purement intérieure, comme sous l'effet d'un
hallucinogène et je commence à dialoguer avec moi-même, car je me
sens mal. Il y a vraiment quelque chose qui ne va pas,
d'indéfinissable, alors je parle à ce malaise et dis « oui,
maintenant j'ai l'habitude de ce genre de conneries, je n'ai
qu'à laisser passer, ce n'est pas la peine de prendre au sérieux
la moindre des pensées qui vient dans cet état-là. » Et
là, je sens que ça redouble d'efforts, et je me dis, tiens, Sri
Aurobindo disait qu'on pouvait trouver de la conscience ou des
intentions, même dans les plans inconscients, et je me demande s'il
n'y a pas dans ce qui se passe une conscience qui cherche à
supprimer le Supramental du corps, et je me dis que c'est une
attaque, ça ne peut pas porter d'autre nom, une attaque, peut-être
une attaque chimique, un circuit qui prend le pouvoir du cerveau et
balance ses trucs à lui. Et à un moment, cette pseudo-conscience me
sort un film, je me vois dans le parc de la tête d'or à Lyon, où
j'ai toujours été enchanté d'aller me ressourcer, alors une
voix monte et me dit : regarde à quel point tu as été heureux
(sous-entendu, pauvre con, tu ne retrouveras jamais ça) et je
retrouve les sensations d'ensemble dans ce parc. Il se trouve que
ça n'a pas pris et je me suis dit oui, le parc à Lyon, c'était
vraiment bien, sans broncher. Finalement, je fais le mantra et
m'endors. Mais cette nuit, rêve ou plan causal très étrange. Je
fais face à un raz de marée, la mer s'ouvre devant moi, comme
pour Moïse, mais les murs d'eau font bien trois cents mètres de
haut, c'est effrayant, je m'accroche à une sorte de mat et
décide de me laisser emporter quand les murs se refermeront, et
soudain je m'en sors et vois la mer juste en-dessous, peut-être à
huit cent mètres en-dessous de moi, j'ai le vertige une seconde,
mais réalise que je suis sur je ne sais quel promontoire
accueillant, je suis sauvé et rencontre G de Nice et deux ou trois
autres personnes, les seules, dont la compagne de G qui n'est pas
la même que la vraie, prétend qu'elles sont avancées
spirituellement. Si intense que ça me réveille. Et nouvelle
expérience d'un style analogue. Je m'écroule en syncope quand
je commence à jouer à une sorte de badminton avec mon ami
d'enfance, JY, mort en 89. Je crois que je vais mourir parce que
j'étouffe, et là j'ai la bonne idée de respirer du
Supramental, comme si c'était de l'air, et je l'envoie
jusqu'aux pieds, et je sens qu'il descend dans les pieds, puis je
récidive, à pleins poumons, quatre ou cinq fois, et quand j'inspire
ça me fait lever à la verticale et quand j'expire je me retrouve
allongé. La syncope fout le camp et je me sens vraiment bien.
Drôle
de nuit. Tout le monde semble vouloir me souhaiter un bon
anniversaire à sa manière. Mais ce matin ça allait bien, sans
doute à cause du second épisode causal. Je n'ai pas récupéré,
envie intempestive de pleurer, impression de porter le destin de
l'humanité sur mes épaules, comme en 78. De toute façon, dès
que les intestins déconnent un tant soit peu, je me retrouve avec de
la merde dans la tête. Par rapport à 2001 et 2002, je n'ai pas à
me plaindre.
Ce
matin, quand même quelques sensations désagréables à l'aine,
autour des parties génitales, le mental physique commence à se
débattre comme un beau diable. Quand je pense à ce que j'ai vécu
il y a quatre ou cinq jours, retomber aussi bas, c'est quelque
chose qui découragerait presque tout le monde. D'ailleurs j'avoue
que je suis découragé, le Divin doit prendre le relais. Je suis
mort en 2001 et l'accepte, et ça fonctionne quand le Divin est là,
mais quand Il est attaqué, j'ai envie de revivre, et de revivre
pour moi. Pourtant hier, je n'ai pas perdu. Cherché explications
vainement. Je n'ai pas trouvé la manifestation des énergies du
thème natal bien que ce fût mon anniversaire. Même l'opposition
saturne/lune ne peut pas faire des dégâts pareils. Grosse
turbulence des énergies ancestrales qui défendent le territoire du
corps de l'invasion Supramentale. Oui, sans doute, mais chaque
cellule aime le Supramental, ce sont donc des circuits qui dominent,
des systèmes qui font autorité, et non les cellules elles-mêmes.
Une révolte électrique, quelque chose de ce goût-là, un truc qui
fait son boulot, à n'en pas douter. Le plus bizarre c'était
cette impression que la force en question savait ce qu'elle
faisait, dès que je l'ai démasquée, et que je lui ai dit cause
toujours...
Pour
le moment ça m'échappe complètement.
J'ai
mon compte aujourd'hui. Je sens que je vais m'écrouler la
conscience vraiment tranquille.
19 Mars 2004
Pas
brillant jusqu'à 15h,30. Et puis un peu de répit. Ce matin vision
de cette zone difficile du physique, le bout des intestins. Le tri a
déjà été fait et il fa falloir expulser. Envie de trouver une
nourriture, ça mettra longtemps, qui me permette d'expulser les
déchets sans qu'ils soient dégoûtants et sentent mauvais. Une
partie très supérieure de la conscience trouve idiot de manger puis
de chier, ad vitam. Une partie de moi aspire à ne plus se
réincarner. J'accepte quand même le travail, qui n'est plus que
du travail dans le physique. Les poumons font toujours des mucosités,
même faibles, mais je n'en sors pas, j'ai dû prendre trois
granules d'Ipeca ce matin, j'avais un chat dans la gorge, et ne
récupère pas mes capacités en apnée.
Tout
l'appareil digestif est plein de sensations, purifier cette zone ou
nettoyer les écuries d'Augias, je ne sais pas ce qui est le plus
difficile.
Je
cherche la stratégie absolue, savoir, quand le corps m'embête,
qu'il n'est pas moi, mais l'écouter quand même. Je sens que
la Force va faire un travail colossal, je ne sais pas de quelle
manière, mais le corps est coupé en rondelles, en chaque point. Ce
n'est pas désagréable, ça va aimenter une descente.
N'ai
pas pu bouger pour le moment.
Consulté
des sites internet sur les Echecs, pour me distraire.
Je
lis aussi Stewart, Dieu joue-t-il aux dés. La théorie de
dimensions cachées effleure l'esprit génial de certains
mathématiciens. Le Supramental en est justement une (ou plusieurs),
les mecs. Cela n'a pas l'air d'être inscrit ni dans le temps
ni dans l'espace, mais je vous garantis que ça déménage, même
si on ne sait pas d'où ça sort. La vitesse, ça vous dit quelque
chose, la vitesse ?
Est-il
nécessaire de devoir relier un point à un autre pour inventer la
vitesse ? Vous croyez sans doute que la vitesse dépend de la
distance. Erreur. Le Supramental, c'est la vitesse pure, et elle
ne relie pas un point à un autre, c'est de la vitesse sans
déplacement si vous voulez. Tout bouge au fin fond de l'atome. (Ou
de ce qui en tient lieu). Il est pour moi certain que le Supramental
dévie certaines conséquences du passé, et fait donc changer de
trajectoire les effets de certaines causes. Il intercepte des
processus et on n'obtient plus le résultat attendu. Comme la
grâce, ou le pardon, mais à une échelle largement supérieure.
Une
partie du futur qui serait donc la seule conséquence du passé peut
donc être théoriquement modifiée.
20 Mars 2004
C'est
tout bonnement incroyable, mais je tiens ce journal peut-être pour
les rescapés de l'Apocalypse, ou les exégètes exigeants. Hier
j'étais encore assez cassé, et après le massage de « la
mama », une javanaise de quarante ans, très saine, un peu
forte, et prête à tout pour s'installer dans la maison, je me
couche. C'était juste la nuit tombée, mais dans l'état où
j'étais, je n'avais rien de mieux à faire, après avoir mangé
de la papaye broyée au blender. Mantra, sommeil. Dans la nuit,
réveil, et je fais le point. Je me dis que par rapport à mes
ambitions ou aspirations personnelles, j'ai largement rempli mon
contrat. Je suis saturé de connaissance, saturé d'expériences
Supramentales, j'ai fait ce que j'ai pu, n'en parlons plus, le
reste ne m'appartient pas. Cela fait descendre un peu de paix, pas
de trace d'amertume, de culpabilité, de ressentiment, et je me
rendors serein. Et puis je fais le mantra à l'aube, longtemps,
dans un demi sommeil, et décide de ne pas me lever avant d'avoir
fait descendre de la force. Et justement elle descend directement
dans le physique. D'habitude dans cette zone, des reins à l'aine
et aux parties génitales, elle passe par le vital, ce qui est
agréable. Ce matin, elle escamote le vital et pénètre le physique
et que le physique, du milieu du dos au bas des intestins. Un bon
quart d'heure et ça m'a bien remis d'aplomb. Mon employé de
maison faisait de la chasse sous-marine dans la baie quand j'ai
pris le bateau avec Ketut à onze heures, et je l'ai emmené. Il
était très content, je lui prête un fusil. J'ai nagé comme un
fou, avec un tee-shirt et un justaucorps lycra pour prendre le frais,
mais je visais mal ou bien c'est le fusil qui n'allait pas, à
cause de l'attache de la flèche. Mais cela n'avait aucune
importance. Pris quand même un gros poisson peu prisé pour les
chats, et un snapper de deux kilos, cela devient une habitude que le
staff du restaurant le prépare. Tout à la fin j'ai fini torse nu,
retrouvé un peu d'apnée, et c'était vraiment frais à cause
des courants. Je me suis dépensé follement et refroidi, mais je ne
peux pas dire que je me sente fatigué. Le corps bout un peu, c'est
amusant.
Je
n'ai pas à me plaindre de m'être remis si vite de l'attaque
violente de l'anniversaire. Mentalement je ne sais toujours pas ce
qui s'est passé, mais comme je vis avec un fond de pragmatisme
chinois, dans la mesure où j'ai l'air de m'en sortir, je m'en
tamponne de savoir ce que c'est précisément. Ce qui est sûr
c'est que ça ne voulait pas du Supramental, et que cela m'a bien
haché menu menu, et que ça oeuvrait pour que je m'en prenne au
Divin. Cela me manipulait, on aura tout vu, comme dans un mauvais
trip d'acide, quand on se demande où est le moi, et qu'il en
apparaît une ribambelle, un à chaque seconde, supplantant le
précédent —jusqu'à ce qu'on ait envie de se foutre en l'air
parfois.
Quand
je dis que je surfe, certains croient que c'est de la coquetterie,
j'aimerais les y voir, les passés-maîtres en christ, les diplômés
Deshimaru, les guénoniens de salon, les taoïstes du thé, tous ceux
qui laissent sri Aurobindo de côté, pour être sur de pavoiser sur
leur terrain, oui j'aimerais bien voir les ronflants petits péteux
qui connaissent Patanjali par cœur, j'aimerais les voir aux
prises avec le mental physique. Leur redondance en prendrait
un sacré coup. Ils s'imaginent sans doute qu'un Satprem est
douillet, et qu'un Natarajan en rajoute, que Mère a trop souffert
pour que cela provienne du Divin. Mais pour le Divin, même si dans
le fond Il donne de l'ananda, il n'y a guère de
différence entre le plaisir et la douleur, quand ils se présentent
sur le chemin. Le Divin n'est pas anthropomorphique, lui.
Et
la spiritualité n'est pas une occupation: ni de bourgeois ni de
prolétaires. Il faut être un marin,
un
guerrier,
un
prêtre,
un
aristocrate,
ou
à la rigueur un philosophe ou un poète,
ou
encore un explorateur.
Tous
ceux qui ne sont pas insatisfaits, (on peut être sereinement
instatisfait) ne peuvent rien comprendre au Spirituel. Le spirituel
ne décore pas la vie en lui donnant la vue sur les cimes. Il
transforme ce qui résiste à l'Esprit, c'est-à-dire à l'amour,
à l'intelligence du Tout, à l'évolution infinie.
Quelques
parvenus spirituels se font passer pour des maîtres, comme ce pauvre
Cohen, juif américain, qui fait vraiment pitié. Mais il y a les
inconnus au cœur pur, et les parfaits anonymes, aussi.
21 Mars 2004
Un
mois de journal régulier, c'est la première fois de ma vie.
Impossibilité de me prendre au sérieux, qui cela concerne-t-il, et
c'est contraignant. Mais finalement c'est une discipline, et moi
qui me perds dans le non-moi (tendance karmique assaisonnée d'un
trigone neptune/venus, maître d'ascendant), je me retrouve un peu
en écrivant ce qui m'arrive. Nuit extraordinaire. D'abord, toute
la journée d'hier était la dernière du calendrier balinais, et
l'on règle ses comptes. Des cérémonies successives dans les
temples, pour apaiser les dieux de la mer, puis les dieux inférieurs
avec sacrifices de poulet, et celui d'une vache, sans doute pour
les démons. Que tous les plans vivent en harmonie. On donne un peu
aux démons, pour qu'ils nous laissent tranquilles. Je trouve que
ça marche bien, mais il faut connaître Bali, sinon on s'imagine
que c'est proche du vaudou, et ça n'a rien à voir, Bali possède
une culture métaphysique profonde, et n'est comparable à rien.
Toujours
est-il que je me suis couché très tôt et suis resté longtemps
éveillé pendant la nuit, et là, à nouveau, l'extraordinaire. Le
supramental était léger, pas une illumination, mais dans le
physique...Le Supramental m'envoie dans mon enfance, et je me
retrouve dans la chambre où je dormais petit (entre sept et douze
ans). Si je relâchais mon attention je me croyais dans cette
chambre, c'était très amusant, et j'ai retrouvé des tas de
détails. C'était aussi le bureau de mon père (qui m'a toujours
fait peur) et je me suis souvenu d'une étagère années cinquante
sous la fenêtre, et que le placard recelait d'un côté l'uniforme
d'aviateur de mon père et de l'autre mes vêtements, je me suis
souvenu d'une belle pendule très dépouillée, en bois, posée sur
son bureau, d'aérations de cheminée en laiton, autour de la
cheminée elle-même, comme si j'y étais. Difficile à croire que
la mémoire existe dans des conditions pareilles. Cela ressemble plus
à un voyage dans cette époque-là, c'est-à-dire un
retour, comme ce qui s'était déjà passé il y a un an, mais
c'était alors dans la cour de la même maison, à laquelle je n'ai
absolument pas pensé cette nuit. Gros sanglot quand je pense à un
de mes premiers livres d'images, Pitou la petite panthère, où je
me suis mis à aimer cet animal imaginaire, alors que je manquais
cruellement d'attention et d'amour autour de moi. La visite a duré
très longtemps, une heure ou deux, mélangée de considérations sur
ma famille, et les autres pièces, finalement cette pièce était
bien mon premier chez moi, par rapport aux autres, et mon père était
assez discret dans son bureau.
C'est
comme si le Supramental voulait me redonner les racines de cette
époque, où j'étais toute pureté. J'étais dans un état
physique tout-à-fait remarquable également, toute la nuit.
En
fait, petit, j'étais si curieux de tout que je n'ai pas souffert
consciemment de manques affectifs, mais c'est descendu dans
l'inconscient. Je me souviens quand même que j'avais souvent des
crampes aux mollets, et pas mal de cauchemars, sans doute à cause du
climat délétère constant entre mes parents.
Aujourd'hui
rien ne bouge, c'est Niepi, silence absolu dans Padang Bai,
personne sur la plage. Ce soir pas de lumière ni de bougies. Journée
vraiment tranquille. Bon site web sur la vulgarisation scientifique,
surfer est enfin presque indispensable ici, puisque je vis
seul, et ne peux ni écrire tout le temps, ni chasser toute le temps,
ni m'abrutir d'échecs. Lu les menaces d'El Kaïda,
hallucinant, sur lemonde.fr. « Bush nous avons encore besoin
de ta stupidité. »
Repris
mon roman de S.F.
Bon
flash intellectuel à partir du livre de Stewart, sur l'effet
papillon, l'imprévisibilité en météorologie. Ne fait que
renforcer mon intérêt pour la géomancie, le yi-king, les tirages
que je crée en séminaire. Les arts divinatoires intuitifs
contournent la question de l'imprévisibilité. Il y aurait encore
beaucoup de recherches à faire là-dessus. En tout cas je le fais
naturellement, c'est en moi, l'amour des premiers nombres, tout
ce qu'on peut mettre dedans. Les nombres comme des champs
producteurs d'événements, attracteurs étranges and co, pochoirs
de formes archétypiques, etc...
Impuissance
du mental. Il confond la stabilité et la stabilité périodique. Il
faut être physicien ou mathématicien pour faire la différence. Il
y a peu de systèmes stables qui ne bougent pas. En général, de
petites fluctuations se produisent à l'intérieur, sans
compromettre la structure d'ensemble. La stabilité inerte est
celle de la matière morte, et encore, mais la stabilité de la vie
maintient son propre équilibre par de multiples variations
constantes, petites sans doute. Entre l'inertie pure et la
frontière du chaos, où la force centrifuge crée sans retour de
l'hétérogène, tous les autres systèmes stables bougent, même
peu, mais ils bougent. Il n'y a donc pas que l'action et le
repos, mais aussi un peu d'action dans le repos, comme le point
noir dans la goutte blanche du Taï chi. Il y a du jeu dans l'espace,
comme on dit de pièces mécaniques qu'elles ont pris du jeu. Il y
a du jeu partout, dans tous les sens du termes.
Le
mental ne voit pas certaines gradations, à moins de se mettre à la
tâche. D'où les représentations fallacieuses dans tous les
domaines. Et la nécessité de s'impliquer pour ne pas dire
n'importe quoi, voir n'importe quoi, suivre n'importe quoi. La
vie en profondeur est plus difficile mais elle est plus vraie.
Si
l'on préfère une vérité dérangeante à une illusion
gratifiante, on veut en finir avec le primate. Ce n'est pas tout le
monde, my God.
P.S
Impression très nette d'un joueur d'échecs : la nuit
dernière, avec l'enfance retrouvée, a été une riposte à
l'attaque de la nuit d'anniversaire. Il n'y a que la guerre,
pour moi. Et rien d'autre. Je ne l'ai ni voulu ni décidé, mais
c'est observé.
1 Avril 2004
Cela
fait une dizaine de jours que je n'ai pas tenu le journal au
bénéfice d'une écriture très rapide, sans corrections,
plusieurs heures par jour, d'un roman de science-fiction, l'Empire
contre la Confédération, presque terminé aujourd'hui.
Pendant plusieurs jours j'étais fort identifié à moi-même ;
en pleine création, et la force se tenait tranquille dans le corps,
mais perçait parfois tout doucement par le sommet de la tête, ce
qui signifie bien que certains êtres doués pour la réflexion et
l'exploitation de l'intellect continueront de faire marcher le
ciboulot avec le Supramental, quoi qu'en disent les
simplificateurs, que l'intelligence gêne, et qui aimeraient
décréter la naissance d'un Supramental à leur mesure. Mais
avant-hier, j'étais dans un état inconnu, ni bien, ni mal, ni
étranger à moi-même mais fort étrange. Je suis allé me promener
pour la première fois sur la route qui sort de Padang Bai tout en
longeant le littoral et j'ai trouvé une piscine d'eau de mer
dans les rochers, où je me suis baigné, plus seul que seul. J'étais
arrivé par la plage mais en repartant par l'intérieur j'ai
croisé deux temples, et sur place, j'avais eu le sentiment que je
dérangeais, aussi j'ai salué à tout hasard les entités des
temples. A vrai dire le premier événement marquant, c'était à
mon réveil où je me suis souvenu que j'avais rêvé d'un lézard
avec la queue coupée au fond d'un bocal d'aquarium. Il se trouve
que pendant la promenade, à un moment, j'ai fait demi-tour, car je
ne trouvais pas la guest-house que je cherchais, et à ce moment-là,
par terre j'ai vu un lézard mort, sans queue, mangé par les
fourmis. De toute façon, dans l'état où j'étais je ne pouvais
m'étonner de rien, mais je me suis souvenu, sans les détails, que
ce n'était pas la première fois, peut-être la deuxième ou
troisième que je vivais un truc comme ça. Comme si pendant mon
sommeil je m'étendais dans le futur, le vrai, et en saisisse
quelques bribes, transformées naturellement. Après la piscine
naturelle et les temples, j'ai traversé un champ avec plein
d'insectes que je connaissais, des coléoptères rouge et noir, un
papillon jaune, plus petit mais analogue aux citrons de France et
j'ai trouvé étrange ces similitudes, puis j'ai eu de la peine à
retrouver mon chemin, et une femme qui cultivait m'a accompagné et
j'ai traversé une porcherie, avec des enclos de chaque côté, ce
qui m'a rappelé que mon nom de famille, en savoyard, veut dire
boîte à cochons, selon un pion que j'ai eu à douze ans dans un
collège huppé de haute-Savoie, chose que je n'ai jamais pu
oublier. Finalement j'ai pas mal marché sous la chaleur, et au
retour, j'étais dans un drôle d'état, je me suis allongé, et
là j'ai eu une émotion extraordinaire, une partie de moi a saisi
le miracle que ça représentait que tout ça, la vie, soit sortie du
néant, et j'ai eu un sanglot très violent. Peu après,
j'ai senti que tout cela existait facilement, sans se préoccuper
du Divin, et que finalement, trouver le Divin était mon affaire à
moi, quelque chose de personnel, du personnel qui deviendrait de
l'universel, mais pour une fois, je n'ai pas du tout été
affecté par le fait que les humains se moquent du Divin, ou n'aient
pas besoin de Le rechercher (ce qui revient au même).
Il
y a peut-être une libération karmique qui s'effectue de ce
côté-là.
La
fin de la journée s'est bien passée, après une petit retour en
arrière, où j'ai quand même trouvé la note un peu salée pour
sortir du néant, (la souffrance, la cruauté), mais ça ne l'a pas
emporté sur la première impression qui m'a arraché un sanglot
monumental.
Hier,
en pleine forme je suis allé nager, puis j'ai joué aux échecs le
matin au restaurant, et suis tombé sur un allemand d'un niveau
exceptionnel qui m'a battu deux fois. Revenu à la maison, la force
a travaillé très très fort, sans prévenir, et d'une manière
très agréable dans le cerveau, et elle a tout de suite mis toute la
gomme. Tout le derrière de la tête a été pris, jusque dans les
os, et d'une force extraordinaire, et cela a duré longtemps après
une petite sieste où là j'étais carrément terrassé. Malgré
une indigestion (je sais maintenant qu les maquereaux locaux, gorgés
de sangs, ne me conviennent pas) la force a superbement travaillé
toute la soirée, et aujourd'hui encore j'ai l'impression
d'avoir dix ans de moins. Le corps doit s'habituer. Ceci dit,
cette pleine forme physique ne s'accompagne pas d'un réel
détachement, car je trouve les femmes plus belles que jamais,
naturellement. Si j'en vois, car autrement il n'y a pas la
moindre trace d'intérêt pour ça, mais l'œil lui est vigilant.
C'est quand même là que c'est difficile d'accepter, ce
yoga, car on est dans une telle reconnaissance et une telle joie, que
l'érotisme dans la foulée pourrait être vécu sur un autre plan,
mais sans doute pas longtemps, ça redeviendrait quelque chose de
banal, avec des attentes. N'empêche qu'à certains moments la
femme me manque, alors au lieu de me plaindre, je me dis que je
pourrai m'autoriser à revivre quelque chose, même si je n'y
crois pas vraiment, et ça passe beaucoup mieux. Ce n'est pas une
ruse, je ne crois pas à l'avenir écrit d'avance, ni à la
volonté, alors l'option d'une rencontre, même si ce n'est pas
le yoga radical, je suis obligé de la reconnaître comme
éventualité, pour calmer je ne sais quoi, le vital peut-être.
Oublié
de mentionner que la veille de la promenade, ai vu un beau requin de
deux mètres passer sous moi, à cinq mètres, quand je faisais de la
chasse sous-marine à la sortie gauche du chenal, sur un lieu que
j'aime bien, plein de corolles de corail et de sortes d'éponges
froissées en éventail par six mètres de fond. C'est rare, et ça
fait un drôle d'effet. Je dois m'habituer à l'idée qu'un
jour il en viendra un voir ce qu'il y a au bout de ma flèche, et
me persuader déjà que ce n'est pas à moi qu'il en voudra.
Assez difficile.
20 Avril 2004
Depuis
hier, complètement écrasé par la force, mais dans une sorte de
reconnaissance très agréable de la chose, bien que le sentiment de
fatigue soit assez net. Cela avait commencé à Ubud, un matin, il y
a trois jours, où je me suis réveillé désincarné. J'étais
bien, mais rien n'avait d'importance dans ma vie, et même mon
installation à Nusa Penida, qui d'habitude me permet d'envisager
des bons séjours là-bas, ne voulait rien dire. Je suis allé avec
MC, qui vient de France (elle suit mes séminaires), vers les
volcans, avec Chakra, mon ami balinais, puis MC est restée à Ubud
et je suis revenu à Padang Bai. Hier matin, j'avais les bronches
qui formaient beaucoup de mucosités, mais je suis allé faire une
petite sortie de chasse sans bateau, à droite du ferry. Quand la
marée est redevenue descendante j'ai dû faire un gros effort
trois minutes pour ne pas être drossé sur les rochers. Au retour,
j'avais une drôle de sensation dans les jambes, comme si les
fémurs étaient vides, c'était vraiment étrange, et j'ai
remarqué que le corps n'avait jamais connu de sensations
pareilles. J'ai mangé à la maison, puis me suis gavé de chocolat
en sentant que j'avais l'impunité, et c'est là que la force
s'est abattue partout à la fois, avec une extrême fatigue. Même
après la sieste je n'ai pas pu faire grand chose, et le soir, je
suis parti dans un mélange de conscience supramentale et d'énergie
supramentale dans le physique. La seule chose qui était encore
réelle c'était le temps, l'abîme du temps qui s'ouvre devant
soi, et que ce temps soit continu, éternel, ou discontinu, une suite
de moments. Cette distinction n'avait plus aucune importance, et
même, n'avait plus aucun sens. La seule chose réelle, c'était
moi percevant la durée. Tout le reste semblait accessoire, comme si
la durée formait le socle absolu de toutes choses, mais une durée
étalée, pas seulement le Présent, un présent étalé partout,
sans doute éternel, et égal à lui-même en chaque point du
déroulement.
Alors
j'ai compris que le Supramental pouvait être une extension du
Brahman, ce que disait Sri Aurobindo je ne sais plus où, et qui
m'avait valu de disputer avec un lettré parisien assez snob, ami
de S Jourdain, qui était persuadé à l'époque que je
survalorisais le Supramental au détriment du Soi. Oui, quand on
touche ce genre de silence absolu, comme hier, où le moment fait
corps avec le passé et l'avenir, comme si l'on tombait dans une
matière fluide d'un seul tenant, alors on peut considérer le
Supramental comme une extension du Brahman, mais ce Brahman-là,
honnêtement, je ne pense pas que nous soyons nombreux à pouvoir
nous y rendre. C'est une sorte de Brahman de luxe, un super soi, un
super Parabrahman, et je ne vais pas me plaindre de l'avoir gagné
avant de m'être endormi. Je ne suis d'ailleurs pas certain
d'avoir vécu une expérience analogue auparavant. C'était
vraiment le temps qui dévoilait sa nature divine, complètement. Il
me reste à accepter peut-être de ne voir plus que la durée comme
réalité, auquel cas toute ma vie extérieure pourrait changer de
structures en permanence. Je pense que si quiconque faisait cette
expérience trop tôt, il perdrait complètement ses racines, c'est
parce que je suis maintenant rompu à toutes sortes d'excentricités
dans les perceptions qu'une percée de ce type s'effectue sans
problème. Autrement, sans préparation, tous les repères
s'effondreraient, et les traces de cette expérience ne seraient
pas forcément positives. Ceci dit, avant-hier j'ai senti le mental
physique à l'affût, comme une bête sauvage, prêt à essayer de
me convaincre que j'allais sombrer dans la folie — si
j'avais laissé le mental s'emparer de cette impression immense
d'être désincarné, sans rien devant.
J'ai
bien dormi, et ce matin j'étais en forme dès six heures, mais
après une sortie pour le petit-déjeuner et voir mes emails, puisque
je n'ai plus de téléphone, je suis à nouveau écrasé, et j'ai
pris la peine quand même d'écrire ces lignes, car là, le
Supramental se présente bien, et il faut le célébrer.
Si
le corps supporte de telles doses, je vais parvenir à bout peut-être
de la petite bronchite chronique héréditaire, et des moments
dépressifs le matin. Mais il faut dormir beaucoup, et encourager la
force. Derrière la tête, cela fait une semaine qu'elle travaille
aussi énormément, et parfois j'ai l'impression que ça
rafraîchit le cerveau. En revanche, les muscles maintenant brûlent,
et je vais me recoucher.
Je
ne sais pas exactement pour quelles raisons je n'arrive pas à
tenir un journal régulier. En tout cas, j'ai fini mon space-opéra,
et viens de reprendre la fin de scénario pour l'Apocalypse.
E se débat pour qu'il y ait un séminaire à Lyon, mais moi je
sens que trois des quatre personnes sur qui je comptais s'en
foutent, et finalement je ne sais pas si cela aura lieu.
Il
y a une petite perspective pour le livre guérir par l'éveil,
grâce à un medium spiritualiste, qui révèle l'enseignement de
Telos.
Je
ne sais pas si je vais récupérer le téléphone ici, auquel cas je
ne resterai pas l'année prochaine. Le branchement n'était pas
conforme, et après un dérangement, telkom refuse de remettre en
service. Tout mon projet de consulter internet pour mon travail et la
culture s'effondre. Les cybercafés du coin peuvent dépanner, mais
ce n'est pas pareil, je n'ai pas envie d'y rester longtemps,
c'est vraiment très lent, et cela peut m'obliger à sortir. De
toute façon, avec cette irruption de la durée comme seule réalité,
je n'ai pas de peine à entrevoir un nouveau déménagement. J'ai
de la peine à réaliser que mon retour en France est imminent.
Heureusement, dans mon studio de Nice je devrais pendant quelques
jours préparer une collection de mandalas pour tee-shirts et une
autre avec quelques motifs de surf, pour Leon, un américain de mon
âge très sympa, qui fait de la pêche, et a lancé la première
industrie de vêtements à Bali en 72 peut-être. Je ne lui en ai pas
encore parlé, mais j'ai envie d'essayer, il y aurait de toute
façon un libelle avec le mandala, du style, Lumière, Paix,
harmonie, liberté, Création, en anglais, etc... Je referai aussi un
peu de musique, donc je devrais supporter la piaule de 15 m carrés
pour une dizaine de jours sans craquer.
Mais
c'est bien que je m'habitue à ce retour, car il y aura un sacré
contraste.
Je
dois également mentionner que plusieurs nuits consécutives, j'ai
fait des rêves où des forces essayaient de me détruire. Le seul
souvenir très net, j'étais étranglé par un surhomme style
nietzschéen et je lui disais, à lui et à sa bande, laissez-moi
vivre, moi je vous laisserai vivre, il y a de la place pour tous, et
en tout état de cause, celui qui m'étranglait n'est pas arrivé
à ses fins. C'était peut-être un rêve spécial, un contenu
causal, le Supramental dérangerait donc certains surchauffés de la
tronche, très intelligents, mais bien décidés à ne se soumettre à
aucune autorité, et à rejeter le Divin. En tout cas, ils voulaient
m'exécuter froidement, comme s'ils étaient convaincus que je ne
leur accordais pas le droit de vivre, et qu'ils devaient donc me
supprimer. Mais j'ai pratiqué le système balinais, « il y a
de la place pour tous », et je m'en suis sorti.
Réécouté
une partie de mon séminaire, un passage est très important, et même
l'ensemble tient la route. C'est comme si je pouvais brosser
l'échec spirituel de l'humanité, avec un seul principe:
la
partie qui se prend pour le Tout.
Je
ne peux même plus évoquer à quel point le zen me semble creux, à
part quelques textes fondateurs, à quel point le christianisme est
prétentieux, à quel point le Nouvel-Age est conçu pour se
féliciter d'être ce que l'on est, moyennant quelques opérations
de chirurgie esthétique. J'ai dû passer subrepticement dans un
autre état. La pauvreté des religions, et même de certains
ésotérismes, maintenant, me saute aux yeux. Avant, cela me
révoltait, aujourd'hui, c'est autre chose. La vision d'un
sommeil convenu entre tous. Tout le monde complice. Sauf peut-être
l'avatar et ses pseudo-disciples. Mais après tout le
monde se donne le mot pour faire semblant de suivre, d'appliquer,
et on fait autre chose, et surtout on brode. Un mensonge colossal. Je
n'ai même pas encore d'explication. Il faudrait ajouter des tas
de paramètres, la possibilité de comprendre de travers, le manque
de motivation réel, l'usage pragmatique et fermé des sutras, le
besoin de faire des compromis permanents pour ne pas s'abandonner
au Divin, et penser quand même un peu à Lui. Il est clair que mes
quatre mystères expliquent tout, et que je pourrais gloser là-dessus
jusqu'à la fin de ma vie. Je ne vois rien qui puisse compromettre
cette structure, rien. Je l'ai découverte en me remémorant
comment j'avais survécu à la crise de Mayotte ; où je suis
allé puiser les éléments de ma survie, et j'ai bien tiré des
ressources de quatre lieux différents, mes mystères. J'hésite à
vulgariser le système. Il pourrait être si facilement perverti,
déformé, récupéré, que je ne sais pas à qui le livrer,
en-dehors de mes pseudo-disciples. Ils ont d'ailleurs la consigne
de ne pas faire écouter les passages qui traitent directement des 4
univers, alors qu'ils possèdent l'enregistrement total du
séminaire. Sri Aurobindo a bien travaillé toute sa vie sur Savitri,
alors pourquoi m'interdirai-je, si besoin est, de fournir un
nouveau système évolutif ? C'est amusant, et je dois
accepter que la chose, de toute façon, se transforme si elle se
développe. Mais je n'ai pas envie que cela devienne n'importe
quoi ! (Devenu la méditation quantique, voir Ecrits).
22 Avril 2004
J'ai
eu une très grosse émotion dans la nuit d'avant-hier, et
finalement j'en parle. La force a travaillé tellement profond
qu'elle a attiré aussi de la conscience Supramentale et d'un
coup j'ai senti que je quittais l'humanité. C'était un départ
irrémédiable. Et contrairement à ce que je me fais croire, j'aime
l'humanité, et donc la quitter c'était très émouvant. C'est
comme si j'avais saisi quelques minutes le travail que j'avais
fait depuis 1977 et que cela me mettait, maintenant, hors de
l'humain, parce que le Divin le décidait ainsi. C'était comme
la conséquence du chemin parcouru, et la justification que le
Supramental libérait la Manifestation.
C'était
vraiment émouvant, mais je ne sais pas dire si cela me faisait
souffrir ou pas, c'était au-delà, et pourtant une émotion forte
avec un gros sanglot, très violent. Toute la journée j'avais
baillé à m'arracher la mâchoire, comme si le corps voulait
monter à une vibration de paix inconnue. Alors je me suis vu quitter
l'humanité, c'était imprescriptible, ce n'est même pas moi
qui le voulais, c'était écrit depuis le 10 janvier 1977, depuis
Satchitananda. Cette expérience me donne confiance dans la
Manifestation supramentale. Mes vingt-cinq ans de lutte, qui
pouvaient passer pour autre chose à cause du lâcher-prise, et d'une
certaine désinvolture, débouchent enfin sur quelque chose. Cela
fait trois jours avec aujourd'hui que je sens que je peux
fonctionner autrement. Il semble qu'une page ait vraiment été
tournée.
Nouveau
gros sanglot tout-à-l'heure. Pourquoi existe-t-il des gens comme
ma mère, des personnes qui ont le mensonge dans la peau et qui ne
peuvent faire que ça toute la journée, toute leur vie, mentir !
Cette
nuit, drôle de rêve, attaqué à plusieurs reprises par de petits
singes qui mordaient salement, touts petits, dont je devais m'occuper
pour je ne sais quelle raison.
Techniquement,
beaucoup de sensations dans le cerveau, presque tout le temps, et des
vagues parfois qui descendent des reins vers les cuisses, à peine
perceptibles. Je suis peut-être en train de convertir le mental
physique, je l'ai senti se recroqueviller ce matin, et lancer des
impulsions autour du sexe, mais j'ai tellement reçu de force que
j'ai l'impression que même lui en a profité. Peut-être que ces
lignes ne seront pas comprises avant plusieurs siècles, mais il faut
bien les écrire quand même. Depuis que j'ai vu la terre suspendue
dans le ciel comme une simple guirlande de Noël, le temps ne veut
plus rien dire du tout, sauf justement quand il n'y a que lui,
comme l'autre soir, et qu'il est insécable, d'un seul tenant,
un bloc indescriptible — le fameux Brahman des veda, bien plus
consistant que le soi qui procure la libération du mental. Peut-être
que le fait de m'être rendu si loin va influer considérablement.
L'expérience n'a pas dû durer plus de trois-quarts d'heure,
mais comme toute ma matière était prise là-dedans, avec la
complicité de l'esprit qui s'élargissait, et sans doute avec
l'être psychique qui assistait, j'ai peut-être préparé le
cerveau à d'autres choses.
Je
redors le matin, après mes œufs au plat, sans aucune culpabilité.
Il suffit que je repense à la crise de Mayotte pour me féliciter
d'être là, et alors j'utilise le sommeil pour faire travailler
la force. La fin de mon roman n'avance plus, mais je m'en fous.
Ce sont trois jours vraiment bénis. Je continue à récupérer de
2001.
Les
événements exceptionnels que je viens de vivre me poussent à
reprendre le témoignage sur le travail de la Force, sans fioritures.
Début décembre, j'ai pu faire descendre une force d'apaisement très
puissante en évoquant Lao-Tseu, quand j'étais à Pekin. Après
quoi, sans raison apparente, j'ai fait une « rechute »,
c'est-à-dire acidité gastrique plus douleurs en haut des poumons à
droite, jusqu'au cou. J'ai été surpris, puis trois jours plus tard,
j'avais retrouvé une bonne forme. Ensuite, j'ai commencé un livre
très inspiré, à base d'astrologie, et j'y ai travaillé plusieurs
heures par jour. Un médecin chinois m'a trouvé plein d'eau, et dans
un sale état, mais moi je trouvais que ça continuait d'aller mieux
quand même, et je n'en ai pas tenu compte. La veille du départ pour
Bali, nouvelle attaque, et par recoupements, je suis enfin certain
que dès qu'il y a un enjeu quelconque, je suis attaqué de
l'intérieur. L'enjeu était minime, mais c'était quand même un
départ, beaucoup d'attente à l'aéroport, et un trajet de six
heures en avion. Bref, j'arrive à partir mais dans un état pas
formidable. Puis arrivé à Singapour, tout devient difficile mais je
supporte, longue attente du taxi (c'était le début de la nuit),
impossible de trouver l'hôtel, on tourne en rond vingt minutes, et
puis je décide de descendre. Encore un quart d'heure à interroger,
et finalement l'hôtel se trouve à cinq cents mètres. Très mal
accueilli, on me réclame un second paiement, alors que c'est déjà
payé par internet. Mais c'est la vibration de l'Inde, Little
India, et je récupère dans ma chambre minable à quarante
euros, en appréciant le contraste avec le logement ultrachic de
Pékin, où E est logé. Le lendemain, rebelote, je veux laisser mes
bagages pour aller acheter un billet d'avion, mais le directeur dit
devant tout le monde, laissez-les là (en plein milieu), on ne vous
les volera pas, enlevez seulement les objets de valeur. Dégoûté,
je décide d'emmener ma petite valise à roulettes et de partir, on
me rattrape encore pour me faire payer plus, mais je grimpe dans le
taxi. Je parviens à trouver un billet pour le jour même pour Bali,
et je me promène un peu en traînant mon bagage. L'avion partira
avec quatre heures de retard, et je passe toute la journée à
l'aéroport. Enfin, j'ai évité les « achats compulsifs »
auxquels normalement personne n'échappe à Singapour, avec soldes
sur appareils photos, ordinateurs, et n'importe quoi d'autre...
A
Bali, ça va mieux, mais je ne remonte pas vraiment la pente, et
voilà qu'une des expériences les plus extravagantes de ma
vie va se passer. Pourquoi j'en parle ? Pour ceux qui après moi, se
lanceront dans le yoga supramental hyper-physique, comme le mien.
Qu'ils sachent que le Divin n'a pas de limites ! Donc, je vais mieux,
mais ce n'est pas encore ça, le 21 décembre, je sens que je dois
prendre 9 granules de Natrum carbonicum en 30 ch, que j'ai
l'heur de trouver, alors que je ne savais pas s'il m'en restait. (Ce
truc est magique pour moi, depuis que j'ai su que c'était ça qu'il
me fallait, à Mayotte, et tout à fait par hasard, quand mes gènes
ont explosé). Il ne se passe rien de spécial, mais le lendemain ça
va mieux, et je me dis, l'homéo, c'est trois jours, recommence. Je
sens à nouveau qu'il me faut 9 granules le second soir, et là
j'entreprends un voyage extraordinaire. Un peu de supramental descend
dans la conscience, éradique le Mental, et il n'y a plus rien, sauf
parfois quelques images. Puis je vois défiler des bataillons de
fourmis (fausses images comme celles des souvenirs) et je comprends
qu'il y a eu parmi mes ancêtres quelqu'un qui avait la phobie des
insectes. Parce que je me sens tout bizarre, malgré la conscience
supramentale, légère, et très dans le corps. Puis je me mets à
avoir froid dans le dos, et soudain l'image surgit, plus réelle
cette fois, celle d'un bébé mort dans un berceau ovale noir, et je
me sens transporté dans un sentiment d'horreur indéfinissable,
inconnu jusqu'à ce jour, tandis que tout mon corps frémit
légèrement, et comme je suis hors d'état mental, il n'y a pas
d'interférence ni d'interprétation, et je revis donc un
infanticide ! Le dos est vrillé de sensations comme de petites
spirales de glace qui me transpercent, et je ne fais toujours rien,
sinon que j'assiste, en le sachant confusément, à la libération de
quelque chose d'effroyable. Dès que l'image se représente,
nouvelles sensations glacées qui sortent, et qui cherchent à
expulser cette horreur vivante.
Enfin,
quand mon esprit, vierge jusque-là de toute pensée, fabrique le mot
« meurtre », alors là, c'est un déferlement de
sensations dans le dos, et jusqu'au bas des reins. Près de quinze
jours après, le fait d'évoquer cet épisode maintenant même,
recrée un tout petit peu les mêmes symptômes: c'est dans ma chair,
my God, mais ça suinte et va finir par disparaître. Dès le
lendemain, attention les yeux, j'ai retrouvé un état d'esprit que
j'avais perdu il y a près de trois ans (à un mois près),
soit « la saveur de la vie », quelque chose qui m'est
indispensable, et qui avait mystérieusement déserté mon esprit et
mon corps. J'ai conclu que j'ai balayé un préjudice très profond
qui entravait la suite de la supramentalisation. Je passe donc à
nouveau quelques jours confortables, puis un matin, pas moyen d'aller
à la selle, et je me sens désincarné, sans trace du moindre amour
pour quoi que ce soit. Cela, je connais, ce sont les restes de ma
chère maman, maniaco-dépressive. En plus, il pleut comme jamais
depuis trois jours, et je décide de partir en voiture trouver le
soleil au nord, réputé plus sec. C'est amusant, parce que c'est la
route de Candi Dasa et d'Amed, où j'ai déjà vécu la même chose
il y a six ou sept ans.
Je
dors à Candi Dasa, avec un bon bouquin trouvé dans le coin, et le
calme et le bruit de la mer me requinquent un peu. Le lendemain, je
gagne Amed, c'est le trente décembre, mais toujours de la pluie.
Discute avec mon ami pêcheur. Je marche un peu quand même, et lis
Philip Roth. Le trente et un, je change de chambre, en fin de
matinée, j'apprécie la mer à quelques mètres de ma terrasse,
tourmentée par un grand vent, et je vais à la selle pour la seconde
fois. Et là, je ne sais pas ce que j'expulse, mais c'est comme une
libération, et je retrouve enfin mon « assiette »,
perdue depuis deux jours. Donc, voilà pour moi ce que c'est devenu
le yoga supremental: un chantier dans le corps physique, pour faire
sortir toutes les scories héréditaires, ancestrales et karmiques.
Depuis
cette date, ça allait vraiment mieux, mais ce matin, état vraiment
bizarre. A la fois très bien, parce que je sens la force présente,
et mal dans le corps sans savoir pourquoi. Je vais au marché aux
poissons avec ma « pambantu », mais au retour, j'esquinte
la voiture de location sans aucune raison, sur le côté, en
déboîtant. Il y avait le soleil en face, mais ce n'est pas une
raison quand même. De retour, je ne peux rien faire, rien du tout.
Je m'allonge, me demande ce qu'il y a... A nouveau une douleur monte,
profonde, je sanglote, images de l'Espagne ou du Portugal, belles
fontaines, puis le corps qui se tord quelques secondes, pareil qu'au
mois de juillet, avec cette histoire d'Inquisition, et plus d'un mois
de travail à laisser parfois monter le préjudice, pour le nettoyer,
quand ça se présentait.
A
moins que j'invente tout ça, (ça ferait plaisir à certains, je
sais), cela confirme le traitement transgénérationnel que je
suis en France. J'y suis allé trois fois depuis septembre, et je
crois que je ne l'ai pas consigné, mais il y a eu beaucoup beaucoup
de souffrances chez les femmes côté paternel, et un gros dégât à
la sixième génération côté maternel. Je progressai à chaque
séance, mais même à la troisième, il y avait toujours un ou une
ancêtre qui barrait le passage. Le thérapeute fait ce qu'il a pu,
avec huiles essentielles et « verbalisation », et je lui
suis très reconnaissant.
J'ai
l'impression que c'est la mémoire de l'infanticide qui sabotait le
présent dès qu'il y avait un « enjeu ». Le caractère
pyschosomatique de mon mal m'était déjà clairement apparu,
et apparemment cela remonte a l'été 2008, où je commençais à ne
plus pouvoir sortir du mal pulmonaire, tandis que l'acidité
gastrique se mettait en place. Je crois que j'ai touché dans mes
gènes quelque chose qui concerne la « responsabilité »,
et qui a torturé la vie d'au moins une personne, la mère qui a tué
son bébé, qu'on l'ait forcé ou non à le faire. N'oubliez pas
qu'on ignore à quoi servent les neuf dixièmes des chromosomes. Bon,
si tout cela vous dépasse, no problem, prenez-le comme de la
science-fiction. Moi j'assume mes responsabilités, justement. Aller
là où nul ne s'est rendu, et continuer le travail de Mère.
Cela
faisait aussi depuis deux mois que j'avais une douleur au milieu du
dos, pas physique, sans doute des mémoires aussi qui sortaient, et
mon épaule gauche était endolorie très souvent, mais elle expulse
aussi un tas de choses, et ça va mieux. Enfin, tout le haut du dos
est un réservoir de mémoires pourries, et je pense que c'est pareil
pour tout le monde. Une zone incroyable qui stocke les non-dits
familiaux, les poussières sous le tapis, et tutti quanti. Bref, le
travail continue. Quand j'ai senti il y un plus d'une année « qu'on
avait voulu me détruire », (ce qui est certain, mais ça s'est
passé dans l'occulte), cette information passait très très mal, et
je ne la supportais pas, pleurs etc... En fait, c'est cette
information-là qui a réveillé l'histoire, un peu plus tard, d'un
initié torturé par l'Inquisition. Fait confirmé par une expérience
encore plus invraisemblable que les autres (mais le Supramental lui
aussi, n'est-il pas invraisemblable), la rencontre avec l'âme
voyageuse qui avait signé le décret autorisant la persécution...
Au début, j'avais juste vu cela pendant la consultation, ce qui
expliquait le thème natal très difficile de la personne en
question, puis nous sommes entrés tous les deux dans une sorte
d'autre dimension, et nous nous sommes mis à pleurer ensemble comme
des malades plusieurs minutes, parce que là, pour la première fois,
j'ai senti que j'avais été « moi-même » impliqué dans
une rafle, par sa faute, et un petit mouvement infinitésimal de
haine s'est produit, mais comme il m'arrive parfois d'être le
Seigneur (très rare, mais ça se produit), Il a pris les choses en
main, et a nettoyé tout ça.
Supramental,
vous avez dit supramental, et à quoi ça sert, je vous prie ? On
n'en sait trop rien pour le moment, mais ça creuse un maximum dans
le passé, en tout cas. Vous n'avez qu'à vous inscrire sur la liste
d'attente, dans une de vos prochaines descentes sur Terre, cela
risque de vous arriver, et même cette vie-ci, si vous trouvez
l'éveil insuffisant (après vous y être vautré, bien entendu).
30 Janvier 2012
Le
combat contre cette étrange maladie, gorge, poumons à droite, qui
me fait sans cesse cracher et produire des mucosités que j'avale, va
entrer dans sa cinquième année. Une grippe d'une violence extrême,
il y a trois semaines en arrivant à Bali après Shanghaï, m'a
complètement bousillé. Mais en descendant très bas, j'ai eu
l'impression de décrocher un envoûtement, alors que je crachais de
plus belle. Une personne qui m'avait servi ici semblait présente
dans la pièce, pourtant je n'avais aucune raison d'y penser. Ce
point reste à éclaircir. Bref, j'ai trouvé des astuces pour
remonter la pente. A un moment, j'ai carrément vu une bouteille de
coca-cola devant mes yeux. Quand ça arrive, c'était la deuxième
fois de ma vie, ça veut dire que je suis complètement déshydraté.
Moralité, je me suis mis au coca coupé d'un tiers de jus de
gingembre frais, et je bois plusieurs verres par jour. Ma gardienne,
qui travaille tout le temps chez les voisins, passe son temps à me
faire du jus de gingembre au blender quand elle passe.
Un
ami kabbaliste a trouvé naturellement des attaques comme d'habitude,
et a essayé de me repositionner. Certains de mes ascendants feraient
encore obstacle. Enfin, j'ai tiré sur imprimante une photo de Mère
Meera, que j'ai posée en face de moi, et je lui ai demandé de
m'aider. Dans l'ensemble, avec toutes ces mesures différentes, sans
compter le temps immense passé à la maison, à méditer, faire le
mantra et lire, je sens que je remonte la pente. De l'énergie
descend dans le corps, et depuis juin seulement, je parviens à la
placer dans la zone contaminée. Je m'étais en quelque sorte préparé
à cette descente aux enfers en Chine. Des heures et des heures de
mantra la nuit, ne récupérant pas du décalage horaire, et très
peu de nourriture, une petite ration de pâtes, une poire dite
royale, et de temps en temps un chocolat à l'eau avec des biscuits.
Deux ou trois extras seulement au restaurant, et encore très sobres.
Près d'un mois de ce régime, tout ça pour compenser une très
mauvaise expérience. Un ressac maniaco-dépressif, une sorte de
soliton génétique, qui m'avait sabré à Saint-Germain avant mon
départ. Le pire c'est que je savais que c'était ça, et je n'ai
rien pu faire ! Une grande exaltation psychologique avait monté tout
un dimanche, accompagnée d'une fringale incoercible. Je sais que
c'est un souvenir de ma mère, qui heureusement frappe de moins en
moins souvent. J'avais donc « mangé », et le lendemain,
mouvement contraire, plus d'exaltation, plus d'appétit... Cet
événement m'avait mis mal, et le contact avec la Chine m'avait
poussé dans cette ascèse drastique. Et puis un truc étonnant,
horrible et merveilleux, après quinze jour à peu près : une odeur
d'huître pourrie et d'oeuf puné dans la morve que je mouchais,
odeur qui se manifestait pour la première fois, avec le net
sentiment que cette fois « l'esprit du mal » concernant
la gorge et les bronches, commençait à sortir ! Mais j'étais très
faible à manger si peu, un seul petit repas à la tombée du jour,
et je tenais avec le mantra.
Pas
étonnant que j'ai été cueilli par une grosse saloperie après
trois jours de déluge non-stop. Je n'avais jamais vu cela à Bali,
et l'impression que la nature attaquait a duré jusqu'à la semaine
dernière. Puis une journée de vrai beau temps a commencé à
remettre les choses en place, il y a trois jours.
J'ai
repris le journal car cela a été comme une injonction, je devais
dire certaines choses, et ça s'imposait. C'est venu hier, et comme
aujourd'hui je ne souffre pas trop, j'inaugure mon petit bureau, que
j'adore, et que j'ai fait repeindre à mon arrivée (corail et
chocolat). C'est là que j'ai l'intention d'écrire des choses
décisives, après quoi cette maison et ce quartier pourront être
abandonnés sans regret. Bref, non seulement j'ai toujours adopté un
profil bas, étant incapable de me prévaloir tant soit peu de mon
statut spirituel, mais je sais enfin pourquoi c'est comme ça.
En-dehors des inhibitions enfantines que le soi a fini par estomper,
j'ai un profil bas, tout le temps, parce que je sais l'espèce
humaine menacée. Et comme j'y appartiens, je poursuis depuis
l'enfance l'idée de trouver le remède, la panacée. C'est ce qui
s'est produit, et c'est la raison pour laquelle j'ai pu me maintenir
pendant sept ans sur des sommets incroyables. Le supramental
travaillait à fond, et je n'avais pas encore soulevé les obstacles
fondamentaux que je me coltine aujourd'hui.
Je
ne pouvais pas être né juste après la Shoah et Hiroshima et rester
indemne dans mes convictions spirituelles. Je me suis reposé dans le
Soi seulement trois ans avant d'entreprendre, par la volonté du
Divin, l'ascension supramentale. Depuis 1977, le monde n'a fait que
péricliter. Sri Aurobindo a certes été marqué par l'Histoire,
mais c'était sur la fin de sa vie. Nous sommes tous confrontés
aujourd'hui à une autre Histoire, plus grave encore que celle du
vingtième siècle. Autrement dit, il est plus difficile aujourd'hui
de « croire » au contenu de la vie divine qu'au
moment où cela a été écrit. L'expression « tout est le
Divin » passe beaucoup mieux quand il y a moins de contrastes à
envisager dans les catégories de ce tout. Un homme seulement
« ignorant » peut facilement être conçu comme la base
obscure d'une manifestation divine future. Mais la seconde guerre
mondiale a ouvert sur des abîmes, et depuis, l'intégrisme, d'où
qu'il soit, devient historiquement légitime. L'homme-machine,
l'homme-robot, l'homme addicted au spectacle, l'adorateur du veau
d'or, l'homme privé d'âme s'avère tout-puissant, foncièrement
égoïste, manipulé par la nature, elle-même renforcée par la
culture. Nous sommes loin de la simple « ignorance » de
l'hindouïsme et du bouddhisme. Cette ignorance est aujourd'hui
cultivée, elle est un critère, ce qui change la donne. Ce
n'est plus une simple ignorance passive, tamasique, obscure, elle est
devenue une valeur d'expression, une éthique, une culture,
vivre pour soi seulement, et cela est partagé par tous (création de
milliers de minisectes par affinités sur le oueb).
C'est
pour cela que je dois aller chercher la sérénité très haut, très
loin, et me distancier du monde phénoménal, pour éviter qu'il ne
me récupère dans sa centrifugeuse chaotique. L'immanent se salit
encore davantage aujourd'hui qu'hier, sa corruption ne semble plus
avoir de limite. Le profil bas permet de supporter pas mal de choses.
L'on peut être anéanti, comme je l'ai été une bonne semaine, sans
avoir à se plaindre, sans chercher la sortie le nez sur le guidon,
sans cultiver le sentiment d'injustice. Accepter ses limites est
difficile. Cela peut devenir une raison de se résigner, et de finir
dans la banalité, le nivellement, et son petit club facebook,
réservé aux mêmes du Semblable exactement pareil.
Accepter
ses limites est possible quand on s'en remet au Divin, sans rien
perdre de son intégrité. C'est Lui qui décide. Mère aussi a
beaucoup souffert, mais la mode complaisancielle sévit partout, et
cela discrédite d'avouer qu'on en bave autant qu'un mineur de fond,
alors qu'on est censé flirter avec l'Infini.
D'accord,
mais rassurez-vous : ce n'est pas incompatible.
31 Janvier 2012
Mon
intention doit être comprise. Je ne fais pas de la souffrance le
critère du bon yoga supramental. Peut-être que certains passeront à
travers les gouttes ! Je veux seulement prévenir certains candidats
qu'ils peuvent tomber de très haut, après avoir éprouvé des
expériences remarquables. Des souffrances karmiques peuvent revenir,
des blocages transgénérationnels, et ces choses-là « essaient »
d'enrayer la progression. Il y en a une quantité d'autres aussi,
dont j'ai déjà parlé. Bref, même si l'état de santé est ce que
recherche le supramental dans le physique, il faut s'attendre à ce
que des choses se mettent en travers. Héréditaires, karmiques, ou
encore génériques, comme la « démission » du corps
physique, son affaissement, qui peut frapper de différentes
manières, vers cinquante, soixante ans. La question est donc de
supporter ces périodes sans flancher, car on ne sait combien elles
peuvent durer. Et si l'on flanche, c'est à accepter aussi : on ne
peut pas faire plus. Alors, on attend que ça reparte, et on se méfie
autant de la culpabilité que du faux enthousiasme, construit, qui ne
berne pas le Divin. Ce laminage permet sans doute au supramental de
descendre dans des zones particulièrement sombres et archaïques, et
le fait que nous ne puissions pas « accompagner » cette
descente dans la joie s'explique par l'extrême sincérité du corps.
S'il souffre, il le reconnaît. Il y a moyen de supporter, mais pas
moyen de tricher, de faire comme si la douleur n'était pas là. Ce
processus ne sert à rien. Elle est là et montre quelque chose, et
la piste de sortie viendra sans doute davantage d'un consentement
ultime et radical à la souffrance que d'une manière artificielle de
« relativiser » le problème. Dédramatiser, oui, fermer
les yeux, non. Ce n'est pas pareil. La sincérité absolue du corps
possède quelque chose de touchant, dont on ne peut pas se
débarrasser. Des tas d'aveux se font dans une solitude intégrale,
une petitesse infinie, une annihilation de soi poussée, sur toutes
les impossibilités présentes qui m'empêchent de jouir de l'ananda
physique que j'ai déjà fort apprécié. Mais le consentement à
cette perte peut quand même permettre de retrouver la paix au
moindre répit, et n'est pas de la résignation. Je n'aspire qu'à
retrouver une vraie respiration, une vraie santé.
1 Février 2012
Certes,
il est presque indiscret de balancer sur le oueb et pour tout public
la narration d'expériences extraordinaires, invérifiables et
nouvelles, mais voilà leur légitimité : donner un coup de pouce
à ceux qui viendront après moi, insister sur l'imprévisibilité
de l'expérience supramentale, et la tentation qu'il y a, dès qu'on
perd le sens exact de ce qui se passe, de « récupérer »
cela avec des approximations mentales sinon fausses du moins par trop
subjectives. Par exemple, je sais que je ne parviens pas à
cataloguer correctement les causes entières de mon mal, et qu'il y a
quelque chose qui m'échappe dans le processus d'ensemble. Pourquoi,
parce que je suis coincé entre des contradictions épouvantables.
D'un côté des problèmes physiques m'empoisonnent l'existence
depuis 4 ans, de l'autre, dans toutes les zones « propres »,
mon corps se sent jeune, vivant, et possédant même une sorte
d'autonomie dans la reconnaissance du don de la vie : une sensation
de connivence absolue, qui, certes, n'est pas toujours là, mais dont
je sens un potentiel exponentiel prêt à se développer depuis peu,
si je résouds le problème pulmonaire.
Ayant
toujours vécu dans une sorte de synchronicité merveilleuse, dans
laquelle pour moi chaque journée me fournit des indices divins en
quantité industrielle ( j'aimerais transmettre ça mais c'est du
boulot de trouver les structures et les formes) pourquoi m'étonner
que c'est au moment où il me semble vraiment remonter la pente, —
depuis quelques jours seulement, que je tombe sur des informations
précieuses, qui me manquaient. Dans son livre remarquable, si l'on
pardonne le style cyber trop poussé (et qu'on n'est pas obligé non
plus de finir), Villa Vortex, Maurice G Dantec balance à la
page 491 un texte qui n'a rien à voir avec l'intrigue pesante, et
qui me parle. Je sais depuis janvier 2001, et les quatre mois de
crise terrible qui s'ensuivirent, que mes gènes ont totalement
explosé. J'y ai survécu par la grâce de Dieu. Quelqu'un devait
descendre jusque-là pour « ouvrir » toute la matière
biologique au Divin, et c'est fait. J'ai été utilisé.
Entre
les crises, j'ai vécu sur des sommets, et peut-être vais-je me
décider à inclure le journal de cette époque, en tout cas pour
ceux qui le demanderaient. Je suis passé par le plan des rishis, le
doux ananda cervical, j'ai été visité par Agni, encore différent
de Satchinanda et du Supramental, et d'Ishwara. J'ai écrit un long
texte, la visite de Krisna, dans une conscience nouvelle, très
belle, aussi joyeuse que profonde, c'était merveilleux, et me
rappelait une période en 1981 où la même identité-conscience
s'était manifestée. Je crois qu'il s'agit plutôt d'un plan que
d'un adombrement, un champ de vision. Ces visites de quelques heures
ont été proportionnelles en hauteur à ce que j'ai vécu tout en
bas, dans l'horreur de la nuit la plus obscure. Je me souviens aussi
très nettement d'avoir échappé à la trame de Maya un bon moment,
naturellement j'ai peiné à trouver les mots qui correspondaient à
l'expérience, mais je n'ai rien trouvé de mieux. Et je me suis
retrouvé dans un autre espace indescriptible, et surtout un autre
temps, un temps qui ne s'écoulait pas, mais complètement vivant,
rien à voir avec le Soi. J'ai vécu aussi bien d'autres choses
d'une intensité exceptionnelle dans le malaise, comme si le plus
haut et le plus bas se répondaient. Et c'était chaque jour, pendant
plus d'un mois. Du temps concentré.
Bref,
même si tous les « chercheurs » ne sont pas d'accord sur
la proportion, je savais globalement qu'une énorme quantité de
gènes avaient été par la bêtise humaine qualifiés de
gènes-poubelles, sous prétexte qu'ils ne servaient pas à coder
l'héritage génétique, à défaut de trouver leur fonction. Ben
voyons mon brave, si je ne vois pas à quoi ça sert, c'est que ça
sert à rien, of course. Dans le texte fourni par Maurice, ce serait
97 % des gènes dont le rôle serait encore inconnu. Trois pour cents
pour s'occuper de combiner papamaman, le reste, mystère et boule de
gomme. N'oublions pas que nous entrons là dans un infinitésimal qui
nous échappe, et qu'aller voir ce qui s'y passe demande des moyens
considérables. Pour ma part, je suis certain que l'enfer que j'ai
vécu, avec trois passages tout près de basculer de l'autre côté,
ont servi à bouleverser mon ordre génétique (2 janvier à fin
avril 2001, puis quelques rémanences irrégulières. Rétablissement,
14 mars 2OO2).
Qu'est-ce
qui se passe aujourd'hui tout au fond de mon corps, je n'en sais
rien. Pourra-t-on dans l'avenir déclencher des processus équivalents
avec moins de souffrance ? Sans doute. Seront-ils alors aussi
profonds ? Pas tout de suite. Que savons-nous vraiment des
gènes-poubelles ? Pas grand chose.
Cela
s'appelle la rétrotransposition, la possibilité de changer
les combinaisons des chromosomes, et l'on pourrait expliquer avec ça,
bien que ce soit plus par analogie que par investigation, pas mal de
phénomènes extraordinaires qui « arrivent » à une
minorité d'êtres humains spécialement consacrés à la conscience:
rajeunissement instantané, effets de lumière à leur décès, etc,
etc.
Peut-être
devrai-je chercher plus précisément la piste qui a décidé les
premiers chercheurs à cataloguer de gènes-poubelles ceux qui ne
servent pas à coder l'héritage biologique. Qu'ont-ils vraiment
entassés, ces gènes ? Pas mal de choses à libérer en tout cas. La
mémoire de la vie est pleine de saloperies. Cette appelation veut
peut-être dire autre chose, de technique, que j'ignore. Peu importe.
Le travail supramental se fait partout depuis le plus bas, les
chromosomes, jusqu'au plus haut, contact avec les espaces divins par
la conscience. Le chantier est remarquable donc, fort intéressant,
mais souvent pénible. Voire très pénible. Le yoga divin n'est donc
pas exclusif et ne peut se diviser. Le yoga des « cellules »,
terme publicitaire employé malencontreusement par Satprem qui n'en
avait pas prévu la portée mystificatrice, ne peut être séparé
de tout ce qui se passe au-dessus, dans les processus de
« conscientisation » de la perception, l'évolution du
moi et son progrès dans la reconnaissance des impératifs divins.
C'est un yoga « en couches », exhaustif, et c'est bien
pour cela qu'on ne peut le comparer à rien d'autre. C'est une erreur
de se cantonner dans un seul de ses aspects. La transformation
physique ne peut se faire que si la personne consent à « servir »,
à se donner, à gagner d'autres perceptions qu'elle ne s'approprie
pas, mais où elle laisse passer la nouvelle conscience, qui vient
alors soutenir le je du moment. C'est vraiment un travail
enrichissant, en dépit des énormes difficultés, qui changent et se
renouvellent.
La
surprise de voir des « identités » supérieures ou des
plans de conscience très élevés se manifester est agréable, comme
il doit être admis qu'ils se retirent, ou restent en arrière-plan
pour laisser tout le « background » s'offrir afin d'être
transformé. Les états de conscience ordinaires ont le pouvoir
d'appeler la force, et ils ne sont donc pas à rejeter. Ce n'est pas
la peine d'essayer de marcher sur la pointe des pieds pour rester
très haut. Si l'on tombe, ce qui est produit par des attaques, des
rencontres, des problèmes de santé, il faut en profiter pour
appeler la force en bas...
6 Février 2012
J'ai
passé deux jours très étranges. Le 4 et le 5. Le soir je me
concentrais sur Mère Meera depuis le début du mois. Il m'a semblé
que l'effet était progressif, et s'améliorait, dès le 3. Je me
sentais moins seul, davantage soutenu. Et puis le 4 au matin,
sensation désagréable. Toute l'épaule gauche souffre, et autour.
Et la souffrance est incroyable, la chair est comme écrasée, os
compris, et je ne saurais dire si c'est une brûlure de chaud ou de
froid. Très désagréable. Et ça dure toute la journée, rien à
faire. Et le 5, même topo mais ça change de côté, et là tout y
passe. L'épaule droite semble attaquée à la perceuse, tout le bras
est compressé, et ça reste. Pas des élancements. Un truc
douloureux, inconnu. La nuit, j'arrive un peu à dormir. Puis
réveillé par la souffrance. Je « vois » alors mon
épaule sous un autre jour, dans une autre perception, c'est un lieu
bourré d'os, omoplate et jointure du bras, j'ai mal, et j'ai la
bonne idée de faire des exercices, je sens exactement ce qu'il faut
faire. Je me rendors vers minuit, mais ça continue. Nouveau réveil.
3 heures à 5 moins le quart, douleur, douche chaude, et cet imbécile
de mental physique qui se demande si ce n'est pas le déclenchement
d'une maladie des os (mon père était soigné pour la maladie de
Piaget), et même, si la souffrance va s'en aller. Là, il me fait
carrément rire, mais pendant une seconde il s'est imposé. Je me
demande ce qui se passe. Travail « cellulaire » ou erreur
de ma part. Hypothèse que les quelques granules d'arsenicum
(prescrit par mon kabbaliste, j'en avais pris trois jours, m'étais
arrêté puis petite reprise) sont responsables. Bon, je patauge sur
la cause. Si c'est la force, c 'est la première fois de ma vie que
ça fait aussi mal. Je me raisonne. Toute cette zone est dévitalisée
depuis quatre ans, thorax, côté droit, alors peut-être qu'elle est
réinitialisée...
J'ai
été soulagé le 5 que ça diminue puis que ça s'arrête. Le plus
curieux, j'ai pensé à un moment que cela avait à voir avec le
circuit lymphatique... Et ce matin, big expérience. Je vais voir un
des meilleurs guérisseurs de Bali, incroyable. Très simple, il me
regarde de loin quelques secondes. Puis je m'approche. Il est
derrière mon dos, et se met à palper mon visage avec ses doigts.
Impression INIMAGINABLE ! Une intelligence fabuleuse est au travail,
quelque chose d'illimité, peut-être infaillible, dans une autre
dimension, plus mystérieuse tu meurs. Le haut du crâne, le front,
les tempes, les yeux, les oreilles et en-dessous, le bas du nez,
tout y passe, très vite... Cela ne dure pas longtemps. Le doigté est
très ferme et extrêmement rapide, pas besoin de s'arrêter nulle
part. Une fois captée l'info, il fait sa première démo, en
touchant chacune de mes tempes. J'ai mal quand il appuie sur la tempe
à droite, c'est impecc à gauche. Puis je m'allonge. Il touche un de
mes doigts de pied, appuie avec une baguette, et heureusement qu'il
ne pousse pas longtemps, c'est intolérable, je me cabre tant ça
fait mal. Il dit que le système lymphatique n 'est pas normal. Il
repère aussi le problème pulmonaire, puis parle d'un problème
gastrique, je dis non là c'est résolu, je n'ai plus d'acidité,
alors il en convient. Il dit que j'ai un très bon « focus »
mais que le corps et l'esprit ne sont pas d'accord...
Je
dois y retourner demain, la lune sera favorable (peut-être pleine, à
Bali le cycle est très suivi). Très bon moment aussi, quand il
semble écrire des signes dans le dos, juste avant la fin. Puis il
« reprend » les doigts de pied, la séance a marché en
partie, deux points qui étaient très sensibles le sont déjà
beaucoup moins. Un point n'a pas bougé. Avec tout ce que je fais
pour me soigner, j'espère bien finir par trouver la sortie. Sinon
j'aurai l'impression que le Divin se fout de ma gueule, mais je
l'accepterai, of course !
15 Février 2012
Finalement
le guérisseur ne m'a pas refait de séance. Sans doute débordé
(une guide française est en train d'en faire une attraction, elles
sont arrivées à 6, les pintades, au moment où je pensais passer,
avec leur émerveillement touristique en bonne et dûe forme, et
l'idée de se faire purifier pour pas cher, 18 €, d'où
l'appellation contrôlée : aviaire, car ce n'étaient plus des
femmes, mais une petite tribu excitée de vieilles adolescentes
bourgeoises caquetant, qui jouaient à voyager). Il a fait un peu la
gueule, le balian, devant l'arrivage, bref mon tour a sauté par la
même occase. J'ai été déçu sur le moment, mais il m'a trouvé en
bonne forme avant de me congédier, et sans doute que le premier
traitement a fait quelque chose. Il y a une amélioration constante
mais faible chaque jour depuis. Moins de toux, moins de mucosités,
arrêt des vomissements de bave.
Belle
descente de Force depuis 48 heures dans des zones très profondes,
dont la racine sexuelle. Toute la zone génitale « bouge »,
boit l'énergie, et cela me redonne envie de vivre, et doit je
l'espère prévenir des problèmes de prostate, très fréquents
passés un certain âge (et j'espère qu'ils se trompent, mais selon
beaucoup de médecins, la continence les favoriserait ces problèmes,
jusqu'au cancer, donc que la Force descende jusque-là c'est
tant mieux pour moi, et ça revivifie). L'envie de vivre s'était
éteinte au fur et à mesure des attaques de février 2008 à
septembre 2009. Je reprends le dessus depuis, mais après 18 mois de
« chute libre », je ne me suis toujours pas vraiment
« repositionné », plus de deux ans et demi plus tard. Ce
manque d'envie de vivre m'avait d'ailleurs détourné des prophéties
pour décembre 2012, ne trouvant pas le cas échéant vraiment utile
de survivre au grand cataclysme.
Aujourd'hui,
avec l'effet inconstestable de la présence quantique, magique, de
Mère Meera grâce à sa photo couleur en sortie d'imprimante, je
remonte donc au créneau. J'ai du respect pour elle, bien que je m'en
sente très éloigné, mais comme chacun sait, toutes sortes de
centres de conscience individuelle existent dans l'univers, dont
certains viennent sur terre dans un but précis. La question de
savoir si ces entités ont un être psychique ou pas, ou quelque
chose qui lui correspond, se pose, mais cette interrogation est
pratiquement insoluble. Sauf dons de voyance spéciaux. Gare à ne
pas tout mélanger d'une part, et d'autre part, attention à ne pas
tout niveler. La terre reçoit toutes sortes de naissances
exceptionnelles, qui, ainsi brassées dans la Manifestation, imposent
leurs propres tendances, si elles ont développé quelque chose que
les humains ordinaires ne connaissent pas... Il y a toujours eu des
leaders, y compris dans le champ spirituel, et ils prétendent
oeuvrer pour le bien général, ce qui est sans doute vrai s'ils ne
forcent pas les autres à les reconnaître, à les suivre, etc….
J'ai tiqué longtemps sur la « présentation » de Mère
Meera, énième super « mère divine », mais finalement
ce folklore-là n'a pas d'incidence sur ce qu'elle fait réellement,
et peu importe qu'elle soit capable de le faire parce qu'elle est une
déesse, ou quoi que ce soit d'autre. Je ne vois pas l'intérêt de
définir qui que ce soit de cette manière d'emblée, mais c'est une
coutume indoue, de toute façon, de reconnaître les « mahatmas »
avant qu'elles-mêmes ne s'en rendent compte. (Même topo pour
Krishnamurti, qui lui a réagi d'une manière différente).
Sri
Aurobindo a baptisé Mère la française qui est venue le rejoindre,
une fois qu'elle avait fait ses preuves en quelque sorte. Pour mère
Meera, ses oncles la promenaient comme un singe savant alors qu'elle
était encore très jeune, et l'avaient déjà affublée du meilleur
pedigree possible (je l'avais rencontrée en 78). A un moment j'ai
pensé que c'était Durga. Aujourd'hui je ne sais plus, et cela n'a
aucune importance. Pour moi elle fait du bon boulot, c'est ça
l'essentiel. Mère divine ou pas, quelle importance ? Ces étiquettes
sont ridicules, comme avatar par exemple. Quant à moi, si j'ai
laissé entendre que j'étais Lao-tseu, c'était pour enfin donner
une version plus vraie du Tao-tê-King que celles qui couraient à
l'époque en France, le chinois étant intraduisible, et comme je ne
connais pas le chinois, il fallait bien expliquer que la source était
une « réminiscence », ce qui est raconté dans le livre.
Il n'a pas manqué de vaniteux pour projeter leur syndrome sur moi,
dont un type connu qui décide du spirituellement correct en France
par l'édition, en prétendant que je disais cela pour me
« faire-valoir », dans l'éditorial de sa revue. L'idée
que je continue à mettre au service des autres une connaissance
supérieure n'a pas effleuré cette personne, ni ce genre de
personnes, qui n'ont donc aucune idée de ce qu'est un engagement
radical, parti de la petite enfance, un engagement auquel tout est
sacrifié, ce qui n'a pas grand chose à voir avec les spiritualistes
endimanchés, influencés ou tardifs, chez qui l'érudition tient
lieu d'intelligence, et qui devront à nouveau tout élaguer pour
vraiment partir d'une aspiration coeur/âme/esprit, après s'être
bourré le mou avec des références impeccables et des personnages
certifiés conformes, d'ailleurs souvent médicores, comme un fameux
maître zen, colérique et grand buveur de saké.
D'autres
ont été touchés profondément par le texte, et ont cessé de
pinailler sur son origine, qu'ils pensent ou non que j'ai été
Lao-Tseu. Bien que pas plus vraisemblable, l'hypothèse que Lao-Tseu
se soit « installé » en moi cette fameuse nuit de
l'automne 90 revient exactement au même, puisque une fois entré en
contact avec cette intelligence, elle ne m'a jamais plus quitté.
J'ai senti des choses profondes en Chine, et je parle la voie du Tao
spontanément, mais qu'est-ce que ça peut bien faire aujourd'hui ?
Pas plus que le titre de Mère divine ne confère à l'être en chair
et en os la qualité de ce qu'elle accomplit, mon pedigree chinois,
inestimable, n'a de valeur concrète. Ce qui compte, c'est que je
sois capable de continuer le yoga, quiconque ai-je pu être
auparavant. Et ce « souvenir » ne m'est revenu qu'à
l'âge de quarante ans, soit quatorze ans après la montée dans la
Conscience suprême, qui a décidé de toute la suite.
La
proportion est difficile à évaluer, entre les facteurs de
« redressement », le jus de gingembre s'avérant un appui
remarquable sur le plan physique, et « mon » kabbaliste
ayant fait aussi quelque chose, plus le guérisseur balinais, et par
hasard il y a deux jours, une balinaise dont la grand mère était
chinoise, m'a fait un feng-shui de la maison. (Elle sent
intuitivement ce qui n'est pas à sa place, belle personne, indigo).
J'ai des petites procédures à effectuer.
J''ai
vraiment été endommagé « grave », ce que me montre la
Force en se posant sur les zones « malades ». (Sensations
intenses de picotements, avec l'impression d'un manque à gagner à
restituer). Il n'y a pas si longtemps que j'ai retrouvé un vrai
sommeil. L'appareil respiratoire était tellement HS que je me suis
cyanosé pendant mon sommeil pendant près de deux ans, avec de
nombreuses petites apnées, un rythme et une ampleur déficientes,
tandis que l'acidité gastrique, incoercible, me réveillait à trois
heures du mat. Deux années pendant lesquelles mon visage a aussi
pris dix ans d'âge. Humiliant si j'avais quelque ego solide, mais il
a été tellement laminé qu'il est devenu friable, et que ce qu'il
en reste doit bien servir à quelque chose. Je suis rassuré sur
l'expérience d'intense douleur dans les bras et les épaules, je
sais que cela s'est passé pendant ma période de « reconnaissance »
de Mère Meera, et il y a peut-être un lien. J'ai senti hier,
(excusez-moi pour l'irrationalité de cette allégation, mais la
Force travaillait partout en même temps ou presque) que la Nature
s'excusait pour l'imperfection de notre morphologie. Bon, disons que
j'ai dû traduire quelque chose qui m'arrivait de l'extérieur, une
information très profonde dûe justement à la grande présence
énergétique. Bref, il s'avère que le cou est une zone très
fragile, TROP FRAGILE, et qu'il y a là soit une erreur, soit une
contrainte dûe à la force gravitationnelle, mais le cou signe notre
condition humaine (pensez aux autres espèces, ce n'est pas pareil, à
part la girafe mais son cou est costaud, chez nous on a gagné en
souplesse, mais perdu en force et rigidité, always the same conflict
between yin and yang).
Il
sépare le corps et l'esprit, et il est lui-même entièrement
vulnérable, mais relativement mobile et souple. L'impression quasi
violente a duré quelques secondes, et elle a naturellement à voir
quelque chose avec les contraintes que la Matière impose à l'Esprit
au cours de l'évolution organique. (Le dauphin ne dispose-t-il pas
d'une meilleure morphologie ?) Il y a aussi un rapport direct entre
la fragilité et le spirituel. Le spirituel possède des bases
fragiles, qu'il est difficile de consolider pour un être ordinaire
(d'où le cinéma des liturgies, des exercices obligatoires, and so
on). Personnellement, comme bien d'autres, en particulier les
taoïstes, j'ai fait de la fragilité le principe même de
l'évolution. Etre fragile, c'est être vulnérable, être vulnérable
c'est laisser entrer le ciel et la terre. C'est se laisser
ensemencer...( Le yin l'emporte d'une petite longueur sur le yang,
mais il faudrait cinq cents pages pour le prouver, et je n'en ai pas
le courage, anyway, il le précède, et ça c'est incontestable, le
mouvement peut surgir spontanément du repos ou de l'immuable, tandis
que le repos n'est la conséquence du mouvement que si celui-ci
s'épuise. Le vide essentiel, sans devenir, est indépendant de la
fatigue du mouvement.) Voir aussi le sixième chapitre du
Tao-të-King.
Ceux
qui ne dépasseront pas les blessures narcissiques n'entreront pas au
Royaume.
20 Janvier 2014
La
néguentropie est moins forte que l'entropie sur le plan général de
la Manifestation, mais toute vie spirituelle est néguentropique, par
définition, et « rachète » cent existences possédées
par la nature. Le « vieux sage » est parvenu à ce que
son esprit ne soit pas usé par le temps. Non seulement il ne pense
pas mécaniquement, mais il tire de son passage sur terre un gain
imperceptible, injustifiable, et qui plus est qui ne lui appartient
pas, mais ce gain est là, et même s'il semble sorti de nulle part,
il provient d'une opposition de l'intelligence à la pente fatale de
la durée (et de certains cycles naturels purement répétitifs).
C'est qu'il est allé à contre-courant de l'érosion, le sage ou le
mystique, par l'amour, l'intelligence, ou l'intégrité. Rudhyar,
dans l'astrologie de la personnalité, que je relis avant de
créer mon nouveau cours d'astrologie, rappelle que la vie peut être
consacrée à se fabriquer quelque chose qui résistera à la mort,
un noyau, une âme, un corps subtil, peu importe. Gurdjieff disait
la même chose, ainsi que Lao-Tseu. Même s'il est très difficile de
« devenir néguentropique », c'est possible, et c'est le
sens des Ecoles des Mystères, qu'il s'agisse de percevoir le temps
« sans qu'il s'écoule », de se fabriquer une âme, de
vieillir lentement et dans la joie, peu importe. L'illumination du
soi « suspend » la friction avec le temps, et l'on peut
déjà dire qu'elle est néguentropique sur les plans de la
conscience. Mais les plans inférieurs restent soumis à l'usure. Le
supramental « veut » soustraire même le corps physique à
l'entropie, c'est le sens du dernier livre de Sri Aurobindo, la
manifestation supramentale sur la terre.
Des
expériences comme celle que j'ai faite le 2 janvier l'attestent
totalement. Quelque chose a « lâché », mais je ne sais
pas quoi exactement. J'ai supporté, grâce à une longue
préparation. Tout le corps vrillé, y compris les organes physiques
plus les chakras, surtout le manipura, complètement saturé, et la
tête complètement « autre », ne pouvant plus produire
la moindre pensée, alors que tout le cerveau absorbe quelque chose
qui l'empêche de fonctionner. Une éponge absolue, avec en prime les
jambes écrasées, tellement que je me suis réveillé plusieurs fois
alors que j'avais trouvé la technique (mantra) pour supporter la
chose en dormant.
Je
ne sais pas jusqu'où j'irai, mais d'autres, fatalement, continueront
le boulot. J'ai cassé une partie du moule en 81 (inconscient
collectif), une autre partie en 2001 (explosion génétique et
libération invraisemblable de mémoires), une autre en 2003 et 2004
(programmations psychomentales de la vieillesse) et cette fois
quelque chose s'est rendu dans la matière dense, — une
« impossibilité » a été détruite. Une « ornière »
a été vaincue, personnelle ou collective, va savoir. Je suis loin
d'être arrivé là par hasard. Je suis un vieux joueur, et je crois
encore dur comme fer au « mérite », même si je préfère
la grâce, of course. Quatre ans de souffrance maousse-costauds (2008
à 2011) suivies d'un lent rétablissement, réparées en 24 heures.
Sacré Divin, Il n'en fait qu'à sa tête.
3 Janvier 2015
Pensé hier que c'était l'anniversaire du grand moment, état positif et assez léthargique favorisé par un temps minable, beaucoup de vent, grisaille, chaleur entêtante mais douce quand même. Envoyé un mail pour confirmer la mise à jour, bon repas italien décidé pour la qualité du wi-fi, quelques parties d'échec à la plage, et fringale. Achat de billet d'avion pour sortie du territoire obligatoire. A 17 heures seulement, je rentre à la maison, unité totale sur la route du retour à quelques centaines de mètres, les quatre chiens ont toujours été là, les pavés déjà décalés aussi, ainsi que ce temps qui, pour sacrifier la grande chaleur, donne sur une sorte de puits tranquille, sans ambition, le cours des choses quand elles s'endorment, s'alanguissent, s'étirent. Et je m'étonne qu'il ne soit pas plus tard, je lis Jünger, qui a compris Lao-Dze mieux que les autres, et le dit simplement, entre des anecdotes de voyage sur Formose. Rien de spécial quand la nuit tombe, et je dors bien. Mais me voilà réveillé à trois heures, et comme il y a deux jours, je me sens obligé d'aller écrire. Je m'installe dans mon charmant petit bureau équipé d'un nouvel ordinateur magnifique, et poursuis le début d'une œuvre que je sens capitale, commencée en janvier dernier, succintement, puis vite abandonnée au profit de la réintégration gravitationnelle qui m'avait pris un mois avec l'aide remarquable d'un ami prenant ma dictée. Vers six heures, content de mon inspiration, je conclus un chapitre par «l'arbre de la kabbale a été inversé». Je touche la bête sans le faire exprès. Frissons partout. Me voilà renseigné. Des intelligences, des entités ont voulu brouiller les cartes, quand, je ne sais, et était-ce vraiment la peine ? La «matérialisation» était en marche de toute façon dès la fin du siècle de Périclès. C'était un peu le même genre d'expériences que quand je capte les traces karmiques en consultation astrologique. Sri Aurobindo l'a remis à l'endroit, l'arbre des Sephiroth, j'en suis certain. Il reste à consolider et cela prendra des siècles. Comment il a pu faire cela tout seul ?
«C'est une Action du Suprême», disait Mère qui l'a bien connu. Continuer l'œuvre.
Plusieurs jours de pluie sans soleil. Dois me méfier, il y a deux ans à cette période, j'ai été laminé par un virus. Il est vrai que depuis j'ai amélioré beaucoup de choses, surtout l'alimentation, j'ai gagné en forces immunitaires, il faut que cela soit suffisant pour affronter l'humidité toute puissante.
9 Février 2015
J'écris de la science-fiction avec plaisir, mais le genre n'arrive pas à la cheville de ce que je vis, surtout depuis 2001, avec les artifices génétiques, épisode sur lequel je reviendrai. En quelques jours, plein de choses différentes, très intéressantes. Au retour de Kotakinabalu, voyage forcé pour renouvellement de visa, j'ai passé plusieurs jours fatigué, et c'était comme si le tamas lui-même voulait m'empêcher d'écrire «Après l'Histoire», mon nouveau chantier, qui avance à pas de géant. Je ne lutte pas, et puis un jour, sans le rechercher le moins du monde, voilà que je vois double, tout en restant un. C'était vraiment amusant, mais cela n'a pas duré longtemps. C'était le Divin qui voyait à travers moi, je Lui prêtai mes yeux, ma perception, et Il en profitait pour se contempler Lui-Même étendu dans toutes les choses, tous les êtres. C'était très doux, pas du tout brillant, et le plus drôle c'est que j'étais complètement effacé. Je n'étais plus personne, et c'était le Divin qui regardait à travers moi, vraiment très «cool» si je puis me permettre l'expression, peut-être une bonne demi-heure. Ce n'était pas le Seigneur, encore autre chose, et je n'étais pas adombré, c'est donc bien un plan qui existe quelque part et qui contient l'existence matérielle, encore plus unifiant que Vasudeva, vraiment une expérience incroyable, totalement inattendue d'un côté, et hyper-naturelle de l'autre... Comme si les choses devaient tout le temps être comme ça... C'est l'opposé du surmental, qui aujourd'hui me paraît imbu de lui-même. Là c'était vraiment l'Un dans toutes choses, en moi, dans le sujet qui regardait, dans les objets, il n'y avait plus qu'une présence partout et rien d'autre. J'étais totalement absent et complètement rempli, merci Heisenberg d'avoir secoué le cocotier du bon sens ! C'est quantique, contradictoire, paradoxal, et oui, le mental ne peut pas comprendre ça, il faut le vivre. Peut-être cela possède-t-il un nom dans les Védas ? Vaut mieux l'éprouver sans savoir comment ça s'appelle, que connaître son nom et passer à côté... (Voici ma doctrine enfin résumée: le signifié précède le signifiant !)
Autre nouveauté de taille, mais j'ai été si «baratté» que je n'ai même pas réagi à ce qui s'est produit. Il y a quelques jours, d'un seul coup, ma poitrine se fend en deux entre le plexus solaire et la pomme d'Adam, ça dure une seconde, et pendant cette seconde je sens un trou noir à l'intérieur de moi, qui débordait largement de mon corps, une bonne trentaine de mètres, dans une vision très fugace. My God ! C'est peut-être l'explication de tout ce que j'endure, bien que ce soit plus faible maintenant, depuis 2008. Naturrellement, résultat des courses, je pose la Force sur cette zone dès que j'en ai l'occasion parce que je ne veux pas mourir idiot.
Ce matin, grande forme, envahi par l'espace depuis quelques jours, j'ai l'impression de voir que la vie s'adosse à quelque chose d'incroyablement pérenne, et ma perception change sur l'autoroute, au retour de Kuta, le long de la lagune. Je vais doucement sur mon scoot, car je suis obligé de pleurer. L'espace, que de l'espace, un beau ciel alentour qui ne pèse rien et n'a pas de limites. C'est d'une telle beauté que c'est presque insupportable. Je pleure. C'est comme si la vie me disait j'ai mis quatre milliards d'années à arriver là, et je ne vais pas m'arrêter en si bon chemin, et je te le dis à toi, parce que tu es un de mes plus grands fans. D'accord, il n'y a pas de mots pour ce genre de choses, la vision de la montée évolutive, mais j'en parle quand même. Je me sentais minuscule de chez minuscule mais sans me sentir écrasé du tout. Au contraire, je faisais partie de l'émergence qui avait pris aussi longtemps, et tant pis si désormais je n'ai plus grand chose à voir avec les autres humains. Sri Aurobindo a supporté, Mère aussi, et le Divin nous rappelle qu'Il est dans Tout, alors il n'y a pas de problème. L'amour se développe tout seul.
Il me semble que cela n'a été possible que parce que j'ai retrouvé quelque chose de perdu. Comme j'ai horreur de me référer à moi-même, et que je dois encore apprendre à m'aimer, à cause d'un préjudice karmique grave, je ne me mets jamais en avant, mais là, j'ai médité un après-midi, il y a cinq jours, et j'ai avoué que j'étais fatigué. J'ai encore lâché prise, alors que je croyais connaître la chose à fond. Une sorte de moi divin s'est manifesté, et m'a rappelé que j'avais «trouvé le passage» en 2002 pour emmener le corps plus loin dans la transformation, alors que cela semblait impossible, et que ce n'était pas le moment de m'inférioriser. Je me suis appuyé sur ce levier pour récupérer, oui, finalement j'étais bien fatigué en revenant de Malaisie. Il est parfois bon, en cas d'urgence, de se souvenir de ce que l'on a été, même si cela paraît loin, c'est peut-être une clé qui continue d'ouvrir certaines portes. Les montagnes russes sont moins impressionnantes depuis deux ans, et surtout, je me sens quand même bien mieux physiquement. L'énorme sentiment de culpabilité suite à un désastre dont j'ai été directement responsable, logé dans la poitrine, lâche parfois. Je crois que j'ai été persécuté avec les adeptes du mouvement que j'avais créé, c'est loin, mais ça remonte encore.
28 Février 2015
J'ai somatisé la maladie d'Alzheimer de maman, c'est sorti avant-hier, j'étais encore crevé après une longue sieste et j'ai lâché prise. C'était anormal de me sentir encore hébété après tout ce repos. J'ai senti la force se déposer d'une manière nouvelle, plus consciente, sur la partie endommagée du poumon ou des bronches à droite en haut. L'émotion n'est pas venue tout de suite, j'ai d'abord vomi comme un malade, puis je me suis vu à Nice, dans l'établissement où j'avais confié maman avant son départ pour Strasbourg. Tout mon moi supérieur avait accepté la chose, le déclin spectaculaire de ma mère, mais pas la conscience charnelle. J'ai revécu tout cet amour fabuleux que j'avais pour elle en contraste de la voir « une autre femme », puisque je l'ai vu délirer au sommet d'une phase «positive» de sa dépression maniaco-dépressive. La vision est revenue... Je n'avais pas digéré la chose «en-dessous», alors qu'elle était passée comme une lettre à la poste dans ma conscience. Pour Maman, c'était la fin logique d'une vie qui ne voulait pas croire à la conscience, alors que l'intelligence, supérieure, aurait pu s'y rendre facilement. J'ai bien pleuré après avoir vomi, j'ai dû dire maman à plusieurs reprises dans une sorte de cri. Tout mon être contingent est ressorti, remonté, dans le but sans doute de venir s'amalgamer d'une nouvelle manière à ma perception intelligible. C'est cet amour qui m'avait porté, mon père me dédaignant et ma soeur m'en voulant de l'avoir supplantée... Je le répète, c'est simplement parce que le supramental exige une perception d'une limpidité absolue que ce genre de choses est rendue nécessaire. On peut très bien vivre sans libérer ce genre de mémoires, mais si ça se présente, on est forcément gagnant. Raison de plus pour envoyer balader les théories hindoues qui veulent passer par-dessus le corps... Cela ne sera plus possible avec le supramental. On ne pourra entraîner vers le champ unifié que des corps reconnus pour leur utilité, leur soutien, et que nous apprendrons à aimer, même si nous leur donnons peu de satisfactions. Leur nettoyage prendra des années, on s'en fout on n'est pas pressé. Nous avons l'éternité devant nous, et contrairement à ce que raconte Woody Allen, ce n'est pas long vers la fin. C'est long dès le début, et c'est justement l'intérêt, avant et après ne veulent plus dire grand chose dans l'éternité. La causalité s'affale et s'abîme dans la grande tortue, qui un jour a pondu le temps, sans que personne ne sache encore pourquoi, même pas les frères Bogdanov, étrange non ?
5 Mars 2015
Que reste-t-il de la matière inanimée dans la vie ? Au moins les sels minéraux dans nos corps. Que reste-t-il de la vie dans le mental, toutes les survivances dynamiques, conquête et préservation du territoire, confusion entre souhait et désir. Pourquoi l'ensemble reste-t-il homogène ? Personne ne sait, c'est le mystère de l'évolution. La vie prend dans la matière, le mental prend dans la vie, espérons que le supramental prenne dans l'esprit. Chaque plan qui arrive sur l'autre le rend en partie passif, en partie seulement. Les sels minéraux peuvent soutenir l'équilibre du corps, la vie peut soutenir le mental, le mental peut soutenir le supramental. Il y a juste à changer d'échelle, et remplacer les secondes par des siècles. Quand je suis «anéanti», c'est juste qu'une mesure plus objective de ma place dans l'espace-temps veut remplacer l'égocentrisme dont tout être humain est porteur. De l'extérieur, je suis comme un minuscule insecte rempli de mémoires personnelles, héritier de mémoires héréditaires, ancestrales, génériques, et qui ne veut plus fonder son identité sur ce qui fut. Mais l'ensemble du film a été enregistré, la fin de maman est très mal passée, au moins deux (de «mes») existences se sont très très mal terminées, et c'est encore là. Le supramental devrait, anyway, même si la transformation ne va pas très loin, libérer une bonne partie du karma, et qui n'en a pas ? Recensé les dernières zones de résistances au supramental par ordre croissant:
1/ Côté droit du cou, la force y va souvent toute seule, léger pétillement agréable, c'est la torture à l'écrou.
2/ Haut du poumon ou des bronches à droite, me fait cracher, respirer mal,
être triste sans raison.
A/ somatisation de la fin tragique de maman, peut-être papa, grosses émotions à sortir pour consentir dans l'absolu à leurs termes de vie horribles pour papa (trois ans et demi grabataire, six mois nourri par le ventre sous la tutelle de ma soeur) et horribles pour moi. Maman a toujours su passer entre les gouttes, et elle n'a pas tant souffert que cela dans sa folie douce, mais c'est moi qui ai très mal pris la chose, c'est vraiment passé par en-dessous.
B/ somatisation de culpabilité karmique, sans doute une zone faible dans le corps «familial» cette zone, qui ramasse et stocke les préjudices. Très humiliant pour un ancien apnéiste amateur de ne pas pouvoir «compter» sur son appareil respiratoire...
3/ Le trou noir entre le plexus solaire et le cou. Je ne sais pas encore ce que c'est. Peut-être générique, mais l'ennemi a été découvert. Quand ça s'est ouvert une seconde, cela a suffi à la conscience pour identifier la chose, elle va s'en mêler. Confiance dans le processus, plus «propre» que la douleur des somatisations.
4/ la «balle de ping-pong» dans le creux au bas du cou, au sommet du thorax donc, le siège de la mort, sans doute, découvert en 2013.
Impression que tout le reste du corps suit et soutient la transformation. Gros travail, permanent, pour ne pas me sentir coupé en deux. Placer la force, le matin, à la sieste, le soir, quand je me réveille la nuit, si elle ne va pas se poser toute seule sur les zones en question.
M'aide avec des huiles essentielles, en massage, en diffusion dans la chambre.
28 Juillet 2015
Ai vécu trois périodes de trois jours à peu près, distantes d'une à deux semaines, complètement homogènes, avec un nouveau travail de la Force. C'est vrai que je préfère les vingt à vingt-quatre heures d'une intensité extrême, comme cela s'est produit de rares fois, mais ce travail en trois jours opère aussi dans une extrême profondeur, et c'est nouveau. La première fois, je me suis senti pas mal décalé avec un corps très présent et lourd, donc pas de bonne ambiance mentale mais supportable pendant quarante-huit heures. Puis le troisième jour au matin, tout le bas-ventre est devenu du plomb et je me suis senti « un sac de merde », c'était quasi humiliant. Impression que mes intestins pesaient cent kilos. Juste après toute la zone a été investie par la force et elle a tout libéré, je crois que j'ai gagné du positif dans cet organe, qui, par hérédité n'était pas terrible. Je n'ai pas cessé d'aller à la selle et d'évacuer du liquide plusieurs fois, ce n'était pas normal du tout qu'autant de flotte se barre, je ne sais pas d'où elle venait, c'était incroyable. Super forme après cela pendant plusieurs jours. J'ai vécu quelque chose d'analogue un peu plus tard, deux jours dans un mini cirage, et puis le troisième branle-bas de combat sur l'estomac. Là aussi, gagné du terrain, sensation chaude sur le ventre, mais avant, la révélation que des milliers de flux électriques innervent cette zone, pas croyable tout ce qui s'y passe, le plus souvent en-dessous du seuil de conscience naturellement. Un vrai nid à traumatismes cette zone. La troisième phase a été absolument incroyable. Je me suis enfoncé trois jours je ne sais où, j'ai cru sentir que la force n'arriverait jamais assez bas pour me transformer, et j'ai été découragé tout au bout d'une descente qui n'en finissait pas. Par « bas », j'entendais tout ce passé pendant lequel j'avais fonctionné sans le supramental, tout mon corps, finalement jusqu'à vingt-sept ans. J'ai lâché prise en me disant tant pis, toute cette histoire ne m'appartient pas finalement, et je me suis dégagé du malaise.
3 Août 2015
Nouvelle résistance très profonde. Malgré des matinées entières à méditer-dormir-mantra, quelque chose ne suit plus. C'est dans la gorge à droite, sans doute une blessure karmique, et dans l'ensemble des poumons. Une non-envie de vivre avant le flux des pensées. Quelque chose d'obstiné. Nouvelles sensations dans les jambes, pas désagréables, mais constantes. Un fourmillement qui resserre. Tout ça vient peut-être du fait que j'ai senti la nécessité de me reposer, de laisser aller les choses (pas de projets de déplacement) et de revenir à mon caractère fondamental, être spectateur absolu et apprécier toutes les secondes. Ai travaillé quand même, en allant un peu à la bibliothèque, et j'ai toujours des phases de jubilation intellectuelle, mais je ne les appelle plus. J'en ai assez de surplomber par la conscience le moi organique et le corps éthérique. Il semble qu'il y ait encore plein de blessures, de la culpabilité, donc je lâche, mais la paix m'emmène hors de la vie, et j'ai de la peine à revenir au monde contingent. Il y a vraiment quelque chose qui veut s'écrouler, ça vient de très loin; ça crie grâce, ça veut disparaître et attaque la respiration. En même temps, je me moque de tout, je tiens le coup, je m'écoute en ne faisant que ce qu'il me plaît, lectures, petites marches, séries télé où je décode sans cesse des schémas humains avec plaisir, ce qui fait que même en ne rien faisant, je travaille, car la distraction ne me distrait plus du tout. J'avance parfois aussi sur la philosophie supramentale, mais je me sens peu soutenu par l'énergie de vie. J'ai appris il y a un mois que Sri Tathâta avait annulé sa tournée, et qu'il est malade, paraît-il. Peut-être vaut-il mieux ne pas s'habituer, malgré leur régularité, à ces baisses de régime. Y consentir quand même, j'ai l'impression « démente » que je peux encore aller plus loin dans la manifestation d'émotions lourdes. Je dois y aller, encore trouver le chemin. Bien que je ne censure rien, il y a trop de choses qui veulent sortir sous la pression de la transformation, et je dois encore plus m'abandonner. Je me croyais spécialiste de la chose, mais il faut encore progresser, sans peur, vers ça. De toute façon c'est un peu normal, avec Saturne opposé à la lune (et Mercure) et un surmoi nickel-chrome, je dois être attentif aux émotions, à leur amorce, sur laquelle je peux passer vite fait bien fait. Bref, le privilège supramental paraît parfois se payer très cher, et là, il vaut mieux s'en remettre au Divin que faire le mariole, en se plaignant ou en se croyant au-dessus de la souffrance. L'idée d'échouer ou d'en rester là me traverse sans que cela me dérange. J'ai de moins en moins l'impression d'y être pour quelque chose dans ce qui m'arrive, alors si la voie est bloquée, elle est bloquée. Jusqu'à présent, cela n'a jamais duré. Mais je ne sais pas tout, alors je laisse l'aventure se continuer de toute façon, avec de moins en moins d'attentes. Je dois m'élargir, supporter la médiocrité, facile dans la tête, moins facile dans un aéroport, je dois embrasser tout ça car tout se tient. J'ai fondé plusieurs existences sur l'excellence, normal que je sois sévère avec les autres, mais même ça je n'en vois plus l'utilité. Notre société nivelle par le bas, je n'y peux rien. Les têtes qui dépassent sont coupées par les petits marquis de la bien-pensance de gauche. Je crois que cette Histoire-là est foutue, je dois m'y faire et préparer la suite, quand le mouvement s'impose. Alors je suis inspiré, mais ce que je reçois ne peut faire plaisir à personne. C'est la faillite, mais l'huissier se planque, et on peut faire dans le déni, comme d'hab. La fin de Mère et celle de Satprem me semblent de plus en plus logiques. Le mental embellit, décore, mais là, nous avons affaire à un business colossal, le système organique et ses dérivés vers les plans subtils. L'ensemble sent et ressent, perçoit et souffre, et meurt. On n'y voit goutte, en dépit des belles planches d'acupuncture, ou des posters des chakras. Dans les faits, descendre là-dedans est souvent insupportable. Pourtant, c'est nécessaire d'y aller. Traverser, difficile de savoir de quoi ça dépend. Même a posteriori. Ni se plaindre, ni fanfaronner masochistement. Sur le fil du rasoir. Mieux sur le fil du rasoir d'Ockham, accéder à la simplicité absolue, celle des S.D.F reconnaissants qu'on leur jette une pièce.
17 Novrembre 2015
J'avais presque décidé de ne plus parler de mes « expériences » tant elles deviennent étranges, dans le sens d'intraduisible, mais brusquement je me sens une dette envers l'avenir. Après trois opérations distinctes de trois jours environ, en juillet, à une semaine d'intervalles à peu près, c'est comme si la Force s'était brusquement retirée, et je me suis retrouvé anéanti, pour la énième fois, mais cette fois c'était plus ennuyeux, puisque j'avais énormément apprécié les trois séries discrètes de travail profond, dont une dans le bas ventre et sans doute les intestins. Je me suis alors demandé si cette fois l'âge ne frappait pas un grand coup, étant donné que c'était la seule explication. Je me « traînai », avec peu d'énergie, alors que quelques jours avant, j'étais plutôt satisfait de mon sort, et de cette avancée dans ce qui, peut-être cette fois, est carrément organique et plein de subconscient of course, c'est-à-dire le plan matériel le plus dense.
L'impression d'être « un sac de merde » et rien d'autre avait duré plusieurs heures, tout l'emplacement des intestins était devenu une chappe de plomb, et puis, comme d'habitude, un grand soulagement est apparu d'un seul coup, mais c'est vraiment passé par cette conscientisation d'être « un sac de merde », c'était d'une neutralité absolue. Il n'y avait pas de culpabilité, pas même de honte dans cet aveu, mais c'était bien ça. J'ai donc dû reconnaître cette identité purement matérielle de ma pomme, m'identifier à ça, à un corps pur et simple soumis à l'excrétion, l'impôt à payer pour jouir de tout le reste. Mais ce n'était pas à proprement parler sale, mais vraiment, un poids incommensurable s'est manifesté dans cette zone. C'est comme si mon ventre avait pesé d'un coup une bonne vingtaine de kilos dans un volume assez réduit, qui partait de quelques centimètres sous le nombril jusqu'au pubis. Je suis mince et pas très grand, et ne dépasse plus les cinquante-huit kilos depuis longtemps, bref, presque la moitié de mon poids s'était condensé dans cette zone, si l'on veut. Quant à ma capacité d'évaluer les poids, elle provient de la chasse sous-marine, j'ai porté suffisamment de ceintures de plomb de sept kilos pour sentir ce que ça fait, et j'observe aussi à l'aéroport le poids du bagage qui part en soute, et que j'ai porté dans les escaliers. Donc, vingt kilos, c'est déjà du lourd quand ce n'est pas conceptuel, et là ce n'était pas du tout conceptuel, une invasion massive de poids dans une partie du corps qui n'en avait jamais entendu parler. Belle séquence donc, pour se retrouver un peu plus tard hors service, what else ?
Là, je n'ai plus su prendre la moindre mesure, et me suis retrouvé lessivé. J'ai donc décidé de trouver la solution, car je ne me voyais pas rester longtemps là-dedans sans dépérir. Dans les grandes épreuves, je reste couché le matin et fais mon mantra jusqu'à plus soif, ce qui peut me mener jusqu'à treize heures.
C'est donc ce que je fais, et finalement au bout de deux trois jours, je ne sais plus, enfin la solution arrive sur le plateau que j'avais commandé plus de quarante-huit heures avant, mais bon, le Divin n'en fait qu'à sa tête, et je n'ai donc pas tiqué sur le retard, bien trop content de voir le bout du tunnel. Là, je ne sais pas ce qui s'est passé, peut-être me suis-je parlé à moi-même, ou c'est l'intelligence qui a fait le boulot, peu importe, la réponse arrive. Je me vois donc vivre presque tout le temps dans la même position, à savoir abolir mon être, mon passé, et m'ouvrir totalement au présent, comme si je n'existais pas ailleurs, pour être précis c'est comme ça que je fonctionne, et là... je me rends compte que ça ne peut plus continuer comme ça. Cette posture est périmée, point barre. Je suis toujours lancé en avant sans m'appuyer sur rien, et là, ça ne le fait plus. Alors je change de stratégie. Je ne me porte plus vers le Divin ni vers le présent, et je me dis : Il se débrouillera pour venir jusqu'à moi si Je l'intéresse, moi, je dois me souvenir de ce que je suis, et toute mon identité s'étale donc depuis plus de soixante ans, je dois la conserver avec moi tout le temps, parce que le mec qui n'est que dans le présent et qui se moque de qui il est, ça le fait plus.
Cette nouvelle méthode a commencé à marcher un peu, en tout cas elle m'a tiré d'un bien mauvais pas, et j'en profite pour dire que si je n'avais pas été « aguerri », un truc comme ça est suffisant pour rebrousser chemin, arrêter tout, ayant l'impression d'avoir été abusé par Dieu Himself, ce qui fait qu'il peut aller se rhabiller.
Mais je commence à connaître la chanson, et donc je mets la tête hors de l'eau peu à peu. Ensuite, pris d'un délire métaphysique, pour me requinquer j'écris l'appel de Socrate, qui n'avait commencé qu'en tant que « journal philosophique », because je suis quand même un mangeur de grenouille, et ça commençait à faire désordre de ne m'intéresser qu'à la Chine et à l'Inde, puisque mes soi-disant racines, organiques en tout cas, sont bien de chez nous les barbares domestiqués par des barbares plus farouches encore, les Romains, dont on ne célèbrera jamais assez la perfection de son église catholique, prêchant l'amour par la violence.
L'écriture me remet les idées en place, et me prend beaucoup de temps, mais au moins c'est rigolo de retracer à grands coups de pinceau la philosophie occidentale, qui a toujours pété plus haut que son Q.I, sauf chez pas grand monde, et j'en profite pour me régaler, en tombant sur Husserl qui exécute Descartes, de la manière dont je commente un de ses aphorismes, et je cite aussi un très court passage de Bergson, qui à lui seul aurait pu soulever les masses si justement elles n'étaient pas des masses, c'est-à-dire du poids mort (dans une perspective évolutive, sinon tout va très bien madame la Marquise, les criminels et les pédophiles font partie du paysage)... Le tout se trouvera sur le prochain site, une bouteille à la mer okay, mais on ne sait jamais, et qui s'appelera « la spirale philosophique ».
Finalement, j'arrive à me reconstituer tout au long du mois d'août pour décider de repartir à Bali, en m'arrêtant par Phuket où mon ami webmaster doit passer préparer un nouveau site. J'arrive dix jours avant lui, et complètement cassé par le voyage, je me fais peur à nouveau, une ankylose terrible s'est emparé des jambes quand je descends l'escalier, et je flippe un peu. Du coup, je décide de faire une monodiète d'eau de noix de coco, d'autant que celles du pays sont une des preuves de l'existence de Dieu. C'est quasi un jeûne, puisque ces quatre ou cinq boissons journalières ne s'accompagnent la première semaine que d'un carré de chocolat, et de deux ou trois tranches d'ananas séché. Puis les trois derniers jours, rien de solide, et encore les mêmes noix de coco du marché. Là aussi découverte, j'ai continué à aller à la selle alors que je n'avais plus mangé du tout de solide depuis deux jours, mais au moins tous les vieux déchets sont sortis.
Je conseille vivement ce régime, on a bien sûr à peu près l'équivalent en Europe avec les monodiètes de raisin, au mois d'octobre. En tout cas, ce jeûne a été un tournant, puisque depuis, j'ai moins besoin de manger et c'est tout bénef puisque la Force travaille davantage.
Enfin à Bali, j'ai vraiment remonté la pente.
Qu'on me pardonne de ne pas commenter les attentats sérieusement, pour moi c'est râpé depuis mars 2011, déclenchement de la guerre civile en Syrie et Fukushima.
27 Janvier 2016
Hauts et bas incroyables, je ne sais même plus « qui » tient.
La Force descend tellement profond que je me sens lourd et aspiré dans un trou noir. Toute la tête lourde avec la nuque. Et puis, je dédramatsie, me dis que l'esprit n'a pas à s'enfoncer dans le travail physique, n'a pas à suivre ce qui arrive au corps, automatiquement, quand c'est angoissant. Cela marche, après ces descentes, je baille une bonne dizaine de fois avec une amplitude invraisemblable. Nouvelle attaque de la vieillesse comme fin juillet. Pieds froids, sciatique, bref vieillir est une connerie, mais j'apprends à faire accepter la chose à tous les plans de l'être. Si le Divin veut combattre l'entropie, Il le fera d'autant mieux que j'accepterai sereinement l'inéluctable baisse de force.
Hier, je sors entre deux averses, et vais boire une noix de coco pas loin, en utilisant le scooter. Je suis resté quelques secondes figé dans l'éternité, c'était une perception absolument inconnue, mais avec un déjà-vu d'une force incroyable. Cela m'a fait penser à l'éternel retour nietzschéen, je devais parvenir à ce point extrême, voilà tout. Donc, je navigue entre cette satisfaction et un corps qui n'en peut mais, malgré les progrès incroyables, puisque le plastron de mort, du sternum à la gorge, avec les côtes qui partent du sternum, a enfin été pénétré par la force fin décembre. Ce n'est pas érotique, mais l'impression d'ouverture et de soulagement est magnifique, c'est une sensation incroyablement féminine, et très fine, du plus léger que l'air s'infiltre dans du plus lourd que du plomb, quelque chose d'une riigidité absolue, comme si ça remontait aux premières calcifications!
Il y a eu trois jours de travail, une interruption, et ça reprend: quand je suis là, arc-bouté contre la mort elle-même, je suis vraiment à ma place. Donc ça avance, mais le prix à payer semble encore parfois, quand je suis épuisé, exorbitant.
15 Février 2016
Trois expériences vraiment incroyables, je m'en remets tout juste. Le 13, après plusieurs heures passées sur l'ordinateur à dessiner, je vais m'allonger et là je suis prêt à perdre pied. Une envie de mort se manifeste, monte peu à peu, alors que j'ai les yeux fermés et ne pense à rien. Je voulais juste dormir un peu... Quand je sens une tentation suicidaire qui se pointe, je me lève et décide d'arrêter volontairement cette sensation psychologique, dont aucune origine n'apparaît. Cela marche, et l'après-midi je fais une grande virée en scooter pour respirer, et gagner une épicerie bio. Il y a tant de circulation que je décide de m'arrêter un bon moment et de prendre un dîner sur le pouce. Je me sens plein de force, mais l'expérience m'a perturbé.
Finalement, quand je reprends la route, je suis soulagé et même étonné que les embouteillages soient finis, ce qui fait que je parviens à me détendre en roulant aux trois-quarts de la course, et là j'ai une prise de conscience violente qui m'arrache des larmes. C'est clair, j'ai été attaqué par une pulsion de mort ! Cela me fait du bien de pleurer un peu, j'ai l'impression que l'être psychique vient tout devant, s'empare de toute la situation et je rentre tranquille. Mais le lendemain, dimanche 14 au matin, pour la première fois de ma vie j'ai des doutes sur ce qui se passe en me réveillant. Une peur panique s'empare de moi et en même temps la Force irradie le bas-ventre, entre le nombril et le pubis, c'est une véritable invasion, un pétillement très net, et la première minute, ça ne passe pas, je suis prêt à flipper, me dire que je vais rester dans ce malaise tout le temps car le cerveau est pris dans le refus, et puis le corps lâche enfin subitement, accepte cette autre présence massive, et mon esprit retrouve ses facultés instantanément, mais vraiment, pendant une minute, c'était too much!
L'après-midi j'ai senti quelque chose que Sri Aurobindo a vu, et décrit dans Savitri. C'est une sorte de présence de la mort, puisque cet esprit (aussi quantique que la Grande Tortue, je ne sais pas où je suis allé le dénicher) fait savoir que tout lui revient, pourtant ce n'est pas méchant ni arrogant, c'est plus comme un trou noir immatériel, un trou noir en apesanteur, invraisemblable. Et là, la chose attaque. Elle m'enlève trois ou quatre moments les plus précieux de ma vie, comme un déjeûner avec ma mère à Villefranche-sur-mer, quand j'avais une vingtaine d'années, et qui était resté inscrit comme une référence absolue de connivence avec elle et avec la vie. L'esprit de la mort arrache d'autres moments, mais je lui rétorque que mon identité n'a pas besoin de ces choses-là, et qu'il peut les dérober sans problème, mais l'impression générale d'être un mort (en sursis) déjà mort sur le plan des principes demeure... pour m'écraser comme on écrase un moustique, et là, je me dis et lui dis, mais enfin, ces moments existent dans le présent éternel, tu ne peux pas me les voler, et je ris de bon cœur, ce qui remet les choses en place.
Voilà, je dois préciser que cela était bien différent d'une expérience provoquée par la Shakti divine, dont j'ai déjà parlé comme d'une opération chrirurgicale prélevant toute une période de ma vie attachée à Lyon et à l'établissement de ma famille où j'ai travaillé. Non, là, cette présence avait pour but de m'anéantir, un peu comme en 2001 à Mayotte, où j'avais été attaqué de l'intérieur : « tu n'es plus rien, plus d'avenir devant toi, tu es fini... ». Cette fois, la forme avait changé, mais je me suis baigné dans quelque chose de très étrange, pas même noir, disons pour personnifier que cela ressemblait au dieu de l'entropie, qui avale tout et ne s'en laisse pas conter. Au début de l'expérience, cela m'a rappelé vaguement un passage de Savitri, dans lequel la Mort s'exprime et dit à Satyavan que ce qu'il entreprend est voué à l'échec.
Et puis après ça, je décide de sortir, mais me voilà complètement anéanti à nouveau, je renonce. Je vais m'allonger, et quelque chose remonte vraiment de très loin, alors j'éclate en sanglots, c'est mon procès, je suis accusé de me faire passer pour un envoyé de Dieu, et je me défends en disant que de toute façon ce que je fais c'est pour le bien de tous, mais ça ne fléchit personne. Tout ça aussi subtil que des souvenirs bien entendu, pas d'images vraiment, mais la souffrance se concentre dans la gorge et sur le côté droit, où j'ai été sans doute torturé. C'est puissant et rapide. Je vais cracher et vomir, comme d'habitude depuis 2008, mais cette fois j'ai l'impression qu'il sort un gros paquet de mémoires très toxiques, et juste après je me sens bien et sors en scooter.
Bien sûr, je ne peux pas plus prouver l'existence de la Grande Tortue, un potentiel éternel d'évolution auquel s'accroche peut-être l'espace-temps et auquel la vie s'adosse, que je ne peux établir que l'entropie absolue, la mort, puisse être vécue de manière sensible, physique et spirituelle dans son principe même mais, étant donné tout ce que permet le Supramental, il n'y a rien d'extraordinaire pour moi une fois que je suis devant le fait accompli. En revanche, imaginer ou prévoir ce type d'expériences est absolument impossible. Cela n'a rien à voir avec du connu, le soi impersonnel est banal à côté, ce qui nous donne une idée des millénaires prometteurs qui s'avancent pour les amants de la Conscience, si nous en réchappons, évidemment. Parfois, j'ai des doutes sur ma possibilité d'avancer encore plus loin, Inch Allah !
23 Décembre 2017
La relecture de Solaciel, préparé pour Amazon, m'a rempli de cette jubilation « intellectuelle » avec laquelle je suis né, mais que je perds parfois, avec tous les maux physiques qui m'assaillent. C'est ce que je veux retrouver, et je prends mon mal en patience quand je ne me sens pas dans mon assiette, ce qui est fréquent le matin. Le 5 décembre, j'ai passé une journée merveilleuse, bains de mer et partie d'échecs sur la plage de Jimbaran, après quoi je me suis cassé la figure comme chaque fois que j'atteins un « niveau perceptif » très performant. J'en ai profité pour arrêter le café, dont la modique consommation me permet de planer un peu moins. Bref, des jours avec des hauts et des bas, et puis le 13 décembre, enfin du nouveau. La Force envahit l'os d'une vertèbre, sans doute la première dorsale en-dessous des cervicales. C'est émouvant ce forage, cette sensation parfaitement précise et profonde, qui m'a rappelé quelque chose d'équivalent à Padang Bai, il y a plus de dix ans, mais c'était dans le coccyx. Bref, ça ne dure pas très longtemps, je me sens assez bien pour aller à la plage de Nusa Dua, et, après une brève baignade, quand je reviens sur mon scooter, c'est l'expérience attendue depuis longtemps qui se produit. Je roule tout bêtement, et à un moment, ça y est, une tristesse infinie jaillit dans mon esprit, en même temps que la sensation que les poumons sont enveloppés de « merde » tout autour. C'est toute la cage thoracique qui est comme phagocytée par de la noirceur... Enfin, la Force semble parvenir au cœur du problème qui me torture depuis 2008. Au bout de trois cents mètres, je freine pour pouvoir cracher, et je dois récidiver deux fois. A vrai dire, pour la première fois de ma vie je me suis senti humilié par cette présence morbide, car elle ne m'appartient pas et elle est toujours là. Mais cela semble avancer. Entre le 5 et le 13, j'avais pensé plusieurs fois à ma grand-mère paternelle qui a passé sa vie à souffrir, elle ne savait rien faire d'autre, à part la cuisine. Elle ne s'est jamais relevée du décès de son bébé, puis mon père est arrivé pour faire oublier cette histoire, mais ça n'a pas suffi. Ma grand mère était vraiment très fruste, faible intellectuellement, et elle débordait d'émotions et de sentiments. Il y a peut-être un lien, ou alors c'est encore une histoire karmique, la fin d'une vie qui s'est très mal passée. Ou autre chose, de générique, cette fois ça descend encore plus profond.
Je m'habitue à l'idée d'intégrer le corps physique, qui est le dernier dans notre histoire, à ce que je suis réellement. Je sens souvent le conflit entre les deux identités, mais je laisse de plus en plus faire « le Divin » que j'ai la chance de connaître. Il ne correspond absolument à rien de ce que l'on peut imaginer, et je ris sous cape de tous les egos surdimensionnés qui osent en parler comme s'ils savaient de quoi il en retourne, et qui n'ont même pas réalisé le Soi (un ou deux éveillés pas plus sur un million de terriens). Le mental fournit une fausse identité fondée sur des « représentations », et elle est fausse, mais bien peu s'en rendent compte. C'était pourtant le message de Bouddha, Tchouang Zi, Héraclite, Lao-Zi, et d'une certaine façon celle de Spinoza. Valéry, Goethe et Bergson ont senti le complot, eux aussi, de la pensée. Pour ne plus penser Sri Aurobindo, il est donc nécessaire d'être à fond dans une sadhana mystique, c'est largement suffisant, et elle n'a même pas besoin du « cadre » aurobindien. Aimer l'Esprit, aimer Dieu, et n'agir que pour Lui, c'est la voie, « le supramental » n'est qu'une décoration, ou plus exactement l'ultime promesse que Dieu s'occupera de la Vie, ce qu'Il n'a jamais réellement poussé très loin, avant 1956 dans le corps de Mère.
La question de la dérive de la vision supramentale ne se posait pas au début de cette aventure, toute nouvelle. Mais le temps a passé, la fascination demeure pour ce couple étrange de Pondichéry, et toutes sortes de dangers, si l'on veut, sont possibles. Des anarchistes purs, incapables de la moindre soumission au Divin, mais intelligents et pervers, voudront se faire passer pour les détenteurs légitimes du flambeau, quitte à faire descendre de drôles d'énergies sur la Terre, que leurs affidés, punis de leur complexe d'approbation et qui se seront laissé prendre, devront considérer comme supramentales, même s'il ne leur arrive rien d'autre que de se sentir en opposition avec le monde entier. C'est la raison pour laquelle je continue de penser que sauver mes textes est important. Je ne sens pas que le charisme fallacieux puisse être transféré dans la magie de l'écriture, alors qu'il va de soi qu'un grand manipulateur peut oralement embobiner toute personne qui a des failles et qui croira les colmater en se soumettant à une autorité « sécuritaire ». Autrement dit, si l'on a des doutes sur une personne qui prétend représenter le supramental, il vaut mieux l'éviter, et s'en tenir aux textes de Sri Aurobindo et Mère, et même éviter les miens, si la confiance n'est pas au rendez-vous. En tant qu'occultiste, je rappelle que la Terre est un enjeu pour toutes sortes de forces qui ont dérivé du Divin originel au cours de la manifestation de l'espace-temps, et que pour elles, infiltrer le mouvement le plus élevé et le plus intelligent de tous, soit l'aurobindisme, qui est l'Advaïta en action, est sans doute une priorité. Parce que c'est là, dans le clan de ceux qui reconnaissent Sri Aurobindo, que se trouve le cheptel le plus fin dans l'immense troupeau humain. Les personnes touchées par ce message ont forcément un coefficient intellectuel élevé, un respect inné pour la totalité une, qu'ils cherchent à développer tout en restant libres et libérés des dogmes. Il s'agit donc d'une catégorie très intéressante, car dans son ensemble, elle est relativement meuble. Il faut être « poreux » pour être emporté par la saga de Mère, et les facultés « spongieuses » de l'esprit, c'est justement ce que les manipulateurs cosmiques recherchent, car ils s'infiltrent plus facilement. D'ailleurs, j'avertis les médiums ordinaires, dont la vie spirituelle est encore fragile par manque de connaissance de soi, qu'ils constituent des proies idéales en ce moment pour devenir les victimes de grandes opérations de récupération de l'âme humaine à des fins délétères.
Je suis donc heureux de continuer mon travail qui revient toujours sur ce que personne ne veut entendre mais qui est pourtant vrai, l'exigence du Divin. En termes astrologiques, tant que la fonction Saturne (autorité-intégrité-responsabilité) n'est pas intégrée, le sujet demeure malléable dans le mauvais sens du terme. Sa souplesse l'entraîne parfois trop loin, dans des abandons corrupteurs puisque, en fin de compte, seul l'abandon au Divin possède une valeur absolue. Avant lui, l'abandon à l'Amour risque d'être teinté de trop de subjectivité et d'attentes, l'abandon à l'intelligence est plus fiable, mais n'est possible qu'en déconnectant le mental du vital, ce qui impose une sadhana également, dont je continerai de faire l'esquisse sous le terme d'alchimie. On a beau essayer de noyer le poisson, la vérité est qu'il n'y a pas de réalisation avant que chacun des gunas soit mis à sa place, et comme le nature les mélange allègrement, nous devons accepter la lenteur du processus de récupération par l'être psychique des fondamentaux de l'incarnation.
24 Décembre 2017
Bien que je ne trouve pas utile outre mesure de m'étendre sur les « expériences supramentales », je dois récapituler, pour l'avenir, une drôle de séquence qui s'est déroulée au mois d'avril. La perception du temps s'était ralentie à l'extrême, j'avais l'impression, à midi seulement, d'en être à la nuit tombée (saturation), et le corps physique a eu de la peine à s'habituer. Il a fini par y parvenir, et depuis, chacune de mes journées est interminable, et j'ai trouvé une astuce pour supporter ça, je me place dans un « temps intérieur », qui, sans abolir ce qui se passe, est fondé sur le sentiment de l'être relié à lui-même. Ainsi, un trajet de train de banlieue d'une heure est pénible dans le temps objectif, mais dans le temps intérieur (il faut un miniumum d'exaltation pour le superposer à l'autre) le même parcours semble ne durer que dix minutes. Fin juillet, le processus de la transformation m'a dépassé pendant trois semaines. Mon corps physique ne parvenait pas à me rattraper, j'avais arrêté thé et café également, et cette relaxation nerveuse a dû accélérer le travail. J'ai même donné une journée de séminaire dans un état physique difficile, mais mon esprit était parfaitement clair. J'ai retrouvé mon équilibre, miraculeusement pendant la nuit, sans savoir pourquoi. C'était, par hasard, à mi-chemin entre la Sorbonne et le Collège de France, rue Saint-Jacques. J'ai revécu alors des moments importants, comme ce désaccord avec un routard qui se baladait avec le Yi-King, et qui voulait me convaincre que rien de bon ne pouvait être accompli à l'intérieur du système. Je devais avoir vingt-et-un ans, et j'étais encore convaincu que je devais pousser mes études très loin, et que, de l'intérieur, je ferais bouger les choses. Bien sûr, c'est lui qui avait raison, Il était sur le chemin, mais moi je tenais encore « à savoir plus de choses » et je croyais pouvoir percer dans cette société ! Ce qui m'a fait le plus regretter d'avoir échoué Normale Sup, c'est le niveau tellement médiocre des professeurs de Lettres à Nice, quand j'ai senti que je n'étais pas à ma place d'une part, et que je ne me voyais pas prof d'autre part. Je me suis mis à « manquer de la vérité » comme un drogué en manque, et je ne pouvais plus me projeter dans le moindre avenir. Le « regret » d'avoir raté Normale Sup est souvent venu me visiter car ma vie sociale a vraiment été nulle jusqu'à trente-huit ans, non, ce n'est pas agréable d'être pris pour un minable par sa famille, quel que soit le détachement, et puis j'ai bénéficié d'une petite reconnaissance en tant que professeur d'astrologie humaniste, qui m'a permis de gagner un peu d'argent. Mais même en astrologie, j'étais trop novateur et exigeant, et les brillants esprits, pour la plupart narcissiques, qui composaient le réseau d'astrologie humaniste m'ont pris de haut quand j'ai présenté mes recherches à Genève, pour le gratin de la discipline, qui ne se sentait plus pisser d'avoir compris quelques algorithmes de la vision de Dane Rudhyar.
Bref, le supramental m'a détourné du destin pour lequel je me croyais « prédestiné » (écrivain, chanteur engagé ou philosophe) et me voilà occupant, à l'insu de mon plein gré, une place d'honneur dans le monde spirituel, place dont tout le monde se fout éperdument. Cette société ne peut pas me reconnaître et ce qui me console si l'on veut, c'est que des esprits similaires au mien s'infiltrent par les réseaux sociaux pour se faire entendre, par la bande comme on dit, car leur vision du monde sape tous les fondements de notre société. Autrement dit, la « nouvelle conscience » n'est pas le monopole des personnes spiritualisées « pour de vrai », mais une attitude d'esprit profonde, qui n'interprète plus les choses « par rapport à soi », mais par rapport à l'intuition profonde du bien collectif. Grande satisfaction de voir Etienne Chouard, interrogé par Natacha Polony sur sa T.V, travailler comme moi sur la distance entre le signifiant et le signifié. J'étais enchanté ! Il va même plus loin, en montrant comment le signifiant, habilement présenté dans une structure, finira par détourner du signifié (sur les articles de la Constitution... ) Je le vois en réincarnation de Tocqueville ou Montesquieu, il respire « la politique ». Avec ce genre d'individus qui apparaît, le mensonge en prend pour son grade, il dérouille le mensonge. L'éditeur du jardin des Livres semble avoir une mission à accomplir. Je crois à son histoire qu'il a senti une balle lui arriver dessus (en Californie) tandis qu'il était passager d'une voiture, et qu'il s'est détourné à temps. C'est un type vraiment bizarre, en tout cas il n'est formaté par aucun système, et tant pis s'il nous fait flipper sur l'avenir, ça fait réfléchir sur les « oligarchies » de l'argent, l'énorme magouille des relations entre les banques et les Etats.
Je me suis donc habitué à ressentir le temps d'une manière extrêmement lente et je suis toujours obligé de me référer au calendrier pour m'apercevoir que si peu de jours ont passé entre un souvenir qui me paraissait lointain et maintenant. C'est une victoire pour le corps, le temps semble souvent ne plus s'écouler du tout, c'est plutôt lui qui m'entoure à droite et à gauche. Le corps physique peut tenir. Ensuite, je crois qu'il faut mentionner aussi certaines phases qui peuvent être déconcertantes et durer plusieurs jours, comme en octobre. Ça commence par un effacement de soi progressif et peu à peu je m'enfonce dans une sorte d'impuissance absolue. Je me rappelle de loin que ma vie a de la valeur, comme toutes les existences, mais ça s'arrête là, je suis noyé dans une réalité sans limites. Je n'ai pas envie ni de créer ni d'écrire, je deviens entièrement passif et je l'accepte. Je diminue. Un soir, trois secondes d'une perception autre, très émouvante. Vision que la Nature a mis des millions d'années à concevoir « mon » corps, une sorte d'émotion surgit, je me doute grosso modo de l'immense persévérance de la vie montant depuis le bas vers plus de conscience. Flash stupéfiant ! Qu'est-ce-que je fais de cet organisme où se sont concentrées des énergies qui s'organisent pour rester complémentaires depuis plusieurs millions d'années ? Il y avait la trace d'une peur à voir de si près « de quoi il en retourne vraiment », je n'ai pas pu rester plus de quelques secondes dans cette dimension, mais j'ai eu la sensation précise et profonde que mon corps présent s'appuyait sur un passé immémorial... toujours là en quelque sorte, à travers les multiples procédures d'équilibrage homéostatique. Cette indépendance du corps vis-à-vis du moi, de l'esprit, du « mental », c'est bien le sujet que j'ai traité dans Politique du Dao : c'est toute notre histoire d'êtres VIVANTS.
Une autre phase a été très intéressante, et totalement imprévisible. C'est une perception, en arrière plan de la mécanique des enchaînements de pensée, qui a duré près d'une semaine. C'était très profond également, doux, mais en même temps d'une intensité incroyable. Un véritable oxymore perceptif. Normalement, l'intense et l'insipide ne sont pas compatibles. Là, c'était conjoint, incroyable. Aussi évanescent que puissant, un truc dont le mental est prêt à jurer que ça ne peut pas exister. Eh bien si! Le temps qui se déroule est devenu autre chose, c'était saisissant, et cela a duré, chaque jour je me sentais plus redevable à l'univers. Mais redevable dans la gratitude. La durée était perçue comme l'unique réalité par laquelle tout existe dans « mon » univers d'être humain. C'est comme si un mantra se répétait en moi inlassablement, sans troubler ma perception, et qu'il me rabâchait, je ne suis là que parce que le temps existe et se prête à ce qui va suivre. Autrement dit, ne te gargarise pas, pauvre cloche, de ce qui t'arrive, tout cela n'est POSSIBLE que parce le temps se prête à ton devenir et que tu peux compter sur lui, — c'est parce qu'il ne se dérobe pas que tu peux être ce que tu es, et toi tu n'y es pour rien... Sans lui, pauvre abruti, tu n'aurais strictement rien été. Tu lui DOIS TOUT, absolument tout, tu ne reposes que sur lui. Cela fait reconnaître notre dépendance absolue vis-vis du monde réel, dont nous ne sommes qu'une insignifiante partie, même triturés par le supramental.
L'attaque assez violente de la vieillesse en novembre, avec l'impression que le corps veut rétrécir, a vraiment été pénible. J'ai changé des trucs pour être encore plus zélé dans le yoga. Différencier l'inanité de la culture humaine du temps absolu, parfait, qui porte tout. Ne pas attacher d'importance au drame de l'Histoire qui s'enfonce encore plus bas dans la « merde » mentale.
26 Décembre 2017
J'en reviens à ce qui se passe pour de nombreuses âmes en avance sur les autres. Elles « se voient » développer quelque chose qui « leur tient à cœur », elles développent donc ce que j'appelle une raison d'être, avec toutes les difficultés que cela comporte, mais elle y tiennent car leur vie n'aurait pas assez de sens sans cette vocation, cet engagement, cette création. Cette vision de soi-même dans le devenir peut rester subjective, et c'est la raison pour laquelle les traditions préconisent de suivre plutôt le dharma, une sorte d'obligation pour conformer son existence aux principes divins, avec la « carotte » d'obtenir le ciel ou une meilleure réincarnation. Le dharma est pour moi une évidence, d'autant que je vois de plus en plus le karma chez les personnes qui me fréquentent, et je leur propose donc une rectification pour dissoudre le reliquat de tendances néfastes (que je ressens sous forme vibratoire). La question se pose donc pour Sri Aurobindo, puisqu'il se voyait « libérer l'Inde des Anglais, l'amener à l'indépendance. » Il a fait autre chose à partir des illuminations à la prison d'Alipore. Je me voyais devenir, par une éloquence quelconque et un travail intellectuel intense, le fer de lance d'une vision du monde à la fois rationnelle et spirituelle, ce dont je ne pouvais guère douter, plusieurs professeurs de Lettres m'ayant trois années consécutives pris à part pour me persuader que j'avais des dons exceptionnels, une maturité incompréhensible pour mon âge (Première, terminale, Hypokhâgne). Ayant ainsi reçu l'appui de personnes que j'estimais et qui voyaient ce que mon propre père, jaloux, ne voulait pas voir, je n'avais aucune raison de douter que j'étais sur le chemin qui me convenait. C'est en Hypokhâgne que j'ai pris l'habitude, aujourd'hui invétérée, d'explorer les bouquineries, et je me fis vite à l'idée qu'il existait des « principes cachés » qu'il fallait découvrir, aussi inaccessibles qu'ils puissent paraître, pour que la vie prenne tout son sens. Dès ma classe de Première, toute mon activité intellectuelle était déjà tournée vers le secret des choses, et comme ma sensualité n'avait pas encore été réveillée j'étais tranquille, bien que je fusse tombé amoureux d'une actrice quand je m'essayais, sans succès, au théâtre amateur. Le plus incroyable quand je pense à mon passé, c'est à quel point j'étais confiant, insouciant et heureux de vivre jusqu'à la crise de mes 22 ou 23 ans, alors que mon esprit, bien que tendu en permanence vers la vérité, n'était toujours pas plus avancé. J'ai été en quelque sorte « sauvé » par mon ascendant Taureau qui considère (et oui nous avons plusieurs moi quantiques en nous, comme je le dis dans une vidéo du site en citant Sri Aurobindo) que la vie telle quelle est déjà une sacrée aubaine, et que je pouvais continuer ma route sans me faire du cinéma sur cette terrible frustration de voir la vérité m'échapper. Ce qui s'est produit, j'écrivais des textes exaltés, fumais parcimonieusement du haschich pour jouer de la guitare et m'envoler, et ma vie « sexuelle » n'avait pas d'importance. Après ma première rupture, je pouvais rester seul jusqu'à me faire draguer, moi-même n'ayant pas assez d'énergie à consacrer à la séduction des filles qui pouvaient m'intéresser, et dont je me sentais, déjà, très loin psychologiquement. Tout était profondément unifié dans ma perception, sans conflits, comme allant de soi, et aujourd'hui j'ai encore beaucoup de peine, malgré le supramental, à comprendre comment la plupart des êtres humains « se compliquent la vie » par différents moyens qu'ils ne soupçonnent pas mettre en place eux-mêmes, comme les attentes vis-à-vis des autres, qui sont de véritables poisons. Bref, comme Sri Aurobindo, j'ai été détourné de la vocation que je croyais être la mienne, réveiller l'âme spirituelle de la France, et comme lui, j'ai accepté la bifurcation divine.
Il doit être maintenant établi que le supramental détourne tellement de la poussée incoercible de l'ensemble des karmas qui se poursuivent à toute vitesse dans notre vie présente, qu'il est extrêmement difficile à incarner pour cette raison même. C'est un peu comme un détournement d'avion dans le fond. Tout ce que nous avons vécu par le passé se prolonge rapidement dans notre vie présente, avec une nouvelle petite marge de manœuvre, et d'un seul coup, c'est un virage vers l'inconnu absolu, plus rien ne tient selon l'ancienne stratégie du moi. Il y aura donc forcément des stades intermédiaires de réalisation pour ceux qui ne tiendront pas le coup face à ce bouleversement total, et qui ne pourront sans doute pas incrémenter le supramental dans le corps, même après avoir légèrement flirté avec lui dans la conscience. Ces personnes-là ne devront pas se plaindre, bien au contraire, leur vie sera moins douloureuse que celles de ceux qui, comme moi, sont complètement possédés par la transformation physique, qui met en contact avec TOUTES les forces qui veulent empêcher ce passage de l'homme à l'homme conscient. Une fois de plus, le Divin est souverain. Quand il tombe à bras raccourcis sur quelqu'un, Il se permet de le détourner de sa voie, mais le paradoxe est de taille. Celui qui accepte d'être pris en otage s'égare beaucoup moins que s'il s'en était tenu à vivre sa vie selon ses propres modes. Il y a un gros hic. L'obéissance est de rigueur, mettre au pas rajas est un travail de titan, voir les limites de sattwa est humiliant, nager dans le tamas universel dans lequel il faut également plonger pour tenter de soustraire le corps à l'emprise de la mort, constitue un exercice décourageant, qui sape le moral. Chaque remontée est miraculeuse.
Cette fois je n'ai plus de regret d'avoir manqué ma carrière, le Divin fait de moi quelqu'un de plus conscient que ce que j'aurais pu obtenir par mes propres moyens. C'est plus important qu'un rayonnement social, qu'une reconnaissance, qu'une « réussite ». Le plus étrange dans cette histoire c'est qu'il faut lâcher prise chaque jour, car la place la meilleure est donnée par le Divin, et ne correspond pas aux attentes de celui qui n'est pas encore entièrement transformé. Peut-être même que je fais davantage « de bien » par le supramental que par tout autre moyen, comme il était plus important pour Sri Aurobindo de suivre l'injonction « Va là où nul ne s'est encore rendu » que d'obtenir plus rapidement, en restant dans la politique, l'indépendance de son pays.
27 Décembre 2017
Hier matin, j'étais vraiment bien dès les réveil, ce qui est exceptionnel, et j'ai donc passé une journée tranquille. J'ai senti que je devais parler de cet incroyable paradoxe que le Divin sait mieux que nous quelle place nous pouvons prendre dans la vie, et c'est vrai qu'il passe le libre arbitre à la moulinette. Ce matin, bon réveil aussi, et je suis allé à la plage tôt, le soleil ne m'agresse pas avant 10 heures, et il me fait du bien. J'ai nagé quelques brasses au milieu des familles de russes, trop contentes d'être au chaud à Phuket à Noël. Puis j'ai eu la sensation étrange, mais nette, qu'il n'y avait peut-être qu'une force qui essayait de me faire rejeter mon corps depuis février 2008. Je suis rompu à ses manœuvres car le 22, toute la journée a été vraiment pénible, puis vers 18 heures, j'ai senti très précisément toute la zone douloureuse en haut à droite des poumons, elle s'est délimitée, et son centre est comme un petit trou noir. A priori, avec ce que j'ai vu ce matin, cette force a perdu. J'y ai senti de l'intelligence my God (Natarajan est avant tout un hyper-réceptif pour ceux qui n'auraient pas compris à qui ils ont affaire), oui, il semble bien qu'il y ait toujours une part d'intelligence dans les prakriti, qu'il n'y ait pas de rupture fondamentale entre les deux. Si ça se représente, j'essaierai de la cerner. Ce n'est pas une intelligence très futée, mais elle est inlassable et intarissable. C'est trop puissant pour être vaincu, donc il faut se contenter de couper le cordon. C'est certain qu'elle est horriblement tamasique et entêtée. Dans le même ordre d'idées, je me souviens d'avoir paniqué à Sri Lanka tandis que je faisais du snorkeling. J'avais perçu la conscience d'une énorme masse de corail homogène, et c'était tellement loin de moi, que ça m'a fait peur et que la peur a chassé la sensation.
La découverte de cette force non identifiée m'a fait tellement de bien que je me suis senti inspiré quelques minutes. Notre condition est difficile. Notre être profond est non-phénoménal (Sri Aurobindo, la vie divine, tome 1) et toute l'incarnation consiste à dépendre du phénoménal. L'être humain n'est pas si bête que ça finalement. Il déguise les contraintes depuis la nuit des temps. Manger, c'est une contrainte, moralité je me gave, je m'empiffre et j'en profite. Le désir sexuel est une contrainte, moralité autant « baiser » au maximum, ce n'est pas désagréable. Mourir est une contrainte, no problem, le paradis nous attend contre deux pater et trois ave chaque dimanche. J'ai vu que je manquais encore de tolérance, certaines personnes sont tellement laides intérieurement, que ça me dérange sur le coup. Puis je sens qu'elles ont le droit de vivre, de toute façon l'Histoire ne m'intéresse plus, alors toute la médiocratie ambiante, je vais finir par m'y faire. En revanche, ça ne pourra plus longtemps rester homogène toute cette humanité, non seulement elle est profondément divisée, mais chaque clan devient chaque jour davantage convaincu qu'il est légitime. Les couteaux s'aiguisent.
28 Décembre 2017
Encore un bon réveil et séance de plage entre 9 et 11 heures. Vu que trois questions seulement me tarabustent en ce qui concerne mon incarnation présente. L'egocentrisme triomphal (mon père et ma soeur), le manque de sincérité (ma mère toujours en représentation), le suicide, soit le départ de ma soeur à 63 ans, qui se jette sous un train. Je n'ai réglé qu'une question pour le moment. L'égocentrisme triomphal est un processus naturel, dicté par la soif de l'existence individuelle. Les égocentriques ne sont pas forcément égoïstes, c'est juste qu'ils s'imaginent qu'ils perçoivent LA REALITÉ. J'ai traité la question de deux manières différentes, dans « dissidence divine » et dans la définition du soleil générique en astrologie, qui fonde le narcissisme primaire ( « Je» ne peux pas « me » permettre de considérer que « je » peux avoir tort sans « m »'humilier « moi-même » — et je ne suis pas là pour ça, que je sache !) Je continuerai à affirmer que la Nature n'aime pas la conscience, si ce n'est la sienne propre. Ce en quoi elle obéit, comme absolument tout le reste, au principe de l'identité ne se reconnaissant que dans l'identique. Bouleversement avec le Soi, si rare, trop rare, et puis l'univers pousse le bouchon encore plus loin avec le Supramental. Il y a deux choses essentielles à savoir sur ce mystère, il attaque l'entropie dans le corps physique (mais c'est très très lent quand même) et il commence à produire une connaissance par identité, tout à fait merveilleuse. C'est d'ailleurs elle qui m'a permis de VOIR les matrices conceptuelles, et leur emprise sur les civilisations. Je sens que la Terre ne peut pas s'unifier dans ces conditions. La complexité des échanges entre 27 nations rend l'Europe impossible, l'acharnement au devenir (ou au matérialisme car cela revient au même) des U.S.A est dangereux, les deux Afrique sont complètement retournées, l'Inde va devenir orgueilleuse en raflant la 5° place économique à la France, et la suite pour la Grèce, la Catalogne, la Corse, l'Ecosse, l'Ukraine, la Corée du Nord, le Vénézuela... Ce pauvre Yemen, l'arrogance de certains Emirats, les espèces qui disparaissent et les pollutions industrielles qui ne sont pas enrayées. Et puis l'échec de la démocratie car le suffrage universel ne garantit pas le meilleur choix, plus les peuples auront peur, plus ils voteront mal... Bref, Onfray a raison, le Titanic coule, on est dessus, on boit du champagne pour fêter ça, on ne va pas se laisser berner par un simple naufrage quand même! Un siècle égale une seconde à la véritable échelle du système solaire, alors l'Histoire, hein, ça va et ça vient, ce n'est pas la peine de dramatiser. Etre prêt à ficher le camp, pour les plus jeunes, il y a de la place en Asie, beaucoup de place, et la pensée n'y fait pas encore la loi. On y respire avant de penser, c'est l'état d'avant la chute, sans blague.
1 Janvier 2018
Avec la mode de dénoncer le harcèlement sexuel, le machisme est en train d'être mis à nu, le mâle est un salaud que rien n'arrête dans son besoin de jouissance, ah bon, il a fallu attendre l'affaire du producteur d'Hollywood pour s'en rendre compte... Le monde extérieur me parait de plus en plus faux, la capacité de tricherie du mental est infinie, j'ai des bouffées de compassion pour les animaux qui souffrent des actions humaines, je vais sans doute aboutir à la conclusion que changer à n'importe quel prix vaut mieux que cette déliquescence. La pensée est en train de pourrir, c'est bizarre, la liberté d'expression devient conditionnelle, tout peut être dit ou presque, et le presque augmente considérablement, la censure propre sur elle fait des ravages. Admirons les Croisés du 12° siècle, mais n'allons surtout pas chercher la moindre analogie avec le djihadiste sincère (1 sur 10) qui y croit vraiment à son sacrifice, le monde extérieur lui étant apparu comme il m'apparaît, une formidable poussée de différentes soifs destructrices (pouvoir, richesse, jouissance). Se dire qu'il y a Dieu derrière tout ça est rassurant, mais il y a quand même trois galaxies de distance entre la vision de Sri Aurobindo et celle du type qui saute en tuant des mécréants et qui croit donner des leçons. Comme je reste amoureux de l'intelligence (le Divin en est jaloux en quelque sorte car il m'arrive de passer par des périodes « bébé »), je risque d'avoir encore des choses à dire, mais il ne faudra pas s'attendre à du gratifiant, of course. Non, je plaisante, le Divin me fait passer par des périodes bébé pour baratter le cerveau, et, quand l'intellect revient, il est plus performant qu'avant. Sacré supramental, on n'est pas prêt de le récupérer, my God.
Nouvelle prise de conscience sur la pertinence de « Politique du Dao » que j'ai vraiment écrit avec beaucoup de soin. Oui, la personnalité humaine ne s'aligne pas forcément sur l'intelligence, il faut continuer de parler de cet écart quasi infranchissable entre la bête et l'esprit... Desproges, par exemple, était vraiment supérieurement intelligent et d'une grande sensibilité, mais son perfectionnisme était maladif et il se réfugiait dans la séduction. Pour moi, je continue de penser que le mélange de mental et de nature est une expérience parfaitement aléatoire, et qu'elle ne réussit que rarement. Un nouveau toubib est en train d'asséner ce que l'on ne veut pas voir. Beaucoup de maladies mortelles proviendraient d'un choc innassimilable (encore un qui enfonce le clou), moralité, se débrouiller pour faire coïncider un minimum la personnalité (et ses compulsions) avec ce que l'on appelait autrefois « le jugement », ce pilote automatique du moi qui le maintient dans la réserve et le continu constructif, et qui surplombe, tant bien que mal, aussi bien le corps que l'instinct et le subconscient. Le libre arbitre serait ce programme aléatoire qui permet au jugement de naviguer, mais le jugement a besoin d'une image de soi... qui cadre rarement avec la poussée des pulsions.
J'ai craint longtemps que l'homme se détruise de mon vivant ou un peu plus tard, mais maintenant ça ne me préoccupe plus. Même avec le supramental, je ne suis pas au niveau de juger l'univers dans sa tentative totalement fantaisiste de vouloir COORDONNER ce qu'il y a de plus subtil avec ce qu'il y a de plus épais. La conscience de l'os ne veut pas évoluer, tandis que le mental le plus ordinaire peut imaginer des mondes en accélération rapide vers la perfection. Mascarades et fariboles de la pensée, assujettie au corps qui pourrira très vite.
Quand un malheur arrive et qu'on ne sait pas d'où il tombe, on s'empresse d'en inventer un tout neuf, de toutes pièces, pour se sentir responsable de ce lisier... J'exagère, le malheur qui arrive tout seul déstabilise et on en profite pour faire des erreurs qui le décorent et donnent une légitimité à la souffrance, tout est là, trouver une cause à la souffrance, imaginaire bien entendu, et hors de soi, cela va de soi. Il y a une jouissance dans la récrimination, une véritable saloperie, mais bien peu s'en rendent compte. Ils sont prêts à tout pour pouvoir récriminer, ils deviennent des experts du sabotage relationnel. Il y a donc des secondes natures perverses qui correspondent aux fonctions psychologiques et elles s'installent quand on ne sait plus utiliser correctement Mars et Vénus, Jupiter et Saturne, qui dictent des modes de perception dans un univers psychologique qu'ils se partagent. La vision supramentale est simple, l'accès à la complexité est naturel, la complexité n'est donc plus compliquée ! C'est un ordre, tout simplement. Cet ordre apparaît spontanément, mais le désordre en fait partie, car les forces complémentaires sur le plan des principes deviennent opposées et rivales dans la Manifestation, tout en se mélangeant dans des amalgames furtifs. (Les physiciens qui se spécialisent dans la mécanique des fluides sont exaspérés par les formes imprévisibles que les turbulences adoptent sous l'effet de la convection, soit le rayonnement d'un changement de température dans un liquide quelconque. Oui, je me tue à le répéter, l'échelle du temps où se passent vraiment les échanges de toutes sortes est peut-être encore bien plus rapide que celle qui nous fait générer des pensées, dont le rythme est ralenti par l'épais cerveau. Aucune pensée ne s'immobilise, c'est déjà du très vite, mais au niveau de la matière, notre fréquence mentale, ça lambine.) C'est d'une simplicité enfantine d'admettre que tout se mélange et qu'il suffit de trouver les couleurs fondamentales, mais le mental ne peut fonctionner de cette manière-là que chez les personnes qui l'ont complètement détaché du vital, lui qui passe son temps à brouiller les pistes avec les projections (certaines attentes sont illégitimes du côté de Jupiter et Vénus comme certains mouvements partant de soi sont illégitimes avec Mars et Saturne).
La connaissance est déposée partout, mais l'aveuglement préside, et je dois l'accepter. Cela me fait parfois soupirer, comment font-ils pour passer à côté de la conscience qui leur tend les bras? Le plus probable, c'est que les mondes au-delà du désir ne les intéressent pas, et le « désir d'être soi » est fondé sur la nature tant que le basculement vers « le chemin du retour » n'est pas opéré. Même parmi les penseurs, la moitié est manipulée par la vanité, soit l'idée qu'ils sont meilleurs que les autres. La plupart finit sectaire, la haine prête à se jeter sur les pairs qui voient les choses différemment. C'est à ce genre de considérations que l'on comprend le risque extraordinaire que court la nature en passant de l'instinct au mental, qui fabriquera des fanatiques en série parmi ceux qui « croiront » au pouvoir de la pensée. J'ai commencé à l'évoquer, la pensée qui s'empare du moi (et coupe de l'incarnation) est aussi dangereuse que la pensée au service de l'instinct. En réalité, la seule pensée vraiment positive est celle qui renonce à elle-même et comprend ses limites. Bref, pour se consoler, nous n'avons qu'à dire que c'est normal que le Divin ne soit pas pressé: il est éternel. Allez, bonne année dans l'unité de la souffrance/jouissance (et sans sadomasochisme of course).
4 Janvier 2018
Le problème, c'est que l'ostracisme sévit aussi dans la spiritualité, ce qui signifie que le mental est toujours plus puissant. Les disciples de Sri Aurobindo, — rien n'est plus facile que de se déclarer tel, sont les plus fantaisistes de tous les chercheurs spirituels. Ils jouent habilement, comme les tantriques, sur la valeur de la vie, que leur maître défend, ce qui les autorise à un certain laxisme sur de nombreux plans. Mais Sri Aurobindo n'a pas justifié la vie pour elle-même, ce qui est la pure thèse matérialiste, comme peuvent la défendre des esprits supérieurs sachant rester intègres au sein de l'immanence sacrée, comme Onfray et avant lui Démocrite. La vie doit être défendue par les yogis supramentaux pour la transformer et non pas pour la légitimer telle qu'elle est. Dans cette mesure, la méfiance vis-à-vis du désir est à conserver pour les hommes et les « nouvelles femmes », qui peuvent dissocier la sexualité de l'amour. Mais en termes de diagnostic psychologique, la plupart des disciples aurobindiens sont des uraniens, c'est-à-dire des êtres humains au karma déjà bien chargé du fardeau de la liberté. Les uraniens ont horreur des contraintes, agissent de leur propre chef, ils ont tous une personnalité très différenciée et le terme de soumission les fait plutôt flipper. Ils préfèrent donc lire les œuvres fascinantes qui sortent complètement de l'ordinaire des dogmes religieux et des recommandations doctrinaires, que de se pencher sur « Lettres sur le yoga » par exemple, où Sri Aurobindo ne cesse de rappeler que le passage ne peut s'effectuer si le Divin n'est pas au centre de toute l'activité psychologique, ce qui est nécessaire pour détourner, alors que c'est long et très pénible, l'âme charnelle de sa domination — prendre du plaisir et l'imaginer.
Néanmoins, la puissance de l'âme charnelle est telle que la chasteté ne porte pas forcément de fruits si elle s'accompagne de trop nombreuses frustrations, comme un amour vrai peut fonder dans la reconnaissance de la vie et de son potentiel magique de transformations évolutives. Chaque contexte modifie la valeur des principes tels qu'ils sont énoncés sur la carte, et de nombreux bramacharias ne servent à rien (quand ils ne renforcent pas l'ego spirituel), comme de nombreux abandons sincères à la force de la Vie peuvent mener à reconnaître la nécessité de faire marcher ensemble l'âme charnelle (trop désirante) et l'âme intelligible (qui surplombe les faits pour cultiver des dénis). Une fois de plus, c'est le terrain, me semble-t-il, qui fait la loi, il y a des moments pour « Vivre » et d'autres pour s'enfoncer à l'intérieur de soi-même dans une exigence absolue, qui exclut le recours à l'autre, aussi bien sur le plan vital que mental. Je défends donc becs et ongles l'idée du « chantier » du moi, chantier sur lequel il est souvent nécessaire d'abandonner la construction, même s'il n'y a plus que le toit à poser, parce qu'il aura fallu attendre ce moment-là pour se rendre compte que le terrain n'était pas le bon. En général, « on » continue quand même. Seuls, les êtres possédés par l'intelligence du mouvement savent se raviser quand cela est nécessaire. Les autres pensent aux efforts qu'ils ont dû faire pour creuser les fondations et monter les murs et les cloisons, alors ils préfèrent finir le logement dans lequel ils pourriront, que de reprendre la route sans rien regretter de leur précédent échec. C'est la pose de la charpente qui les a éreintés, alors même si le flash se produit qu'ils n'ont rien à faire ici et qu'ils feraient mieux de déguerpir, ils posent les tuiles quand même pour se féliciter d'être allés jusqu'au bout, et ils s'installent !
Il n'est jamais trop tard pour faire machine arrière, et les mariés ou mariées qui s'enfuient en courant avant d'entrer dans l'église pour l'échange des anneaux, contrairement à une opinion répandue, rien n'indique qu'ils fuient. Il faut même un sacré courage pour planter tout son beau monde à ce moment-là. Les flashs de lucidité absolue ne proviennent pas du mental « constructeur », mais d'une fenêtre qui s'ouvre inopinément donnant sur la vraie vision de l'avenir, celui qui n'a pas été conçu, et qui fera foi. Renoncer au dernier moment, trahir, tous ces mouvements ont parfois une vraie légitimité. La loyauté, la fidélité, okay d'accord, mais à qui, à quoi être fidèle, si seul le Divin ne trompe pas?
5 Janvier 2018
La connaissance avance énormément depuis quelques jours, alors que j'ai passé près de deux mois sans aucune intensité mentale. Mais quand le besoin de réfléchir revient, avec celui de s'exprimer, il est plus puissant, plus enraciné dans une réalité plus vaste. Je concède que les choses vont dans un sens assez « dérangeant » si je suis les progrès de ma perception: l'homme n'occupe qu'un tout petit segment de la réalité, et l'humain fait différents types d'erreur en ne comprenant pas quelle est sa place. La première erreur, la plus courante, consiste à inventer de toutes pièces la réalité manquante. A défaut de découvrir la vraie, le mental invente une réalité purement illusoire, mais qui lui donne l'impression de « contrôler », de « maîtriser » beaucoup de choses. La seconde erreur consiste à trouver tous les moyens imaginables pour décréter que le peu de réalité que l'on connaît est largement suffisant pour permettre de se sentir épanoui, il suffit d'organiser le milieu correctement, d'en tirer parti, et d'oublier toute question profonde. A ce propos, je trouve vraiment que les boxeurs de ma catégorie sont trop peu nombreux. Les esprits vraiment prêts à dénicher les manœuvres de l'intelligence partout sont vraiment rares. Heureusement qu'il y a eu René Guenon, et, aujourd'hui, François Jullien démontre, si l'on veut, qu'il n'y a pas qu'une seule manière de percevoir le réel (la nôtre depuis Aristote), puisque les chinois voient les choses autrement. Ils n'ont pratiquement pas besoin de concepts, tant ils se fient à l'observation pour avancer vers les décisions. Certaines tribus d'Amérique centrale (voire d'autres lieux évidemment) ont une culture avare mais propre pourrait-on dire, et, bien que l'on ne le perçoive pas du haut de notre Histoire, y naître peut constituer une opportunité pour l'âme qui prendra confiance dans l'incarnation, la culture du conflit y étant absente. Je me sens, cette fois, dépositaire d'une avance de plusieurs siècles sur mes contemporains, et je dis bien dépositaire, car c'est le supramental et lui seul, qui remplace la perception conceptuelle par une sorte de nouveau « regard », puisque les choses sont vues au lieu d'être pensées, arrangées, structurées pour appartenir à une vision du monde...
Pourtant, l'esprit logique reste fidèle au poste, et peut-être même qu'il devient encore plus rigoureux. J'ai réalisé soudain, une intuition brève et profonde, que mon petit discours sur « la maison à abandonner alors qu'il ne manque que le toit à poser » correspond forcément à un des hexagrammes du yi-king. Je m'y suis intéressé cette vie-ci, mais j'ai préféré réorganiser totalement le tarot des 22 arcanes avec l'aide du supramental. De toute façon, je me tue à le dire, les principes vraiment PREMIERS ne sont pas très nombreux, tout le reste n'est que leur mélange. Je n'ai sans doute pas terminé le travail à faire dans cette même direction, mais j'ai déjà été si radical, en ne préconisant que l'essentiel, être yin ou yang, observer les gunas, savoir laquelle des sept fonctions alchimiques prend le devant de la scène dans le présent, que j'ai mis tout le monde au pied du mur. Moralité, tous les faux chercheurs sont écœurés, ils ne peuvent plus tricher, ils ne peuvent plus se donner le change avec de belles paroles et des commentaires snobs. Quant aux éveillés qui s'enferment dans leur illumination, il n'en manque pas non plus, car pour le moment, nous ne sommes pas nombreux à saisir la puissance du supramental, et à pouvoir faire la différence avec les autres « réalisations », qui restent assez pauvres par rapport à ce qui se produit dans la transformation supramentale physique, le cerveau commençant un autre fonctionnement, que ni le soi ni le surmental n'autorisent.
J'aurai au moins servi à cela, ramener toute spiritualité au travail intérieur à accomplir, et non à la discussion des canons, des sutras, des squelettes conceptuels des doctrines, qui ne sont que des friandises pour le mental qui ne veut pas mourir, et s'arrangera donc pour en tirer une fausse stratégie de changement, pour rester à la surface des choses avec des jongleries.
6 Janvier 2018
Ce que l'on veut dissimuler, c'est justement le lieu des faiblesses ou des incapacités, ce dont on n'est pas fier, mais cette politique échoue. Une personne qui se débrouille pour donner une belle image d'elle-même sera méprisée une fois démasquée, alors que l'individu qui « avoue » sans cesse ses difficultés, même s'il semble vulnérable, finira par attirer confiance et sympathie. Il ne s'agit pas de tout déballer en permanence, mais d'abandonner un certain triomphalisme, qui consiste, systématiquement et pour toute l'espèce, à gonfler ses mérites et ses succès, et à minimiser erreurs, inconduites, fautes, faux pas, chutes, etc. La « pratique » du yoga supramental n'a rien à voir avec les beaux discours et les idéaux et il devient impossible de se cacher quoi que ce soit sur soi-même. Rien ne dit que les « principes » tiennent la route en permanence dans la navigation à vue qu'est le yoga supramental. Il y a trop de choses à voir de près, trop de pressions de la part de forces surhumaines pour prétendre pouvoir s'en tenir à la même stratégie, alors que l'avancée est extrêmement rapide et fait changer la perception des choses à toute vitesse. C'est donc l'honneteté qui doit primer, et, en ce qui me concerne, j'étais prêt à préférer vivre selon ma propre loi que continuer à obéir à des principes qui ne me concernaient plus, après sept ans d'obéissance. Il se trouve que le Divin m'a donné « carte blanche » et que j'ai avancé selon mes propres besoins avec un retour à la sexualité après huit ans d'abstinence absolue, ce qui m'a mené jusqu'à l'extraordinaire aventure des « artifices génétiques » en janvier 2001. Alors que je venais de « tout » envoyer paître, ma compagne et son désir d' enfant récurrent, ma soeur me persécutant sur un héritage, et une petite maison acquise par chance (elle en avait beaucoup) par ma mère. Bref, j'ai voulu sauver le yoga supramental en laissant tout derrière moi, en partant à Mayotte, où j'ai vécu des choses absolument incroyables, dès mon arrivée. Là s'est passé un grand tournant, un immense tournant. En effet, en 2000, tout mon corps passait par des périodes de malaise imprévisibles, avec des sensations très désagréables, très certainement la « conscience de la mort » s'avouait dans les cellules, à quarante-neuf ans. C'était l'enfer, tout le corps suintait un mal-être global, ça durait des heures, j'étais dépossédé de moi-même. Il est aujourd'hui certain que le supramental ne pouvait pas continuer dans cette substance matérielle du corps biologique répliqué depuis des milliers de générations en stockant des informations inconscientes par millions. Les gènes ont donc explosé, pour ouvrir un nouveau chemin au supramental. Le yoga supramental n'est pas une aventure qui découle d'une notice apprise par cœur, mais quelque chose qui plonge dans d'innombrables dimensions INCONNUES.
Que ces dimensions inconnues soient présentes sans qu'on les aperçoive, c'est à la mécanique quantique d'en rendre compte. Elles sont là, mais pour les voir, il faut atteindre par la conscience une nouvelle condition. C'est donc sans doute « l'être psychique » qui soudain, par une opération indéfinissable, utilise le corps autrement, ce qui ouvre COMPLETEMENT les fenêtres de la perception. C'est mystérieux, et c'est certain que les matérialistes profitent encore du peu d'expérimentateurs pour affirmer que ces perceptions sont des hallucinations alors qu'elles découvrent des sphères principielles. Une fois ce monde pénétré, une fois que l'on y sera accroché (pour moi c'est le 17 mars 1978), toutes les perceptions peuvent changer, tandis que des prises de conscience fantastiques (il n'y a pas de meilleur qualificatif pour évoquer la surprise et l'aspect irrationnel des découvertes) peuvent se produire. Or, comme il y a un écart absolument considérable entre les dimensions nouvelles perçues et le monde dans lequel elles n'existent pas tant elles sont cachées, le moi est obligé de faire une navette rapide et aléatoire entre les nouveaux objets perçus, comme les identités divines, le champ imprégné de supramental, et tout le reliquat de l'individu dans son milieu ordinaire, ce sujet qui possède sa logique, son corps, son hérédité, sa personnalité, c'est-à-dire son caractère, et qui supporte l'intrusion divine. Il se trouve que la puissance de tout ce que l'on aura été avant la transformation ne peut pas assimiler, ni intégrer rapidement les contacts avec les dimensions supérieures qui se présentent. Il y aura donc des degrès différents de conquête selon les capacités d'adaptation des individus. Il y aura aussi le karma à résoudre, avant d'aller très loin, car l'illumination ne le dissout pas entièrement. Bref, non seulement pour le moment le Supramental est presque inaccessible, mais une fois « touché », les difficultés ne font que commencer, car toute l'histoire de la vie se refait à l'envers, bonjour les dégats. C'est en quelque sorte la preuve par neuf qu'il s'agit vraiment d'un autre monde que le monde « spirituel » connu, recensé, établi.
C'est-à-dire qu'il faut prendre au pied de la lettre la définition de Sri Aurobindo: c'est le début de l'hémisphère supérieur.
Or, c'est une véritable révolution, qui va par exemple à l'encontre de certains canons spirituels élevés. Par le passé, il était entendu que certains maîtres dits parfaits pouvaient perdre le contact avec le monde extérieur, embrasés par leur amour pour Dieu (source Meher Baba). Ce n'est pas la direction de l'évolution. Grâce à Sri Aurobindo et Mère qui ont réconcilié le Divin et le vie, le bhakta accompli restera fidèle au poste dans la vie, et verra le Divin s'emparer de son enveloppe charnelle. Dans le même ordre d'idées, et de l'autre côté exactement, il était dit que le Parabrahman, le soi du soi, était l'ultime réussite spirituelle. Il se trouve que Sri Aurobindo a traité de lâches les maîtres qui voudraient se diriger vers cette dimension, une fois le Soi atteint, pour suivre la doctrine archaïque du Vedanta. J'ai fait l'expérience du Parabrahman en 1984, quelques secondes seulement, mais j'étais trop jeune, avec toute cette force de vie en moi, pour trouver intéressant de m'y confiner. J'avais aboli le sujet à un point inimaginable, et j'étais complètement désidentifié de moi-même, tout en étant complètement le monde extérieur, jusque-là ça va, mais le fait d'être totalement identifié à tout (en l'occurence ce bœuf qui tirait une charrette ne pouvait être que moi-même) n'avait plus aucun sens. Zéro multiplié par zéro égale un infini négatif ! Dans d'autres voies encore, il était possible de se donner le change avec des « siddhis » et ceux qui les acquéraient se croyaient les humains les plus parfaits de la planète... et se prenaient pour des dieux. Tout cela, ce n'étaient que les enfantillages les plus performants du singe devenu conscient. Le supramental, ça fout aussi la pagaïe au sommet des hiérarchies spirituelles et c'est normal: c'est le début de l'hémisphère supérieur, c'est-à-dire du supracosmique.
Si c'est donc du supracomsique, et j'y reviendrai, c'est un monde hors du temps lui-même, et qui se moque donc de la durée (les trames qui constituent la matière ne peuvent être modifiées qu'à partir d'une vitesse supérieure à celle dont l'espace-temps dispose). Le supramental parviendra ou non à s'immiscer dans la vie humaine, mais cela n'a aucune importance mon cher Saturne, qu'il y parvienne en trois cents, trois mille, ou trois cent mille ans. C'est de l'autre côté, un point c'est tout. Là où l'éternité rote tous les quinze milliards d'années un nouvel univers dans un coin vide de l'infini. Rien à voir avec quoi que ce soit de concevable. Bon, je ne veux pas vous assommer non plus. C'est la pause café.
7 Janvier 2018
Il est devenu clair pour moi que le mental prend très souvent le rôle de l'inquisiteur, pour d'innombrables raisons, ce qui permet au sujet d'avoir l'impression d'avoir raison. Bien que seul Jésus et ses meilleurs disciples aient compris au cours des âges que le jugement de valeur était une projection, aujourd'hui plus que jamais le jugement de valeur triomphe et obéit à certains codes, comme le politiquement correct (indignation des journalistes nantis face à toute position plus réaliste que la leur) et le spirituellement correct pour les petits groupes sectaires des chercheurs (soi-disant) de la vérité. Non seulement les obsédés de la non-dualité se regroupent en se tenant à l'écart de la vision aurobindienne, mais, parmi les thuriféraires de Sri Aurobindo, il n'y a pas d'entente, avec de petits blocs hermétiques. Comme les Auroviliens divisés en factions, les fidèles de Satprem qui mettent un point d'honneur à le surestimer et à ignorer l'hypothése de nouveaux mutants, ainsi que les suiveurs de Nolini, le premier ashramite à proclamer que, Mère ayant échoué, le projet supramental était reporté pour la terre entière, ce qui m'interdit donc d'être ce que je suis et de faire ce que je fais. Nous tenons le principe de déni du réel, c'est-à-dire l'opinion qui se détourne des faits avant même de les avoir observés, cette terrible tare humaine à laquelle Michel Onfray s'attaque depuis quelques années. Avec son exécution de Freud, il a enfin trouvé la vraie perspective pour démystifier les héros, car les héros ne survivent que si leur part maudite, ou en tout cas leur ombre, reste cachée. Le déni du réel est donc pratique, c'est le couteau suisse de la pensée, de la matrice. Les faits désobligeants, qui ne cadrent pas avec des opinions préconçues érigées en système, ne sont pas pris en compte. En revanche, construire une glorieuse pyramide avec quelques considérations incontestables, permet de chérir son héros, de l'envelopper de cette pureté idéale sans laquelle il ne mériterait pas ce piédestal. S'il faut pour cela détourner les yeux de certains événements, qu'à cela ne tienne. C'est justement cette politique « idéaliste » qui est en train de se casser la figure partout. Plus personne n'a envie d'autoriser la lumière à cacher l'ombre des grands de ce monde. La chute de D.S.K parait déjà anodine par rapport à l'ignoble conduite du producteur américain Weinstein. Et je crois que ce n'est pas fini. J'avais d'ailleurs averti tout le monde que le transit de Pluton en Capricorne allait faire des ravages au sein des « autorités ». Cela continue.
Au lieu de me plaindre de la politique du déni, je ferais mieux de me féliciter de ne l'avoir jamais pratiquée. N'ayant toute ma vie fait qu'une chose, obéir au nécessaire, je suis devenu mon propre chantier de transformation, prêt à tout pour avancer. J'ai profondément modifié ce qu'aurait dû être le cours de ma vie si je ne m'étais pas attaqué de plein fouet à ce qui pouvait m'empêcher de me réaliser. J'ai fait des efforts surhumains pour me soustraire à l'envoûtement du présent, qui me privait de toute volonté, même une fois l'illumination de la libération atteinte. J'ai passé outre mon hérédité et mon thème natal pour mettre au pas ma sensualité, je suis resté classique dans le fond, très classique, profondément sourcilleux et scrupuleux, sans quoi le monde supracosmique m'aurait laissé de côté, d'ailleurs rien ne dit que les éveillés y soient prédestinés : ils ont travaillé jusqu'à la libération, et n'ont pas forcément envie de continuer à faire du zèle, zèle sans lequel le supramental se dérobe, car un nouveau chantier s'ouvre.
Je ne dis pas cela pour me vanter, mais bien pour établir qu'il est possible de changer en profondeur « la nouvelle donne » de l'incarnation présente, même une fois éveillé. La naissance oblige à s'habiller d'un caractère imparfait, mais qui fait pleinement son office dans une vie ordinaire, et certains chocs laissent des traces profondes qui altèrent le fonctionnement cérébral. La sadhana est donc une sorte de cerise sur le gâteau pour les plus exigeants, capables de se frayer un chemin à la machette parmi les opportunités et les contraintes de l'existence, s'ils sont prêts à revivre leur passé pour y dénicher des faux plis, et à renoncer aux ambitions courantes qui rendent le présent esclave des images de l'avenir. Mais elle est d'une telle exigence qu'il existe un fossé entre ceux qui la suivent et ceux qui font semblant, et qui ne font que décorer leur existence ordinaire de considérations métaphysiques. J'ose avancer que l'être humain est « programmé » pour prendre de mauvaises décisions. La vraie décision ne peut pas découler du passé, et cela déroute complètement ce pauvre cerveau animal, ce qui conduit à reconnaître que seules les personnes qui ont une intuition de leur être psychique prennent les bonnes décisions. Elles servent alors leur être au lieu de continuer à être au service de cette âme charnelle toute puissante, qui, depuis le bébé, n'a cessé de renforcer son emprise sur le sujet. Il est vrai qu'à trente ans une première décantation est possible, mais pour la majorité des êtres humains, les bifurcations sont ratées (30 ans, 40 à 42 ans, 57 à 60 ans) car le moi poursuit sur sa lancée originelle, soit la formation d'un caractère donné qui se fixera.
Il existe toute une catégorie d'êtres humains coincés entre la nature, leur caractère, et la vision spirituelle. Ils ne sont plus soumis à la mécanique, mais ne parviennent pas à l'engagement absolu. Ils remplissent les rangs des gourous à succès, qui, s'ils ne sont pas des charlatans, les branchent sur des énergies positives, qu'ils gaspilleront ou utiliseront comme marchepied selon les individus. Aucune de ces démarches ne dépend du supracosmique, la magie cérémonielle enveloppe le darshan de Sri Tathâta, encore un mythe en marche de canonisation puisqu'il est préconsisé par ses dévots d'abandonner toutes les autres références (inférieures ça va de soi)... Pour moi le darshan d'Amma est plutôt une drogue qu'autre chose, un énorme shoot de morphine, tellement puissant que le sujet peut repartir sur des bases plus saines s'il est vraiment sincère. SInon, il voudra sa dose régulière naturellement. Il reste mère Meera, une entité non humaine, qui interface peut-être son propre niveau d' énergie avec le supramental. Personnellement, je continue ma route vers l'Esprit, que j'aime, et que j'ai enfin la chance de pouvoir rencontrer physiquement, sans pouvoir donner de sens à ce que je vis, si ce n'est justement d'accepter de supporter l'intrusion de l'énergie originelle. Le supramental triture tous les corps, en suivant sa logique à lui. Hier, par exemple, les cuisses et les mollets étaient si écrasés que c'en était douloureux, mais c'est resté supportable, ça s'arrête plutôt que de désorganiser la perception d'ensemble quand la douleur dure trop longtemps.
Alors que la chenille devient papillon à son corps défendant, la transformation supramentale oblige à une responsabilité harassante vis-à-vis du corps et du caractère, et il faut en plus gérer l'incompréhension dont on est l'objet, tant de personnes sont gênées, parfois, par votre seule présence, ou plus généralement par le discours, dans lequel il ne subsiste que très peu de projections par rapport à tout ce que la matrice oblige à penser chez tous les humains qui ne basculent pas vers la radicalité spirituelle. Il reste à ces derniers, aux chercheurs, à se débarrasser de leur propre école pour avoir une chance de comprendre que le supracosmique s'avance. Ce qui devrait mettre fin à la guerre entre les démons et les dieux, les religions et les humanismes, puisque toute la terre est infestée de pouvoirs occultes qui veulent s'en emparer. Dans l'ensemble des forces actuelles, peu d'individus veulent se soumettre à l'énergie supracosmique, ce qui rend le mouvement extrêmement lent. Mais si nous avons des siècles devant nous tous les espoirs sont permis, même celui de voir arriver la vie divine dans des monastères tibétains, et l'agenda dans les quelques couvents survivants, tandis que les chinois devraient finir par apprécier, dans quelques siècles, les principes de la Manifestation d'un certain français respectant leur bon sens et leurs allergies aux envolées idéalistes, aux hypothèses esthétiques et aux digressions masturbatoires. Infuser les énergies supracosmiques sur terre est une entreprise toute nouvelle, et qui ne peut pas être prise en compte par les représentants officiels des cultes monothéistes, bouddhistes et taoïstes.
Seul l'advaita s'en rapproche, encore faut-il qu'il incorpore que le contact avec la Mère des mondes est possible, ce qui ne peut s'opérer que par la reconnaissance de Sri Aurobindo, et de l'Agenda de 1956 à 1973. Bref, si nous sommes pressés, nous attirons des déceptions inutiles. Tout cela va très lentement, y compris la transformation physique. Il faut s'y faire, saluer la perfection du projet et le servir, mais en mesurer mesquinement les résultats indique simplement qu'on n'a pas saisi l'écart entre le supramental et tous les autres pouvoirs spirituels, qui laissent la matière intacte. A moins que l'on me montre un « corps de gloire » vivant, je continuerai de considérer que l'énergie supramentale tente quelque chose de neuf, que la mère de Pondichéry a inauguré.
8 Janvier 2018
Je ne trouve pas pour autant que les autres voies soient inférieures, car la vision supramentale n'est plus d'ordre hiérarchique. Elle obéit à un autre principe de perception globale, ce qui veut principalement dire, dans l'immense champ de l'évolution, qu'une personne qui a peu de moyens mais fait de son mieux est plus proche du Divin qu'une personne aux nombreux talents et qui ne bascule pas vers la reconnaissance de sa dette pour le Divin, ou qui se l'approprie. Car la dette est vraiment là, d'abord cachée, puis quand le moi comprend qu'il est porté par le Tout, il sent qu'il lui est redevable de sa propre existence et il est prêt à se méfier de ses croyances. Le merveilleux travail commence, descendre de son piédestal pour rejoindre le vrai présent, celui dans lequel c'est le corps qui est embarqué, et c'est avec une immense satisfaction que je vois de nombreux éveillés, parfois en contact avec le public grâce à la revue 3°millénaire ou des tv privées comme Hym-media, rappeler la simplicité de la voie, revenir au moment vrai, celui qui nous embarque dans le flot de l'Histoire. C'est là que les choses se passent, mais ce moment présent et pur n'est pas celui de la pensée, qui l'interprète avant de le vivre. C'est autour de cette seule vérité que s'articulent toutes les voies, sur la terre, qui ne sont pas à proprement parler mystiques, mais qui tendent simultanément à une connaissance de soi et à une réintégration dans la réalité immuable. Il est pour moi assez incompréhensible que des personnes qui refusent de passer par là s'intéressent au supramental, lui qui ne peut se manifester qu'une fois le mental totalement pacifié parce que le contact authentique avec le présent absolu aura remplacé celui des projections perpétuelles.
Le problème est donc celui de l'usurpation. Un maître du Soi impersonnel peut très bien n'avoir qu'une dizaine de disciples tandis qu'un simulateur, parce qu'il s'appuie sur des forces occultes, peut avoir des disciples dans le monde entier. Les maîtres ne sont pas tous authentiques, et parmi ceux qui le sont, beaucoup surestiment la portée de leur enseignement, mais c'est très rarement intentionnel. C'est simplement qu'ils continuent de trop « généraliser » à partir de leur propre expérience, et ils ont donc tendance à rendre obligatoire leur propre cheminement, en toute sincérité, parce que c'est ce chemin-là qui leur a réussi. Le supramental a tellement de puissance qu'il permet de supporter tous les ostracismes pour la bonne raison qu'il voit spontanément l'intention vraie qui anime les systèmes qui se refermeront sur des manœuvres, des formes, des interdits et des règlements (voir essais sur la Gûitâ, un livre parfait). Le supramental voit la part de vérité partout où elle émerge, avant qu'elle ne devienne totalitaire, ce qui arrive nécessairement par la création du dogme qui garantit l'expansion de la doctrine. C'est un cercle vicieux. L'intention pure est toujours plus profonde que toute mise en forme conceptuelle qui devra en rendre compte, bien que la Vie divine échappe à cette règle puisque son niveau d'inspiration n'a plus rien à voir avec celui des avatars. Même sil faut un certain entraînement pour faire la différence entre les plus grands textes sacrés et l'œuvre de Sri Aurobindo, un jour il apparaît distinctement qu'il n'a pas d'équivalent. Mais à ce moment-là, le mental peut l'emporter quand même. Le supramental n'est réel que pour ses inventeurs, dira-t-il ! Le présupposé : le Divin reprend possession de la Matière, ne sera que pure hypothèse, tant qu'il n'y aura pas de « mutants » confirmés. On ne peut pas attendre grand chose d'un mental qui n'a pas la foi, et les « informations objectives » ne plaident pas en faveur du mouvement. La « Mère » est restée une personne énigmatique, avec son mariage bizarre qui l'a uni à un homme qu'elle considèrera comme un adversaire haut placé du Divin, et une maternité qui, de l'extérieur, semble avoir été négligée. Satprem n'a pas « réussi » et il a été fort contesté par ses proches à la fin de sa vie, proportionnellement à un mythe qui en fait, à tort, un héros, mais il s'est accompli quand même et a bel et bien sauvé l'Agenda.
L'humain pensant ne peut prévaloir sur le Divin lui-même, et il continuera donc de se produire l'événement suivant: des hommes et des femmes méprisés par tous les autres, ou rejetés pour leur radicalisme, leur profondeur, leurs exigences de vérité, leur franc parler, leur intégrité, trouveront l'éveil en catimini, — seuls contre tous. Et après avoir subi l'opprobre générale, dix, vingt, trente, quarante ans, ils deviendront des héros adulés par les enfants de leurs contempteurs. C'est le schéma classique. Le rejet obstiné, le plus longtemps possible, puis l'admiration obséquieuse les générations suivantes. Enfin, la déification quelques siècles plus tard pour certains. Il est évident que ce schéma est profondément défectueux, mais il est systématique. Bien sûr, la forme peut varier quelque peu. Mais nous ne sommes pas sortis de l'auberge avec l'islam. Si le Prophète n'a pas été déifié, le Coran est considéré par les musulmans comme la parole même de « Dieu » qui l'aurait dicté. Il ne faut pas être grand clerc pour soupeser les menaces qui découlent de cette affirmation. La situation n'est pas rassurante. La première issue véritable du monde mental est constituée par l'éveil, qui ne concerne pour le moment qu'un ou deux terriens seulement sur un million. Il existe naturellement des êtres humains qui respectent les lois cosmiques spontanément, sans même en avoir conscience, et, quel que soit leur nombre, ces terriens-là ne seront pas nuisibles et se rangeront en grande partie du côté des leaders évolutifs. Mais il reste plusieurs catégories d'individus pour lesquels toute transformation est une menace posée sur leurs privilèges, même chez certains spiritualistes, qui ont des institutions à défendre. Demander à un jésuite de passer de Jésus à Sri Aurobindo ou à un brahmane de passer de Sankara à la mère de Pondichéry, ce sont des opérations difficiles tant le « moi » a besoin de s'identifier à des repères qui le rassurent.
Je ne peux pas m'empêcher de considérer qu'un conflit se prépare entre les « terriens évolutifs » et les autres, que l'Histoire devrait condamner avant la fin de ce siècle. Nous sommes en pleine période de transition. L'insatisfaction va grandir. Mais une « concertation » à l'échelle planétaire étant impossible, des guerres, numériques, économiques ou autres, devraient finir par se produire, d'autant que la démographie exponentielle sur certains continents poussera à toutes sortes d'invasions, ce fameux sujet tabou que Renaud Camus a laissé s'échapper de sa conscience conservatrice, qui apporte de l'eau au moulin de toutes les partis d'extrême-droite d'Europe. Etant donné les difficultés de l'esprit à se reconnaître lui-même dans des formes différentes, le métissage généralisé n'est pas si évident que cela à mener à bien, puisque les croyances divisent les humains en clans incompatibles. C'était un des leitmotivs de Krishnamurti, qui combattait la violence en la fondant dans la pensée croyante dont il préconisait de s'affranchir, comme à une autre échelle, Levy-Strauss, qu'on ne peut soupçonner d'idiotie, avait averti qu'au-delà d'un certain seuil, une structure collective donnée ne pouvait conserver son intégrité face à une somme trop importante d'éléments hétérogènes. Cette pensée n'est pas angélique, mais sans doute bien réelle, ce qui envoie ce pauvre Edgar Morin dans les choux et les cordes, puisqu'il prétend qu'il n'y a pas lieu de s'inquiéter d'une saturation d'immigrés. Il ne pourrait avoir raison que si le métissage général se passait lentement, mais tel n'est pas le cas. Toute l'Histoire a comploté dans le même sens, les inégalités entre les Etats riches et pauvres, la démographie, les turbulences politiques dans les pays en voie de développement, l'efficacité des moyens de transport, comme l'avion qui a permis à des centaines de jeunes français de rejoindre incognito et illico presto le djihad. Qui, il y a un siècle seulement, aurait accepté de voyager un mois ou deux à ses risques et périls, avec peu de chances d'y parvenir, pour rejoindre une insurrection ? L'abolition des distances a chamboulé beaucoup de choses, et nous n'avons pas encore saisi toutes les conséquences des déplacements géographiques rapides, de même que les connexions immédiates à longue distance par internet, nous réservent encore des surprises, toutes sortes de surprises !
L'Histoire ne nous attend pas, et utilise toutes les conséquences des actes que nous n'avons pas prévues.
La pensée ne touche pas sa bille au milieu de ce chaos rapide.
Raison de plus pour laisser le monde phénoménal de côté en ne le prenant plus au sérieux même si on l'assume : il n'a pas fini de nous faire prendre des vessies pour des lanternes.
20 Janvier 2018
Encore quelques journées assez étranges, pas de joie, mais une sorte de sérénité impresciptible qui remplace presque ce qui me manque. Jours sans entrain, avec peu de solutions, mais la Force descend dans des zones encore plus profondes. J'ai repris avec plaisir le jeu d'échecs, gagnant parfois des obsédés qui jouent tous les jours, à la plage ou à Denpasar, avec ce long trajet en scooter pendant lequel je lâche complètement prise, et qui me place au centre spirituel de Bali, sur cette merveilleuse place près d'un temple vénéré. Sinon, je surfe un peu. Le net est intelligent et constitue un mode de résistance souverain — mais il faut trouver les bonnes adresses. Je confirme que tout notre corps est de la mémoire organisée, avec tous les problèmes de ce que nous traînons avec nous et qui vient d'ailleurs. La psychogénéalogie, les fantômes familiaux, la psychanalyse transgénérationnelle, tout cela revient au même, avec l'épigénétique. Cela me permet donc de classer les survivances dynamiques en génériques (colère, jalousie, peur sans danger, envie compulsive, intransigeance psycho-rigide, attentes obsessionnelles, narcissisme primaire entre autres) et en génétiques, avec tous les héritages toxiques possible imaginables. Je patauge dans ce monde-là depuis 2001, mais je suis moins catégorique que les intervenants sur le web, ces praticiens qui laissent entendre que ce type de préjudices pend au nez de tous. Ce sont des révélateurs analogues qui les activent, mais certaines personnes passent à travers, et pour eux ce genre de « kystes » ne joue pratiquement aucun rôle. En revanche, leur réveil à la suite d'un événement correspondant, peut certainement troubler énormément la personnalité, et même, chercher à la détruire.
Il faut vraiment aimer le Divin pour supporter tout ce que je vois dans la Manifestation depuis dix-sept ans, il n'y a pratiquement que du gaspillage, et pire, du sabotage. La qualité intuitive des « praticiens » dans ce genre de thérapie est remarquable, et la plupart font un excellent travail. Personnellement, j'ai revécu un enfanticide, ce qui est consigné, et avant de le voir surgir, pendant des années, le trauma agissait par en-dessous : j'étais dans un malaise certain à chaque moment qui sortait vraiment de l'ordinaire, comme un voyage en avion par exemple. L'idée que nos ancêtres ont laissé des dettes dans notre corps ou notre esprit n'est pas si absurde que cela peut paraître au prime abord cartésien. La vie est avant tout énergie, mais comme l'énergie et la conscience ne sont jamais totalement séparées, ce qui est conscience dans l'énergie de vie souffre quand elle est reniée, et il n'y a pas de reniement plus profond que l'infanticide. De même, à un moindre degré, les manques d'amour-attention brident l'élan vital, et ce genre de choses sur plusieurs générations peut laisser des traces dans l'ultime rejeton qui n'en est pas « responsable ». Une simple rupture affective peut réactiver ce logiciel. Pour moi, qui me bats depuis le début du siècle contre toutes ces inscriptions, génériques, génétiques, individuelles, cela ne fait aucun doute que toute cette mémoire n'est pas morte, et qu'elle revient à la surface le cas échéant, une cause de plus pour expliquer le peu d'individus qui débouchent dans le soi. Si leur pratique spirituelle ne parvient pas à bout de certains dénis hérités, ils plafonneront, de même s'ils cultivent certains karmas à leur corps défendant.
Il est même possible que d'autres modes de transmission soit possibles, sans parler des gènes. Il peut très bien exister des univers psycho-énergétiques, comme des réservoirs « astraux », et il suffirait que notre mental se branche dessus pour être manipulé par une fréquence analogique à son trouble intérieur. Il suffit de réfléchir sur le wi-fi pour comprendre l'omnipotence des ondes dans notre monde.
Il est également probable que la position des pouvoirs planétaires favorise ou non l'éclosion des trauma transgénérationnels, et à ce moment-là, par amour, quand les dysfonctionnements apparaissent, nous pouvons payer les dettes de nos ancêtres en traversant les « bugs » qu'ils auront laissés dans notre programmation psychologique. Je suis à peu près certain que quiconque en voudrait à ses aïeux de lui avoir confié ce genre de dettes les renforcerait gravement par cette attitude fermée, car rien n'est plus nocif que de culpabiliser les morts, ou de culpabiliser ses parents, quoi qu'ils aient fait, — car ce n'est pas par hasard que nous débarquons dans telle ou telle famille. Accepter sans se soumettre, telle est la force du yin originel, comme s'affirmer sans nuire, telle est la force du yang originel. Il est donc nécessaire de remonter à ces vibrations parfaites pour guérir plus rapidement des maladies et des fautes de nos ancêtres.
Toutes sortes d'algoritmes sont possibles. Certains dénominateurs communs aux préjudices transgénérationnels et aux scories karmiques peuvent s'épauler pour « abattre » un ego. Ces rebondissements des mémoires les unes sur les autres devraient forcer à des prises de conscience à double-tranchant, salutaires pour ceux qui sont prêts à la résilience, catastrophiques pour ceux qui célébreront la souffrance ainsi redoublée. Toute personne qui s'intéresserait à cette problématique doit d'abord charger son intelligence de lui faire comprendre ce qu'est une répétition. On peut être forcé à répéter des actes (ou des représentations fausses) pour se conformer à des attitudes profondes adoptées par nos ascendants, jusqu'à la septième génération, selon les Ecritures et les observations des praticiens.
Bon, vous pouvez toujours déclarer que, dans ces conditions, ce n'était pas la peine de débarquer si c'est pour traîner autant de boulets... Il vous reste donc à remonter le temps, et à empêcher la rencontre de vos parents...
24 Septembre 2018
C'est sans doute par fidélité au projet supramental que j'écris, car je ne sens pas la nécessité de parler de « moi », mais comme les candidats à la supramentalisation sont rarissimes, et qu'il faut se méfier des imitations, c'est sans doute nécessaire de garantir un suivi minimum. Donc, ça continue ferme, avec une intensification des sensations dans le corps, ce qui fait qu'en me réveillant, je dois mettre cinq minutes à changer la douleur dans les jambes, une sorte de compression, en devenant consient que c'est le Divin qui travaille, ce qui atténue la sensation désagréable, puis, dès que je me lève, il doit y avoir « dispersion » du phénomène.
J'ai travaillé comme un malade pendant deux mois chaque jour sur mon grand œuvre, en juillet août, un traité d'astrothérapie qui fonde un nouveau métier, mais c'est si en avance que le Rocher m'a déjà félicité avec une fin de non-recevoir. J'attends cinq réponses, sinon il restera Amazon ou la création d'un nouveau site pour former les futurs astrothérapeutes, s'il y a de la demande. Je n'avais jamais autant rectifié un texte et cela m'a rapproché de ma sœur qui avait travaillé six ans d'arrache-pied sur une thèse d'Etat en Droit, ce qui l'avait laminée. Mais elle s'est suicidée bien plus tard et pour d'autres raisons. Le supramental, conscience de vérité, concerne surtout la connaissance des principes ou guide ce que l'on a à faire soi-même, mais cela ne m'a pas transformé en devin, et d'ailleurs, mon tarot, dont je suis fier, pose toujours la question du potentiel contre l'actuel. Personne n'a vu venir le suicide de Sylvie, ses enfants la dissuadant, au nom du Christ et du karma, mais elle s'est jetée sous un train quand même.
Il y a eu aussi deux descentes de trois jours vers l'inconscient, avec moins de vitalité, et la première je n'en ai pas trouvé la cause, mais la seconde, quinze jours plus tard, ma mené au fond du trou, et j'ai dû pleurer une nouvelle fois en pensant à mon père, trois ans grabataire puis six mois nourri par le ventre. Il est encore sorti du chagrin de mon corps, mais j'ai l'impression qu'il restera inépuisable, car c'est mon identité elle-même qui en a pris plein la poire, puisque je suis né exalté et bien dans ma peau à un point difficilement imaginable. Le moment où ma mère atteinte d'Alzheimer ne m'a pas reconnu, est aussi resté gravé profondément. Bon, c'est de la faute au Divin, cette putain de matière enregistre tout, absolument tout, puisque ce sera avec cette base de données qu'elle modifiera le principe même de la perception. Peu d'êtres humains comprennent que tout ce qu'ils font laisse une trace qui transformera leur vision des choses, mais c'est quand même la révélation qu'ont subie les meilleurs philosophes à la recherche d'un « code parfait » et c'est aussi ce que nous bassinent les avatars avec le karma, le péché et tutti quanti.
J'ai établi dans mon traité qu'un principe très sensible nous avertit de l'écart entre ce que nous vivons et ce que nous voudrions vivre, il est juste en-dessous du « jugement », mais le précède d'une bonne longueur, mais pas de bol de chez j'ai pas de chance, très peu d'êtres humains perçoivent sa fonction, ce qui fait que l'émotionnel ne se transforme jamais. Grâce à ses nouvelles réminiscences, le taoïsme originel n'a rien à envier à l'ensemble des doctrines hindoues, dont le propre est d'égarer vers le haut en niant le bas, avec les catastrophes que l'on connaît comme le machisme sacré, la haine de la vie qui se traduit par toutes sortes de pollutions recommandées, mais, comme le dit Sri Aurobindo dans les fondements de la culture indienne, il y eut une époque pendant laquelle la spiritualité ne condamnait pas la vie, mais elle n'a pratiquement pas survécu sauf à travers des combines compliquées et dangereuses, comme l'éveil de la kundalini, qui a déjà envoyé en hôpital psychiatrique pas mal de candidats. Quelques écoles tantriques vraies sont tenues par des maîtres qui font descendre des énergies, je ne le conteste pas, mais une fois qu'on est parvenu au supramental, le reste fait piètre figure.
Le problème c'est que le supramental ne se mettra jamais à la portée de l'être humain, s'il descend : cela ne s'appelle plus le supramental, et c'est moins puissant, moins unifié, donc incomparable. Je n'en reviens toujours pas de ce qu'a fait Sri Aurobindo entre 1926 et 1950, il a trouvé le transformateur, et ce n'était écrit nulle part. Personne ne sait comment il s'y est pris. Toujours est-il qu'il a permis que l'accès à la conscience suprême engendre sponte sua sa conversion en énergie, ce qui a pour conséquence de chasser le Divin de l'esprit, pour qu'il ne s'y installe pas, afin que le corps soit obligé, lui, de le retrouver par le bas (chez ma pomme, après onze mois et trois semaines de descente progressive en enfer). En gros, je n'ai rien d'autre à dire que ça, mais ça explique tout, l'échec des rishis coincés dans des visions ultimes sans conséquences sur le corps, et ça explique aussi que Mère ait pu commencer à vivre un truc de ouf, au lieu de planer sur les plans les plus hauts de l'esprit.
La conscience est en quelque sorte plus importante que l'énergie, en principe, mais dans la nature, c'est l'inverse. Une partie de nous sait que la conscience est supérieure, une autre le nie farouchement sous l'emprise du désir, de la peur, du besoin de sécurité, de la demande d'approbation et tutti quanti. Bref, le chemin des maîtres est unique, incomparable et discutable à l'infini, comme le mariage de Mère avec un des adversaires haut placés du Divin, ce qui fait que la Raison n'est d'aucun secours pour se hisser à la compréhension du travail des précurseurs. Le monde serait-il si différent sans Amma et Sri Tatata ? Pas vraiment. Ce n'est pas la même chose que l'arrivée sans tambour ni trompette du supramental.
En ce qui me concerne, je vais mon petit bonhomme de chemin, je ne me remettrai jamais complètement ni de la fin tragique des trois membres de ma famille, ni d'avoir éprouvé Vasudeva, à plusieurs reprises de longues heures d'affilée en 1978. Finalement, il y a de l'équilibre, et je défie quiconque de me prouver que le noir existe sans le blanc et réciproquement, bien que tout voir en gris fasse illusion un bon moment, y a qu'à raboter les élans et mettre la poussière sous le tapis, ça marche, en tout cas un moment, avant que le gris n'implose dans le noir, et là, c'est le trou du même non, avec de grosses maladies protestataires, la vie n'aime pas qu'on la prenne, ni pour une poire, ni pour une pomme, pas même celle d'Eve.
3 Octobre 2018
Le dao ne serait plus ce qu'il est s'il ne passait son temps à se foutre de notre gueule, et quand je vois que l'excellent livre de Guy Corneau, revivre ! a été bradé un euro chez Gibert en face de chez moi à saint-Germain en Laye, je me dis que l'amour de la connaissance n'est pas encore ce qui caractérise l'humanité. On y trouve des sortes d'éclaircissements sur ce que j'établis moi-même avec le shen, la sentinelle très active de l'inconscient, qui mesure l'écart entre ce que nous attendons de la vie et ce qui se passe. Autrement dit, l'inconscient non formaté par les mémoires est positif, mais son disque dur enregistre le négatif à notre insu, ce qui fait qu'il est très difficile de savoir si notre inconscient vierge et propre l'emporte sur celui qui est contaminé par les mémoires négatives, refoulées dans le subconscient, afin de ne pas altérer la perception générale. Ce qu'aurait défini Reich, cité par le canadien. Plus ça va, plus je me dis que les maladies graves ont pour but de faire prendre conscience au sujet qu'il est autonome, libre, au-delà de ses personnages, ce qui fait de la souffrance l'autoroute de l'éveil pour ceux qui conduisent avec amour. Pour les autres rebelote. Rechute pour avoir coupé les cheveux en quatre pour en... les mouches. Beaucoup d'êtres humains ne savent rien hiérarchiser du tout et brûlent ce qu'ils ont adoré et adorent ce qu'ils ont brûlé, j'en ai fait l'expérience à plusieurs reprises et je continue à être sidéré, bien que l'explication apparaisse souvent grâce à l'étude du moment de naissance. L'apparence aventureuse de la démarche chaotique déborde de bénéfices secondaires intenses, mais le corps peut finir par se révolter contre le manque de stabilité de l'esprit.
Bref, c'est encore une question d'équilibre entre l'ouverture au nouveau et une « base intérieure » qui maintient l'intégrité contre les turbulences des extrêmes jouissifs ou douloureux, exaltants ou angoissants. La seule question sérieuse est de savoir si nous pardonnons au Divin de se produire par couches autonomes, car sensations, sentiments et pensée n'ont strictement rien à voir les uns avec les autres, mais ce pauvre libre arbitre fait la circulation, envoie des coups de sifflet, et dresse des contraventions, avec les amendes de la culpabilité quand nous prenons des sens interdits. Nous ne faisons rien d'autre qu'être les spectateurs de leur ménage à trois, avec les jalousies qui en découlent, quand l'un est obligé de tenir la chandelle au lieu de jouer avec les autres.
8 Octobre 2018
Ai passé deux jours très exalté, comme « avant » en quelque sorte, comme avant les artifices génétiques de 2001, tout allant de soi, la vie ayant été exprès conçue par un couturier génial exactement à mes propres mesures. Faite pour moi, et tant pis si elle est un costume trop ample, trop serré ou encore un déguisement pour les autres, je n'y suis pour rien. Le soir avant de dormir, impression extraordinaire qui se résume en une seule phrase : le temps est l'expérience de la conscience (ce qui lui permet de varier ses procédures de perception grâce au renouvellement du flux). Est-ce qu'il est quelque chose d'autre ? Pas vraiment, mais c'est un secret. Motus et bouche cousue s'il vous plaît. On pourrait vous interner.
9 Juin 2019
DIMANCHE DE PENTECÔTE 2019, 9 JUIN
Une énorme surprise de temps en temps, c'est notre lot. Je suis revenu chez moi en scooter dimanche vers 18 H sans savoir d'où je venais, mais j'ai retrouvé la route. J'ai dû conduire dans une sorte d'état d'hypnose, j'avais mal à la tête et j'ai pensé que j'avais choppé un virus en arrivant chez moi, mais j'ai constaté que je ne me souvenais pas des heures précédentes. Puis j'ai vu en descendant du scooter que j'avais le dessus du pied droit brûlé sur quelques centimètres carrés, et puis j'ai fini par voir que j'avais l'arcade sourcillière amochée, une pastille rouge sur les pommettes, et un énorme bleu sur l'épaule droite... sans compter un enfoncement au sommet de la joue droite, dont l'effet esthétique est douteux. J'ai bien dû conclure que j'avais eu un accident dont je ne me souvenais absolument pas, que j'avais donc été assommé, ce que laissent à penser les éraflures sur le casque et la visière. Je me demande « qui » est entré à la maison en conduisant, puisque je n'ai strictement aucun souvenir de l'après-midi en entier.
Ayant trouvé des filtres à café dans le porte-bagages, je me rappelle vaguement d'être passé dans le grand centre commercial Lucky, mais toute l'après-midi reste hors de portée. N'ayant aucun souvenir, j'ose quand même imaginer que j'ai été pris par surprise sur le côté, il me semble que si l'accident avait eu lieu de face, j'aurais eu une telle concentration que je me serais sans doute souvenu. Là, ça fait bien penser aux coups portés derrière la tête dans les romans et films policiers. Le mystère essentiel demeure dans le fait que je suis revenu seul, comme si personne n'avait eu à me secourir. Je me souviens de quelques délires au retour, quand j'ai laissé le scooter sous l'auvent, j'essayais de reconstituer en vain mon itinéraire et je me voyais revenir avec trois petites bouteilles d'huile d'olive australienne, que, naturellement je n'ai jamais achetées.
Cette aventure prend facilement une place d'honneur au palmarès des Surprises qui méritent un Oscar. Le 4 Janvier 1974 a été aussi une énorme surprise avec le terme instantané de toute pensée dynamique, comme la descente du supramental accompagnée de réminiscences karmiques trois ans plus tard. Enfin, toute la période des artifices génétiques a été scandée par des surprises invraisemblables, en janvier 2001, avec des descentes au plus bas de ce qui est possible et des montées aux plus hautes sphères, dont des incursions dans la conscience d'Agni, et une identification de quelques minutes au « seigneur suprême », sur laquelle je reviendrai sans doute un jour, et qui à elle seule prouve que Sri Aurobindo a raison sur toute la ligne. Toutes les créatures vivent pour le Seigneur suprême sans le savoir naturellement, puisqu'il se tient à une distance encore plus éloignée que le supramental, qui n'est pas la porte à côté. Ces quelques minutes d'identité parfaite avec le seigneur suprême m'ont soutenu par la suite, car je vivais vraiment dans l'horreur absolue une nuit sur trois ou quatre. Il se peut que nos vies soient orientées par les surprises, car elles peuvent modifier considérablement l'image de soi ou la vision globale de ce que la réalité représente pour nous.
C'est humiliant de ne pas se souvenir des dernières heures écoulées. J'ai mal à la brûlure quand je pose le pied par terre, mais apparemment pas de foulure, pas de fracture. J'aimerais savoir ce qui s'est passé, naturellement, mais ça me semble inaccessible et je ne vais pas me diriger vers ça. C'est un peu bizarre que ce soit passé un dimanche de Pentecôte, mais pas moyen de savoir si ce n'est qu'un accident. Etant donné que conduire un scooter est presque mon activité principale à Bali depuis 2003, qu'il ne m'était jamais rien arrivé sauf une petite collision en changeant de file à cause d'un abruti fonçant à toute allure, j'ai de la peine à m'incriminer dans l'accident. Je ne suis pas assez voyant pour déterminer si c'est de la magie ou pas. Peut-être qu'une partie de moi se réjouit d'être pratiquement indemne, car les deux premiers refus d'une nouvelle proposition aux éditeurs, parvenus au même moment par mail (un roman), sont passés comme une lettre à la poste. Bref, je ne sais absolument pas ce qui m'est arrivé. N'étant pas débile, je me repose, il y a un énorme travail du corps sur la brûlure (sans doute le pot d'échappement) et le vide de mémoire a aussi créé un nouvel espace. Des souvenirs remontent. Je suis comme mon père, addicted à la vie. Tout ce qui revient est merveilleux, et réparti dans toute ma vie. Il y a eu quelques salves seulement, mais c'était intéressant, à Nice en particulier, quand je me remettais des artifices génétiques. Des souvenirs de désir sexuels fugaces sont aussi venu me dire que j'étais bien encore en vie, c'était très rapide et pas plus de trois ou quatre fois. En revanche, je me suis vu rouler avec une grande satisfaction sur mon Piaggio, de Cimiez vers le port de Nice, le nez au vent, sans doute pour gagner les galets de la petite plage qui lui succède, et m'y baigner, l'été 2001. J'ai dû m'ancrer sur terre d'une nouvelle manière à ce moment-là, quand j'ai récupéré des artifices génétiques, et peut-être que le cerveau cherche à combler le déficit de la journée de dimanche en me ramenant du positif inoubliable.
15 Juin 2019
Nous sommes samedi et ça fera donc une semaine demain que je me suis cassé la figure sans m'en rendre compte. Je suis resté à la maison, et il n'y a que ce matin que j'ai pu marcher sans souffrir après quelques pas seulement. J'avais quelques provisions, et en mangeant très peu, je n'ai pas eu à sortir. Je comprends l'expression avoir de la chance dans son malheur, je ne vois pas comment un accident aussi grave aurait pu être moins porteur de conséquences. Bien sûr, la brûlure n'est pas anodine et elle est profonde sur deux petits points, comme si quelque chose était entré profondemment dans la chair, mais la douleur ne vient que de la peau qui « tire ». De toute façon, je tiens de ma mère de me sentir presque mieux dans l'adversité que quand tout va bien, et je me suis entraîné à mettre la conscience sur la douleur pour la ressentir en tant que sensation, ça ne marche pas du tonnerre, mais la volonté que ce ne soit pas de la souffrance parvient à atténuer la douleur. Je ne cherche pas le sens de cet accident, tout au plus il correspond à Uranus en Maison 12 natale, avec un carré exact de Neptune au soleil, et depuis que c'est arrivé, j'ai supposé que le Divin allait en tirer partie.
J'ai rarement été victime sans participer moi-même à mes déboires, en particulier sur le plan sexuel et sentimental avec des choix peu inspirés, mais en quelque sorte obligés par une attirance inaliénable, en revanche, cet accident est peut-être entièrement fortuit, être au mauvais endroit au mauvais moment, et ça arrive.
J'ai navigué sur le web, il y a beaucoup d'esprits éclairés qui passent à thinkerview, et nous avons ainsi le dessous des cartes dans de nombreux domaines décisionnels. Les malversations concernant les banques, avec la création artificielle d'argent, la manipulation des cours d'intérêt, —tout cela est absolument irrespirable. Le plus curieux c'est que la peur du fascisme est telle que l'on préfère se soumettre à ce mensonge généralisé de la mondialisation avec l'Europe (qui sait s'il ne remonte pas à Monet), que ruer dans les brancards, et reprendre ses billes grâce à la souveraineté nationale, que l'on tient à tout prix à présenter comme réactionnaire, alors qu'elle serait peut-être la bonne issue de secours... (voir nouvelle vidéo sur spiralephilosophique.fr). Les banques peuvent continuer à confondre les branches de dépôt et d'investissement selon un spécialiste très brillant, un jésuite, un intellectuel idéaliste à la Debray, Gaël Giraud, qui respire l'honnêteté intellectuelle, comme quoi, ne jamais généraliser... Autrement dit, les carottes sont cuites. Qu'on s'imagine Marine le Pen en réincarnation de Hitler ou en simple élue rétrograde profondément attachée à ses racines territoriales, anyway l'Europe (et peut-être même la droite française) agonise autant dans les abus de pouvoir que dans les débats stériles, les uns équilibrant les autres. Faire front avec les « prochains » de son espèce locale, comme Salvini, aux menaces du grand remplacement, que seul un snobisme idéologique empêche de prendre au sérieux, coule de source, mais les projections sentimentales condamnent les mesures efficaces. Le politiquement correct aussi mou que de la barbe à papa fait dans le déni systématique de tout ce qui dérange, et comme l'invasion musulmane dérange, on se rassure en la nommant autrement, mais le réchauffement climatique poussera vers le nord peut-être des millions d'Africains d'ici une vingtaine d'années. Cette invasion peut combler l'Allemagne aujourd'hui, qui parvient encore à maintenir une colossale production industrielle, et elle lui permettra de payer au rabais les réfugiés dans les usines, afin d'ajourner la hausse des salaires dérisoires des ouvriers non-qualifiés, une sorte de remake encore plus tordu que l'arrivée massive des Algériens chez Renault, à l'époque de la 4 L... C'est une aubaine économique à faire passer pour de la grandeur d'âme, of course, les portes ouvertes aux migrants. Mais l'Histoire me souffle à l'oreille une de ses sentences préférées, adaptée au goût du jour : Si tu es né pour être esclave, ce n'est pas en changeant de côté de la Méditerranée, que tu échapperas à ton destin... ou bien un courage surhumain te sera nécessaire...
La crise des migrants est comme dirait insoluble et tant que des structures nouvelles ne permettront pas aux exilés de rester sur leur propre continent, quitte à changer de pays, nous aurons affaire à des infiltrations de mentalités rétrogrades, échouées chez nous par nécessité, et qui conserveront des valeurs que nous avons nous-mêmes dépassées. Le heurt est inéluctable car de part et d'autre l'ouverture d'esprit est insuffisante. Les cercles et les carrés ne font pas bon ménage longtemps, seuls quelques rares hexagones découlent de leur rencontre, qui transcende leurs différences. Souvent, les cercles finissent cabossés, et les carrés perdent leurs angles droits. Toute l'Histoire témoigne que le mélange d'identités lointaines est un processus dangereux, lent, incertain, souvent voué à l'échec, le génocide couvant dans les vengeances inassouvies.
Le comble, c'est que c'est l'identité congelée dans ses propres principes, qui se reconnaît elle-même dans des formes adverses. Yes, sir, c'est la psycho-rigidité du Rassemblement national qui lui permet de reconnaître la psycho-rigidité dogmatique de l'islam, et de s'en méfier... Les Marion Maréchal laissent entrevoir que certaines âmes veulent conserver du passé « français » ce qui fit sa grandeur et qui a totalement disparu sous l'avancée du laxisme consumériste des années Tapie-Mitterand, qui ont fait de la consommation une religion au dogme complaisant: la seule interdiction, le seul péché, c'est d'être pauvre depuis que Bernard Tapie a été vu par des millions de français à 21 heures en train de courir en suant sur un tapis roulant de fitness, comme si le monde lui appartenait ! Mitterand, le scorpion accompli, sournois et calculateur, avait été fasciné par la spontanéité de génie de Bernard, qui avoua mentir sans s'en rendre vraiment compte, et qui a vécu plusieurs vies en une seule. Il n'y a pas à tortiller, Watson, les personnes qui se sentent vraiment légitimes sont capables de beaucoup plus de choses que les autres, en bien comme en mal. Et figure-toi qu'elles sont rares... A moins d'avoir été aimé et reconnu, ou à moins de s'aimer soi-même si les autres en sont incapables, ce qui est possible avec certains moments de naissance, le sentiment d'être légitime est faible, et il s'ensuit que l'on devient un mouton, qu'on ne traverse jamais en-dehors des clous, que le risque est considéré comme une menace et non un tremplin...
Il n'y a pas de jugement de valeur à porter sur l'Histoire: ce sont toujours les mêmes forces qui l'animent, l'ouverture et la fermeture, le principe Yin/yang dans son alternance quasi automatique, chacune souffrant — à un moment donné — de la démesure de l'autre quand elle tend au monopole. D'où les renversements irrémédiables, inévitables et imprévisibles. Le laxisme prédomine en France depuis le premier mandat de Chirac... et il s'épuise lui aussi, alors par quoi le remplacer ? (Une petite parenthèse sans doute avec Sarkozy qui aurait bien mené la réaction à la crise financière, tout en s'embourbant dans l'opération lybienne, soutenue par d'autres puissances... )
Naturellement, j'ai la chance d'avoir eu la matière grise complètement baratée par le supramental dans les années 80 et 90... et je suis donc passé à autre chose, une vision dans laquelle chaque aspect hétérogène apparaît appartenir à une phase de reconstruction homogène, ce qui est d'ailleurs très jouissif, puisque rien ne peut s'opposer à quoi que ce soit (voir nouvelle vidéo sur supramental.fr). Le réel se diversifie sans se perdre, et les choses apparaissent spontanément à leur place, tandis que les déplacements eux aussi révèlent des failles à rectifier. Les limites des « visions » intellectuelles apparaissent également spontanément et me différencient largement des spécialistes les plus engagés. Zemmour et Onfray sont excellents dans certains champs, mais absolument nuls dans d'autres... Peu importe, j'ose affirmer qu'ils « ont des couilles » ces deux-là: tous ceux qui font dans le déni systématique aimeraient les voir pendus. C'est essentiel dans ce monde pantouflard de donneurs de leçons patentés, que l'évocation de l'intégrité qui manque soit évoquée, Et Zemmour comme Onfray la défendent. Mais, dans un monde aussi plastique que le nôtre, — à vrai dire flasque jusqu'à l'informe, l'intégrité passe pour de l'intégrisme... Ceux qui vivent dans des bulles de bonne conscience, veulent qu'on accueille tous les migrants, les pauvres, sniff sniff, mais n'en logeraient jamais un seul dans leur appartement trop ample pour eux, ou leur maison de campagne vide.
La carte et le territoire disait Bateson... C'est l'unique problème, le décalage entre les pensées et les actes... Ceux et celles qui parviennent à le réduire dans leur propre vie sont haïs par tous les lâches de la terre, innombrables, qui colmatent avec toutes sortes de mensonges le fossé entre ce qu'ils disent et ce qu'ils font. Je milite pour la complémentarité Yin/yang puisque c'est la même chose, la réceptivité ne doit pas empêcher la fonction décisionnelle, et cette dernière ne doit pas empiéter ni sur la sensibilité, ni sur l'empathie, ni sur la réceptivité. Il s'ensuit un travail quotidien, dont j'énonce les principes dans un nouveau texte à lire dans supramental-astrologie.fr. Cet essai de quarante pages, Cosmothérapie, est une synthèse de l'approche thérapeutique qu'une connaissance profonde de l'astrologie humaniste, complétée par mes soins, permet. C'est la suite de la voie du guerrier intérieur, dans Transmission.
Pour le moment, le mental Objectif est réservé aux seuls éveillés, un élu seulement sur un million de specimens humains, mais la proportion va décupler rapidement, et ensuite ce sera exponentiel, mais un nettoyage est indispensable avant... par des moyens drastiques sans doute, comme un effondrement progressif ou non de quelques sociétés, ce qui permettra de changer l'ensemble des motivations existentielles. Pour le moment, Jupiter est devenu le tyran absolu et sans égal, et le mythe de la croissance exponentielle, qui survit à plus de vingt ans de stagnation économique, le confirme. Les « élites » croient encore à cette fable, il y a de quoi jouer à la roulette russe, et les Yves Cochet, par exemple, sont encore trop rares, lui qui rappelle que le bout du chemin « consumériste » a été prévu et défini depuis plusieurs décennies, dans un interview de thinkerview. Personne n'écoute les Cassandre, et les catastrophes ne peuvent donc être évitées.
Samedi soir.
J'ai pu sortir, élancements violents, mais en boîtant, c'était supportable, acheté nourriture, puis fried rice local au retour, dans un resto. S'ajoute à l'énigme le fait que le scooter marche impeccable. Accepter de souffrir un peu, savoir que cela doit se produire, est une pensée beaucoup plus riche que se plaindre. Il faut se féliciter d'endurer des douleurs supportables, et c'est justement le cas, le répit est certain entre deux pas, et il reste à négocier une façon de s'appuyer ultra-rapide sur le pied déficient. Toujours tranformer la douleur en simple sensation, possible si c'est très court, et justement, l'appui sur le pied est rapide, et ainsi les douleurs discontinues peuvent-elles être tolérées par l'esprit très facilement. N'empêche que la douleur est la plus grosse connerie que la vie charrie avec elle, et le supramental peut devenir le moyen de la diminuer, sur quelques millénaires, si le Divin est reconnu par le plus grand nombre, non comme un père mais comme une destination exigeante et satisfaisante.
21 Juillet 2019
Quelques éclaircissements sur l'accident. Je me souviens très bien au retour chez moi de m'être « souvenu » d'avoir acheté trois petites bouteilles d'huile d'olive australienne, et je me demandais d'où tombait cette impression absurde. Un mois plus tard, en rangeant mon débarras, je trouve, —pratiquement cachées, trois petites bouteilles du produit en question, et du coup je suis mort de rire... Je n'ai donc retrouvé mes esprits, avec cette impression d'avoir mal à la tête à cause d'un virus, qu'après être allé planquer mes bouteilles... Rassuré par cette opération instinctive de survie, je suis retourné au scooter et c'est seulement là my God que je suis sorti de l'état somnambulique, tout en découvrant mes blessures. Je rappelle à tout hasard que c'est l'hypnose qui a mis sans doute Breuer sur la piste de l'inconscient, dont Sigmund s'est emparé. Je ne sais donc pas si je suis revenu en état d'hypnose ou en tant que somnambule mais la machine biologique s'est remise en marche parfaitement bien avant que le moi conscient ne réapparaisse. Et encore une semaine plus tard, en allant faire des courses dans la meilleure épicerie fine de Kuta, je tombe sur un étal conséquent de l'huile en question, rare au demeurant sur l'île, avec cette inscription, achetez-en deux, la troisième est offerte!
Tout s'explique, mon moi inconscient s'est sans doute réfugié chez « Dijon », cette belle épicerie, qui est un commerce que j'affectionne, et il était assez présent pour profiter de l'aubaine (je me demande assez souvent si je suis très économe ou radin). Je ne sais même pas si j'ai payé les bouteilles, le personnel est toujours caché derrière un comptoir élevé, et j'ai dû me dire: mission accomplie, je rentre à la maison, ce produit va me sauver. Ayant vécu cette chose incroyable, je consens davantage aux scénarios de films où l'on voit un pauvre huluberlu se demander si oui ou non il a tué quelqu'un car il ne se souvient de rien. Bref, perso, je ne recommande pas de se laisser hypnotiser pour le fun, et en thérapie, j'ai l'impression que cela peut parfois être risqué, mais je dois poursuivre mes recherches sur ce sujet, et voir ce que l'on peut y substituer, ce que je commence à faire dans les séances de «réorientation gravitationnelle» qui permettent de récupérer l'énergie conforme au moment de naissance. Le moi hypnotisé obéit aux injonctions, croit à ce que l'hypnotiseur raconte... Qui est-il?
En fait, je voulais reprendre le journal pour parler d'une avancée du supramental dans le fond de la matière organique. Le 8 juillet au soir, l'image de mon père et celle de sa mère fusionnent dans mon esprit, sans prévenir, et je cours vomir et cracher, comme presque tous les jours depuis 2008, mais là, c'était le soir et vraiment violent. S'ensuit une descente de la Force dans tout ce qui ne va pas dans le corps, un léger décalage des hanches, un travail chaud sur l'épaule gauche pas tout à fait rétablie, et des sensations très fortes, astringentes mais pas désagréables, sur les deux genoux, sensations que je prends très bien, je sens que c'est pour éviter les articulations de se figer trop vite. Mais pendant neuf jours, tous les matins et jusqu'à treize heures environ, je ne suis plus le même, je suis bien sous l'emprise d'une vibration consciente intolérable que je parviens à identifier le huitième jour: c'est une négation absolue de la vie... qui tire son origine de la pensée (décret) que la souffrance est injuste.
Cet état d'esprit me prive de toute légitimité et de tout désir, et de toute vision de l'avenir, mais cette fois c'est clair, ma grand-mère paternelle a vécu là-dedans. Je la connaissais bien, c'est elle qui m'a élevée de 6 à 7 ans, et elle était la tristesse incarnée, la résignation faite chair. Elle ne s'est sans doute jamais remise de la disparition de son premier fils mort-né, que mon père a eu pour tâche de remplacer... C'était une personne totalement dépourvue d'intelligence et très sensible. Bref, l'organisation génétique est infaillible et il est probable que ce déficit en haut et à droite du poumon droit vienne de là, et c'est là que se combinent l'état d'esprit mortifère et les sensations physiques de parasitage. D'ailleurs ma grand mère a passé sa vie à être malade, soit de l'estomac, soit de l'appareil respiratoire avec asthme, bronchites et tutti quanti. Elle gémissait plutôt qu'elle ne parlait, c'était un cas d'école.
Mon père a hérité de la chose mais l'a transformée totalement: il parlait avec complaisance, entrain, et parfois même avec joie, de toutes les maladies possibles imaginables... C'était son dada, son obsession, de parler des défaillances de la santé, et personne n'y coupait, c'est ainsi qu'il a fait le vide autour de lui, tout en accusant facilement les autres, avec colère, de nombreuses turpitudes. Il se jetait aussi sur le journal pour lire la rubrique nécrologique et ne ratait pas un enterrement à saint-Raphaël, dès ses soixante-dix ans, même ceux de personnes qu'il n'avait fait que croiser distraitement.
Nous ne sommes qu'au début de comprendre ce que l'évolution trafique depuis des millions d'années. Mon père a fait un saut impressionnant en avant. Ce fils de chocolatier ruiné, obligé d'aider ses parents dans la petite boulangerie grenobloise pendant son adolescence, s'est payé ses études d'ingénieur, allait être largué dans son avion de chasse quand est survenu l'armistice (major de sa promotion), puis il n'a pas trop mal mené sa barque sur le plan professionnel, en ayant l'idée géniale de créer un lotissement entier à la sortie de saint-Raphaël. C'est sur les deux derniers lots qu'il s'était fait construire une magnifique villa, pour ses cinquante ans. Je mesure aujourd'hui seulement le chemin incroyable qu'il a parcouru, d'autant qu'il a eu la patience de s'occuper de sa mère la moitié de l'année, qui habitait sous notre toit quand elle n'était pas chez sa fille à Grenoble. Selon la légende familiale, c'est moi qui suis à l'origine du déménagement de mes parents. Ils ne voulaient pas que je grandisse dans les brouillards lyonnais, et sont partis dans le midi quand j'étais tout bébé. Ma soeur non désirée et de quatre ans mon aînée, n'avait joui d'aucune faveur, et sa jalousie à mon égard a fini par bousiller son existence. Son thème natal la prédisposait à se sentir insatisfaite par définition, et cette tendance a été encouragée par son éducation, nos parents séparés n'étaient pas des modèles, et, tandis que ma mère et moi ne formions qu'une seule personne sur un certain plan, ma sœur n'a jamais bénéficié d'une véritable reconnaissance ni du père ni de la mère. Le schéma était tout tracé pour que je devienne le bouc-émissaire de son malheur, qu'elle entretenait par des décisions insensées, mais c'est une autre histoire.
Etant donné que cette emprise mortifère que je viens d'évoquer est très désagréable, déstabilisante, j'en parle surtout pour prévenir les prochains candidats au supramental, qui ne savent pas à quoi ils s'attendent. Plus ils iront profond, plus les résistances se manifesteront, et bonjour les dégâts. En ce qui me concerne, c'est « la tristesse infinie » qui me persécute, mais je vois d'autres scénarios probables d'héritages empoisonnés se dessiner pour mes successeurs, comme l'intolérance absolue à toute opposition, concentration du yang, ou l'abandon systématique à toute tentation comme concentration du yin. Bref, nous ne sommes pas sortis de l'auberge espagnole de l'inconscient ancestral, qui regorge de perversions. Le supramental le fait ressortir pour le nettoyer, et je répète que, sans la transformation dont je suis l'objet, les postures mentales de mes ancêtres se tiendraient dans l'ombre. Mais la nouvelle conscience que peut engendrer le supramental est incompatible avec ces logiciels truqués, qui ont déformé le contact avec la vie, l'ont désacralisée, et ont laissé leur empreinte toxique, leur voile, leur sombre couleur...
Je sais bien que j'ai de la chance de voir comme le nez au milieu de la figure ce que d'autres découvrent dans le vague et qu'ils ne peuvent préciser, et qu'ils subissent parfois, mais c'est tout simplement que le mental est verrouillé vers le haut, ce qui oblige à passer par l'éveil pour voir directement le fonctionnement de la réalité, en s'affranchissant des algorithmes génériques de la perception. Les éveillés sympathiques, comme Sadhgourou, disent des choses très intelligentes, mais une lecture au scanner révèle que tout leur discours s'articule autour d'une seule proposition: si vous souffrez autant c'est parce que vous croyez être au centre du monde. Oui, même parmi les « chercheurs spirituels », beaucoup ne sont pas des trouveurs car ils perpétuent leur feeling d'être au centre, même s'ils en ont plein la bouche de la «non-dualité»... Le bocal résiste à tout, sauf à l'humilité, très rare au demeurant chez les aficionados du « Cosmique », qui se sentent supérieurs parce qu'ils font des bisous imaginaires au Transcendant qui leur échappe.
D'une certaine façon, je ne suis plus personne, en particulier quand la force travaille bien, que tout mon être l'accepte, et que je tombe dans une sérénité absolue, d'ordre physique. C'est la preuve que le supramental veut créer un autre mode perceptif. Cet état d'âme ou d'esprit ne ressemble à rien de connu, mais il est certain que pour progresser dans cette direction, tous les miasmes héréditaires et karmiques, tous les algorithmes défectueux de notre histoire présente, depuis notre naissance, doivent être nettoyés.
J'ai découvert aussi que j'avais eu toute ma vie tendance à sous-estimer « mon histoire », c'est-à-dire ma famille, et même mon «vécu», pour que mon esprit gouverne seul et s'adonne sans frein à la réflexion enthousiasmante, — une prédisposition du caractère que possédait par exemple Spinoza. C'est donc assez légitime que tout mon parcours remonte aujourd'hui avec force, car je ne cesserai de le répéter, la matière enregistre tout, et notre corps est une véitable cimémathèque! Mais ce n'est pas désagréable de sentir mes parents tout proches alors qu'ils sont morts (2001 et 2003) d'autant que je n'ai plus aucun compte à régler avec eux. Je les aime tant maintenant que les larmes me viennent aux yeux, alors que mon père ne m'a été utile que par son opposition farouche, et que je n'ai pas pu l'aimer avant sa vieillesse. Il avait fini par mettre de l'eau dans son vin, et ne pouvait plus rien m'empêcher, contrairement au jeu qu'il a joué systématiquement jusqu'à mes vingt ans. A cet âge-là, je n'ai plus été qu'à la charge de ma mère. Une anecdote curieuse me revient... Mon père n'avait pas accepté qu'à la fin de mon Hypokhâgne, je passe « sans avoir travaillé » dans la classe supérieure, comme l'avait établi un convive. Il apprend cela au cours d'un dîner consacré à ce succès, où mes copains de classe de la région sont conviés, dont les recalés méritants... Le lendemain matin, papa me traite comme du poisson pourri pour avoir été réveillé par ma mobylette, et je me casse dans le camping d'en face. Le gars qui m'accueille est un joyeux drille en vadrouille, qui m'avait abordé dans la rue pour une raison inconnue l'été précédent, où nous avions joué nos propres chansons à un petit groupe d'étudiants en vacances connu de mon viel ami d'enfance, Jean-Yves. C'étaient des soirées sur la plage, exceptionnelles de complicité, entre des personnes intelligentes et fort satisfaites de vivre. Georgie et moi commençons donc à chanter ensemble sur les terrasses pour nous faire du blé, maintenant que j'assume ma fugue avec une désinvolture totale... Je chante seul le pti bonheur de Felix Leclerc quand mon pote fait la manche et ensemble nous chantons Santiano, tandis qu'il balance à la suite une chanson à lui géniale, une rencontre amoureuse avec la mort... Ce garçon que j'ai vite perdu de vue, je l'ai retrouvé tardivement, il avait parfaitement réussi en Italie, après avoir monté tous les échelons d'une entreprise commerciale dans l'outillage. Il rayonnait d'esprit positif et cependant, un cancer l'a emporté passé la soixantaine. Ce fut pour moi l'occasion de penser à mon âge, à ma chance, d'autant qu'un autre ami, psychothérapeute, disparaissait au même âge du même mal, à saint-Germain en Laye, autour de ses soixante-cinq ans. Cette autonomie du corps pose problème, les causes des maladies mortelles ne sont pas toutes identifiées, et elles sévissent de plus en plus, en dépit d'une longévité accrue. Nous avons du pain sur la planche en médecine, puisque le psychologique se mêle à l'organique, dans les deux sens. Le péjudice matériel, accidentel, rebondit sur le psychique, autant que les fluctuations mentales peuvent entraîner des désordres organiques. Cette navette sera l'objet de la médecine du troisième millénaire, nous ne pouvons plus reculer l'échéance de ces investigations fort humiliantes pour la pensée cartésienne...
Bref, je termine l'épisode de cette fugue, qui m'avait libérée de mon milieu à dix-neuf ans. Je fais pipi dehors en sortant de la tente le matin et j'aperçois à travers les feuillages la maison luxueuse de mon père pendant cet acte trivial et ce rituel me confirme que j'ai la vie devant moi... et qu'elle sera forcément merveilleuse, que personne ne se mettra plus jamais en travers de mes aspirations. Mon père est déshonoré: son fils fait le clown en djellabah noire avec une barbe et des cheveux qui lui tombent sur les épaules au restaurant où se tiennent les assises du Rotary Club, dont il est le trésorier, à moins qu'il soit devenu vice-président. Les serveurs de l'Excelsior m'appellent Jésus, et se foutent gentiment de ma gueule. L'offense pousse mon père à me punir, et il m'envoie donc faire ma khâgne à Grenoble, interne, en jouant sur ses relations. Mais il se trouve que ma classe n'existe pas, et me voilà reparti à Lyon chez ma mère, passer une année rimbaldienne. Maman me passe tout, et loue un appartement pour moi. Je séduis, sans aucune allusion sexuelle bien entendu, un groupe de trois copains très liés qui sont en maths sup, et je deviens le quatrième mousquetaire. Je conserve à leur demande les 300 grammes de haschich divin turc dans mon vieil appart, mais je sens que les choses vont mal tourner rapidement. Mes copains se font prendre à siphonner une voiture pour leur vieille deux-chevaux, et les flics leur demandent s'ils connaissent « Barbu », le nom que la bande m'avait octroyé, mais les amis ne me dénoncent pas. Comme quoi, les quelques soirées haschich soufi et guitare avaient dû fuiter: mes copains y ramenaient parfois une fille dans l'espoir de la sauter. Bref, je retourne chez ma mère à temps, au bout d'un trimestre inoubliable...
On laisse tomber l'appartement baudelairien d'un commun accord, on sent que les flics ne sont pas loin, et je navigue alors dans des eaux fort tumultueuses: souvent la vie me paraît absurde et je me demande pourquoi continuer. Les hommes sont vraiment trop cons. Vous allez croire que j'invente mais tant pis, cela fait aussi partie de mon histoire. Un copain qui est pratiquement le sosie de mon père, et de la même région, Voiron, affiche le même tempérament que lui, offensif et péremptoire. C'est la grande année pendant laquelle les étudiants feront le deuil de la révolution, 1970, mais Dédé y croit encore: j'en ai rien à foutre des flics, s'il faut les descendre... Et moi, mais ce sont des pères de famille... Dédé me rétorque que ça ne l'arrêtera pas. Il a le même air buté que mon père contrarié... Je sens un sacré fossé, non seulement entre lui et moi, mais entre moi et tous les abrutis qui croient encore à la politique, — sous quelque forme que ce soit d'ailleurs. Je suis donc d'une autre planète, évidemment, car tout le monde y va de son devenir sur mesure, avec un zèle puéril qui m'affole... Moi, je crois en L'Esprit, je sais qu'Il est caché, mais je ne passe jamais plus d'une heure sans chercher à le débusquer, par une réflexion qui s'abîme, en chute libre, et dont je reviens bredouille. Ça me décourage. J'ai envie de sauter du septième étage de mon logement pendant l'hiver, je m'avance de la balustrade, je pense à Daumal, à Gérard de Nerval, j'arrive les gars, ce monde ne fait pas le poids... mais quelque chose d'indéfini me retient... Je renaîtrai trois mois plus tard, à l'arrivée du printemps, j'accepterai toute cette « merde » humaine, et la traverserai ! C'était un moment divin à Fourvière, Lyon s'étendait à perte de vue, avec ses vies insignifiantes ou nuisibles, mais ça valait la peine de continuer, les secrets finiraient par se révéler.
Pour en revenir à aujourd'hui, j'ai fait aussi un parallèle très intéressant entre mon père et moi. Il était assez enjoué, et nous rappelait parfois la chance qu'il avait de vivre. Il aurait été sauvé au dernier moment du peloton d'exécution par un milicien qui l'a fait sortir des rangs, car il le connaissait vaguement... Mon père a d'autant plus apprécié la vie qu'il se considérait comme un rescapé depuis la fin de son adolescence, il racontait cette histoire au moins une fois par an, et en tirait de la joie. En ce qui me concerne, je ne vois pas comment cet accident, avec perte de connaissance, aurait pu mieux se passer. Le sommet de la joue est un peu enfoncé, mais l'os n'a pas bronché, et j'ai toutes mes facultés: je joue aussi bien aux échecs qu'avant, et pour tout dire, mieux ! car je me laisse emmener par le présent où il veut, dans un état de gratitude que certains pourraient considérer comme pathologique, mais qui est assez courant à Bali. J'étends donc la vision de la possibilité des coups, et seul le champion de Bali (parmi les cinq intoxiqués) me gagne encore à chaque partie.
Je n'oppose plus guère de résistance à quoi que ce soit. J'ai définitivement compris que le cours des choses, ou l'Histoire, était gouverné par l'imprévisible qui transporte avec lui l'irréversible...
— En petite ou grande quantité?
C'est une bonne question et je vous remercie de me l'avoir posée. « Nous autres civilisations, nous savons maintenant que nous forgeons nous-mêmes nos propres épées de Damoclès... »
(Voir la nouvelle vidéo sur supramental.fr).
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